Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La commune de Saint-Genest-Lerpt a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne à la garantir, au titre du contrat d'assurance responsabilité générale souscrit le 1er février 2008, de la condamnation de 120 000 euros mise à sa charge et des frais de 5 922 euros qu'elle a exposés à l'occasion du litige l'ayant opposée à M. et Mme A..., subsidiairement, de condamner la mutuelle d'assurance des instituteurs de France (MAIF) à lui verser les sommes de 120 000 euros et de 6 580 euros sur les mêmes fondements.
Par jugement n° 2103027 du 23 février 2023, le tribunal a condamné la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne à verser à la commune de Saint-Genest-Lerpt la somme de 120 000 euros et a rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 avril 2023 et le 21 août 2023, la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne, représentée par Me Sardin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à verser à la commune de Saint-Genest-Lerpt la somme de 120 000 euros et de rejeter la demande de la commune de Saint-Genest-Lerpt ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Genest-Lerpt la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- l'action de la commune est prescrite en vertu de l'article L. 114-1 du code des assurances, la prescription biennale demeurant applicable sans que ne puisse lui être opposé l'état du droit issu de la jurisprudence postérieure à la souscription du contrat ;
- la commune ne peut valablement l'appeler en garantie dès lors qu'elle n'avait pas sollicité son intervention dans l'instance engagée par M. A... ;
- sa garantie ne pouvait plus être actionnée dès lors que la commune n'avait pas respecté la clause de direction du procès ;
- la commune avait perdu son droit à garantie compte tenu de l'application de la clause de déchéance de garantie pour déclaration tardive de sinistre prévue au contrat ;
- sa garantie ne pouvait plus être actionnée dès lors que les conditions prévues par l'article L. 124-5 du code des assurances, tenant à la date de la première réclamation, n'étaient pas satisfaites ;
- sa garantie au titre de la protection juridique n'était pas due, en application des stipulations de l'article 7 du contrat de protection juridique.
Par mémoire enregistré le 17 mai 2023, la commune de Saint-Genest-Lerpt, représentée par Me Salen, conclut au rejet de la requête et demande à la cour :
1°) par la voie de l'appel incident, de porter la condamnation de la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne à la somme de 125 922 euros ;
2°) subsidiairement, de condamner la MAIF à lui verser les sommes de 120 000 euros et de 6 580 euros ;
3°) de mettre à la charge de la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne ou de la MAIF la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la prescription biennale n'est pas applicable dès lors qu'elle n'était pas mentionnée avec une précision suffisante dans le contrat et qu'aucune dérogation au principe de rétroactivité de la jurisprudence ne pouvait s'appliquer ;
- aucune disposition ne lui imposait d'attraire son assureur à l'instance à peine de déchéance du droit à garantie ;
- la société Groupama ne peut se prévaloir de la clause de déchéance de garantie pour déclaration tardive de sinistre prévue au contrat ; en tout état de cause, dans un tel cas, la garantie serait due par la MAIF qui lui a succédé ;
- elle peut en outre prétendre à la prise en charge des frais d'avocat au titre du contrat de protection juridique.
