Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2024 du préfet du Puy-de-Dôme l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi et lui interdisant de retourner sur le territoire français pour une durée de cinq ans.
Par un jugement n° 2402993 du 12 décembre 2024, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 9 janvier 2025, M. C..., représenté par Me Khanifar, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;
2°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme de procéder à l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé s'agissant de la réponse au moyen, fondé, tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français contestée ne repose pas sur un examen particulier de sa situation ;
- le préfet doit établir que l'arrêté contesté a été signé par une autorité compétente ;
- le délai de recours dont il disposait pour contester la décision implicite de rejet de sa demande de renouvellement de son titre de séjour a commencé à courir à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français qui est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle est fondée sur le 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il n'a pas bénéficié du droit d'être entendu, faute d'avoir été mis à même de se faire assister de son conseil pendant la procédure contradictoire ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour sur le territoire français sur sa situation personnelle et porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris l'obligation de quitter le territoire français et lui a interdit de retourner sur ce territoire, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'autant qu'il ne s'est pas fondé sur un motif d'ordre public pour décider de l'éloigner ;
- les décisions portant refus de délai de départ volontaire, fixation du pays de renvoi et interdiction de retour en France seront annulées par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français.
La requête a été communiquée au préfet du Puy-de-Dôme qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Soubié, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant camerounais, arrivé en France en 2013, en compagnie de sa mère et de l'un de ses frères, a bénéficié d'un document de circulation pour étranger mineur valable jusqu'au 5 décembre 2019 puis d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en qualité d'étranger résidant en France depuis l'âge de treize ans, valable jusqu'au 10 octobre 2020. Le 8 septembre 2020, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-21 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet du Puy-de-Dôme a rejeté implicitement sa demande. Par un arrêté du 26 novembre 2024, dont M. C... demande l'annulation, le préfet l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de cinq ans. Par un jugement dont M. C... relève appel, la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 novembre 2024.
En ce qui concerne le moyen commun à l'ensemble des décisions :
2. L'arrêté du 26 novembre 2024 a été signé par Mme D... B..., directrice de la direction de la citoyenneté et de la légalité de la préfecture du Puy-de-Dôme, qui disposait d'une délégation de signature consentie par un arrêté du préfet du Puy-de-Dôme du 30 mai 2024 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du même jour. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
3. Une violation du droit d'être entendu n'entraîne l'annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l'absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent.
4. Il ressort du courrier du 12 novembre 2024 du préfet du Puy-de-Dôme invitant M. C... à présenter ses observations sur les décisions qu'il envisageait de prendre à son encontre et du document annexé que l'intéressé a été informé de la possibilité de se faire assister par un conseil. Le document que celui-ci a signé le 13 novembre 2024 en l'assortissant d'observations sur la présence de sa famille en France ne mentionne pas son souhait d'être assisté dans le cadre de cette procédure, auquel l'administration n'aurait pas fait droit. En outre, il avait la possibilité, après le 13 novembre 2024, de compléter ses observations en produisant auprès des services de la préfecture tout justificatif de nature à établir la consistance de sa vie privée et familiale en France. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il n'aurait pas bénéficié du droit d'être entendu doit être écarté.
5. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; / (...). ". Il résulte des articles R. 311-12 et R. 311-12-1 du même code, dont les dispositions sont désormais codifiées aux articles R. 432-1 et R. 432-2 de ce code, que le silence gardé par l'administration pendant plus de quatre mois sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet.
6. Comme exposé au point 1, M. C... a saisi le préfet du Puy-de-Dôme d'une demande de renouvellement de son titre de séjour le 8 septembre 2020. Celle-ci n'a pas donné lieu à la délivrance d'un accusé de réception et une décision implicite de rejet est née au terme d'un délai de quatre mois à compter de sa réception en préfecture, alors même que les services préfectoraux auraient continué à lui délivrer des récépissés jusqu'au 16 avril 2024 et que le délai de recours contentieux à l'encontre de cette décision ne lui était pas opposable. Le moyen tiré de ce que le préfet a commis une erreur de droit doit, dès lors, être écarté.
7. Il ressort des pièces du dossier que le préfet du Puy-de-Dôme, qui a fait état des éléments pertinents relatifs à la situation personnelle de M. C... en sa possession à la date à laquelle il a pris l'obligation de quitter le territoire français contestée, a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé ainsi que l'a jugé la magistrate désignée au point 10 du jugement attaqué qui est suffisamment motivé sur ce point.
8. Comme l'a relevé le préfet dans son arrêté, M. C... a été condamné les 19 décembre 2019, 20 et 26 novembre 2020 et 1er décembre 2020 pour usage illicite de stupéfiants, puis, le 17 décembre 2021, à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis probatoire pendant un an et six mois pour des faits de détention non autorisée de stupéfiants, usage illicite de stupéfiants, transport non autorisé de stupéfiants, offre ou cession non autorisée de stupéfiants et acquisition non autorisée de stupéfiants et, le 16 novembre 2022, à une peine de huit mois d'emprisonnement avec un sursis probatoire pendant deux ans pour des faits de violence suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un acte civil de solidarité. En outre, par une décision du 27 novembre 2023, le juge de l'application des peines du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand a ordonné la mise à exécution de la peine d'emprisonnement délictuel de trois mois en raison de l'inexécution du stage de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences intrafamiliales. Si l'intéressé se prévaut, outre de la durée et de la régularité de son séjour en France jusqu'au 16 avril 2024, de la présence régulière sur le territoire français de membres de sa famille dont certains, en particulier sa mère et son frère et sa sœur mineurs, sont de nationalité française, il ne ressort pas, toutefois, des pièces du dossier, notamment des attestations produites rédigées en termes très généraux, qu'il entretiendrait des liens particulièrement intenses avec eux, et il était âgé de vingt-quatre ans à la date de l'arrêté contesté, célibataire et sans charge de famille. Dans ces conditions, le préfet du Puy-de-Dôme n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a décidé son éloignement et n'a donc pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. Pour les mêmes motifs, il n'a pas davantage commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision accordant un délai de départ volontaire :
9. Il résulte de ce qui vient d'être jugé que M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision accordant un délai de départ volontaire serait illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
10. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
11. Compte tenu des motifs exposés au point 8 et de ce que M. C... a vécu jusqu'à l'âge de 13 ans au Cameroun et a eu l'occasion d'y retourner pour des vacances, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en décidant son renvoi dans ce pays en cas d'exécution d'office de l'obligation de quitter le territoire français.
En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :
12. Il résulte de ce qui vient d'être dit que M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'interdiction de retour sur le territoire français serait illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
13. Pour les motifs exposés au point 8, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
14. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée, en toutes ses conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l'audience du 22 mai 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Michel, présidente de chambre,
Mme Vinet, présidente-assesseure,
Mme Soubié, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juin 2025.
La rapporteure,
A.-S. SoubiéLa présidente,
C. Michel
La greffière,
F. Bossoutrot
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 25LY00053
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