Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2023 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n°2306515 du 13 novembre 2023, le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 2 janvier 2024, Mme B..., représentée par Me Huard, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 13 novembre 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 26 septembre 2023 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour et à défaut de réexaminer sa situation en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé et n'a pas été précédé d'un examen de sa situation personnelle ;
- elle n'a pas pu présenter d'observations préalablement à l'obligation de quitter le territoire français en litige et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait été informée, en cas de rejet de sa demande d'asile, de ce qu'elle était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ou mise à même de présenter des observations emportant une méconnaissance de son droit d'être entendue ;
- le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été consulté en méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'arrêté en litige méconnaît ces dispositions compte tenu de son état de santé et de sa prise en charge médicamenteuse ;
- l'arrêté en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ; il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
La requête de Mme B... a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas présenté d'observations.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Burnichon, première conseillère.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., née le 27 octobre 1984 et de nationalité congolaise, est entrée irrégulièrement sur le territoire français le 3 juin 2019 pour y demander l'asile. A la suite du rejet de sa demande d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 25 juin 2021 puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 1er février 2023, le préfet de l'Isère, par un arrêté du 26 septembre 2023, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du 13 novembre 2013 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, l'arrêté en litige, qui vise les dispositions législatives et règlementaires dont il fait application, rappelle la situation administrative et personnelle de Mme B..., notamment sa précédente demande d'asile en Italie sous une autre identité. Il est dès lors suffisamment motivé et a été précédé d'un examen de la situation personnelle de l'intéressée.
3. En deuxième lieu, le droit d'être entendu, principe général du droit de l'Union européenne, se définit comme le droit de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Ce droit n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement. Tout manquement au droit d'être entendu n'est pas de nature à entacher systématiquement d'illégalité la décision prise. Il revient à l'intéressé d'établir devant le juge chargé d'apprécier la légalité de cette décision que les éléments qu'il n'a pas pu présenter à l'administration auraient pu influer sur le sens de cette décision et il appartient au juge saisi d'une telle demande de vérifier, lorsqu'il estime être en présence d'une irrégularité affectant le droit d'être entendu, si, eu égard à l'ensemble des circonstances de fait et de droit spécifiques de l'espèce, cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que cette procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent.
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., dont la demande d'asile a été enregistrée par les autorités françaises le 30 janvier 2020, a fait l'objet le 25 juin 2021 d'une décision de l'OFPRA rejetant cette demande confirmée par la CNDA le 1er février 2023, à la suite de laquelle a été adoptée la décision portant obligation de quitter le territoire français du 26 septembre 2023 contestée. Dans le cadre de l'examen de sa demande d'asile, Mme B... a été entendue en ce qui concerne les craintes pour sa sécurité dans son pays d'origine. Si Mme B... soutient qu'elle aurait pu, préalablement à l'adoption de la décision d'éloignement, apporter des éléments complémentaires en ce qui concerne sa situation médicale, la seule circonstance suivant laquelle Mme B... est atteinte d'hypertension ne constitue pas un élément suffisamment pertinent qu'elle aurait pu utilement porter à la connaissance de l'administration avant que ne soit prise la mesure d'éloignement et qui, s'il avait été communiqué à temps, aurait été de nature à faire obstacle à la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.
5. En troisième lieu, l'unique certificat médical daté du 12 octobre 2023 indiquant que " l'hypertension est un facteur de risque cardiovasculaire majeur et si elle était en rupture de traitements et de suivi cela risquerait de l'exposer à de possibles pathologies lourdes " ne permet pas d'établir que l'absence de soins concernant l'état de santé de Mme B... serait susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'en tout état de cause, l'intéressée ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Il n'est ainsi pas établi que la décision d'éloignement de l'intéressée du territoire français aurait dû être précédée d'une consultation du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ni qu'elle aurait été prise en méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En dernier lieu, les moyens tirés de ce que l'arrêté en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 et serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation, doivent, en l'absence d'éléments nouveaux en appel, être écartés par les motifs retenus par le premier juge qu'il y a lieu pour la cour d'adopter.
7. Il résulte de ce qui précède, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 septembre 2023 par lequel le préfet de l'Isère lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2025 à laquelle siégeaient :
Mme Anne-Gaëlle Mauclair, présidente de la formation de jugement,
Mme Claire Burnichon, première conseillère
Mme Gabrielle Maubon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 février 2025.
La rapporteure,
C. BurnichonLa présidente,
A.-G. Mauclair
Le greffier en chef,
C. Gomez
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N°24LY00006 2