Par mémoire enregistré le 28 juin 2023, la MAIF, représentée par Me Paturat, conclut au rejet de la requête et des conclusions dirigées contre elle et demande à la cour de mettre à la charge de la commune de Saint-Genest-Lerpt la somme de 5000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la requête d'appel est irrecevable pour défaut de production du jugement attaqué ;
- les conclusions de la société Groupama et de la commune dirigées à son encontre sont tardives et par suite, irrecevables ;
- la prescription biennale est opposable dès lors qu'elle était mentionnée avec une précision suffisante dans le contrat la liant la commune ;
- elle ne peut apporter sa garantie dès lors que la commune avait connaissance du fait dommageable, à savoir l'annulation du permis de construire illégal en 2012, à la date de la souscription du contrat et que la commune n'a pas respecté la clause de direction du procès ;
- la demande de la commune était exposée à la déchéance de garantie pour déclaration tardive du sinistre ;
- elle ne peut être condamnée à prendre en charge des frais et honoraires d'avocats qui sont afférents à des diligences antérieures à la déclaration du sinistre.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code des assurances ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Evrard,
- les conclusions de Mme B...,
- les observations de Me Sardin pour la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne, celles de Me Salen pour la commune de Saint-Genest-Lerpt et celles de Me Manamanni pour la MAIF.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêt du 25 août 2020, la cour a condamné la commune de Saint-Genest-Lerpt à verser à M. A... une somme de 118 000 euros en réparation du préjudice causé à ce dernier par l'illégalité du permis de construire délivré par la commune à son voisin, ainsi que 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. A la suite des refus de prise en charge qui lui ont été opposés par ses assureurs successifs, la commune de Saint-Genest-Lerpt a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne à la garantir, au titre du contrat d'assurance responsabilité générale souscrit le 26 mai 2008 pour la période du 1er février 2008 au 30 janvier 2014, de la condamnation de 120 000 euros mise à sa charge et, au titre du contrat de protection juridique, des frais d'avocat exposés à hauteur de 5 922 euros, subsidiairement, de condamner la MAIF, au titre du contrat d'assurance responsabilité générale et protection juridique souscrit le 30 janvier 2014, à lui verser les sommes de 120 000 euros et de 6 580 euros sur les mêmes fondements. Par jugement du 23 février 2023, le tribunal a condamné la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne à verser à la commune de Saint-Genest-Lerpt la somme de 120 000 euros au titre de la garantie responsabilité générale et a rejeté le surplus de la demande. La société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne relève appel du jugement en tant qu'il a fait droit à sa demande. La commune de Saint-Genest-Lerpt conclut au rejet de la requête et demande, à titre incident, l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté sa demande. La MAIF conclut au rejet de la requête et des demandes formées à son encontre.
Sur les conclusions de la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne :
2. Aux termes de l'article 1.J des dispositions générales du contrat " responsabilité générale des communes " souscrit par la commune de Saint-Genest-Lerpt le 26 mai 2008 et applicable à compter du 1er février 2008 : " Sont garanties les conséquences pécuniaires de la responsabilité encourue par l'assuré en raison des dommages causés aux tiers résultant notamment de l'exercice de ses compétences : (...) en matière d'urbanisme, principalement en ce qui concerne les délivrances d'autorisation d'occupation des sols ".
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 124-5 du code des assurances : " La garantie est, selon le choix des parties, déclenchée soit par le fait dommageable, soit par la réclamation (...) / Le contrat doit, selon les cas, reproduire le texte du troisième ou du quatrième alinéa du présent article. / La garantie déclenchée par le fait dommageable couvre l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres, dès lors que le fait dommageable survient entre la prise d'effet initiale de la garantie et sa date (...) d'expiration, quelle que soit la date des autres éléments constitutifs du sinistre. / La garantie déclenchée par la réclamation couvre l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres, dès lors que le fait dommageable est antérieur à la date (...) d'expiration de la garantie, et que la première réclamation est adressée à l'assuré ou à son assureur entre la prise d'effet initiale de la garantie et l'expiration d'un délai subséquent à sa date (...) d'expiration mentionné par le contrat, quelle que soit la date des autres éléments constitutifs des sinistres. Toutefois, la garantie ne couvre les sinistres dont le fait dommageable a été connu de l'assuré postérieurement à la date (...) d'expiration que si, au moment où l'assuré a eu connaissance de ce fait dommageable, cette garantie n'a pas été resouscrite ou l'a été sur la base du déclenchement par le fait dommageable. L'assureur ne couvre pas l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres s'il établit que l'assuré avait connaissance du fait dommageable à la date de la souscription de la garantie ". Aux termes de l'article 5 du contrat souscrit par la commune de Saint-Genest-Lerpt le 26 mai 2008 : " La garantie est déclenchée par la réclamation. / La garantie déclenchée par la réclamation couvre l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres, dès lors que le fait dommageable est antérieur à la date (...) d'expiration de la garantie, et que la première réclamation est adressée à l'assuré ou à son assureur entre la prise d'effet initiale de la garantie et l'expiration d'un délai subséquent à sa date (...) d'expiration mentionné par le contrat, quelle que soit la date des autres éléments constitutifs des sinistres. / Toutefois, la garantie ne couvre les sinistres dont le fait dommageable a été connu de l'assuré postérieurement à la date (...) d'expiration que si, au moment où l'assuré a eu connaissance de ce fait dommageable, cette garantie n'a pas été resouscrite ou l'a été sur la base du déclenchement par le fait dommageable. L'assureur ne couvre pas l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres s'il établit que l'assuré avait connaissance du fait dommageable à la date de la souscription de la garantie. Le délai subséquent est de 5 ans ". Selon les définitions des termes généraux du contrat, la réclamation s'entend de la : " Mise en cause de la responsabilité de l'assuré, soit par lettre adressée à l'assuré ou à l'assureur, soit par assignation devant un tribunal civil ou administratif. Un même sinistre peut faire l'objet de plusieurs réclamations, soit d'une même victime, soit de plusieurs victimes ", et le fait dommageable est : " celui qui constitue la cause génératrice du dommage. Un ensemble de faits dommageables ayant la même cause technique est assimilé à un fait dommageable unique ".
