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22/01/2025 | FRANCE | N°23LY02625

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 3ème chambre, 22 janvier 2025, 23LY02625


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 1er juin 2021 par lequel le préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes a autorisé M. A... à exploiter 12,85 hectares correspondant aux parcelles cadastrales ZB64 et ZB66 situées sur le territoire de la commune de Saint-Bonnet-de-Salers.

Par un jugement n° 2101616 du 16 juin 2023, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.



Procédure devant la

cour



Par une requête, enregistrée le 9 août 2023, et un mémoire en réplique non communiqué, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 1er juin 2021 par lequel le préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes a autorisé M. A... à exploiter 12,85 hectares correspondant aux parcelles cadastrales ZB64 et ZB66 situées sur le territoire de la commune de Saint-Bonnet-de-Salers.

Par un jugement n° 2101616 du 16 juin 2023, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 9 août 2023, et un mémoire en réplique non communiqué, enregistré le 11 décembre 2024, M. B..., représenté par Me Joanny, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 16 juin 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes du 1er juin 2021 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime, dès lors que la surface agricole pondérée retenue est erronée et que le projet de reprise de 12,85 hectares porte atteinte à la viabilité de son exploitation.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 septembre 2024, M. C... A..., représenté par Me Petitjean, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 novembre 2024, le ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 26 novembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 13 décembre 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté n° 18-091 du 27 mars 2018 du préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes portant schéma directeur régional des exploitations agricoles pour la région Auvergne-Rhône-Alpes ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure,

- et les conclusions de Mme Lordonné, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... était locataire d'un domaine agricole de 12 hectares 86 ares et 01 centiare constitué par les parcelles cadastrales ZB64 et ZB66 depuis le 1er janvier 2012, sur le territoire de la commune de Saint-Bonnet-de-Salers (Cantal), au terme d'un contrat de bail conclu pour une durée de neuf ans. M. A..., qui a acquis ces parcelles pour une surface de 12,85 hectares le 6 septembre 2018, a signifié, le 3 juin 2019 à M. B..., un congé aux fins de reprise des parcelles afin de pouvoir les exploiter à titre personnel. Ce congé-reprise a fait l'objet d'un litige auprès du tribunal paritaire des baux ruraux d'Aurillac. Le 24 octobre 2019, M. A... a présenté auprès de la direction départementale des territoires (DDT) du Cantal une demande d'autorisation d'exploiter sur les parcelles acquises. Le 17 janvier 2020, M. B... a effectué la même demande. Par un jugement du 10 décembre 2020, le tribunal paritaire des baux ruraux d'Aurillac a sursis à statuer sur le litige relatif au congé de reprise dans l'attente d'une décision définitive sur la demande d'autorisation d'exploiter de M. A.... Après une première décision de refus opposée le 27 février 2020, le préfet de la région Auvergne-Rhône-Alpes a accordé à M. A... l'autorisation d'exploiter les terres en litige par un arrêté du 1er juin 2021. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime : " I.-Sont soumises à autorisation préalable les opérations suivantes : 1° Les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole mise en valeur par une ou plusieurs personnes physiques ou morales, lorsque la surface totale qu'il est envisagé de mettre en valeur excède le seuil fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles. (...) ". Aux termes de l'article L. 331-3-1 du même code : " I.- L'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 peut être refusée : 1° Lorsqu'il existe un candidat à la reprise ou un preneur en place répondant à un rang de priorité supérieur au regard du schéma directeur régional des structures agricoles mentionné à l'article L. 312-1 ; 2° Lorsque l'opération compromet la viabilité de l'exploitation du preneur en place ; (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que le préfet, saisi d'une demande d'autorisation d'exploiter des terres déjà mises en valeur par un autre agriculteur, doit, pour statuer sur cette demande, d'une part, observer l'ordre des priorités établi par le schéma directeur régional des structures agricoles entre la situation du demandeur et celle du preneur en place, alors même que celui-ci n'a déposé aucune demande en ce sens et, d'autre part, le cas échant, mettre en œuvre les critères de départage en cas d'égalité.

4. D'autre part, l'article 1er de l'arrêté du 27 mars 2018 susvisé portant schéma directeur régional des exploitations agricoles alors applicable, prévoit que : " (...) Les revenus d'activité extra-agricoles sont pris en compte pour comparer des candidatures concurrentes, en les convertissant en surface selon l'équivalence suivante : - 1 salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) net annuel équivaut au seuil de surface déclenchant le contrôle des structures, tel que défini à l'article 3, - les revenus pris en compte sont les revenus déclarés de la dernière année fiscale connue, et composés des retraites et des revenus provenant de l'ensemble des activités professionnelles, déduction faite, s'il y a lieu, de la part de ces revenus provenant d'activités agricoles, - on ne prend en compte que les revenus extérieurs à l'agriculture supérieurs à 0.33 SMIC. Ces revenus extérieurs sont alors retenus dans leur totalité. (...); ". L'article 3 de ce schéma fixe le seuil de surface à 59 ha pour la " région naturelle 3 ", dont fait partie la totalité du territoire du département du Cantal. Son article 4 précise que : " (...) 2 - Les rangs de priorité par ordre décroissant de 1 à 7 sont liés à la nature de l'opération et visent à favoriser l'atteinte par les exploitations d'une dimension économique viable. Ils sont définis comme suit :

