Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 10 mars 2022 par lequel le préfet de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un arrêt n° 23LY02227, 23LY02329 du 19 octobre 2023, la présente cour a annulé le jugement n° 2201482 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand et renvoyé l'affaire au tribunal administratif de Clermont-Ferrand pour qu'il soit statué sur la demande de M. B....
Par un jugement n° 2302456 du 1er juillet 2024, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
I. Par une requête, enregistrée le 19 juillet 2024 sous le n° 24LY02074, M. B... représenté par Me Rodrigues, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 1er juillet 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 mars 2022 du préfet de l'Allier ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner avant dire droit la vérification par les autorités guinéennes de l'ensemble des actes produits par Monsieur A... B... en application des dispositions du décret du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger et en l'absence d'annulation de la décision portant refus de séjour, sursoir à statuer sur les conclusions de sa requête tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire, jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée définitivement sur la question de savoir si la déclaration de nationalité française souscrite devait effectivement faire l'objet d'un enregistrement ;
4°) d'enjoindre au préfet de l'Allier de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois et, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour et de travail, sous huitaine et astreinte de trente euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt et, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, et à titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse d'un sursis à statuer sur la requête tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire, de lui enjoindre la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour et de travail, sous huitaine et astreinte de trente euros par jour de retard, ce à compter de la notification de l'arrêt ;
5°) de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, la somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- le tribunal a insuffisamment motivé son jugement sur le moyen concernant son état civil et ne s'est pas livré à un examen particulier des circonstances afférentes ;
- le jugement est entaché d'omission à statuer sur les conclusions tendant à ce que soit ordonné avant dire droit la vérification par les autorités guinéennes de l'ensemble des actes d'état civil produits ;
- le jugement est entaché d'omission à statuer sur les conclusions tendant au sursis à statuer sur la question préjudicielle de nationalité au soutien des conclusions aux fins d'annulation de l'obligation de quitter le territoire ;
- les premiers juges ont commis des erreurs de droit et des erreurs manifestes d'appréciation dans leur examen des moyens ;
Sur le bien-fondé du jugement :
- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il remplit toutes les conditions pour se voir délivrer un titre sur ce fondement ;
- le préfet a commis une erreur de fait et une erreur de droit, dès lors qu'il n'apporte pas d'élément suffisant à renverser la présomption d'authenticité des actes d'état civil étrangers posée par l'article 47 du code civil ;
- il a méconnu son droit à une identité tel que protégé par l'article 8 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale tel que garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre ;
- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale tel que garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il doit être sursis à statuer, dès lors qu'il est dans l'attente de la décision du tribunal judiciaire de Lyon sur sa déclaration de nationalité française ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
La procédure a été communiquée au préfet de l'Allier qui n'a pas présenté d'observations.
Par ordonnance du 9 septembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 22 octobre 2024.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 août 2024.
II. Par une requête enregistrée le 11 juillet 2023 sous le n° 24LY02079, M. B..., représenté par Me Rodrigues, demande à la cour :
1°) qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, la somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'exécution du jugement attaqué aura des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens présentés dans sa requête au fond présentent un caractère sérieux.
La procédure a été communiquée au préfet de l'Allier qui n'a pas présenté d'observations.
Par ordonnance du 9 septembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 22 octobre 2024.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 août 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Haïli, président-assesseur ;
- et les observations de Me Rodrigues, représentant M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant guinéen, qui a déclaré être né le 2 août 2002 et être entré en France le 1er juillet 2017, a été placé auprès des services de l'aide sociale à l'enfance de l'Allier, par un jugement du tribunal de grande instance de Moulins du 6 mars 2018. Le 9 mars 2021, à sa majorité, il a déposé une demande de carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 313-11, 2° bis devenu l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui a fait l'objet d'un refus du préfet de l'Allier par un arrêté du 10 mars 2022, l'obligeant également à quitter le territoire français. Par un jugement n° 2201482 du 25 mai 2023 le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M. B... aux fins d'annulation de cet arrêté. Par un arrêt n° 23LY02227, 23LY02329 du 19 octobre 2023, la présente cour a annulé ce jugement et renvoyé l'affaire au tribunal administratif de Clermont-Ferrand pour qu'il soit statué sur la demande de M. B.... Par la présente requête, M. B... relève appel du jugement n° 2302456 du 1er juillet 2024 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
2. Les affaires enregistrées sous les nos 24LY02074 et 24LY02079 concernent la situation d'un même ressortissant étranger, sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur la requête n° 24LY02074 :
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :
3. En premier lieu, l'appelant soutient que le tribunal n'a répondu aux conclusions tendant à ce que soit ordonné avant dire droit la vérification par les autorités guinéennes de l'ensemble des actes d'état civil produits en application des dispositions du décret du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger. Toutefois, il résulte de la motivation du jugement attaqué, et notamment de son point 8, que les premiers juges, disposant d'éléments suffisants au dossier pour forger leur conviction sur la force probante des documents produits par le requérant, doivent être regardés comme ayant répondu implicitement mais nécessairement à la demande formulée en ce sens par le demandeur de première instance. Par suite, l'absence de motifs du jugement sur ce point n'entache pas d'irrégularité le jugement attaqué.