4. Il résulte de l'instruction que le contrat conclu par la commune de Saint-Genest-Lerpt avec la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne le 26 mai 2008 pour la période du 1er février 2008 au 30 janvier 2011 a été reconduit pour une nouvelle période de trois ans courant jusqu'au 30 janvier 2014. Le fait dommageable, constitué par la délivrance, le 27 octobre 2008, par le maire de Saint-Genest-Lerpt, du permis de construire dont l'illégalité a engagé la responsabilité de la commune, est en conséquence antérieur à la date d'expiration de la garantie offerte par la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne, le 30 janvier 2014. En outre, la première réclamation, constituée par la requête indemnitaire introduite par M. A... auprès du tribunal administratif de Lyon, le 29 avril 2017, a été communiquée à la commune à cette même date, soit dans le délai subséquent de cinq ans ayant couru à compter de la date d'expiration du contrat, le 30 janvier 2014. Enfin, dès lors que la commune a eu connaissance de l'illégalité du permis de construire le 18 décembre 2012, soit avant la date d'expiration du contrat, le 30 janvier 2014, la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne n'est pas fondée à opposer la déchéance de garantie sanctionnant la connaissance acquise par l'assuré du fait dommageable postérieurement à la date d'expiration du contrat. Il s'ensuit que la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'était pas tenue d'accorder sa garantie par application des dispositions et stipulations citées au point précédent.
5. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 114-1 du code des assurances : " Toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance (...) ". Aux termes de l'article L. 114-2 du même code : " La prescription est interrompue par une des causes ordinaires d'interruption de la prescription et par la désignation d'experts à la suite d'un sinistre. L'interruption de la prescription de l'action peut, en outre, résulter de l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception adressée par l'assureur à l'assuré en ce qui concerne l'action en paiement de la prime et par l'assuré à l'assureur en ce qui concerne le règlement de l'indemnité ". Aux termes de l'article R. 112-1 de ce code : " Les polices d'assurance (...) doivent rappeler (...) la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance (...) ".
6. Il résulte des dispositions précitées de l'article R. 112-1 du code des assurances que, pour assurer une information suffisante des assurés sur ce point, les polices d'assurance entrant dans le champ d'application de cet article doivent rappeler les règles de prescription des actions dérivant du contrat d'assurance, y compris les causes d'interruption de celles-ci, qu'elles soient prévues par le code des assurances ou par le code civil. A défaut, l'assureur ne peut opposer à l'assuré la prescription prévue à l'article L. 114-1 précité.
7. D'autre part, il appartient en principe au juge administratif de faire application de la règle jurisprudentielle nouvelle à l'ensemble des litiges, quelle que soit la date des faits qui leur ont donné naissance, sauf si cette application a pour effet de porter rétroactivement atteinte au droit au recours.
