Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. G... A... et Mme D... F... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 6 août 2019 par lequel le maire de la commune de La Chapelle-du-Mont-du-Chat a délivré un permis de construire n° PC 073 076 19C1001 à M. C... H... et Mme B... E... pour la construction d'une maison individuelle avec entrepôt et de deux bâtiments abritant des gîtes, sur un terrain situé lieudit " Croizerbou " sur le territoire de cette commune, et la décision du 21 novembre 2019 rejetant leur recours gracieux dirigé contre cet arrêté.
Par un jugement n° 2000392 du 30 mai 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 29 juillet 2022, M. A... et Mme F..., représentés par Me Degrange, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 30 mai 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 août 2019 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de La-Chapelle-du-Mont-du-Chat le versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur requête est recevable ;
- l'arrêté du 6 août 2019 méconnaît les dispositions du point 3.2.2 de l'article UD 3 du plan d'occupation des sols (POS) de la commune, en ce que la voie d'accès au terrain ne présente pas une largeur de quatre mètres et qu'aucune plate-forme de retournement n'est prévue ;
- l'arrêté méconnaît les dispositions du point 3.3 de l'article UD 3 du POS, en ce que le projet ne prévoit pas de cheminement piéton ;
- il méconnaît les dispositions du point 4.2.4 de l'article UD 4 du POS, en ce que le projet de gîtes, qui constitue une activité commerciale en tant qu'activité d'hébergement hôtelier, ne prévoit pas de pré-traitement des eaux usées et qu'aucune autorisation de rejet n'est jointe au dossier ;
- il méconnaît les dispositions du point 4.3 de l'article UD 4 du POS, en ce que le projet de bassin de rétention est situé à moins de quatre mètres de la construction et qu'il est insuffisant au regard de l'ampleur du projet de constructions ;
- il méconnaît les dispositions de l'article UD 10 du POS, en ce que le projet de maison d'habitation présente une hauteur supérieure à sept mètres.
Par un mémoire enregistré le 30 septembre 2022, la commune de La Chapelle-du-Mont-du-Chat, représentée par Me Lacroix (SELARL Itinéraires Avocats), conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce qu'il soit fait application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de justice administrative et à ce que soit mis à la charge de M. A... et Mme F... le versement d'une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête de première instance est irrecevable, faute d'intérêt pour agir des requérants, qui ne subiront aucun trouble de jouissance de leur bien du fait du projet, séparé de leur maison d'habitation par un écran végétal d'arbres à haute tige, implanté à une distance de près de quarante mètres pour la construction la plus proche et orienté vers le sud ;
- les moyens tirés de la méconnaissance de l'article UD 3 du POS sont inopérants ;
- les conditions d'accès au projet ne présentent pas de dangerosité ;
- les moyens tirés de la méconnaissance de l'article UD 4 du POS sont inopérants ou infondés ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UD 10 du POS est infondé ;
- à titre subsidiaire, il pourra être fait application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de justice administrative.
Par ordonnance du 29 mai 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 juin 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Maubon, première conseillère,
- les conclusions de Mme Djebiri, rapporteure publique,
- et les observations de Me Plénet, représentant la commune de La Chapelle-du-Mont-du-Chat.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... et Mme F... relèvent appel du jugement du 30 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 août 2019 par lequel le maire de la commune de La Chapelle-du-Mont-du-Chat (Savoie) a délivré un permis de construire n° PC 073 076 19C1001 à M. C... H... et Mme B... E... pour la construction d'une maison individuelle, d'un entrepôt et de gîtes au lieudit " Croizerbou ", sur des parcelles cadastrées section ... sur le territoire de cette commune.
2. En premier lieu, aux termes de l'article UD 3 du règlement du plan d'occupation des sols (POS) de la commune de La Chapelle-du-Mont-du-Chat, maintenu en vigueur dès lors que la communauté d'agglomération Grand lac, à laquelle appartient la commune, avait engagé une procédure d'élaboration d'un plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) par une délibération du 19 novembre 2014 : " 3.1 Accès / 3.1.1. Tout terrain enclavé est inconstructible à moins que son propriétaire ne produise une servitude de passage suffisante (...). / 3.1.2. L'autorisation de construire peut être refusée pour les projets dont les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant les accès. / 3.1.3. Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique. / 3.2. Voirie / 3.2.1. Les voies privées doivent avoir des caractéristiques adaptées à l'approche du matériel de lutte contre l'incendie, aux exigences de la protection civile, au brancardage, au déneigement. / 3.2.2. Les dimensions, formes et caractéristiques techniques des voies privées doivent être adaptées aux usages qu'elles supportent ou aux opérations qu'elles doivent desservir. La plate-forme (chaussée + accotement) doit être de 4 mètres minimum et 5 mètres minimum à partir de 5 logements. / 3.2.3. Les voies privées se terminant en impasse doivent être aménagées de telle sorte que les véhicules de service public en particulier, puissent faire demi-tour. / 3.3. Voies piétonnes / Dans le cadre d'opération d'ensemble, des cheminements piétons devront être prévus ".
