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12/12/2024 | FRANCE | N°24LY00187

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 5ème chambre, 12 décembre 2024, 24LY00187


Vu la procédure suivante :



M. C... H..., Mme U... H..., M. P... G..., Mme AB... G..., M. Y... Q..., M. N... W..., Mme M... W..., M. AA... Z..., Mme R... Z..., M. F... T..., Mme AC... T..., M. AD... I..., Mme S... O..., M. AA... A..., Mme D... A..., M. J... V..., M. B... L..., Mme E... L..., Mme X... K..., représentés par Me Vaysse (Cabinet Lagoa), ont demandé au tribunal administratif de Lyon, par une demande enregistrée le 27 février 2023 sous le numéro 23LY01647, d'annuler l'arrêté PC 069 266 21 00121 du 19 septembre 2022 par lequel le maire de Villeurbanne a a

ccordé un permis de construire valant autorisation d'exploitation co...

Vu la procédure suivante :

M. C... H..., Mme U... H..., M. P... G..., Mme AB... G..., M. Y... Q..., M. N... W..., Mme M... W..., M. AA... Z..., Mme R... Z..., M. F... T..., Mme AC... T..., M. AD... I..., Mme S... O..., M. AA... A..., Mme D... A..., M. J... V..., M. B... L..., Mme E... L..., Mme X... K..., représentés par Me Vaysse (Cabinet Lagoa), ont demandé au tribunal administratif de Lyon, par une demande enregistrée le 27 février 2023 sous le numéro 23LY01647, d'annuler l'arrêté PC 069 266 21 00121 du 19 septembre 2022 par lequel le maire de Villeurbanne a accordé un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale à la société Rhône Saône Habitat en vue de la construction de sept bâtiments représentant une surface de plancher global de 18 043 m² à Villeurbanne (Rhône) ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux.

Par une ordonnance du 24 janvier 2024, le tribunal administratif de Lyon s'est déclaré incompétent sur le fondement de l'article R. 351-3 du code de justice administrative pour juger la requête et l'a renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.

Par des mémoires, enregistrés sous le numéro 24LY00187, le 4 avril 2024, le 2 mai 2024 et le 13 mai 2024, M. H... et autres représentés par Me Vaysse (Cabinet Lagoa), demandent à la cour dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler l'arrêté PC 069 266 21 00121 du 19 septembre 2022 par lequel le maire de Villeurbanne a accordé un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale à la société Rhône Saône Habitat en vue de la construction de 7 bâtiments représentant une surface de plancher global de 18 043 m² à Villeurbanne ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Villeurbanne et de la société Rhône Saône habitat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils justifient d'un intérêt à agir ;

- les membres de la Commission départementale d'aménagement commercial ont été irrégulièrement convoqués ;

- l'avis émis par l'architecte des bâtiments de France est irrégulier ;

- le projet n'a fait l'objet ni d'une étude d'impact ni d'un avis de l'autorité environnementale, ce qui rend la procédure irrégulière ;

- l'avis de l'autorité environnementale émis le 9 février 2022 est irrégulier, dans la mesure où il n'est pas signé, ne se prononce pas sur les trames verte et bleue et ne porte que sur un des ilots composant la zone d'aménagement concerté ;

- le dossier du projet d'aménagement de la zone a été irrégulièrement fractionné en trois dossiers de permis de construire ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions du règlement du secteur 3 de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine des Gratte-Ciel de Villeurbanne ;

- il méconnaît l'orientation d'aménagement et de programmation n° 4 du plan local d'urbanisme et de l'habitat (PLU-H) de la métropole de Lyon- ;

- il méconnaît le chapitre V de la partie I du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît les règles de retrait posées à l'article 2.1.3 du règlement de la zone Upr4 ;

- il méconnaît les règles posées à l'article 5.2 du règlement de la zone Upr4 s'agissant des places de stationnement ;