4. En deuxième lieu, il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif a expressément répondu aux moyens contenus dans la demande introduite par le requérant. En particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre aux moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 432-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité en raison d'une insuffisance de motivation.
5. En dernier lieu, si l'appelant fait valoir que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a commis des erreurs de droit et d'appréciation dans l'examen des moyens, de telles erreurs, à les supposer établies, relèvent de l'appréciation du bien-fondé de sa décision et non de sa régularité.
6. Il résulte de ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularités.
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
7. Il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, les moyens tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une insuffisante motivation, d'un défaut d'examen particulier de sa situation et d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention relative aux droits de l'enfant, que M. B... réitère en appel sans apporter d'éléments pertinents.
8. Aux termes de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire (...), l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance (...) au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil (...) sur son insertion dans la société française. ".
9. Lorsqu'il examine une demande de titre de séjour de plein droit portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entre dans les prévisions de l'article L. 421-35 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public et qu'il a été confié au plus tard le jour de ses seize ans au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un tiers digne de confiance. Si ces conditions sont remplies, il ne peut alors refuser la délivrance du titre qu'en raison de la situation de l'intéressé appréciée de façon globale au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur l'insertion de cet étranger dans la société française.
10. D'autre part, aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : / 1° Les documents justifiants de son état civil ; / 2° Les documents justifiants de sa nationalité ; / (...) ". Aux termes de l'article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies à l'article 47 du code civil ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Celle-ci est appréciée au regard de la loi française ".
11. L'article 47 du code civil pose ainsi une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère dans les formes usitées dans ce pays. Il incombe à l'administration de renverser cette présomption en apportant la preuve du caractère irrégulier, falsifié ou non conforme à la réalité des actes en question. Il ne résulte en revanche pas de ces dispositions que l'administration française doit nécessairement et systématiquement solliciter les autorités d'un autre État afin d'établir qu'un acte d'état civil présenté comme émanant de cet État est dépourvu d'authenticité, en particulier lorsque l'acte est, compte tenu de sa forme et des informations dont dispose l'administration française sur la forme habituelle du document en question, manifestement falsifié. Il en résulte que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.
12. Pour refuser de faire droit à la demande de M. B..., le préfet de l'Allier a estimé que l'intéressé ne justifiait ni de son état civil ni de son âge lors de son placement à l'aide sociale à l'enfance par l'extrait d'acte de naissance établi le 16 mai 2017 et a relevé que le jugement supplétif n° 10285/2017 produit par l'intéressé à l'appui de sa demande de titre de séjour ayant été analysé par les services de la police aux frontières dans un rapport de 23 juillet 2021 qui, s'il indique qu'aucun élément visible ne permet de mettre en doute l'authenticité de l'extrait de registre de naissance, a conclu qu'un dossier avait déjà été instruit sous les mêmes identités et filiation en 2018 avec des numéros d'actes d'état civil de naissance différents, de sorte que M. B... se prévalait de la même identité qu'une tierce personne et qu'il n'a jamais allégué avoir été victime d'usurpation d'identité.
13. Dans le cadre de la présente instance, l'appelant produit différents jugements supplétifs et rectificatifs du tribunal judiciaire de première instance de Dixinn, soit un jugement du 2 décembre 2021 rectifiant le jugement supplétif du 15 mai 2017 tenant lieu d'acte de naissance et sa transcription en date du 26 juillet 2018, un jugement du 11 mai 2022 annulant un jugement supplétif en date du 5 février 2021 tenant lieu d'acte de naissance et, en dernier lieu un jugement du 25 avril 2023 portant annulation de l'extrait de transcription 4822 du 16 mai 2017, légalisé par l'ambassade de Guinée à Paris. Il ressort des pièces du dossier que ces jugements présentent de nombreuses erreurs et fautes d'orthographe, ont été obtenus depuis la France par le requérant dans des délais, pour certains, très brefs, et notamment, ainsi que l'a d'ailleurs relevé le tribunal judiciaire de Lyon dans sa décision du 19 janvier 2021 refusant l'enregistrement d'une déclaration de nationalité française de l'intéressé, le premier extrait du registre de l'état civil comporte une erreur dans la date du jugement supplétif dans lequel il est indiqué n° 10285 greffe du 15 mai 2018 et " sur requête en son audience publique ordinaire du 15 MAI DEUX MILLE DIX HUIT ", alors que la lecture du jugement montre que l'audience s'est tenue suite à une requête du 15 mai 2017 formulée par M. F..., père du requérant, et que le jugement est référencé n°10285/2017. En outre, il ressort des pièces du dossier que le jugement du 25 avril 2023 a également été rendu sur demande en date du 24 avril 2023 de son père, ce qui met en doute l'absence de liens avec sa famille en Guinée que l'intéressé fait valoir dans ses écritures. Aussi, dans ces conditions, l'accumulation de ces jugements et ces anomalies et incohérences prises dans leur ensemble, dans un contexte de fraude massive à l'état civil en Guinée visant à l'obtention du statut de mineur non accompagné en France, sont de nature à remettre en cause l'authenticité des documents d'état civil produits de sorte que, dans ces circonstances, M. B... ne justifie pas d'un état civil certain. Si M. B... se prévaut nouvellement de sa carte d'identité consulaire délivrée le 27 juillet 2023 par les autorités consulaires guinéennes en France, celle-ci, qui justifie seulement de l'inscription de l'intéressé sur les registres consulaires, si elle constitue une pièce d'identité, n'est pas un document d'état civil. Dans ces conditions, les pièces versées au dossier par le requérant ne sont pas de nature à établir son identité, nonobstant la circonstance que M. B... a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance à la suite d'un jugement en assistance éducative du tribunal pour enfants E... en date du 20 mars 2018, dont la chose jugée ne faisait pas obstacle à ce que le préfet de l'Allier s'interroge sur l'état-civil de l'intéressé et ne lie pas la présente cour. Par suite, sans qu'il ait été nécessaire de saisir préalablement les autorités guinéennes, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Allier aurait fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 423-22-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire pour ce motif.
14. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
15. M. B..., qui déclare être né le 2 août 2002 et être entré en France en 2017, est célibataire et sans charge de famille et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où réside notamment son père. Dans ces conditions, alors même qu'il se prévaut du parcours d'insertion qu'il a suivi en France depuis sa prise en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance à compter du 6 mars 2018, la décision portant refus de titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et n'a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet de l'Allier n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur la situation personnelle de M. B....
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
16. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision de refus de séjour ne peut être accueilli.
17. Pour les mêmes motifs qu'exposés au point 15 et même en tenant compte des conséquences spécifiques à la mesure d'éloignement, l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de l'appelant ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne les conclusions à fin de sursis à statuer :
18. L'article L. 111-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile exclut du champ d'application d'une mesure d'éloignement une personne qui, à la date de cette mesure, a la nationalité française alors même qu'elle aurait également une nationalité étrangère.
19. Aux termes de l'article R. 771-2 du code de justice administrative : " Lorsque la solution d'un litige dépend d'une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction judiciaire, la juridiction administrative initialement saisie la transmet à la juridiction judiciaire compétente. Elle sursoit à statuer jusqu'à la décision sur la question préjudicielle ". Aux termes de l'article 29 du code civil : " La juridiction civile de droit commun est seule compétente pour connaître des contestations sur la nationalité française ou étrangère des personnes physiques. / Les questions de nationalité sont préjudicielles devant toute autre juridiction de l'ordre administratif ou judiciaire (...) ". L'exception de nationalité française ne constitue, en vertu des dispositions de l'article 29 du code civil, une question préjudicielle que si elle présente une difficulté sérieuse.
20. M. B... soutient qu'il a introduit le 21 juillet 2020 une procédure de déclaration de nationalité française en application de l'article 21-12 du code civil qui prévoit que " L'enfant qui a fait l'objet d'une adoption simple par une personne de nationalité française peut, jusqu'à sa majorité, déclarer, dans les conditions prévues aux articles 26 et suivants, qu'il réclame la qualité de Français (...) / (...) / Peut, dans les mêmes conditions, réclamer la nationalité française : / 1° L'enfant qui, depuis au moins trois années (...) est confié au service de l'aide sociale à l'enfance ; / (...) ".
21. Compte tenu de ce qui était dit au point 13, M. B... ne justifiant pas d'un état civil certain, et alors qu'à la date de l'arrêté en litige, le tribunal judiciaire de Lyon par une décision du 19 janvier 2021 avait refusé l'enregistrement de la déclaration de nationalité française au vu des erreurs entachant l'extrait du registre d'état civil n°10285 produit par l'intéressé, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer sur les conclusions de sa requête dans l'attente du jugement du tribunal judiciaire de Lyon lequel a été à nouveau saisi par l'intéressé d'une action en reconnaissance de sa nationalité française par une assignation en date du 3 juin 2022, introduite postérieurement à la date de l'arrêté attaqué.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
22. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la mesure d'éloignement ne peut être accueilli.
Sur la requête n° 24LY02079 :
23. Le présent arrêt statuant sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement du 1er juillet 2024, les conclusions de M. B... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement se trouvent dépourvues d'objet. En conséquence, il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur les frais liés aux litiges :
24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans les présentes instances la partie perdante, une somme quelconque à verser au conseil de M. B....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête n° 24LY02074 de M. B... est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur requête n° 24LY02079.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Allier.
Délibéré après l'audience du 20 février 2025, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
M. Haïli, président-assesseur,
M. Porée, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 mars 2025.
Le rapporteur,
X. Haïli
Le président,
D. Pruvost
La greffière,
M. D...
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
2
N° 24LY02074, 24LY02079