Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 9 février 2023 par lequel la préfète du Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays vers lequel elle pourrait être éloignée d'office.
Par un jugement n° 2305709 du 21 février 2024, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 10 mai 2024, Mme A... C..., représentée par la SCP Robin-Vernet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 février 2023 ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " ou, à défaut, de la munir d'une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler et de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 300 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le refus de titre de séjour qui lui est opposé est entaché d'un défaut d'examen de sa situation et d'une insuffisance de motivation ;
- le refus de séjour en litige porte une atteinte excessive à sa vie privée et familiale, en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, méconnait l'intérêt supérieur de sa fille protégé par les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et résulte d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'illégalité du refus de titre qui lui est opposé entache d'illégalité l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français et la décision fixant son délai de départ volontaire ;
- l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire français et la décision fixant son délai de départ volontaire sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français entache d'illégalité la décision fixant son pays de destination.
La procédure a été communiquée à la préfète du Rhône qui n'a pas produit d'observations.
Par une ordonnance du 4 octobre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée le 21 octobre 2024.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 avril 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Haïli, président-assesseur,
- et les observations de Me Vernet représentant Mme C... ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante géorgienne née en 1970, relève appel du jugement susvisé du 21 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 février 2023 par lequel la préfète du Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. Les moyens tirés de l'insuffisante motivation et du défaut d'examen particulier de sa situation au regard de l'ensemble de ses demandes doivent être écartés par adoption des motifs pertinents retenus par le tribunal administratif au point 3 du jugement attaqué.
3. Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention (...) " vie privée et familiale " (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. / (...) ". Aux termes de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants (...) l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
4. A l'appui de sa requête, Mme C... expose séjourner en France depuis le 27 septembre 2017, où elle exerce une activité professionnelle et où elle vit aux côtés de sa fille née en 2009 et qui y est scolarisée. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la demande d'asile de la requérante a été rejetée définitivement le 3 juin 2020 par la Cour nationale du droit d'asile et que sa présence en France ne résulte que de son admission au séjour durant la période de mars 2021 à mars 2022 pour lui permettre de demeurer aux côtés de son conjoint malade, désormais décédé. Par ailleurs, l'appelante entrée en France à l'âge de quarante-sept ans, qui ne se prévaut d'aucune attache familiale en France, ne conteste pas posséder ses attaches familiales principales en Géorgie où résident sa mère, ses deux sœurs et ses deux frères et n'établit pas l'ancienneté et la stabilité de ses attaches en France par l'exercice d'une activité professionnelle à hauteur de cinq heures hebdomadaires à compter du mois d'octobre 2021 et le recrutement à temps plein par la commune de Lyon à la fin de l'année 2022 par un contrat expirant au mois de juillet 2023. Par suite, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, la préfète n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport au but en vue duquel la décision de refus de séjour a été édictée et le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté. Pour les mêmes motifs, doit également être écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante aurait sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur lesquelles l'autorité préfectorale ne s'est pas fondée pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour. Il ressort en outre de l'arrêté contesté que la préfète du Rhône n'a pas procédé d'office à un examen de son droit au séjour à ce titre. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions est inopérant et doit être écarté.
6. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
7. La décision portant refus de titre de séjour n'a ni pour objet, ni pour effet de séparer l'enfant de sa mère. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le délai de départ volontaire :
8. Il résulte de ce qui a été exposé précédemment que doivent être écarté les moyens invoqués à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire et de la décision lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours prises sur son fondement par voie d'exception d'illégalité du refus de séjour.
9. Il résulte de ce qui a été dit au point 4, en l'absence d'argumentation spécifique, même en tenant compte des conséquences spécifiques des décisions contestées, eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de la requérante, la préfète du Rhône, en l'obligeant à quitter le territoire français et en fixant le délai de départ volontaire, n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'a donc, par suite, pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, en l'absence de circonstance particulière, elle n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante et de sa fille.
10. Par ailleurs, d'une part, les décisions en litige n'ont ni pour objet ni pour effet de séparer l'appelante de sa fille mineure. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'enfant de la requérante ne pourrait pas poursuivre sa scolarité hors de France, et notamment en Géorgie, pays d'origine de l'intéressée. Enfin, l'appelante n'établit pas de circonstance particulière justifiant qu'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours lui soit accordé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
11. En l'absence d'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire, le moyen tiré de ce que la décision contestée devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de ces décisions ne peut qu'être écarté.
12. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 27 mars 2025, à laquelle siégeaient :
M. Haïli, président-assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
Mme Djebiri, première conseillère,
M. Porée, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 avril 2025.
Le président-rapporteur,
X. HaïliL'assesseure la plus ancienne,
C. Djebiri
La greffière,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24LY01358