La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2025 | FRANCE | N°23LY02916

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 19 juin 2025, 23LY02916


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



M. F... B... A..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 juin 2023 par lequel la préfète de la Drôme lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Son conseil, Me C... E..., a demandé que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à lui verser en application de l'article 37 d

e la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.



Par jugement n° 2304644 du 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. F... B... A..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 22 juin 2023 par lequel la préfète de la Drôme lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Son conseil, Me C... E..., a demandé que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à lui verser en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Par jugement n° 2304644 du 11 août 2023, le tribunal a annulé cet arrêté (article 2) et mis à la charge de l'Etat la somme de 900 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me E... (article 4).

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 12 septembre 2023 Mme E... demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 4 de ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre de la procédure de première instance et de 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de la procédure d'appel.

Elle soutient qu'en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme versée à ce titre ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 % soit, en l'espèce, 907,20 euros

Par mémoire enregistré le 22 octobre 2024, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête.

Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Savouré,

- et les conclusions de Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Par jugement du 11 août 2023, le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à la demande de M. B... A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 juin 2023 lui faisant obligation de quitter le territoire français et a alloué à son conseil, Me E..., la somme de 900 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Mme E... relève appel de ce jugement en tant qu'il fixe cette somme et demande que celle-ci soit fixée à 1 500 euros.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, dans sa rédaction applicable au litige : " Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. / Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat pouvant être rétribué, totalement ou partiellement, au titre de l'aide juridictionnelle, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat majorée de 50 %, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide (...) ".

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 27 de la loi du 10 juillet 1991 : " L'avocat qui prête son concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle (...) perçoit une rétribution (...) Le montant de la dotation affecté à l'aide juridictionnelle résulte d'une part, du nombre de missions d'aide juridictionnelle accomplies par les avocats du barreau et, d'autre part, du produit d'un coefficient par type de procédure et d'une unité de valeur de référence. Le montant, hors taxe sur la valeur ajoutée, de cette unité de valeur de référence est fixé, pour les missions dont l'admission à l'aide juridictionnelle est prononcée à compter du 1er janvier 2022, à 36 euros ". Aux termes de l'article 86 du décret du 28 décembre 2020 portant application de cette loi : " La contribution de l'Etat à la rétribution des avocats qui prêtent leur concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale (...) est déterminée par le produit de l'unité de valeur prévue par la loi de finances (UV) et des coefficients, le cas échéant majorés, fixés dans les tableaux figurant en annexe I du présent décret et du taux d'admission à l'aide juridictionnelle (...) ".

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 16 du règlement-type annexé au décret du 10 octobre 1996 portant règlement type relatif aux règles de gestion financière et comptable des fonds versés par l'Etat aux caisses des règlements pécuniaires des avocats pour les missions d'aide juridictionnelle et pour l'aide à l'intervention de l'avocat prévue par les dispositions de la troisième partie de la loi du 10 juillet 1991 : " Le montant de la rétribution due à l'avocat pour les missions d'aide juridictionnelle totale est fixé sur la base de l'une ou plusieurs des options suivantes : 1° Rétribution égale à la contribution de l'Etat (renvoi aux dispositions législatives et réglementaires applicables (...) / Dans tous les cas, il prend en compte la situation fiscale de l'avocat au regard des dispositions législatives et réglementaires relatives à la T. V. A. ". Aux termes de l'article 21 du même règlement-type : " Chaque avocat fait connaître immédiatement à la Carpa tout changement de sa situation au regard de la T.V.A. et de son mode d'exercice ".

5. Enfin, en vertu de l'article 256 A du code général des impôts, sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités énumérées par cet article, au nombre desquelles figurent celles des professions libérales ou assimilées. Il résulte de l'article 293 B du code général des impôts que pour les opérations réalisées par les avocats et les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, dans le cadre de l'activité définie par la réglementation applicable à leurs professions, ceux-ci bénéficient d'une franchise qui les dispense du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'ils n'ont pas réalisé un certain chiffre d'affaires l'année civile précédente.

6. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que si le montant de la rétribution due à l'avocat qui prête son concours au bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, qui est versée pour le compte de l'Etat par la caisse des règlements pécuniaires des avocats, prend en compte la situation fiscale de l'avocat au regard des dispositions législatives et réglementaires relatives à la taxe sur la valeur ajoutée, le montant de l'unité de valeur de référence pour la détermination de la part contributive de l'Etat au financement des missions d'aide juridictionnelle accomplies par les avocats est exprimé hors taxe sur la valeur ajoutée. Par suite, les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, en ce qu'elles prévoient que la somme que le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, doivent s'entendre comme faisant référence au montant de la part contributive de l'Etat tel qu'il est exprimé hors taxe sur la valeur ajoutée. En revanche, cette somme peut être fixée par le juge sans référence à cette taxe, quel que soit le statut fiscal de l'avocat, lequel dépend uniquement de son chiffre d'affaires et de l'application de la franchise prévue par l'article 293 B du code général des impôts.

7. Il n'est pas contesté que la part contributive de l'Etat à laquelle Mme E... pouvait prétendre au titre de l'aide juridictionnelle pour les deux affaires jugées par le tribunal s'élevait à 504 euros HT, à raison de 14 UV de 36 euros HT, de sorte qu'après majoration de 50 %, la somme allouée par le tribunal ne pouvait être inférieure à 756 euros HT. Le tribunal a dès lors pu fixer le montant alloué à ce titre à la somme de 900 euros, sans référence aux taxes applicables et sans qu'il y ait lieu pour la cour de l'augmenter à hauteur de la TVA.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a fixé à 900 euros la somme qui lui est allouée en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés en appel par Mme E....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2025, à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

M. Savouré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 juin 2025.

Le rapporteur,

B. SavouréLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 23LY02916


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY02916
Date de la décision : 19/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-06-05-11 Procédure. - Jugements. - Frais et dépens. - Remboursement des frais non compris dans les dépens.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme PSILAKIS
Avocat(s) : VIGNERON

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-19;23ly02916 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award