8. Contrairement à ce que soutient la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne, il appartient à la cour de faire application de la règle rappelée au point 6, dont la mise en œuvre n'a pas pour effet de porter rétroactivement atteinte à son droit au recours, alors même qu'elle aurait été énoncée postérieurement au 26 mai 2008, date à laquelle la commune de Saint-Genest-Lerpt a souscrit le contrat de responsabilité générale. En se bornant à stipuler, à l'article 3.4 de ses dispositions générales, que : " Toute action liée à l'exécution du présent contrat est prescrite dans un délai de deux ans. Ce délai commence à courir à compter de l'événement qui lui a donné naissance, dans les conditions déterminées par les articles L. 114-1 et L. 114-2 du code des assurances ", avant de reprendre les autres causes d'interruption mentionnées à l'article L. 114-2 du code des assurances, telles que la désignation de l'expert à la suite du sinistre, la citation en justice, le commandement ou saisie ou l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception, le contrat d'assurance souscrit par la commune de Saint-Genest-Lerpt auprès de la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne ne rappelle pas l'ensemble des règles de prescription des actions liées à ce contrat, notamment les causes d'interruption prévues par le code civil. A défaut d'une information suffisante de la commune sur ce point, la société requérante ne peut se prévaloir de la prescription biennale prévue par l'article L. 114-1 du code des assurances. Par suite, la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne n'est pas fondée à soutenir que la demande de la commune de Saint-Genest-Lerpt était prescrite lorsqu'elle l'a saisie le 3 septembre 2020.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 113-17 du code des assurances : " L'assureur qui prend la direction d'un procès intenté à l'assuré est censé aussi renoncer à toutes les exceptions dont il avait connaissance lorsqu'il a pris la direction du procès. L'assuré n'encourt aucune déchéance ni aucune autre sanction du fait de son immixtion dans la direction du procès s'il avait intérêt à le faire ".
10. Si le contrat souscrit par la commune de Saint-Genest-Lerpt prévoit, en son article 4, que : " En présence d'une action judiciaire mettant en cause l'assuré à l'occasion de dommages couverts par la présente garantie et à concurrence du montant indiqué dans le tableau des montants de garanties et des franchises : devant les juridictions civiles ou administratives : l'assureur assume la défense de l'assuré, dirige le procès et a le libre exercice des voies de recours ", de telles stipulations n'ont ni pour objet, ni pour effet, de subordonner la mise en œuvre de la garantie responsabilité générale souscrite par la commune à la mise en cause par cette dernière de la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne dans l'instance par laquelle sa responsabilité a été engagée par M. et Mme A.... Le contrat ne prévoit par ailleurs aucune clause de déchéance de garantie dans cette hypothèse. Il s'ensuit que, la déchéance n'étant prévue ni par la loi, ni par le contrat, la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne n'est pas fondée à soutenir que, faute pour elle d'avoir sollicité son intervention dans l'instance, la commune de Saint-Genest-Lerpt serait déchue de sa garantie.
11. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 121-12 du code des assurances : " L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur. L'assureur peut être déchargé, en tout ou en partie, de sa responsabilité envers l'assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l'assuré, s'opérer en faveur de l'assureur ". Aux termes de l'article 6 du contrat souscrit le 26 mai 2008 : " L'assureur est subrogé, jusqu'à concurrence de l'indemnité payée, dans les droits et actions de l'assuré contre tous les responsables du sinistre. L'assureur peut être déchargé, en tout ou partie, de sa responsabilité envers l'assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l'assuré, s'opérer en sa faveur (article L.121-12 du code des assurances) ".
12. La société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne fait valoir que, si elle avait été avertie, en cours d'instance, du recours engagé par M. A... à l'encontre de la commune de Saint-Genest-Lerpt, elle aurait pu exercer un recours subrogatoire contre les véritables responsables des dommages subis, et, notamment, à l'encontre du bénéficiaire du permis de construire annulé. Toutefois, la société requérante n'ayant versé aucune indemnité à la commune, elle ne pouvait valablement exercer pour le compte de cette dernière aucune action à l'encontre de tiers. Au demeurant, le permis de construire en litige ayant été délivré par la commune sous sa seule responsabilité, sans que ne soit alléguée une quelconque fraude du bénéficiaire, la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne ne pouvait obtenir l'engagement de la responsabilité de ce dernier. Il s'ensuit que la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle est déchargée de sa responsabilité envers la commune de Saint-Genest-Lerpt, au motif que cette dernière l'aurait privée d'une action envers un tiers.
13. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 113-2 du code des assurances : " L'assuré est obligé : (...) 4° De donner avis à l'assureur, dès qu'il en a eu connaissance et au plus tard dans le délai fixé par le contrat, de tout sinistre de nature à entraîner la garantie de l'assureur. Ce délai ne peut être inférieur à cinq jours ouvrés. / (...) Lorsqu'elle est prévue par une clause du contrat, la déchéance pour déclaration tardive au regard des délais prévus au (...) 4° ci-dessus ne peut être opposée à l'assuré que si l'assureur établit que le retard dans la déclaration lui a causé un préjudice (...) ". Aux termes de l'article 1.a du contrat souscrit le 26 mai 2008 : " Lors de la survenance d'un sinistre, l'assuré doit : (...) le déclarer à l'assureur par écrit (de préférence par lettre recommandée) ou verbalement contre récépissé dès qu'il en a connaissance, et au plus tard : (...) dans les autres cas, dans les 5 jours ouvrés, sauf cas fortuit ou de force majeure. A défaut de respecter les délais de déclaration mentionnés ci-dessus, et dans la mesure où l'assureur peut établir qu'il en résulte un préjudice pour lui, l'assuré perd, pour le sinistre concerné, le bénéfice des garanties du contrat, sauf s'il s'agit d'un cas fortuit ou de force majeure ".
14. Il résulte de l'instruction que la commune de Saint-Genest-Lerpt n'a averti la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne de la condamnation prononcée à son encontre qu'au-delà du délai de cinq jours à compte de l'arrêt statuant sur le recours indemnitaire formé par M. A.... La société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne soutient que le retard avec lequel la commune a déclaré le sinistre lui a causé un préjudice, dès lors qu'elle aurait pu invoquer à l'instance des moyens de défense et suggérer à la commune des mesures destinées à limiter le sinistre.
15. Toutefois, contrairement à ce que soutient la requérante, le maire ne disposait pas du pouvoir de suspendre le permis de construire qu'il avait accordé, alors même que la légalité de cette décision avait été contestée.
16. M. A... ayant adressé une demande préalable à la commune le 28 décembre 2016, interrompant la prescription quadriennale dont le délai a couru à compter du 18 décembre 2012, la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne ne peut soutenir qu'elle a été privée de la possibilité d'opposer à ce dernier la prescription de la créance.
17. Il résulte de l'instruction que le tribunal de grande instance de Saint-Etienne a été saisi par M. A... d'une demande tendant à la démolition de la construction en litige, qu'il a rejetée par jugement du 26 avril 2016. La société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne, qui n'invoque aucun moyen qui aurait valablement pu être articulé par la commune pour obtenir la démolition, n'établit pas que l'absence d'action engagée par la commune sur le fondement de l'article L. 480-14 du code de l'urbanisme lui aurait causé un quelconque préjudice.
18. Une faute commise dans le cadre de la procédure d'instruction d'une demande d'autorisation d'urbanisme n'étant susceptible d'engager, à l'égard du pétitionnaire, que la responsabilité de la personne publique qui délivre ou refuse de délivrer l'autorisation sollicitée, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée, du fait de son assurée, de la faculté d'engager une action récursoire à l'encontre de la métropole de Saint-Etienne en sa qualité de service instructeur des demandes d'autorisations d'urbanisme présentées sur le territoire de la commune de Saint-Genest-Lerpt.
19. Enfin, et dès lors que les travaux ont été achevés au cours de l'année 2009, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le retard avec lequel la commune a déclaré le sinistre a fait obstacle à ce que le maire, agissant au nom de l'Etat, prescrive l'interruption de ces travaux sur le fondement de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme.
20. Dans ces conditions, la société requérante n'a, contrairement à ce qu'elle prétend, pas été privée de la possibilité de faire cesser le trouble allégué. Il s'ensuit qu'elle n'établit pas que le retard avec lequel la déclaration de sinistre lui a été faite lui aurait causé un quelconque préjudice. Par suite, elle n'est pas fondée à se prévaloir de la déchéance de garantie pour déclaration tardive prévue par les dispositions et stipulations citées au point 13.
