Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 25 mai 2022 par laquelle le préfet de l'Allier a refusé de l'admettre au séjour.
Par un jugement n° 2201669 du 3 mai 2024, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 27 juin 2024, M. D..., représenté par Me Canis, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et cette décision ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de trente jours à compter de la date de notification de l'arrêt, sous astreinte journalière de 10 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et au bénéfice de son conseil la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ou de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision a été signée par une autorité incompétente ;
- elle méconnaît l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par mémoire enregistré le 10 avril 2025 et non communiqué, le préfet de l'Allier conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une décision du 23 octobre 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. D....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Evrard.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... relève appel du jugement du 3 mai 2024 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Allier du 25 mai 2022 rejetant sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) ".
3. Aux termes de l'article 371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. Cette obligation ne cesse de plein droit ni lorsque l'autorité parentale ou son exercice est retiré, ni lorsque l'enfant est majeur ".
4. M. D..., ressortissant comorien né le 7 mai 1986 et entré en France, selon ses déclarations, le 15 octobre 2014, était père, à la date de la décision en litige, de deux enfants français, nés, respectivement, le 17 mai 2017 de son union avec Mme A..., dont il est séparé, et le 25 juin 2021 de son union avec Mme B..., ressortissante française avec laquelle il a conclu un pacte civil de solidarité le 9 juillet 2021 et qui a d'ailleurs donné naissance, postérieurement à l'arrêté en litige, à leur deuxième enfant, le 3 mai 2023. Il ressort des pièces du dossier, et, notamment, de l'audition de Mme B... par les services de police ainsi que de l'attestation qu'elle a établie, que M. D..., avec lequel elle a effectivement établi une communauté de vie, participe à l'éducation de son enfant. S'il est constant qu'il n'apporte aucune contribution financière à l'entretien et à l'éducation de ce dernier, il ressort des pièces du dossier, et, notamment, du jugement du 24 août 2018 du juge aux affaires familiales au tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, que M. D... a été dispensé de l'obligation de contribution financière à l'entretien de son premier enfant français compte tenu de son impécuniosité. Le préfet de l'Allier ne conteste pas l'absence de ressources de l'intéressé pour pourvoir aux besoins de son deuxième enfant. Dans ces conditions, M. D... contribue à l'entretien et à l'éducation de cet enfant à proportion de ses ressources au sens des dispositions citées au point 3. Enfin, le préfet de l'Allier ne conteste pas sur Mme B... contribue également aux besoins affectifs, éducatifs et moraux de son enfant français. Par suite, M. D... est fondé à soutenir qu'en refusant de l'admettre au séjour, le préfet de l'Allier a méconnu les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Il s'ensuit que la décision du 25 mai 2022 du préfet de l'Allier refusant d'admettre M. D... au séjour doit être annulée.
6. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation du refus de séjour qui lui a été opposé par le préfet de l'Allier le 25 mai 2022.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ".
8. Dès lors qu'aucun changement dans les circonstances de droit ou de fait ne résulte de l'instruction, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique nécessairement, au sens des dispositions précitées, que le préfet territorialement compétent délivre à M. D... une carte de séjour temporaire, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de prononcer d'astreinte.
Sur les frais liés à l'instance :
9. La demande d'aide juridictionnelle de M. D... a été déclarée caduque. Son avocat ne peut, par suite, se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. M. D... ne sollicitant pas que soit mise à la charge de l'Etat une quelconque somme à son profit sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il ne peut être fait application de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2201669 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 3 mai 2024 est annulé.
Article 2 : La décision du préfet de l'Allier du 25 mai 2022 refusant de délivrer un titre de séjour à M. D... est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au préfet territorialement compétent de délivrer à M. D... une carte de séjour temporaire, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Montluçon en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative et au préfet de l'Allier.
Délibéré après l'audience du 10 avril 2025 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
M. Savouré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2025.
La rapporteure,
A. Evrard
Le président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
F. Faure
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Une greffière,
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N° 24LY01855