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10/04/2025 | FRANCE | N°24LY02471

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 10 avril 2025, 24LY02471


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. et Mme D... et B... C... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2002186 du 28 juin 2024, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a déchargé M. et Mme C... des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions soc

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme D... et B... C... ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2002186 du 28 juin 2024, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a déchargé M. et Mme C... des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales établies au titre de l'année 2013 à proportion de la réduction de la base imposable de 34 900 euros, ainsi que des pénalités correspondantes (article 2), et a rejeté le surplus de ses conclusions (article 4).

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 27 août 2024, M. et Mme D... et B... C..., représentés par Me Arnal-Yves, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions auxquelles ils demeurent assujettis au titre de l'année 2014 et des pénalités correspondantes ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens, et mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les rémunérations versées par la SARL Serrurerie C... correspondent à un travail effectif, ne présentent pas de caractère excessif et sont engagées dans son intérêt ;

- l'assemblée générale des associés de la SARL Serrurerie C... du 18 mars 2014 a approuvé les comptes et les rémunérations allouées aux cogérants, au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2013, lesquelles ont été appliquées pour les exercices suivants ;

- la décision collective des associés déterminant les rémunérations des cogérants peut intervenir après leur versement ;

- l'assemblée générale des associés du 26 novembre 2020 a approuvé les comptes annuels et les rémunérations allouées à chacun des gérants pour les exercices clos les 30 septembre 2014 et 2015, et son procès-verbal a été couché sur le registre des assemblées générales.

Par un mémoire, enregistré le 5 décembre 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 2 décembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 2 janvier 2025.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Porée, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Serrurerie C..., qui a son siège social à Creuzier-le-Vieux (Allier), exerçant depuis le 3 septembre 2012 une activité de travaux de menuiserie métallique, serrurerie, domotique, automatismes, contrôles d'accès, montes escaliers électriques, et ayant pour associés M. et Mme C..., également cogérants, détenteurs chacun de 50 % des parts sociales, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur la période du 3 septembre 2012 au 30 septembre 2015, au terme de laquelle le vérificateur, d'une part, au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2013, a remis en cause des charges de rémunérations des cogérants d'un montant total de 37 356 euros qu'il a réintégrées aux résultats déclarés de la société, d'autre part, au titre des exercices clos les 30 septembre 2014 et 2015, a constaté le défaut de présentation de la comptabilité, l'absence de dépôt de déclarations de résultats, a procédé à la reconstitution des recettes en se basant sur les produits et charges résultant du logiciel de gestion commerciale utilisé par la société, tout en excluant des charges de rémunérations des cogérants. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a imposé entre les mains de M. et Mme C... les sommes, d'une part, de 25 500 euros et de 9 400 euros, soit un total de 34 900 euros, au titre de l'année 2013, d'autre part, de 24 000 euros et de 13 100 euros, soit un total de 37 100 euros, au titre de l'année 2014, qu'ils avaient déclarées dans la catégorie des traitements et salaires, en tant que revenus distribués, et les a, en conséquence, assujettis, selon la procédure contradictoire, à des cotisations d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2013 et 2014, sur le fondement du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts. Ces impositions, de même que les contributions sociales corrélativement mises à la charge des intéressés, ont été assorties des intérêts de retard et de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts. Par une décision d'admission partielle du 29 septembre 2020, le directeur départemental des finances publiques de l'Allier a procédé à un dégrèvement correspondant à la majoration de 25 % prévue à l'article 158 7 2° du code général des impôts qui avait été appliquée à l'assiette des contributions sociales, et a rejeté la réclamation de M. et Mme C... en tant qu'ils contestaient l'imposition des sommes précitées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Par un jugement du 28 juin 2024, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a déchargé M. et Mme C... des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales établies au titre de l'année 2013 à proportion de la réduction de la base imposable de 34 900 euros, ainsi que des pénalités correspondantes, et a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge des impositions et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014. M. et Mme C... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande.

2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Pour soumettre à l'impôt sur le revenu des revenus sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, il incombe à l'administration d'établir qu'ils ont été mis à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts. Les sommes mises à disposition des associés non prélevées sur les bénéfices ont, sauf preuve contraire apportée par les associés, le caractère de revenus distribués, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

3. Aux termes de l'article L. 223-26 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable : " Le rapport de gestion, l'inventaire et les comptes annuels établis par les gérants, sont soumis à l'approbation des associés réunis en assemblée, dans le délai de six mois à compter de la clôture de l'exercice sous réserve de prolongation de ce délai par décision de justice. Si l'assemblée des associés n'a pas été réunie dans ce délai, le ministère public ou toute personne intéressée peut saisir le président du tribunal compétent statuant en référé afin d'enjoindre, le cas échéant sous astreinte, aux gérants de convoquer cette assemblée ou de désigner un mandataire pour y procéder. Les documents visés à l'alinéa précédent, le texte des résolutions proposées ainsi que le cas échéant, le rapport des commissaires aux comptes, les comptes consolidés et le rapport sur la gestion du groupe sont communiqués aux associés dans les conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'Etat. Toute délibération, prise en violation des dispositions du présent alinéa et du décret pris pour son application, peut être annulée. ". Aux termes de l'article R. 221-2 de ce code : " Toute délibération des associés est constatée par un procès-verbal qui indique la date et le lieu de réunion, les noms et prénoms des associés présents, les documents et rapports soumis à discussion, un résumé des débats, le texte des résolutions mises aux voix et le résultat des votes. Le procès-verbal est signé par chacun des associés présents. (...) ". Aux termes de l'article R. 221-3 du même code, applicable aux sociétés à responsabilité limitée en application de l'article R. 223-24 de ce code : " Les procès-verbaux prévus à l'article R. 221-2 sont établis sur un registre spécial tenu au siège social et coté et paraphé soit par un juge du tribunal de commerce, soit par un juge du tribunal judiciaire, soit par le maire de la commune du siège social ou un adjoint au maire, dans la forme ordinaire et sans frais. Toutefois, les procès-verbaux peuvent être établis sur des feuilles mobiles numérotées sans discontinuité, paraphées dans les conditions prévues à l'alinéa précédent et revêtues du sceau de l'autorité qui les a paraphées. Dès qu'une feuille a été remplie, même partiellement, elle est jointe à celles précédemment utilisées. Toute addition, suppression, substitution ou interversion de feuilles est interdite. (...) ".