Sur les conclusions de la commune de Saint-Genest-Lerpt :
En ce qui concerne l'appel incident dirigé contre la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne :
21. Aux termes de l'article 7 du contrat de protection juridique conclu par la commune avec la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne : " Sauf cas fortuit ou de force majeure, toute déclaration de litige susceptible de relever de la présente garantie doit être transmise au plus tard dans les 30 jours ouvrés à compter de la date à laquelle l'assuré en a eu connaissance, sous peine de déchéance de la garantie s'il est établi que le retard dans la déclaration cause un préjudice à l'assureur (...) En tout état de cause, et sauf cas d'urgence absolue, l'assureur ne prend pas en charge les frais et honoraires appelés ou réglés antérieurement à la déclaration de l'assuré ".
22. La commune n'a pas déclaré le litige lié à l'engagement de frais d'avocat avant le 12 février 2021, ainsi qu'il résulte, notamment, de la décision du 12 novembre 2020 par laquelle la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne a refusé de prendre en charge le sinistre lié à l'engagement de sa responsabilité par M. A... au titre de la seule garantie responsabilité générale ainsi que du courrier de la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne du 24 mars 2021 confirmant ce refus à la suite d'un courrier de la commune de Saint-Genest-Lerpt du 12 février 2021 et indiquant refuser par ailleurs la prise en charge, sollicitée par la commune, de ses frais et honoraires d'avocats à hauteur de 10 321,12 euros. Par suite, et sans qu'elle puisse utilement faire valoir que le retard n'a causé aucun préjudice à son assureur, la commune de Saint-Genest-Lerpt, qui ne soutient pas avoir été placée dans une situation d'urgence absolue, n'est pas fondée à soutenir que la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne devait la garantir des frais et honoraires facturés par son avocat les 6 décembre 2016, 13 juin 2018, 28 décembre 2018 et 3 septembre 2020, qui ont appelés antérieurement à la déclaration de sinistre qu'elle a formée.
En ce qui concerne l'appel provoqué dirigé contre la MAIF :
23. Aux termes de l'article 52 du contrat conclu le 30 janvier 2014 avec la MAIF : " Sont exclus de la garantie (...) les frais et honoraires d'avocat ou de toute personne qualifiée par la législation ou la réglementation en vigueur pour défendre, représenter ou servir les intérêts de la collectivité assurée ou du bénéficiaire des garanties, afférents à des diligences antérieures à la déclaration du sinistre à la mutuelle, sauf s'ils ont été exposés en raison d'une urgence caractérisée et ayant nécessité une mesure conservatoire ".
24. Il résulte de l'instruction que la commune de Saint-Genest-Lerpt a déclaré à la MAIF le sinistre tenant à l'engagement de frais d'avocat, le 9 décembre 2020. Par suite, et dès lors qu'elle n'allègue pas avoir exposé ces frais en raison d'une urgence caractérisée et ayant nécessité une mesure conservatoire, la commune n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que la MAIF devait la garantir des frais et honoraires facturés les 6 décembre 2016, 13 juin 2018, 28 décembre 2018 et 3 septembre 2020, qui ont appelé antérieurement à la déclaration de sinistre.
25. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par la MAIF, la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon l'a condamnée à verser à la commune de Saint-Genest-Lerpt la somme de 120 000 euros et que la commune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par ce même jugement, le tribunal a rejeté le surplus de sa demande.
Sur les frais liés au litige :
26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Genest-Lerpt, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme de 2 000 euros à verser à la commune de Saint-Genest-Lerpt, en application de ces mêmes dispositions. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions présentées aux mêmes fins par la MAIF doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne est rejetée.
Article 2 : La société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne versera à la commune de Saint-Genest-Lerpt une somme de 2000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Groupama Rhône-Alpes-Auvergne, à la commune de Saint-Genest-Lerpt et à la mutuelle d'assurance des instituteurs de France.
Délibéré après l'audience du 23 janvier 2025 à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président,
Mme Evrard, présidente-assesseure,
M. Savouré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 février 2025.
La rapporteure,
A. Evrard
Le président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
F. Faure
La République mande et ordonne au préfet de la Loire, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
2
N° 23LY01183