Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SAS Galilé a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 2200786 du 21 septembre 2023, le tribunal administratif de Dijon a déchargé la SAS Galilé de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré à concurrence de la somme 39 895 euros et intégralement respectivement au titre des exercices clos en 2013 et 2014 (articles 1er et 2), et a rejeté le surplus de la demande (article 3).
Procédure devant la cour
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 24 novembre 2023, 17 juillet, 19 septembre, 4 décembre 2024, 7 janvier, 6 février et 25 février 2025, la SAS Galilé, représentée par Me Roumier, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités restant à sa charge ;
3°) de condamner l'Etat aux dépens, et mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'administration a méconnu l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
- des vices entachent la procédure menée devant le comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche, en raison de la méconnaissance de l'article L. 60 du livre des procédures fiscales garantissant le caractère contradictoire de la procédure devant ledit comité, en l'absence de communication à la contribuable de la contre-expertise établie par M. B..., et en raison de la participation de ce dernier à la séance du comité consultatif en méconnaissance du II de l'article 1653 F du code général des impôts ;
- les projets de conteneur de confinement blindé et mobile, d'une porte étanche motorisée pour enceinte de confinement nucléaire, d'une unité de perçage téléopérée en milieu hostile, de hotte de transfert de carquois et de modélisation d'une chute de dalle sur une boîte à gants, relèvent du développement expérimental de nature à constituer le résultat d'une recherche au sens de l'article 244 quater B du code général des impôt ;
- les paragraphes n° 250 et 270 de la documentation de base référencée BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 sont opposables à l'administration.
Par des mémoires, enregistrés les 17 juin, 4 septembre, 19 novembre, 21 novembre, 13 décembre 2024, 24 janvier, 17 février, et 10 mars 2025 non communiqué, la ministre chargée des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- les conclusions sont irrecevables au-delà de la somme de 283 802 euros en l'absence de réclamation préalable sur les autres chefs de rehaussements que ceux liés au crédit d'impôt recherche ;
- les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 26 février 2025, la clôture d'instruction a été fixée au 14 mars 2025.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Porée, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. La SAS CLM Industrie, dont le siège social était à Chevigny-Saint-Sauveur (Côte-d'Or), qui avait pour activité la chaudronnerie et la mécanique principalement pour l'industrie nucléaire, a déposé des déclarations au titre du crédit d'impôt en faveur des dépenses de recherche prévu à l'article 244 quater B du code général des impôts, pour les exercices clos les 31 décembre 2013 et 2014 portant sur des montants de, respectivement, 131 655 euros et 103 857 euros dans lesquelles elle a demandé le remboursement des crédits d'impôt non imputés sur l'impôt sur les sociétés. Ces sommes ont été remboursées à la SAS Galilé, société-mère du groupe fiscalement intégré dont elle faisait partie, par décisions des 19 juin 2014 et 2 novembre 2015. La SAS CLM Industrie a fait l'objet, en 2017, d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 incluant les déclarations de crédit d'impôt recherche pour les dépenses exposées en 2013 et 2014, au terme de laquelle la vérificatrice a, outre diverses corrections apportées aux résultats déclarés, remis en cause les crédits d'impôt recherche déclarés au titre des exercices 2013 et 2014. Après avis du comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche du 20 juin 2019, l'administration a assigné à la SAS Galilé, en sa qualité de redevable de l'impôt, les cotisations d'impôt sur les sociétés consécutives au contrôle de sa filiale assorties de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévu au a. de l'article 1729 du code général des impôts. Par un jugement du 21 septembre 2023, le tribunal administratif de Dijon, après avoir déchargé la SAS Galilé de la pénalité de 40 %, à concurrence de 39 895 euros en ce qui concerne l'exercice clos en 2013 et intégralement en ce qui concerne l'exercice clos en 2014, a rejeté le surplus de ses conclusions en décharge des impositions procédant de la remise en cause des crédits d'impôt recherche. La SAS Galilé relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande de décharge.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 de ce livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article. ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter, outre la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base des redressements, ceux des motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés qui sont nécessaires pour permettre au contribuable de formuler ses observations de manière entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.
