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19/12/2024 | FRANCE | N°24LY01313

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 19 décembre 2024, 24LY01313


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une part, d'ordonner la communication de l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) et de tous les éléments relatifs à la possibilité de bénéficier d'un accès effectifs aux soins, examens et traitement prescrits en Angola ainsi que tous ceux relatifs aux conditions financières d'accès à ces actes et

à ce traitement au regard du système de santé angolais, le cas échéant, après avoir consult...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une part, d'ordonner la communication de l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) et de tous les éléments relatifs à la possibilité de bénéficier d'un accès effectifs aux soins, examens et traitement prescrits en Angola ainsi que tous ceux relatifs aux conditions financières d'accès à ces actes et à ce traitement au regard du système de santé angolais, le cas échéant, après avoir consulté les services consulaires français en Angola, ou, l'ambassade de l'Angola en France, et d'autre part, d'annuler l'arrêté du 29 juin 2023 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office.

Par un jugement n° 2302060 du 5 avril 2024, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 6 mai 2024, Mme C... représentée par l'AARPI Ad'Vocare Avocats, agissant par Me Bourg, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

3°) à titre subsidiaire, de réformer le jugement attaqué ;

4°) d'ordonner la communication de l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;

5°) d'ordonner la communication de tous les éléments relatifs à la possibilité de bénéficier d'un accès effectif aux soins, examens et traitements prescrits en Angola ainsi que tous ceux relatifs aux conditions financières d'accès à ces actes et à ce traitement au regard du système de santé angolais, le cas échéant, après avoir consulté les services consulaires français en Angola, ou, l'ambassade de l'Angola en France ;

6°) d'annuler les décisions du 29 juin 2023 par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office ;

7°) d'enjoindre au préfet du Puy-de-Dôme, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour pour raison de santé dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt et, en tout état de cause, de lui remettre une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt ;

8°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- le tribunal a omis de viser la demande d'injonction de communication de tous les éléments relatifs à l'accès aux soins dans le pays d'origine ;

- le tribunal a omis de statuer sur les deux demandes d'instruction, et par suite a insuffisamment motivé son jugement ;

- le tribunal a entaché son jugement d'un défaut d'examen suffisant des pièces médicales qui lui étaient produites, en a dénaturé le contenu et a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'a pas été précédée d'un examen réel et complet de sa situation.

La procédure a été communiquée au préfet du Puy-de-Dôme qui n'a pas produit de conclusions.

Par une ordonnance du 5 juillet 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 22 juillet 2024.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 juillet 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Haïli, président-assesseur, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Par la présente requête, Mme C..., de nationalité angolaise, relève appel du jugement susvisé par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 juin 2023 par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, le tribunal peut demander aux parties toutes pièces ou tous documents utiles à la solution du litige, une telle demande constituant une simple faculté pour le juge. Si l'appelante a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand que soit ordonnée la communication de l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège de médecins de l'OFII ainsi que de tous les éléments relatifs à la possibilité de bénéficier d'un accès effectif et financier aux soins, examens et traitements prescrits en Angola, il ressort des points 8 et 17 du jugement contesté que le tribunal administratif a estimé qu'il pouvait statuer dans l'appréciation de la situation de l'intéressée au regard des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans qu'il soit besoin de prendre une mesure supplémentaire d'instruction. En particulier, il s'évince du jugement en litige que les premiers juges se sont estimés suffisamment éclairés par les pièces déjà versées au dossier et pouvaient ne pas demander la communication de l'entier dossier médical au vu duquel le collège des médecins a émis l'avis du 17 avril 2023 ou les sources documentaires pour apprécier notamment la disponibilité effective d'un traitement en Angola et ont suffisamment motivé leur réponse à cette demande de supplément d'instruction aux points 8 et 17 du jugement attaqué. Il résulte de ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à soutenir qu'en ne faisant pas usage de leurs pouvoirs d'instruction les premiers juges ont entaché leur jugement d'une irrégularité.

3. En second lieu, hormis dans le cas où les juges de première instance ont méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à eux et ont ainsi entaché leur jugement d'irrégularité, il appartient au juge d'appel de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Si la requérante soutient que le jugement attaqué est entaché d'un défaut d'examen suffisant des pièces, d'une dénaturation des pièces produites, et d'une erreur d'appréciation, ces moyens se rattachent au bien-fondé de ce jugement et non à sa régularité.

Sur la légalité de la décision :

4. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ".

5. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dont il peut effectivement bénéficier dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires et des éventuelles mesures d'instruction qu'il peut toujours ordonner.

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... a été blessée par balle dans son pays d'origine, en a conservé une paralysie cubitale gauche, ainsi qu'une amyotrophie des interosseux gauches et que son état a imposé plusieurs interventions chirurgicales jusqu'en 2019, l'astreignant depuis lors à un suivi médical régulier et à un traitement anti douleur. En outre, l'appelante fait valoir que le 27 juin 2023, elle s'est vue diagnostiquer une bursopathie sous-acromiale, nécessitant des injections et un traitement supplémentaire.

7. Pour refuser d'admettre Mme C... au séjour, le préfet du Puy-de-Dôme s'est notamment appuyé sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 17 avril 2023 indiquant notamment que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut de prise en charge peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'elle peut néanmoins effectivement bénéficier d'un traitement dans son pays d'origine, vers lequel elle pouvait voyager sans risque. A l'appui de sa requête, l'appelante se borne à faire état des prescriptions médicales, de certificats médicaux et des comptes-rendus médicaux dont elle fait l'objet, qui ne se prononcent pas sur l'accès à ces traitements dans son pays d'origine, puis à exposer une description du système de santé angolais établis par les ministères des affaires étrangères canadiens et français ainsi que par le groupe Allianz care et le site internet pharmacie-espérance.fr. Toutefois, ces éléments insuffisamment circonstanciés, ne sont pas de nature à infirmer l'appréciation du collège des médecins de l'OFII selon laquelle Mme C... peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié à ses pathologies dans son pays d'origine. Par ailleurs, si la requérante fait valoir que ses pathologies et son état de stress post-traumatique sont liés à son agression en Angola, les pièces médicales versées au dossier ne mettent pas en exergue les raisons pour lesquelles un éloignement vers l'Angola présenterait un risque particulier du fait d'une pathologie trouvant son origine dans des évènements survenus dans ce pays. Par suite, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il n'aurait pas procédé à un examen sérieux et complet de sa situation médicale, le préfet du Puy-de-Dôme a pu retenir à bon droit que Mme C... pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont elle est ressortissante l'Angola. Par conséquent, et sans qu'il soit besoin d'ordonner un supplément d'instruction, les moyens tirés de l'erreur de droit et de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

8. Si la requérante demande à la cour l'annulation des décisions du 29 juin 2023 par lesquelles le préfet du Puy-de-Dôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office, les moyens qu'elle invoque dans sa requête sont uniquement dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour et l'appelante n'articule aucun autre moyen propre à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre les deux autres décisions. Par suite, les conclusions à fin d'annulation desdites décisions ne peuvent être que rejetées.

9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner à la partie intimée la communication des documents sollicités, que l'appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles qu'elle présente au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Haïli, président-assesseur,

M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 décembre 2024.

Le rapporteur,

X. Haïli

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY01313


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY01313
Date de la décision : 19/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Xavier HAILI
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : AD'VOCARE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-19;24ly01313 ?
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