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20/03/2025 | FRANCE | N°24LY02037

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 20 mars 2025, 24LY02037


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des compléments d'impôts sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti avec son épouse au titre des années 2015 et 2016 ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2305341 du 30 mai 2024, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une requête et un mémoir

e, enregistrés le 16 juillet 2024 et le 4 décembre 2024, M. C... D..., représenté par Me Tournoud, demande à la cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des compléments d'impôts sur le revenu et des prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti avec son épouse au titre des années 2015 et 2016 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2305341 du 30 mai 2024, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 juillet 2024 et le 4 décembre 2024, M. C... D..., représenté par Me Tournoud, demande à la cour :

1°) d'annuler ou de réformer ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens.

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de droit et a dénaturé les faits ;

- l'administration a méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales en ne lui communiquant pas les renseignements et les documents demandés ;

Par un mémoire enregistré le 27 novembre 2024, le ministre chargé du budget et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 20 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée le 6 décembre 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président assesseur,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,

- et les observations de Me Hakkar, représentant M. D... ;

Une note en délibéré présentée pour M. D... par Me Tournoud a été enregistrée le 25 février 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... D..., alors président et associé de la SAS Ess Auto, qui exerçait une activité de vente de négoce de véhicules d'occasion et de réparation automobiles, a été assujetti avec son épouse à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2015 et 2016 résultant notamment de l'inclusion dans ses revenus imposables de revenus distribués constitués, d'une part, de recettes de ventes de véhicules non comptabilisées par la société révélées par une reconstitution de ses chiffres d'affaires et, d'autre part, d'avances consenties par l'intermédiaire de soldes débiteurs de compte courant que l'administration a imposées entre ses mains, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement, respectivement, du c. et du a. de l'article 111 du code général des impôts. Par la présente requête, M. D... relève appel du jugement susvisé du 30 mai 2024 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande de décharge de ces impositions, des contributions sociales auxquelles M. et Mme D... ont également été assujettis du chef de ces rectifications et des pénalités correspondantes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si l'appelant soutient que les premiers juges ont dénaturé les faits et commis une erreur de droit, de tels moyens ne relèvent pas de la régularité du jugement mais de son bien-fondé. Les moyens tirés de prétendues irrégularités du jugement attaqué ne peuvent, dès lors, qu'être écartés.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ".

4. Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des documents et renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour mettre à même l'intéressé d'y avoir accès avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable lui en fait la demande, l'administration est, en principe, tenue de lui communiquer, alors même qu'il en aurait eu connaissance, les renseignements, documents ou copies de documents obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés, afin de lui permettre d'en vérifier l'authenticité ou d'en discuter la teneur ou la portée. Il en va autrement s'agissant des documents et renseignements qui, à la date de la demande de communication, sont directement et effectivement accessibles au contribuable dans les mêmes conditions qu'à l'administration. Dans cette dernière hypothèse, si le contribuable établit qu'il ne peut avoir effectivement accès aux mêmes documents et renseignements que ceux détenus par l'administration, celle-ci est alors tenue de les lui communiquer. Lorsque le contribuable le demande, la copie de ces documents doit lui être transmise, sauf si leur nature ou leur volume impose une communication sous forme de consultation dans les locaux du service.