3. La proposition de rectification du 21 décembre 2017 adressée à la SAS CLM Industrie désigne l'impôt concerné, les années d'imposition et les dispositions du code général des impôts fondant les rehaussements en matière de crédit d'impôt pour dépenses de recherche. Elle mentionne la distinction entre les activités d'innovation et celles de recherches et de développement, exigeant un élément de nouveauté non négligeable associé à la dissipation d'une incertitude scientifique et / ou technique, que les dossiers justificatifs des crédits d'impôt recherche ont fait l'objet d'une expertise par la délégation régionale à la recherche et à la technologie dont le rapport a été communiqué à la SAS CLM Industrie, que le projet SDC unité mobile n'a pas été présenté par cette société, que la présentation de l'état de l'art est succincte et que les verrous technologiques ne sont pas suffisamment précisés pour les autres projets, qui relèvent seulement de l'ingénierie mécanique ou industrielle comportant la réalisation d'une modélisation, d'une simulation, de prototypes ou de tests. La proposition de rectification indique également les montants des rappels de crédit d'impôt recherche de 131 655 euros pour 2013 et de 103 857 euros pour 2014, qui résultent des déclarations 2069A de la SAS CLM Industrie telles que retranscrites dans le tableau se trouvant en page 21 de la proposition de rectification. Les circonstances que les insuffisances dans l'exposé de l'état de l'art et des verrous technologiques ne pourraient pas justifier la remise en cause de crédits d'impôt recherche, que la réalisation de prototypes et d'essais serait en revanche une des conditions d'octroi du crédit d'impôt recherche, et que la motivation de la proposition de rectification présenterait des contradictions, sont sans incidence sur le caractère suffisamment motivé de la proposition de rectification. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales doit être écarté.
4. En second lieu, d'une part, aux termes de l'article 1653 F du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : " I. - Il est institué un comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche. Ce comité est présidé par un membre de la juridiction administrative désigné par le vice-président du Conseil d'Etat. (...) II - Pour l'examen des litiges relatifs aux dépenses prévues aux a à j du II de l'article 244 quater B, le comité comprend un agent appartenant à un des corps de catégorie A du ministère chargé de la recherche et un agent de l'administration fiscale ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire. Pour l'examen des litiges relatifs aux dépenses prévues au k du même II, le comité comprend un agent appartenant à un des corps de catégorie A du ministère chargé de l'innovation et un agent de l'administration fiscale ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire. Pour l'examen des litiges relatifs à la fois à des dépenses prévues aux a à j et au k dudit II, le comité comprend un agent appartenant à un des corps de catégorie A du ministère chargé de la recherche, un agent appartenant à un des corps de catégorie A du ministère chargé de l'innovation et un agent de l'administration fiscale ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire. L'agent du ministère chargé de la recherche et l'agent du ministère chargé de l'innovation peuvent, s'ils l'estiment utile, être assistés par toute personne susceptible d'apporter une expertise sur la qualification des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt. Cette personne ne prend pas part aux votes. Les personnes ayant déjà eu à connaître du litige ne peuvent siéger au comité saisi sur ce litige. (...) ". Aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) soit du comité consultatif prévu à l'article 1653 F du même code (...) ". Aux termes de l'article L. 59 D de ce livre, dans sa rédaction alors applicable : " Le comité consultatif prévu à l'article 1653 F du code général des impôts intervient lorsque le désaccord porte sur la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt défini à l'article 244 quater B du même code. Ce comité peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d'être pris en compte pour l'examen de cette question de droit. ". Aux termes de l'article L. 60 du même livre : " Le rapport par lequel l'administration des impôts soumet le différend qui l'oppose au contribuable (...) au comité consultatif prévu à l'article 1653 F du même code, ainsi que tous les autres documents dont l'administration fait état pour appuyer sa thèse, doivent être tenus à la disposition du contribuable intéressé. Cette communication doit être faite sous réserve du secret professionnel relatif aux renseignements concernant d'autres contribuables. (...) ". Aux termes de l'article R. 60-1 du même livre : " Lorsque le litige est soumis (...) au comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche, en application de l'article L. 59 D, le contribuable est convoqué trente jours au moins avant la date de la réunion. (...) Le rapport et les documents mentionnés à l'article L. 60 doivent être tenus à sa disposition, au secrétariat de la commission ou du comité consultatif, pendant le délai de trente jours qui précède la réunion de cette commission ou de ce comité. Ils peuvent également être communiqués au contribuable par courrier électronique. ". Aux termes de l'article R. 60-2 B du même livre, dans sa rédaction alors applicable : " Le comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche peut demander, avant la tenue de la séance, aux services du ministère chargé de la recherche ou du ministère chargé de l'innovation un rapport complémentaire d'expertise technique sur la qualification des dépenses de recherche. Ce rapport est transmis par le ministère chargé de la recherche ou par le ministère chargé de l'innovation au président du comité qui le communique au contribuable et à l'administration fiscale dans un délai raisonnable avant la tenue de la séance. ".
