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12/06/2025 | FRANCE | N°24LY02105

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 5ème chambre, 12 juin 2025, 24LY02105


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012.



Par un jugement n°s 1805381 et 1901812 du 2 décembre 2021, ce tribunal n'a pas admis l'intervention de Me Tournoud dans l'instance n° 1805381 et a rejeté les demandes de M. B....



Par un arrêt n°s 22LY00314 et 22LY00329 du 10

juillet 2023, la cour a rejeté les appels formés respectivement par M. B... et le cabinet Arbor-To...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012.

Par un jugement n°s 1805381 et 1901812 du 2 décembre 2021, ce tribunal n'a pas admis l'intervention de Me Tournoud dans l'instance n° 1805381 et a rejeté les demandes de M. B....

Par un arrêt n°s 22LY00314 et 22LY00329 du 10 juillet 2023, la cour a rejeté les appels formés respectivement par M. B... et le cabinet Arbor-Tournoud contre ce jugement.

Par une décision n° 488164 du 19 juillet 2024, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par M. B... et la société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) Arbor-Tournoud et Associés a annulé cet arrêt en tant qu'il statue sur la demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. B... a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 dans la catégorie des revenus fonciers et a, dans la mesure de la cassation ainsi prononcée, renvoyé l'affaire devant la cour, désormais enregistrée sous le n° 24LY02105.

Procédure devant la cour

Par effet de la décision du Conseil d'Etat du 19 juillet 2024, la cour se trouve à nouveau saisie des seules conclusions présentées par M. B... tendant à la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 dans la catégorie des revenus fonciers.

Par des mémoires, enregistrés le 25 juillet 2024, le 30 décembre 2024, le 6 février 2025, le 27 février 2025 et le 11 avril 2025, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. B..., représenté par Me Tournoud, demande à la cour :

1°) d'annuler ou de réformer le jugement n°s 1805381 et 1901812 et de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 dans la catégorie des revenus fonciers et des majorations correspondantes ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'administration n'est pas fondée à opposer l'autorité de la chose jugée ;

- elle a adressé la réponse aux observations du contribuable uniquement à son conseil alors qu'il n'avait pas fait élection de domicile au cabinet de ce mandataire ;

- elle a méconnu l'article L. 53 du livre des procédures fiscales en engageant une procédure de rectification des résultats de la SCI La Verrerie alors qu'elle ne disposait pas d'un mandataire désigné ; le contrôle a été mené avec un interlocuteur qui n'avait pas qualité pour la représenter et cette irrégularité l'a privée d'une garantie ;

- la SCI la Verrerie, faute de mandataire habilité à cet effet, n'a pas été mise à même de contester les éléments qui fondent les pénalités ;

- les pénalités sont insuffisamment motivées ;

- elles doivent être déchargées en application de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 septembre 2024, 13 décembre 2024, 23 janvier 2025, 17 février 2025 et 2 avril 2025, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions.

Il fait valoir que l'autorité de la chose jugée dont est revêtu l'arrêt n° 18LY00314 de la cour du 27 août 2019 rend irrecevable les moyens soulevés par M. B... et qui, à titre subsidiaire, ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Moya, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société civile immobilière (SCI) La Verrerie, dont M. B... était associé à hauteur de 48 % du capital et gérant puis liquidateur, a fait l'objet d'un contrôle sur pièces de ses déclarations postérieurement à la clôture de sa liquidation, le 20 décembre 2012. A l'issue de cette procédure, l'administration a, le 28 mai 2014, notifié à M. B..., en sa qualité de liquidateur, une proposition de rectification des revenus fonciers de la SCI au titre des années 2011 et 2012. M. B... a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu à proportion de ses parts sociales dans la SCI. Par un jugement du 2 décembre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de M. B... tendant à la décharge de ces impositions et n'a pas admis l'intervention à l'instance de Me Tournoud, son conseil. La cour a, par un arrêt du 10 juillet 2023, rejeté les appels formés par l'un et l'autre contre ce jugement. Par une décision du 19 juillet 2024, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par M. B... et la SELARL Arbor-Tournoud et Associés, annulé l'arrêt du 10 juillet 2023 en tant qu'il statue sur la demande en décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. B... a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 dans la catégorie des revenus fonciers et renvoyé l'affaire à la cour dans cette mesure.

