Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mmes B... D..., Marion Audissergues, Claire Martin, Marie-José Martin, Marie-Noëlle Pannetier-Chevillard et Denise Faulks et M. A... C... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 23 décembre 2021 par lequel le maire de la commune de Clermont-Ferrand a délivré à la société V2 Immo un permis de construire un immeuble collectif de quatre logements et huit maisons individuelles.
Par un jugement n° 2201406 du 30 juin 2023, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 31 août 2023, Mmes B... D..., Marion Audissergues, Claire et Marie-José Martin et M. A... C..., représentés par Me Maisonneuve, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 30 juin 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 décembre 2021 du maire de Clermont-Ferrand ;
3°) de mettre à la charge des parties perdantes la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils ont intérêt à relever appel du jugement et à demander l'annulation du permis de construire délivré le 23 janvier 2021 à la société V2 Immo ;
- le dossier de demande de permis de construire était incomplet faute de contenir des éléments permettant de vérifier le respect du coefficient de biotope et de déterminer précisément l'aménagement du terrain, l'implantation, l'organisation et la composition des constructions et le traitement des végétations ;
- le projet méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme compte tenu des caractéristiques de son accès, en termes de largeur et de pente de la voie, et du flux de véhicules qu'il va générer ;
- par son aspect extérieur et son volume, il méconnaît les articles R. 111-27 du code de l'urbanisme et UG 6 du règlement du plan local d'urbanisme, compte tenu de la présence d'un monument historique sur la parcelle voisine et d'un porche sur le terrain d'assiette, dont certains éléments seront conservés en raison de leur intérêt patrimonial ; les prescriptions de l'architecte des bâtiments de France sont illégales et le maire n'était pas tenu de suivre son avis.
Par un mémoire enregistré le 16 février 2024, la commune de Clermont-Ferrand, représentée par Me Bonicel-Bonnefoi, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme D... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- M. C... était forclos devant le tribunal ;
- les appelants n'établissent pas leur intérêt pour agir ;
- les moyens qu'ils soulèvent ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 17 février 2024, la société V2 Immo, représentée par Me Joly, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de Mme D... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- M. C... était forclos devant le tribunal ;
- les appelants n'établissent pas leur intérêt pour agir ;
- les moyens qu'ils soulèvent ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vinet, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,
- et les observations de Me Juilles, représentant la commune de Clermont-Ferrand.
Considérant ce qui suit :
1. La société V2 Immo a déposé le 30 juillet 2021 en mairie de Clermont-Ferrand un dossier de demande de permis de construire huit maisons individuelles et un immeuble d'habitat collectif de quatre logements sur la parcelle cadastrée section IZ n° 120, située 12 rue Gaultier de Biauzat. Par un arrêté du 23 décembre 2021, le maire de Clermont-Ferrand a accordé le permis de construire sollicité et l'a assorti de prescriptions. Mme D... et autres relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, d'une part, la circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient suffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme qu'aucune information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente dont la production ne soit pas prévue par les dispositions des articles R. 431-5 à R. 431-34-1 du même code. Enfin, un permis de construire n'a d'autre objet que d'autoriser la construction d'immeubles conformes aux plans et indications fournis par le pétitionnaire, la circonstance que ces plans et indications pourraient ne pas être respectés n'étant pas, par elle-même, sauf en cas de fraude avérée à la date de la délivrance du permis de construire, de nature à affecter la légalité de celui-ci.
3. Aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ".
4. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire que la surface de plancher des constructions à créer sera de 1 358 m² et que celle des constructions existantes à supprimer est de 1 548 m², sur une parcelle d'une superficie de 2 210 m². Il ressort également de ces pièces que les places de stationnement, auparavant au nombre de 32, seront réduites à 19, la surface consacrée au stationnement étant de 238 m², dont 104 m² de surface bâtie, et les pièces relatives à la documentation technique indiquent précisément la surface de plancher de chaque construction. L'aménagement du terrain, l'implantation des constructions et des espaces verts, ainsi que le traitement des végétations figurent sur le plan de masse joint au dossier de demande. La notice du projet architectural indique que la parcelle située en centre historique et dense requiert un coefficient de biotope par surface (CBS) de 0,3 et une surface de pleine terre de 0,1, et que le projet, qui reprend en quasi-totalité l'implantation bâtie existante, obtient un CBS de 0,32 et une surface de pleine terre de 0,19. Si le dossier de demande de permis de construire, et en particulier la notice architecturale, ne précise pas la superficie de chaque surface en fonction de sa nature pour le calcul du coefficient de biotope, d'une part, les dispositions citées au point 3 ne l'imposent pas et, d'autre part, l'appréciation portée par l'autorité administrative n'a, en tout état de cause, pu être faussée sur ce point compte tenu de la possibilité pour elle d'effectuer des recoupements entre les différentes données dont elle disposait, sans que n'ait d'incidence la circonstance que l'indication figurant dans la notice pourrait ne pas être respectée. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme doit, par suite, être écarté.