5. D'autre part, aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions ou le comité mentionnés à l'article L. 59 (...) est saisi d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission ou le comité. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission ou du comité. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. (...) ".
6. Les vices entachant la procédure de consultation du comité consultatif du crédit d'impôt pour dépenses de recherche sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 60 du livre des procédures fiscales fondés, d'une part, sur l'absence de communication à la société vérifiée des résultats d'une contre-expertise qui aurait été effectuée par un agent du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, et, d'autre part, sur la participation de cet agent à la séance du comité consultatif du 20 juin 2019 au cours de laquelle a été examiné le dossier de la société, doivent être écartés comme inopérants à l'appui de la demande de décharge des impositions contestées. Au demeurant, si le comité consultatif comprenait, outre sa présidente, magistrate de l'ordre administratif, un agent de l'administration fiscale, un agent et un agent expert du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, et si un courriel de la délégation régionale académique à la recherche et à l'innovation de Bourgogne-Franche-Comté du 7 novembre 2024 refusant de procéder à une contre-expertise, mentionne que la société a bénéficié de l'expertise initiale du 29 novembre 2017 et d'une contre-expertise menée par un nouvel expert dans le cadre de la saisine du comité consultatif et qu'elle a pu faire valoir ses droits devant ce comité en présence du second expert, il ne résulte nullement de ce courriel que l'agent expert du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation aurait, préalablement à la réunion du comité consultatif, procédé à une nouvelle expertise à la demande du comité, ni qu'il ne serait pas limité, en tant que membre du comité consultatif, à se prononcer, eu égard à ses compétences et connaissances, sur la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses exposées.
Sur le bien-fondé des impositions :
7. En premier lieu, aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. ". Aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III à ce code, dans sa rédaction alors applicable : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : (...) c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté. ".
8. Il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si les opérations réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du crédit d'impôt recherche eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ces opérations, et, notamment, d'examiner si les opérations de recherche apportent une contribution théorique ou expérimentale à la résolution de problèmes techniques, ou bien présentent un caractère de nouveauté au sens de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts.
9. La SAS Galilé ne soutient plus que les projets SDC unité mobile, sur la nucléarisation d'un four en environnement confiné, et sur une épreuve hydraulique, relèvent de la recherche.
10. Il résulte de l'instruction que le projet de conteneur de confinement blindé et mobile a été élaboré dans le cadre d'une réponse à un appel d'offre d'EDF pour le développement d'un matériel de transport spécifique, destiné à transférer des matériels ou échantillons de matière irradiante provenant de ses différents sites vers le centre d'expertise et d'inspection dans les domaines de la réalisation et de l'exploitation (CEIDRE), et qu'il correspond au prototype d'un conteneur blindé, mobile (manipulable) et accostable pour les nouvelles enceintes de confinement. Les travaux de la SAS CLM Industrie ont consisté, dans une première étape, à concevoir et fabriquer une enceinte de confinement, dans une deuxième étape, à développer le chariot d'accostage permettant qu'aucun opérateur n'ait à manipuler l'enceinte directement, et, dans une troisième étape, à insérer l'enceinte de confinement dans les moyens de transport routier. Le rapport d'expertise du 11 décembre 2023 produit par la société requérante conclut que les travaux de la première étape répondent à la définition du développement expérimental, alors que ceux des deuxièmes et troisièmes étapes, qui relèvent d'une opération d'ingénierie basée sur le savoir-faire de l'homme de l'art, n'entrent pas dans le cadre du crédit d'impôt recherche. Toutefois, ce même rapport conclut que l'enceinte de confinement relève du développement expérimental aux seuls motifs que ses conception et fabrication ont nécessité l'application du savoir-faire de l'homme de l'art de la SAS CLM Industrie, qui est une des sociétés françaises expertes dans le domaine des solutions technologiques de confinement, notamment par le recours à une modélisation numérique et à un processus itératif qui ont permis d'atteindre une géométrie acceptable au vu des critères d'étanchéité. Le rapport de l'expert du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche du 29 novembre 2017 retient, quant à lui, que les travaux ont consisté en un recours à la conception assistée par ordinateur pour définir la géométrie de l'enceinte de confinement, puis à un prototype sur lequel des essais et des contrôles mécaniques ont été réalisés, qui correspondent à de la seule ingénierie mécanique. Par suite, les dépenses liées à l'enceinte de confinement n'ont pas été affectées à la recherche.