Sur l'étendue du litige :

2. Par une décision du 3 septembre 2024, postérieure à l'introduction de la requête d'appel, l'administration a prononcé le dégrèvement, à concurrence de 3 364 euros en droits et de 514 euros en pénalités, des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des majorations auxquels M. B... a été assujetti au titre de l'année 2011 dans la catégorie des revenus fonciers. Les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur les impositions supplémentaires :

En ce qui concerne l'exception de chose jugée par les arrêts de la cour administrative d'appel de Lyon des 27 août 2019 et 2 septembre 2021 :

3. Par l'arrêt n° 18LY00314 du 27 août 2019 qui a fait l'objet, le 3 avril 2020, d'une décision de non-admission du Conseil d'Etat, la cour a rejeté la requête de M. B... tendant à la décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012 résultant du chef de rectification relatif à la plus-value professionnelle, dans laquelle il soulevait des moyens portant sur la régularité de la procédure d'imposition et le bien-fondé des impositions. Par l'arrêt n° 19LY00947 du 2 septembre 2021 non frappé de pourvoi, la cour a rejeté les conclusions de la requête de M. B... tendant à la décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012, dans laquelle étaient soulevés des moyens relatifs au bien-fondé des impositions. L'administration fiscale n'est pas fondée à opposer l'exception de chose jugée par ces arrêts, dès lors que M. B... n'a pas critiqué dans les instances précédentes, par des moyens qui se rattachent à la régularité de la procédure d'imposition, les impositions supplémentaires qui procèdent du rehaussement de ses revenus fonciers.

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

4. Aux termes de l'article 1844-7 du code civil dans sa rédaction alors applicable : " La société prend fin : / (...) / 7° Par l'effet d'un jugement ordonnant la liquidation judiciaire ; / (...). ". Aux termes de l'article 1844-8 de ce code : " La dissolution de la société entraîne sa liquidation, hormis les cas prévus à l'article 1844-4 et au troisième alinéa de l'article 1844-5. Elle n'a d'effet à l'égard des tiers qu'après sa publication. / Le liquidateur est nommé conformément aux dispositions des statuts. Dans le silence de ceux-ci, il est nommé par les associés ou, si les associés n'ont pu procéder à cette nomination, par décision de justice. Le liquidateur peut être révoqué dans les mêmes conditions. La nomination et la révocation ne sont opposables aux tiers qu'à compter de leur publication. Ni la société ni les tiers ne peuvent, pour se soustraire à leurs engagements, se prévaloir d'une irrégularité dans la nomination ou dans la révocation du liquidateur, dès lors que celle-ci a été régulièrement publiée. / La personnalité morale de la société subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de celle-ci. / (...). ".

5. Il résulte des dispositions citées au point 4 que si une société, même non commerciale, prend fin par la dissolution anticipée décidée par les associés, sa personnalité morale subsiste pour les besoins de la liquidation jusqu'à la publication de la clôture de cette dernière. Jusqu'à la date d'enregistrement de la clôture de la liquidation au registre du commerce et des sociétés, le liquidateur a qualité pour représenter la société. En revanche, postérieurement à cet enregistrement, sauf décision qui aurait été prise par les associés conformément aux statuts de la société et qui aurait prolongé le mandat du liquidateur au-delà de cette date, seul un mandataire spécialement désigné par la juridiction judiciaire, à la demande de l'administration ou des anciens associés de la société, dispose de la qualité de représentant de cette société. C'est, par suite, avec celui-ci que les opérations de contrôle doivent se dérouler et à lui que, dès lors, toute nouvelle pièce de la procédure doit être adressée. Ces dispositions ne font pas obstacle, durant la période courant de la date d'enregistrement de la clôture de la liquidation de la société au registre du commerce et des sociétés à la date de désignation d'un mandataire spécialement désigné, à la poursuite des opérations de contrôle, à l'exclusion de la notification de nouvelles pièces de procédure, avec toute personne pouvant être regardée, dans les circonstances particulières de chaque espèce, comme mandataire.