3. Le projet prévoit la construction, sur un terrain actuellement non bâti et boisé d'une superficie totale de 11 065 m², de plusieurs bâtiments : au nord du terrain, un bâtiment comportant au rez-de-chaussée un entrepôt artisanal de 171 m² et au premier étage deux gîtes (T2 et T3), à l'ouest un gîte (T3) semi-enterré, et au sud une maison d'habitation de type T6 sur deux niveaux, pour une surface de plancher totale créée de 617 m². L'accès au terrain se fait par le nord, au bénéfice d'une servitude de passage tous usages, instaurée conventionnellement sur la parcelle cadastrée section ..., propriété des requérants, au bénéfice des parcelles cadastrées section .... Il ressort des photographies produites que cette servitude de passage est à l'état de chemin. Selon le plan de masse daté du 16 mai 2019 figurant au dossier, un cheminement en enrobé est prévu, à partir de cette voie d'accès pour permettre la desserte du premier bâtiment d'une part et celle de la maison d'autre part.
4. D'une part, les requérants estiment que la voie de desserte du projet n'est pas conforme aux dispositions du 3.2. de l'article UD 3 du POS. Il ressort des pièces du dossier qu'il s'agit d'un chemin non bitumé, parallèle à la route départementale, séparé de celle-ci par un mur de soutènement, et traversant la propriété de M. A... et Mme F... au bénéfice d'une servitude de passage, établie sur une bande d'une largeur de cinq mètres selon l'acte de constitution de servitude du 7 septembre 2018 produit par les requérants. Toutefois, le chemin dont s'agit ne constitue pas une voie privée nouvelle prévue par le projet, dont le terrain d'assiette est constitué des seules parcelles cadastrées section ..., à l'exclusion de la parcelle cadastrée section ..., propriété des requérants. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 3.2. de l'article UD 3 du POS ne peut qu'être écarté comme inopérant.
5. D'autre part, le projet autorisé par l'arrêté contesté prévoit la création de trois bâtiments situés sur un même tènement, non divisé, et qui n'ont pas vocation à être cédés à un tiers à l'issue des travaux, le formulaire de demande précisant que les modes d'utilisation des logements seront l'occupation personnelle et la location. Ainsi, le projet ne constitue pas une opération d'ensemble au sens du 3.3 de l'article UD 3 du règlement du POS imposant la réalisation de cheminements piétons. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 3.3. de l'article UD 3 du POS ne peut dès lors qu'être écarté comme inopérant.
6. Enfin, l'accès au projet depuis la route départementale se fait, ainsi qu'il a été décrit, au bénéfice d'une servitude de passage établie sur la propriété des requérants sous la forme d'un chemin débouchant à angle droit sur cette route. M. A... et Mme F... estiment que ce chemin situé à l'entrée d'une courbe " présente des signes évidents de dangerosité compte tenu de sa configuration ", sans davantage de précisions. Cependant, il ressort des pièces du dossier que cet accès, déjà utilisé pour accéder à la propriété des requérants, est suffisamment large pour accueillir deux véhicules et offre une visibilité suffisante. Ainsi la configuration de cet accès, qui ne présente aucune dangerosité particulière, est adaptée à l'objet de l'opération, qui n'engendrera qu'une hausse limitée de la fréquentation du chemin. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 3.1. de l'article UD 3 du POS ne peut dès lors qu'être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes du quatrième paragraphe du point 4.2. " Eaux usées " de l'article UD 4 " Desserte par les réseaux " du règlement du POS : " L'évacuation des eaux usées liées aux activités artisanales, commerciales ou industrielles dans le réseau public d'assainissement doit être subordonnée à un prétraitement approprié, et à une autorisation de rejet. "
8. Il ressort des pièces du dossier que l'une des activités exercées dans les constructions projetées consistera en la location de trois gîtes, de respectivement quatre, quatre et deux couchages. A supposer que l'ensemble des gîtes soit occupé, et alors que leur usage ne tend qu'à l'habitation, cette activité limitée ne générera pas d'eaux usées nécessitant un traitement spécifique ni une autorisation de rejet. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du point 4.2.4. de l'article UD 4 du règlement du POS doit être écarté.
