Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme A... et B... C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 30 octobre 2023 de la préfète du Rhône portant pour chacun d'eux refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.
Par un jugement n°s 2400317-2400359 du 3 juin 2024, le tribunal administratif de Lyon a joint leurs demandes avant de les rejeter.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2024, M. et Mme C..., représentés par Me Vray, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 3 juin 2024 et les décisions du 30 octobre 2023 ;
2°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de :
- procéder sans délai à l'effacement de leur inscription au fichier du système d'information Schengen ;
- leur délivrer, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, une autorisation provisoire de séjour les autorisant à travailler, dans un délai de 8 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
- leur délivrer, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir un titre de séjour les autorisant à travailler, ou subsidiairement, de réexaminer leur situation dans le même délai ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à leur conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- le refus de titre de séjour opposé à M. C... est entaché d'un défaut de motivation et d'examen sérieux de sa situation ;
- les refus de titre de séjour méconnaissent les dispositions des articles L. 425-9 et L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- ils sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment compte tenu de l'intégration professionnelle de M. C... ;
- les refus de titre de séjour et les obligations de quitter le territoire méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
La requête a été communiquée à la préfète du Rhône qui n'a pas produit d'observations.
M. et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 août 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale sur les droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport de Mme Soubié, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C..., ressortissants du Kosovo, sont entrés en France avec leurs deux enfants mineurs le 11 avril 2018 pour solliciter l'asile. Leur demande a été rejetée par une décision de l'Office français des réfugiés et apatrides du 23 juillet 2019. Le 5 novembre 2019, ils ont sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, compte tenu de l'état de santé de leur fils. Ils ont obtenu des autorisations provisoires de séjour renouvelées à plusieurs reprises. Par des décisions du 30 octobre 2023, la préfète du Rhône a refusé de renouveler leur autorisation provisoire de séjour et les a obligés à quitter le territoire français. Par un jugement dont ils relèvent appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la légalité des refus de titres de séjour :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour opposé à M. C... :
2. M. C... réitère en appel ses moyens soulevés en première instance, tirés de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de titre de séjour et du défaut d'examen de sa situation. Il y a lieu pour la cour d'écarter ces moyens par adoption des motifs du tribunal.
En ce qui concerne les moyens communs aux décisions refusant la délivrance d'un titre de séjour :
3. Aux termes de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions prévues à l'article L. 425-9, ou l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, se voient délivrer, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, une autorisation provisoire de séjour d'une durée maximale de six mois. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / (...) / Elle est renouvelée pendant toute la durée de la prise en charge médicale de l'étranger mineur, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. / (...). ". Aux termes de l'article L. 425-9 de ce code : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / (...). ".
4. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser à M. et Mme C... la délivrance des autorisations provisoires de séjour sollicitées, la préfète du Rhône s'est appropriée la teneur de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 7 août 2023, selon lequel le défaut de prise en charge médicale de leur fils ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité pour celui-ci qui peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que l'enfant, qui est atteint de la maladie de Hirschsprung, a fait l'objet d'une chirurgie correctrice en France puis d'un suivi post-opératoire. Si les requérants font valoir les risques encourus par leur enfant en l'absence de traitement, il ne ressort pas des pièces médicales produites par eux, notamment du certificat médical du 1er décembre 2023, que l'état de santé de l'enfant nécessiterait un traitement au-delà de la surveillance médicale dont il doit faire l'objet jusqu'à sa majorité. Dans ces conditions, les appelants ne contestent pas sérieusement l'appréciation portée par le collège des médecins sur les conséquences d'une absence de prise en charge médicale pour leur fils. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles L. 425-10 et L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...). ".
6. D'une part, les requérants font état de leur présence régulière sur le territoire français depuis cinq ans à la date de la décision, de la scolarisation de leurs enfants nés en 2014 et 2017, de leur maîtrise de la langue française et de l'absence de décision antérieure d'obligation de quitter le territoire français. D'autre part, M. C... fait valoir qu'il a été employé en contrat à durée indéterminée à compter du 1er novembre 2021 et jusqu'au refus de titre de séjour en qualité de plaquiste, sans justifier d'un diplôme dans ce domaine, et se prévaut du dépôt par son employeur d'une demande d'autorisation d'emploi d'un travailleur étranger. Toutefois, ces circonstances ne relèvent pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels propres à justifier une admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions précitées. Par suite, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que la préfète du Rhône a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de leur délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
8. M. et Mme C..., entrés en France, ainsi qu'il a été dit au point 1 ci-dessus, en avril 2018, invoquent la durée de leur séjour en France sous couvert d'autorisations provisoires de séjour renouvelées à plusieurs reprises, l'intégration professionnelle de M. C... et la scolarisation de leurs enfants, outre l'état de santé de leur fils. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'état de santé de l'enfant ne nécessite pas une prise en charge dont le défaut aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité. S'ils invoquent la scolarisation en France de leurs enfants, dont deux sont majeurs, il n'est fait état d'aucune circonstance particulière faisant obstacle à la poursuite de leurs études dans leur pays d'origine. Par ailleurs, l'activité professionnelle exercée par M. C... ne suffit pas à caractériser une insertion sociale particulière et durable dans la société française. Enfin, aucune circonstance ne fait obstacle à la reconstitution de la cellule familiale au Kosovo, pays dont tous ses membres ont la nationalité, où ils ont vécu l'essentiel de leur existence et où il n'est pas allégué qu'ils seraient dépourvus d'attaches personnelles et familiales. Dans ces conditions, et eu égard notamment à la durée de leur séjour en France, en refusant de les admettre au séjour, la préfète du Rhône n'a pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, la préfète n'a pas davantage méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :
9. Pour les motifs exposés ci-dessus et en l'absence d'argumentation distincte, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.
10. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande. Par suite, leur requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... et Mme B... C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 17 avril 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Vinet, présidente de la formation de jugement,
M. Moya, premier conseiller,
Mme Soubié, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 mai 2025.
La rapporteure,
A.-S. SoubiéLa présidente de la formation de jugement,
C. Vinet
La greffière,
F. Bossoutrot
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24LY02216
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