11. Il résulte de l'instruction que le projet de développement d'une porte étanche motorisée pour enceinte de confinement nucléaire, qui a été élaboré dans le cadre de l'étude sur la prévention des accidents survenant sur des équipements nucléaires secondaires, porte sur le développement de deux portes étanches de passage utile supérieur à 500 mm (contre 150 à 250 mm classiquement), l'une pour l'ouverture ponctuelle d'une boîte à gants, et l'autre pour l'interconnexion de deux boîtes à gants. Si le rapport d'expertise du 11 décembre 2023 produit par la société requérante conclut que les travaux réalisés sont des travaux d'ingénierie expérimentale, dépassant la connaissance accessible et le savoir-faire de la SAS CLM Industrie, il en résulte également que les travaux ont consisté en la gestion de l'étanchéité radioactive, de la déformation mécanique et de la manœuvrabilité motorisée de portes carrées de grandes dimensions, par le recours à des calculs, à des portes prototypes, à des tests. Selon le rapport d'expertise du 29 novembre 2017, les travaux relèvent de la seule ingénierie mécanique, sans apport significatif par rapport aux connaissances de conception mécanique ou de savoir-faire de la profession. Selon l'avis du comité consultatif du 20 juin 2019, les travaux relèvent de la seule ingénierie mécanique procédant de l'adaptation de produits à un environnement spécifique. Par suite, les dépenses liées aux portes étanches motorisées n'ont pas été affectées à la recherche.
12. Il résulte de l'instruction que le projet d'une unité de perçage téléopérée en milieu hostile porte sur la conception d'un poste de perçage de cylindres en acier 304 et 316 de 56 centimètres et de 5,5 mètres de haut, en vue de l'évacuation des 100 kilogrammes de sodium s'y trouvant, dans le cadre du démantèlement de réacteurs à caloporteur sodium. Le rapport d'expertise 11 décembre 2023 conclut que les conception et réalisation d'ensemble du poste de travail ne consistent qu'en une opération d'ingénierie non éligible au crédit d'impôt recherche, mais que les travaux de levée de verrous sur l'usinabilité relèvent du développement expérimental. Toutefois, ce même rapport se fonde, pour conclure à l'éligibilité au crédit d'impôt recherche des travaux d'usinabilité, sur les difficultés liées à l'existence d'un cordon de soudure dans la zone de perçage, nécessitant de maîtriser l'hétérogénéité de la matière, à l'absence de bavure présente à l'orifice réalisé, à l'évacuation de copeaux fragmentés, au risque de feu des cartouches de sodium fortement réactif, tout en précisant que ces obstacles peuvent être levés par le choix de l'outil de coupe (fraise à carotter ou foret), des conditions de coupe, des conditions de mise en œuvre, et que la SAS CLM Industrie n'a pas pu réaliser d'essais de validation avec du sodium. En outre, le rapport d'expertise du 29 novembre 2017 retient que les travaux, qui ont consisté en des choix de configuration de l'implantation de la tête de perçage, de conditions opératoires, du moteur de broche, en des tests d'essais de perçage, correspondent seulement à de l'ingénierie industrielle associant des phases d'études, de choix de composants et de tests expérimentaux, sans apport significatif par rapport aux connaissances existantes. Par suite, les dépenses liées à l'unité de perçage téléopérée en milieu hostile n'ont pas été affectées à la recherche.
