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13/02/2025 | FRANCE | N°24LY00620

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 13 février 2025, 24LY00620


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 11 janvier 2023 par lesquelles la préfète du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.



Par jugement n° 2305638 du 6 février 2024, le tribunal a annulé l'arrêté de la préfète du Rhône du 11 janvier 2023 en tant qu'i

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 11 janvier 2023 par lesquelles la préfète du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2305638 du 6 février 2024, le tribunal a annulé l'arrêté de la préfète du Rhône du 11 janvier 2023 en tant qu'il fait obligation de quitter le territoire français à M. A... et fixe le pays de destination, a enjoint à la préfète du Rhône de réexaminer la situation de l'intéressé dans le délai de deux mois et après remise d'une autorisation provisoire de séjour, et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 7 mars 2024, la préfète du Rhône demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il annule partiellement son arrêté du 11 janvier 2023 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Lyon tendant à l'annulation de son arrêté du 11 janvier 2023 en tant qu'il lui fait obligation de quitter le territoire français et fixe le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont entaché leur jugement d'erreur de droit, en prenant en compte des circonstances postérieures à la décision litigieuse ;

- l'obligation de quitter le territoire français prononcée à l'encontre de M. A... n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- les autres moyens soulevés en première instance n'étaient pas fondés.

Par mémoire enregistré le 7 mai 2024, M. A..., représenté par Me Cadoux, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête présentée par la préfète du Rhône ;

2°) par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 février 2024 en tant qu'il rejette le surplus de ses conclusions ;

3°) d'annuler l'arrêté de la préfète du Rhône du 11 janvier 2023 en tant qu'il refuse de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de lui délivrer une carte de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et dans l'attente et dans un délai de sept jours, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la préfète du Rhône ne sont pas fondés ;

- la préfète du Rhône n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle avant de refuser de lui délivrer un titre de séjour, ni n'a suffisamment motivé sa décision ;

- ce refus de titre de séjour méconnaît le deuxième alinéa de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 mars 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sophie Corvellec ;

Considérant ce qui suit :

1. La préfète du Rhône relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 février 2024, en ce qu'il annule son arrêté du 11 janvier 2023 en tant qu'il fait obligation de quitter le territoire français à M. A... et fixe le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Par la voie de l'appel incident, M. A... demande en outre l'annulation de ce jugement, en ce qu'il rejette le surplus de ses demandes, notamment celle tendant à l'annulation du même arrêté en ce qu'il refuse de lui délivrer un titre de séjour.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. L'erreur de droit dont les premiers juges auraient, d'après la préfète du Rhône, entaché leur jugement, pour retenir le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant l'obligation de quitter le territoire français, n'est susceptible d'affecter que le bien-fondé de ce jugement et demeure sans incidence sur sa régularité.

Sur le fond du litige :

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... vivait depuis le mois de novembre 2020 sur le territoire français, où il est entré régulièrement pour s'y produire en qualité d'artiste de cirque. Au cours de l'année 2022, il a été admis dans cinq écoles régionales ou nationales d'art du cirque pour y suivre une formation préparatoire aux écoles supérieures en art du cirque. En lui opposant le refus de titre de séjour et la mesure d'éloignement litigieuses, qui ont pour effet d'interrompre ce cursus sélectif, que l'intéressé suivait avec assiduité et talent ainsi qu'en témoignent les attestations produites et son admission au Centre national des arts du cirque de Châlons-en-Champagne peu de temps après, la préfète du Rhône a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation de M. A....

4. Il résulte de ce qui précède que la préfète du Rhône n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 11 janvier 2023 en tant qu'il fait obligation de quitter le territoire français à M. A... et fixe le pays de destination de cette mesure d'éloignement. M. A... est en revanche fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté, en tant qu'il refuse de faire droit à sa demande de titre de séjour et à demander l'annulation de ce jugement, dans cette mesure.

Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ".

6. Dès lors qu'aucun changement dans les circonstances de droit ou de fait ne résulte de l'instruction, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique que le préfet territorialement compétent délivre à M. A... un titre de séjour. Il y a lieu d'enjoindre au préfet territorialement compétent d'y procéder dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me Cadoux, avocate de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cette dernière d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la préfète du Rhône est rejetée.

Article 2 : La décision de la préfète du Rhône du 11 janvier 2023 refusant de délivrer un titre de séjour à M. A... est annulée.

Article 3 : Le jugement n° 2305638 du tribunal administratif de Lyon du 6 février 2024 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2 du présent arrêt.

Article 4 : Il est enjoint au préfet territorialement compétent de délivrer à M. A... un titre de séjour, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à Me Cadoux une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,

Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2025.

La rapporteure,

S. CorvellecLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY00620


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY00620
Date de la décision : 13/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: Mme PSILAKIS
Avocat(s) : CADOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 23/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-13;24ly00620 ?
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