9. En troisième lieu, aux termes du point 4.3. " Eaux pluviales " de l'article UD 4 " Desserte par les réseaux " du règlement du POS : " Des mesures devront être prises pour limiter l'imperméabilisation des sols et pour assurer la maîtrise des débits, de l'écoulement des eaux pluviales et de ruissellement des parcelles. (...) / L'objectif est de limiter les surfaces imperméabilisées (...) / En cas d'absence d'un réseau public d'évacuation des eaux pluviales : / Le constructeur devra ainsi réaliser les dispositifs appropriés (type tranchée draînante, puit filtrant...) pour limiter les rejets en eaux pluviales avec interdiction absolue de rejet dans le collecteur des eaux usées. / (...) ". Il ressort de la notice descriptive que le projet prévoit une gestion des eaux pluviales sur la parcelle, avec création d'un bassin de rétention. Une étude géologique réalisée le 30 janvier 2019 jointe au dossier conclut dans un sens favorable à l'infiltration des eaux pluviales, au moyen d'une cuve de rétention avec rejet régulé dans une tranchée d'infiltration, et le plan de masse figure un " bac de rétention " à proximité de la maison d'habitation. D'une part, si l'étude géologique " recommande " de positionner les dispositifs d'infiltration des eaux pluviales à plus de quatre mètres des ouvrages, les requérants n'invoquent aucune disposition législative ou réglementaire qui serait opposable au projet et lui imposerait de respecter cette distance minimale, qui n'est au demeurant qu'indicative. D'autre part, en se bornant à " légitimement s'interroger sur la suffisance d'un seul bassin de rétention " pour les constructions envisagées, sans apporter aucun élément de nature à faire présumer cette insuffisance, les requérants n'établissent pas que le projet méconnaîtrait les dispositions précitées, qui imposent la réalisation de dispositifs appropriés pour limiter les rejets en eaux pluviales. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UD 4.3. du règlement du POS ne peut qu'être écarté en toutes ses branches.
10. En quatrième lieu, aux termes de l'article UD 10 du règlement du POS : " Pour les constructions principales / La hauteur est définie comme la différence de niveau entre tout point de la construction et le sol à son aplomb et elle est mesurée entre : - l'égout de toiture (ou l'acrotère) et le terrain aménagé après travaux si celui-ci est plus bas que le terrain naturel d'origine / - l'égout de toiture (ou l'acrotère) et le terrain naturel dans le cas contraire. Les ouvrages techniques, cheminées, croupes, jacobines et autres superstructures ne sont pas pris en compte. / La hauteur des constructions nouvelles ne peut excéder 6 m sauf en cas de toiture terrasse où la hauteur maximale est de 7 m. / (...) ".
11. Il ressort des pièces du dossier que la construction la plus haute est la maison d'habitation, érigée sur deux niveaux avec toitures terrasses, le second niveau étant implanté en retrait du premier afin de s'adapter à la pente importante du terrain naturel. Selon le plan de la façade sud de cette construction, la hauteur entre l'acrotère de la terrasse du second niveau, qui sert de toiture au premier niveau, et le terrain naturel situé à l'aplomb est de 5,99 mètres et la hauteur entre la toiture du second niveau et le terrain naturel situé à l'aplomb est de 6,99 mètres. Les requérants, qui se prévalent d'une hauteur de la construction calculée en déduisant l'altitude de la toiture du second niveau à l'altitude du terrain naturel au point le plus bas à l'aplomb de la façade du premier niveau, alors que ces deux points ne sont pas situés à l'aplomb, ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté portant permis de construire méconnaîtrait l'article UD 10 du règlement du POS.
12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. A... et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. "
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par M. A... et Mme F... soit mise à la charge de la commune de La-Chapelle-du-Mont-du-Chat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
15. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de M. A... et Mme F... une somme de 2 000 euros à verser à la commune de La-Chapelle-du-Mont-du-Chat sur le fondement de ces dispositions.
DÉ C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... et Mme F... est rejetée.
Article 2 : M. A... et Mme F... verseront 2 000 euros à la commune de La-Chapelle-du-Mont-du-Chat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... A..., à Mme D... F..., à la commune de La-Chapelle-du-Mont-du-Chat et à M. C... H... et Mme B... E....
Délibéré après l'audience du 4 décembre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Anne-Gaëlle Mauclair, présidente de la formation de jugement,
M. Bernard Gros, premier conseiller,
Mme Gabrielle Maubon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 décembre 2024.
La rapporteure,
G. MaubonLa présidente,
A.-G. Mauclair
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au préfet de la Savoie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N° 22LY02442 2