13. Il résulte de l'instruction que le projet de hotte de transfert de carquois des crayons de combustibles radioactifs, permettant la récupération des carquois en cuve d'eau et leur chargement dans un conteneur dans le cadre du démantèlement de la cuve et des internes de cuve du réacteur nucléaire à eau sous pression de Chooz Ardennes, consiste en la conception et la réalisation d'une hotte blindée de transfert, de perches de tampon et d'un poste d'égouttage / séchage. Le rapport d'expertise du 11 décembre 2023 conclut que, si les travaux se rapportant au poste d'égouttage / séchage relèvent d'une opération d'ingénierie basée sur le savoir-faire de l'homme de l'art, n'entrant pas dans le cadre du crédit d'impôt recherche, ceux relatifs à la hotte de transfert et aux perches répondent à la définition du développement expérimental. Toutefois, ce rapport se borne à relever des incertitudes initiales tenant en la prise en compte d'un milieu aqueux, d'un compromis entre résistance mécanique et légèreté, de la précision des déplacements et d'alignement du système avec la cuve à combustibles, de la préhension des tampons knitt et de l'étanchéité contre la diffusion des radiations nucléaires résiduelles, sans préciser ce qu'a dû mettre en place la SAS CLM Industrie pour les surmonter, à l'exception d'un travail d'itérations. En outre, le rapport de l'expert du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche du 29 novembre 2017 retient que les travaux se rapportant à la hotte blindée de transfert et aux perches, qui ont seulement consisté à mettre en œuvre les formules imposées par la FEM, les connaissances de résistance des matériaux, une étude ergonomique, la simulation par éléments finis et à choisir un matériau adapté en raison de la corrosion, relèvent de la seule ingénierie mécanique comportant des choix de solutions techniques. Par suite, les dépenses liées au projet de hotte de transfert de carquois n'ont pas été affectées à la recherche.
14. Il résulte de l'instruction que le projet de modélisation d'une chute de dalle sur une boîte à gants, élaboré dans le cadre d'une demande du Commissariat à l'énergie atomique Valduc sur l'étude des conséquences de la chute éventuelle d'une dalle sur une enceinte de confinement en raison de l'évolution de la réglementation prenant désormais en considération des évènements exceptionnels, tels les séismes, pouvant impacter une installation nucléaire, a consisté à modéliser une chute de dalle de béton sur l'enceinte, puis à proposer des modalités de renforcement de sa structure si nécessaire. Si le rapport d'expertise produit par la société requérante conclut que les travaux, qui intègrent un dépassement du savoir-faire de l'homme de l'art pour analyser le besoin et construire la réponse à une situation de séisme envisagée, relèvent d'un accroissement de connaissance par une démarche structurée répondant à la définition du développement expérimental, ce rapport indique que la simulation d'une collision entre deux corps et les calculs sont aisés à modéliser à l'aide des moyens informatiques actuels, que la difficulté du travail de simulation résidait toutefois dans la présentation et l'analyse du problème qui allait au-delà du savoir-faire de l'homme de l'art, que les différentes hypothèses de sollicitation ont pu être construites. Le rapport de l'expert du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui était saisi de verrous liés aux hypothèses et à la pertinence des données d'entrée pour la simulation, retient que la description du projet ne mettait pas en évidence de fortes incertitudes, ni l'apport de connaissances génériques, qui relève alors de la seule ingénierie mécanique comportant des choix de solutions techniques. Par suite, les dépenses liées au projet de modélisation d'une chute de dalle sur une boîte à gants n'ont pas été affectées à la recherche.
15. En second lieu, la SAS Galilé reprend en appel le moyen tiré de l'opposabilité des paragraphes n° 250 et 270 de la documentation de base référencée BOI-BIC-RICI-10-10-10-20 à l'administration. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Dijon au point 16 de son jugement.
16. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir de la ministre, que la SAS Galilé n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté le surplus de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et celles en tout état de cause relatives aux dépens, doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Galilé est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Galilé et à la ministre chargée des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 28 mai 2025, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
M. Haïli, président-assesseur,
M. Porée, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 juin 2025.
Le rapporteur,
A. Porée
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
M. A...
La République mande et ordonne à la ministre chargée des comptes publics, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
2
N° 23LY03609