(...) / Les candidatures du rang de priorité le plus fort sont les seules à pouvoir obtenir un avis favorable. / Au sein d'un même rang de priorité, il peut être décidé de départager ou non les différentes candidatures en fonction des critères d'appréciation définis à l'article 5. (...) ". Enfin, son article 5 dispose que : " 1 - Critères d'appréciation de l'intérêt économique et environnemental / En application de l'article L 312-1, en vue de départager des candidatures de même rang de priorité, la priorité peut être donnée aux projets suivants : * surface pondérée par actif après agrandissement la plus faible (...) / 2 - Dimension économique viable : pour l'application, notamment de l'article L 331-1, 1°, la dimension économique viable d'une exploitation à encourager est définie comme la surface, pondérée des équivalences de production et des revenus d'activité extra-agricole, par actif égale au seuil de déclenchement par région naturelle définie à l'article 3 - 1° b) (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions que la détermination du rang de priorité des candidats dépend du type d'opération, de la surface agricole utile avant et après opération, pondérée en tenant compte des équivalences de productions végétales, du montant des revenus extra-agricoles, du nombre d'actifs de l'exploitation et de la distance entre le siège d'exploitation et les biens objet de la demande d'autorisation. Lorsque les candidats relèvent du même rang de priorité, l'autorisation peut être accordée au candidat disposant de la surface agricole utile pondérée par actif la plus faible.

6. Il ressort des termes de l'arrêté du 1er juin 2021 que le préfet a retenu une surface agricole utile pondérée après reprise de 79,25 hectares pour M. A... et une surface agricole utile pondérée de 81,55 hectares pour M. B.... Ces surfaces sont toutes deux classées en catégorie confortation et au rang de priorité 3 dès lors qu'elles sont comprises entre 1 et 1,5 fois le seuil de déclenchement de 59 hectares fixé par le SDREA.

7. En premier lieu, si M. B... fait valoir que le préfet aurait dû prendre en compte dans le calcul de sa surface agricole utile pondérée les surfaces supplémentaires dont dispose M. A... et que ce dernier n'a pas portées à la connaissance de la DDT, de nature à le placer en rang de priorité 4, ou 3 mais avec une surface utile supérieure à la sienne, il ne produit aucun élément permettant d'établir l'existence des surfaces supplémentaires ainsi alléguées. A ce titre, l'" extrait cadastral " versé au dossier, qui ne reporte aucune valeur précise et dont il est allégué qu'elle représenterait une surface de 2 ha 46 ca, ne suffit pas, à défaut de toute autre précision sur ce point, à justifier que la surface agricole utile valorisée par M. A... devrait être portée à 81 ha 71 ca. En outre, la surface pondérée par actif après agrandissement la plus faible ne constitue que l'un des critères d'appréciation définis à l'article 5 du schéma directeur permettant de départager des candidatures de même rang de priorité, et en vertu de l'article 4 de ce schéma, le préfet peut ne pas décider de départager les différentes candidatures en fonction de ces critères. Par suite, et dans la mesure où M. B... ne se trouvait pas à un rang de priorité supérieur, le préfet n'était pas tenu de refuser l'autorisation au bénéfice de M. A.... Le moyen doit ainsi être écarté.

8. En deuxième lieu, si M. B... fait valoir que la reprise de l'exploitation de la surface de 12,85 ha par M. A... impacte la viabilité de son exploitation agricole ainsi qu'il ressortirait de l'étude des projections de son activité, établie par l'organisme Cerfrance le 5 novembre 2019, aux termes de laquelle, qu'il maintienne ou non le nombre d'animaux composant son cheptel, le solde courant de l'exploitation sera négatif en raison de la perte d'hectares, le requérant ne conteste pas l'analyse des premiers juges, portée au point 10 du jugement en litige, selon laquelle celui-ci n'apportait pas de précisions sur l'origine professionnelle ou privée des charges à couvrir, ni sur leur montant, qui auraient permis de les prendre en compte pour évaluer la viabilité de l'exploitation. Dans ces conditions, et alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il bénéficie de revenus extra-agricoles et ne justifie pas de la baisse des revenus qu'il allègue, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la perte de surface d'exploitation en litige conduirait à rendre sa structure non viable économiquement ni, en tout état de cause, qu'elle la ferait basculer en-dessous du seuil de déclenchement de 59 hectares. Les circonstances, postérieures à l'arrêté en litige, que les aides " ICHN " et " PACS " dont il bénéficiait ont été réduites, et qu'il rencontrerait des problèmes de santé sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté.

9. Il résulte des deux points précédents que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 331-3-1 du code rural et de la pêche maritime doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions du requérant présentées sur leur fondement et dirigées contre l'Etat, qui n'est pas partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions formulées par M. A... sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. A... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à M. C... A... et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Copie en sera adressée à la préfète de la région Auvergne-Rhône-Alpes.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,

Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 janvier 2025.

La rapporteure,

Emilie FelmyLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Péroline Lanoy

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 23LY02625


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY02625
Date de la décision : 22/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-04-02 Agriculture et forêts. - Remembrement foncier agricole. - Attributions et composition des lots.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Emilie FELMY
Rapporteur public ?: Mme LORDONNE
Avocat(s) : MOINS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-22;23ly02625 ?
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