Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 23 août 2023 par lequel le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois.
Par jugement n° 2307792 du 1er février 2024, le tribunal a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 22 février 2024, M. B..., représenté par la SELARL BS2A, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement et l'arrêté litigieux ;
2°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- la limitation à trente jours du délai de départ volontaire est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la fixation du pays de destination est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour, de l'obligation de quitter le territoire français et de la fixation du délai de départ volontaire ;
- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- son principe et sa durée sont excessifs.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bertrand Savouré,
- et les observations de Me Sabatier pour M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant bosnien, relève appel du jugement du 1er février 2024 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
2. En premier lieu, et d'une part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ", tandis qu'aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale " (...) Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour (...) ".
4. M. B... fait valoir qu'il est présent en France depuis huit ans à la date de l'arrêté litigieux, qu'il est bien intégré, qu'aucun de ses six enfants ne vit en Bosnie et que quatre d'entre eux vivent en France et ont acquis la nationalité française, de sorte qu'étant veuf, il serait isolé dans son pays d'origine. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il n'a jamais séjourné régulièrement en France et n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 66 ans. Dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour contestée n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 423-23 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle au regard de l'article L. 435-1 précité du même code.
5. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité du refus de titre de séjour pour contester l'obligation de quitter le territoire français qui l'assortit. Il n'est pas davantage fondé à invoquer l'illégalité de ces deux décisions pour contester le délai de départ volontaire, la fixation du pays de destination et l'interdiction de retour.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du même code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui n'a jamais séjourné régulièrement en France et a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 66 ans, a précédemment fait l'objet d'une mesure d'éloignement qui lui a été notifiée le 16 juin 2018. Dans ces conditions, le préfet a pu sans méconnaître les dispositions précitées édicter à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français, pour une durée de six mois qui n'est pas, dans les circonstances de l'espèce, disproportionnée.
8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
9. Le présent arrêt rejetant les conclusions à fin d'annulation de M. B... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 28 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,
Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,
M. Bertrand Savouré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2024.
Le rapporteur,
B. SavouréLe président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
F. Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 24LY00499