5. En deuxième lieu, à l'appui de leurs conclusions, les appelants reprennent le moyen, déjà soulevé en première instance, tiré de ce que le projet serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Ce moyen doit être écarté par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Aux termes de l'article UG 6 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les constructions, par leur situation, leur architecture, leur dimension ou leur aspect extérieur ne doivent pas porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux environnants ainsi qu'aux sites et aux paysages naturels ou urbains. / De même, les travaux sur les bâtiments existants ne doivent pas porter atteinte à leur qualité architecturale. ". Ces dispositions ont le même objet que celles de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres. Dès lors, la légalité du permis de construire en litige doit être appréciée au regard des seules dispositions du plan local d'urbanisme.
7. Pour apprécier si un projet de construction porte atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales, il appartient au juge administratif d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.
8. La parcelle d'assiette du projet contesté se trouve, comme indiqué au point 1, rue Gaultier de Biauzat, dans le centre historique de Clermont-Ferrand et consiste en la réalisation d'un immeuble collectif de quatre logements de type R+3 d'une hauteur au faitage d'environ 17 mètres et de huit maisons individuelles de type R+2 dont les hauteurs au faitage sont comprises entre 9 et 10 mètres. Le projet implique également la démolition d'un bâtiment anciennement affecté à l'usage de commerce sur rez-de-chaussée avec un porche d'entrée couvert attenant permettant d'accéder au cœur de la parcelle IZ n°120. L'immeuble collectif jouxtera la parcelle d'assiette de la cité Vaudoit, ensemble immobilier édifié au 19ème siècle et classé monument historique depuis 1993, se composant notamment d'un immeuble à tourelles situé dans la même rue. Toutefois, l'immeuble collectif projeté doit être implanté en retrait de la voirie, selon un angle permettant de dégager une vue depuis la rue sur l'immeuble classé monument historique. Si le porche à démolir est mitoyen à la pile nord du portail de la cité Vaudoit, il résulte de l'accord de l'architecte des bâtiments de France du 11 septembre que le portail devra être restitué après travaux dans l'état existant. Par ailleurs, le pignon du porche à démolir sera abaissé jusqu'au niveau du montant nord du portail d'entrée et les autres éléments de ce portail seront réintégrés dans le projet, en particulier plusieurs éléments en pierre de Volvic. Pour le reste, les lieux avoisinants ne présentent pas un intérêt architectural particulier ni de véritable homogénéité. Ainsi, la cité Vaudoit, du côté opposé au projet, est mitoyenne d'un immeuble d'architecture contemporaine. D'une façon générale, les immeubles situés de part et d'autre de la rue Gaultier de Biauzat présentent des caractéristiques de construction et matériaux hétérogènes et la plupart des volumes comparables à celui de l'immeuble collectif contesté. Enfin, et contrairement aux allégations des requérants, les ouvertures à réaliser seront en bois peint de couleur gris clair comme les volets coulissants. Dans ces conditions, compte tenu de la configuration des constructions projetées, en particulier celle de l'immeuble collectif, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article UG6 du règlement du plan local d'urbanisme de Clermont-Ferrand.
9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées à la demande de première instance, que Mme D... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande.
Sur les frais liés à l'instance :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D... et autres la somme de 1 500 euros chacune à verser à la commune de Clermont-Ferrand et à la société V2 Immo au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Clermont-Ferrand et de la société V2 Immo, qui ne sont pas parties perdante dans la présente instance.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... et autres est rejetée.
Article 2 : Mme D... et autres verseront la somme de 1 500 euros chacune à la commune de Clermont-Ferrand et à la société V2 Immo au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., représentante unique des requérants, à la commune de Clermont-Ferrand et à la société V2 Immo.
Délibéré après l'audience du 17 avril 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Michel, présidente de chambre,
Mme Vinet, présidente-assesseure,
Mme Soubié, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 mai 2025.
La rapporteure,
C. VinetLa présidente,
C. Michel
La greffière,
F. Bossoutrot
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation et à la ministre chargée du logement en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
2
N° 23LY02796
ar