- il méconnaît les dispositions relatives aux trames verte et bleue et les règles relatives à la nature en ville.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 janvier 2024, le 5 février 2024 et le 21 mai 2024, la commune de Villeurbanne, représentée par Me Petit (Selarlu Jean-Marc Petit-avocat) conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire à ce qu'il soit sursis à statuer en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et demande à la cour que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, les requérants ne justifiant pas d'un intérêt à agir ;

- le moyen tiré de ce que l'avis de la Commission nationale d'urbanisme commercial serait irrégulier est inopérant à l'encontre de l'arrêté litigieux en tant qu'il vaut autorisation de construire ;

- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par des mémoires enregistrés le 30 janvier 2024 et le 15 mai 2024, la société Rhône Saône Habitat, représentée par Me Bornard (Cabinet Léga cité avocats), conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial est irrecevable ;

- les moyens développés par les requérants dans le mémoire du 27 juin 2023 sont irrecevables ;

- les autres moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code du patrimoine ;

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Soubié, première conseillère,

- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,

- et les observations de Me Temps, représentant la commune de Villeurbanne, et de Me Couderc, représentant la société Rhône Saône Habitat.

Considérant ce qui suit :

1. La société Rhône Saône Habitat a sollicité, le 22 décembre 2021, la délivrance d'un permis de construire, valant également autorisation d'exploitation commerciale, pour la construction d'un ensemble immobilier de sept bâtiments composés de logements, de bureaux, de commerces et d'une crèche sur le terrain constituant le macro-lot C de la zone d'aménagement concerté Gratte-ciel Nord, à Villeurbanne. Le maire de Villeurbanne a délivré le permis de construire sollicité le 19 septembre 2022. M. H... et plusieurs résidents de l'immeuble situé 131-133 rue Francis de Pressensé à Villeurbanne ont formé un recours gracieux à l'encontre de ce permis de construire, le 2 décembre 2022. Ce recours a été rejeté le 26 décembre 2022. Les requérants demandent à la cour d'annuler le permis de construire et la décision rejetant leur recours gracieux.

Sur la recevabilité de la requête :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation (...). ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci.

3. Les requérants sont propriétaires d'appartements situés en face du terrain d'assiette du projet de la société Rhône Saône Habitat et dont ils ne sont séparés que par la largeur de la chaussée existante. Leur appartement se trouve en vis-à-vis avec à tout le moins l'un des immeubles projetés, qui dépassera leur immeuble de plusieurs mètres. Les requérants font état de la perte d'ensoleillement qu'ils vont subir suite à la construction de l'ensemble immobilier en cause, notamment ceux habitant dans les premiers étages de l'immeuble, de l'apparition d'un vis-à-vis qui n'existait pas préalablement, de l'apparition de nuisances liées à l'augmentation du nombre de résidents et à la clientèle des nouveaux commerces créés dans leur quartier et enfin des troubles occasionnés par les travaux. Dans ces conditions, ils établissent suffisamment l'atteinte à leurs conditions d'occupation et de jouissance de leur bien résultant de la construction de l'ensemble immobilier sur le macro-lot C de la ZAC des Gratte-ciel. Par suite, la fin de non-recevoir opposée en défense à leurs conclusions dirigées contre l'arrêté contesté en tant qu'il vaut autorisation de construire doit être écartée.

4. En revanche, les dispositions du code de commerce et du code de l'urbanisme constituant des législations indépendantes et répondant à des finalités distinctes, les requérants ne disposent d'aucun intérêt pour agir à l'encontre de l'arrêté contesté en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale. Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L. 600-1-4 et L. 425-4 du code de l'urbanisme que des moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du code de commerce ne peuvent être utilement invoqués à l'appui d'une requête dirigée contre un permis relevant de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme en tant qu'il vaut autorisation de construire.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté contesté en tant qu'il vaut autorisation de construire :

En ce qui concerne la recevabilité des moyens présentés dans le mémoire en réplique du 27 juin 2023 :

5. Aux termes de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative. / Le président de la formation de jugement, ou le magistrat qu'il désigne à cet effet, peut, à tout moment, fixer une nouvelle date de cristallisation des moyens lorsque le jugement de l'affaire le justifie (...) ". Aux termes de l'article R. 611-8-2 du code de justice administrative : " Les parties sont réputées avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été adressé par voie électronique, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties sont alertées de toute nouvelle communication ou notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par elles. (...). ".