6. Il résulte de l'instruction que, par décision de l'assemblée générale des associés de la SCI La Verrerie du 5 décembre 2012, les associés ont approuvé les comptes de liquidation de la société, ont donné quitus à M. B..., qui avait été nommé liquidateur amiable de la société, l'ont déchargé de son mandat et ont décidé la clôture des opérations de liquidation. La radiation de la SCI La Verrerie a été enregistrée le 25 janvier 2013 au greffe du tribunal de commerce de Grenoble, soit antérieurement au contrôle sur pièces qui a été mis en œuvre en 2014. Il résulte de cette délibération que l'assemblée des associés n'avait pas donné à M. B... tous pouvoirs à l'effet d'exercer tous droits et d'exécuter toutes obligations au nom et pour le compte de l'indivision entre les anciens associés. Ainsi, dès lors que M. B... n'avait pas été désigné judiciairement en qualité de mandataire ad hoc et que les anciens associés de la SCI La Verrerie ne l'avaient pas désigné en tant que mandataire pour les représenter après la dissolution de cette société, et alors même que M. B... s'est comporté lors des opérations de contrôle comme étant le représentant de la SCI La Verrerie en répondant aux demandes de la vérificatrice, l'administration n'a pu régulièrement notifier la proposition de rectification du 28 mai 2014, puis celle du 1er juillet 2014, qui a annulé et remplacé la précédente, à M. ou Mme B.... Dans ces conditions, M. B... est fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012 qui procèdent de la rectification de ses revenus fonciers.

Sur les pénalités :

7. En premier lieu, la majoration de 10 % prévue par le I de l'article 1758 A du code général des impôts appliquée aux rectifications concernant les revenus fonciers doit être déchargée en conséquence de la décharge des droits en principal.

8. En second lieu, la majoration de 40 % appliquée par l'administration pour manquement délibéré procède du contrôle sur pièces dont a fait l'objet M. B... et ne tend à réprimer que les manquements qui lui sont personnellement imputés, faute pour lui d'avoir mentionné sur sa déclaration de revenus une plus-value dont le report d'imposition avait pris fin. Elle est donc sans lien avec la procédure de contrôle ayant visé la SCI La Verrerie et hors du litige d'appel dont la cour se trouve à nouveau saisie par effet de la décision du Conseil d'Etat du 19 juillet 2024.

9. Il résulte de ce qui précède que, sous réserve du dégrèvement prononcé en cours d'instance, M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui doit être annulé dans cette mesure, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales procédant de la rectification de ses revenus fonciers de l'année 2012 et de la pénalité prévue au I de l'article 1758 A du code général des impôts dont elles étaient assorties.

Sur les frais du litige :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu, à concurrence de la somme de 3 878 euros, de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. B... a été assujetti au titre de l'année 2011, ainsi que des majorations correspondantes.

Article 2 : M. B... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012 dans la catégorie des revenus fonciers et de la majoration prévue par le I de l'article 1758 A du code général des impôts dont elles étaient assorties.

Article 3 : Le jugement nos 1805381 et 1901812 du tribunal administratif de Grenoble est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la société d'exercice libéral à responsabilité limitée Arbor-Tournoud et Associés et à la ministre chargée des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2025, à laquelle siégeaient :

Mme Michel, présidente de chambre,

Mme Vinet, présidente-assesseure,

M. Moya, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 juin 2025.

Le rapporteur,

P. MoyaLa présidente,

C. Michel

La greffière,

F. Bossoutrot

La République mande et ordonne à la ministre chargée des comptes publics en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY02105

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY02105
Date de la décision : 12/06/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01-02 Contributions et taxes. - Généralités. - Règles générales d'établissement de l'impôt. - Contrôle fiscal. - Vérification de comptabilité.


Composition du Tribunal
Président : Mme MICHEL
Rapporteur ?: M. Philippe MOYA
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : JBV AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-12;24ly02105 ?
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