5. Par une proposition de rectification n° 3924 du 19 octobre 2018 consécutive à la vérification de comptabilité de la SAS Ess Auto envoyée à l'adresse de son siège social, l'administration fiscale a informé la société qu'elle envisageait de réintégrer des recettes omises quant à la vente de véhicules dans ses résultats des exercices clos les 31 mai 2015, 31 mai 2016 et 31 mai 2017. Par une proposition de rectification n°2120 du même jour envoyée à M. et Mme D... à leur adresse personnelle d'Echirolles (Isère), l'administration fiscale a informé les intéressés de son intention d'imposer entre les mains de M. D... les revenus réputés distribués par la SAS Ess Auto en joignant, en annexe à cette proposition de rectification, une copie de la proposition de rectification n°3924 adressée à cette société, qui comportait le détail des modalités selon lesquelles le service vérificateur a procédé à la reconstitution des résultats des exercices clos en 2015 et 2016. Il ressort de la proposition de rectification adressée à la SAS Ess Auto que les rectifications dont elle a fait l'objet sont fondées sur des informations obtenues par le service dans le cadre de droits de communication exercés, d'une part, auprès de ses fournisseurs de la société et, d'autre part, auprès de la Caisse d'Epargne Rhône-Alpes. Par un courrier daté du 20 novembre 2018, M. B..., après avoir déclaré contester les éléments notifiés et demandé une prorogation des délais de réponse " aussi bien en matière d'impôt sur le revenu qu'en matière d'impôts professionnels ", a demandé " par ailleurs " que lui soit communiqué " l'ensemble des droits de communication (demandes et réponses) effectués par vos soins ". Il résulte de l'instruction qu'en réponse à cette lettre, l'administration fiscale a, par un courrier du 26 novembre 2018 envoyé à l'adresse de la société à son représentant légal, indiqué qu'en raison du caractère volumineux des éléments de réponse concernés, il lui était proposé de venir les consulter dans les locaux du service en lui proposant trois dates. Enfin, toujours en réponse au courrier du 20 novembre 2018, l'administration fiscale a, par lettre n° 3926 du 4 mars 2019, indiqué que l'ensemble des droits de communication ayant servi aux rectifications notifiées dans la proposition de rectification notifiée à la SAS Ess Auto avait été transmis à ladite société par un courriel du 1er février 2019, par l'intermédiaire de la plate-forme sécurisée d'échanges de fichiers Escale à l'adresse électronique de cette société.

6. A l'appui de sa requête d'appel, M. D... soutient que les documents recueillis auprès de tiers dans l'exercice clos du droit de communication ne lui ont pas été transmis avant la mise en recouvrement des impositions auxquelles il a été personnellement assujetti au titre des distributions en provenance de la SAS Ess Auto en méconnaissance de l'obligation de communication prévue à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. Toutefois, dès lors que la lettre du 20 novembre 2018 revêtue de la signature de M. D... faisait suite à deux propositions de rectification du même jour adressées l'une à l'intéressé pour son imposition personnelle et l'autre à la société qu'il dirigeait, que cette lettre ne mentionnait, dans son en-tête, que l'adresse du siège de la société et qu'elle était revêtue du timbre humide de la société, elle ne peut être regardée comme une demande faite par M. D... en son nom propre tendant à obtenir personnellement la transmission des éléments demandés quand bien même elle demandait la prorogation des délais pour contester l'imposition personnelle de l'intéressé. Par suite, en s'abstenant de communiquer à M. D... les éléments utilisés pour fonder son imposition personnelle, l'administration fiscale, qui ne peut être regardée comme ayant été valablement saisie d'une demande en ce sens par l'intéressé, n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales.

7. Par ailleurs, en vertu du principe d'indépendance des procédures, les moyens relatifs à la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre d'une société soumise au régime d'imposition des sociétés de capitaux sont sans influence sur l'imposition personnelle mise à la charge de son gérant. Par suite, si le requérant entend soutenir que l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales a été méconnu dans le cadre de la procédure d'imposition suivie avec la SAS Ess Auto, ce moyen ne peut qu'être écarté comme inopérant.

8. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause celles des conclusions au titre des dépens, doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et à la ministre chargée des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 20 février 2025, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Haïli, président-assesseur,

M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 mars 2025.

Le rapporteur,

X. Haïli

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

M. A...

La République mande et ordonne à la ministre chargée des comptes publics en ce qui la concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 24LY02037


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY02037
Date de la décision : 20/03/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : ARBOR TOURNOUD PIGNIER WOLF

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-03-20;24ly02037 ?
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