6. Il ressort des pièces du dossier que le premier mémoire en défense présenté par la société Rhône Saône Habitat a été enregistré au greffe du tribunal administratif de Lyon le 25 avril 2023 et a été mis à disposition des parties le 27 avril 2023. Le conseil des requérants a consulté le mémoire le 18 mai 2023, soit au-delà du délai de deux jours fixé par l'article R. 811-8-2 précité. Dans ces conditions, à la date du 27 juin 2023, le délai durant lequel les requérants pouvaient présenter de nouveaux moyens n'était pas expiré. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la société Rhône Saône Habitat aux nouveaux moyens présentés par les requérants dans leur mémoire du 27 juin 2023 ne peut qu'être écartée.

En ce qui concerne la procédure de délivrance du permis de construire :

7. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 4, les requérants ne peuvent utilement soutenir que la procédure suivie par la commission départementale d'aménagement commercial aurait été irrégulière.

8. En deuxième lieu, l'article R*425-1 du code de l'urbanisme prévoit que " Lorsque le projet est situé dans les abords des monuments historiques, le permis de construire, le permis d'aménager, le permis de démolir ou la décision prise sur la déclaration préalable tient lieu de l'autorisation prévue à l'article L. 621-32 du code du patrimoine si l'architecte des Bâtiments de France a donné son accord, le cas échéant assorti de prescriptions motivées, ou son avis pour les projets mentionnés à l'article L. 632-2-1 du code du patrimoine. "

9. Il ressort des pièces du dossier que le projet de construction est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable. L'architecte des bâtiments de France sollicité au cours de l'instruction du dossier de demande de permis de construire a, contrairement à ce que soutiennent les requérants, donné un avis favorable au projet, quand bien même il l'a assorti de prescriptions sur les matériaux et les couleurs à utiliser, d'ailleurs reprises dans l'arrêté de permis de construire. La circonstance que l'avis comporte de telles prescriptions visant à assurer l'insertion du projet dans le site patrimonial remarquable ne saurait conduire à le faire regarder comme irrégulier. Par suite, le moyen doit être écarté.

10. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 431-16 du code de l'urbanisme : " Le dossier joint à la demande de permis de construire comprend en outre, selon les cas : / a) l'étude d'impact ou la décision de l'autorité environnementale dispensant le projet d'évaluation environnementale lorsque le projet relève du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement (...) " et aux termes du I de cet article : " Les projets relevant d'une ou plusieurs rubriques énumérées dans le tableau annexé au présent article font l'objet d'une évaluation environnementale, de façon systématique ou après un examen au cas par cas ( ...) en fonction des critères et des seuils fixés dans ce tableau ". La rubrique 39 du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement prévoit que les " Opérations d'aménagement dont le terrain d'assiette est compris entre 5 et 10 ha, ou dont la surface de plancher au sens de l'article R. 111-22 du code de l'urbanisme ou l'emprise au sol au sens de l'article R. * 420-1 du même code est supérieure ou égale à 10 000 m². " sont soumises à la procédure d'examen au " cas par cas ".

11. Il ressort des pièces du dossier que l'autorité environnementale a estimé que le projet ne nécessitait pas d'évaluation environnementale, dès lors qu'il s'inscrit dans une zone d'aménagement concerté sur laquelle elle s'est déjà prononcée en 2010 et 2013. Si les requérants ont soulevé le moyen tiré de l'irrégularité de cet avis, d'ailleurs plus de deux mois après la production du premier mémoire en défense, cet avis comporte, en tout état de cause, la signature de son auteur, et la cartographie de la trame verte et bleue ne fait apparaître aucun réservoir ou espace relais, pas plus qu'un corridor écologique à proximité immédiate du terrain d'assiette du projet, de sorte que l'autorité environnementale a pu s'abstenir régulièrement de mentionner cette trame, après avoir au surplus relevé que le terrain n'était recouvert quasiment d'aucune végétation et que la faune y était peu présente attestant ainsi de la prise en compte des enjeux environnementaux sur le site d'implantation de l'ensemble immobilier. De plus, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'avis de l'autorité environnementale mentionne la surface de la parcelle d'assiette du projet et la surface des constructions projetées. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de l'autorité environnementale doit, en tout état de cause, être écarté, ainsi qu'en tout état de cause celui tiré de l'absence d'étude d'impact.