4. La rémunération des gérants d'une société à responsabilité limitée est fixée soit dans les statuts, soit par une décision collective des associés réunis en assemblée générale.

5. Il résulte de l'article 17 - Gérance des statuts de la SARL Serrurerie C... du 13 août 2012, et de l'acte séparé à ces statuts désignant cogérants M. et Mme C..., qui a été déposé au greffe du tribunal de commerce le même jour que ceux-ci, que la rémunération des cogérants n'est pas fixée par les statuts mais par une délibération des associés.

6. La SARL Serrurerie C... a mis à disposition de M. et Mme C... respectivement les sommes de 24 000 euros et de 13 100 euros, qu'ils ont mentionnées dans la catégorie des traitements et salaires de leur déclaration de revenus de l'année 2014. Si M. et Mme C... soutiennent que leurs rémunérations, qui ont été approuvées par l'assemblée générale des associés du 18 mars 2014 au titre de l'exercice clos le 30 septembre 2013, devaient s'appliquer aux exercices clos les 30 septembre 2014 et 2015, il résulte de l'instruction que l'approbation des comptes annuels de l'exercice clos le 30 septembre 2013, qui ne peut concerner que cet exercice, porte seulement approbation des rémunérations allouées au cours de l'exercice écoulé, soit celui clos le 30 septembre 2013. Au demeurant, il résulte des comptes annuels aux 30 septembre 2014 et 2015, que la SARL Serrurerie C... a établi après sa vérification de comptabilité, qu'elle y a inscrit des rémunérations de 11 900 euros et de 14 400 euros pour la cogérante, 24 000 euros et 26 000 euros pour le cogérant, au titre respectivement des exercices clos en 2014 et 2015, et du procès-verbal des délibérations de l'assemblée générale des associés du 26 novembre 2020, qui a approuvé exactement ces sommes à titre de rémunérations pour ces deux exercices, que cette dernière assemblée générale n'a pas approuvé des compléments de rémunérations à celles prévues pour l'exercice clos en 2013. En outre, si M. et Mme C... se prévalent des délibérations de l'assemblée générale des associés du 26 novembre 2020 approuvant les comptes annuels et des rémunérations allouées à chacun des gérants au titre des exercices clos en 2014 et 2015, ces délibérations n'ont pas été adoptées dans le délai de six mois à compter de la clôture de ces exercices en méconnaissance de l'article L. 223-26 du code de commerce, sans qu'une prolongation de ce délai par décision de justice soit invoquée par les requérants, et elles ont par ailleurs été prises après la vérification de comptabilité de la SARL Serrurerie C... au terme de laquelle le vérificateur a refusé d'admettre des charges de rémunérations au titre des exercices clos en 2013, 2014 et 2015, ainsi qu'après la décision d'admission partielle de la réclamation des requérants du 29 septembre 2020 qui rejette la qualification de rémunérations. Enfin, le procès-verbal des délibérations de l'assemblée générale du 26 novembre 2020, dont il n'est pas démontré qu'il serait établi sur un registre spécial tenu au siège social de la SARL Serrurerie C..., comprend des feuilles mobiles non numérotées, non paraphées, ni revêtues du sceau d'un juge du tribunal de commerce, du tribunal judiciaire, ou du maire ou d'un de ses adjoints de la commune du siège social de ladite société, en méconnaissance de l'article R. 221-3 du code de commerce. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration fiscale a regardé les sommes de 24 000 euros et de 13 100 euros comme des revenus distribués au profit de M. et Mme C..., et à les imposer au titre des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, sans que les requérants puissent utilement soutenir que ces sommes, versées par chèques ou virements bancaires, l'ont été pour un travail effectif et ne seraient pas excessives.

7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté le surplus de leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et celles en tout état de cause relatives aux dépens, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... et B... C... et à la ministre chargée des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Haïli, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Djebiri, première conseillère,

- M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 avril 2025.

Le rapporteur,

A. Porée

Le président,

X. Haïli

La greffière,

M. A...

La République mande et ordonne à la ministre chargée des comptes publics, en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY02471


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY02471
Date de la décision : 10/04/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués. - Notion de revenus distribués. - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. HAILI
Rapporteur ?: M. Arnaud POREE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-10;24ly02471 ?
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