12. En quatrième lieu, s'il résulte des dispositions de l'article L. 423-1 du code de l'urbanisme qu'une construction constituée de plusieurs éléments formant, en raison des liens physiques ou fonctionnels entre eux, un ensemble immobilier unique, doit en principe faire l'objet d'un seul permis de construire, elles ne font pas obstacle à ce que, lorsque l'ampleur et la complexité du projet le justifient, notamment en cas d'intervention de plusieurs maîtres d'ouvrage, les éléments de la construction ayant une vocation fonctionnelle autonome puissent faire l'objet de permis distincts, sous réserve que l'autorité administrative ait vérifié, par une appréciation globale, que le respect des règles et la protection des intérêts généraux que garantirait un permis unique sont assurés par l'ensemble des permis délivrés.

13. Il ressort des pièces du dossier que, l'ensemble immobilier en cause est un élément du programme d'aménagement de la zone " Gratte-ciel Nord ". Cette zone d'aménagement concerté tend à la création d'un lycée, d'un groupe scolaire de vingt classes, d'un équipement " petite enfance ", d'un équipement sportif, de 60 000 m² de surface de plancher destinés au logement, de locaux destinés au commerce et aux services pour une surface de 27 000 m² notamment, qui seront répartis sur quatre macro-lots. Si cette opération a donné lieu à une conception globale, la zone d'aménagement concerté " Gratte-ciel nord " se compose de lots immobiliers distincts qui ont chacun une vocation fonctionnelle autonome, quand bien même l'aire de stationnement en silo à construire sur le macro-lot B peut servir aux commerces à construire sur le macro-lot C et constitue une opération de grande ampleur et complexe. Par ailleurs, les demandes de permis de construire, notamment pour les macro-lots B et C déposées respectivement le 21 décembre 2021 et le 13 janvier 2022, étaient accompagnées d'un dossier présentant l'opération dans son ensemble. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de Villeurbanne n'aurait pas été en mesure, du fait du dépôt de demandes distinctes, de porter une appréciation globale sur le respect des règles et la protection des intérêts généraux dont il a la charge. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'opération aurait dû faire l'objet d'une seule demande et d'un permis de construire unique doit être écarté.

14. En cinquième lieu, si le règlement du secteur 3 de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine du site " Gratte-Ciel ", incluse dans les annexes du PLU-H relatives aux servitudes d'utilité publique, impose des prescriptions sur les matériaux et couleurs utilisables pour les constructions réalisées dans l'aire de mise en valeur, le permis de construire attaqué est assorti de prescriptions spécifiques sur les matériaux et les couleurs issues de l'avis de l'architecte des bâtiments de France, lequel, ainsi qu'il a déjà été dit plus haut, pouvait assortir son avis favorable de telles prescriptions. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du règlement de l'aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine au motif de l'irrégularité de l'avis de l'architecte des bâtiments de France, doit être écarté.

15. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 151-2 du code de l'urbanisme : " Le plan local d'urbanisme comprend : / (...) 3° Des orientations d'aménagement et de programmation ; (...) ". Aux termes de l'article L. 151-6 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les orientations d'aménagement et de programmation comprennent, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, des dispositions portant sur l'aménagement, l'habitat, les transports, les déplacements (...). ". Aux termes, enfin, de l'article L. 151-7 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Les orientations d'aménagement et de programmation peuvent notamment : / 1° Définir les actions et opérations nécessaires pour mettre en valeur l'environnement, notamment les continuités écologiques, les paysages, les entrées de villes et le patrimoine, lutter contre l'insalubrité, permettre le renouvellement urbain, favoriser la densification et assurer le développement de la commune ; / 2° Favoriser la mixité fonctionnelle en prévoyant qu'en cas de réalisation d'opérations d'aménagement, de construction ou de réhabilitation un pourcentage de ces opérations est destiné à la réalisation de commerces ; / 3° Comporter un échéancier prévisionnel de l'ouverture à l'urbanisation des zones à urbaniser et de la réalisation des équipements correspondants ; / 4° Porter sur des quartiers ou des secteurs à mettre en valeur, réhabiliter, restructurer ou aménager ; / 5° Prendre la forme de schémas d'aménagement et préciser les principales caractéristiques des voies et espaces publics ; / 6° Adapter la délimitation des périmètres, en fonction de la qualité de la desserte, où s'applique le plafonnement à proximité des transports prévu aux articles L. 151-35 et L. 151-36. (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'une autorisation d'urbanisme ne peut être légalement délivrée si les travaux qu'elle prévoit sont incompatibles avec les orientations d'aménagement et de programmation d'un plan local d'urbanisme et, en particulier, en contrarient les objectifs.

16. L'orientation d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme et de l'habitat (PLU-H) de la métropole de Lyon relative au développement du quartier " Gratte-ciel " précise que les constructions devront être réalisées selon une architecture dite en gradins. Il ressort du dossier de demande de permis de construire que les immeubles à construire sur le macro-lot C présenteront une forme de type pyramidal, permettant de favoriser l'ensoleillement aux différents niveaux des immeubles. Si les gradins créés par cette forme pyramidale sont, sur certaines façades, d'une profondeur assez modeste et ne débutent qu'à mi-hauteur des constructions, il n'en demeure pas moins que ces dernières, dans leur ensemble, prennent en compte l'objectif d'une architecture en gradins, de sorte que le projet ne contrarie pas la réalisation des objectifs poursuivis par l'orientation déjà mentionnée. Les constructions envisagées ne sont ainsi pas incompatibles avec cette orientation d'aménagement et de programmation.

17. En septième lieu, les requérants font valoir que la voie d'accès au futur ensemble immobilier ne répond pas aux exigences du chapitre V de la partie I du règlement du PLU-H de la métropole de Lyon, selon lesquelles notamment les voies de desserte doivent présenter des caractéristiques répondant à la nature et à l'importance du projet situé sur le terrain, compte tenu de l'importance du projet qui comporte notamment la création de deux cents logements. Toutefois, d'une part, la rue Francis de Pressensé n'est pas l'unique voie d'accès au projet, d'autre part, cette rue comporte une voie à double sens, dont les dimensions ne sont pas inférieures à ce qui est attendu d'une voie de circulation en agglomération. Si les requérants font état de difficultés de circulation existant d'ores et déjà, ils ne les établissent pas et alors qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est largement desservi par les transports en commun et que la métropole de Lyon, gestionnaire de la voirie, a émis un avis favorable au projet. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance du chapitre V de la partie I du règlement du PLU-H de la métropole de Lyon doit être écarté.

18. En huitième lieu, si les requérants font valoir que le permis de construire méconnaît les règles de retrait posées à l'article 2.1.3 du règlement de la zone Upr4 du règlement du PLU-H, ils n'assortissent pas leur moyen de précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.

19. En neuvième lieu, il ressort des pièces du dossier que le macro-lot C comporte cent onze places de stationnement prévues pour les logements et que les places de stationnement liées aux commerces et bureaux seront situées dans l'aire de stationnement en silo du macro-lot B, pour lequel un permis de construire a été délivré le 25 novembre 2022. Cette possibilité de mutualisation était prévue par le cahier des charges relatif aux prescriptions urbanistiques et architecturales de la zone d'aménagement concerté. Il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'article 5.2 du règlement du PLU-H, relatif au stationnement, aurait été méconnu.

20. En dixième lieu, aux termes de l'article L. 113-29 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer en espaces de continuités écologiques des éléments des trames verte et bleue, définies aux II et III de l'article L. 371-1 du code de l'environnement, qui sont nécessaires à la préservation ou à la remise en bon état des continuités écologiques. ". Aux termes de l'article L. 113-30 du même code : " La protection des espaces de continuités écologiques est assurée par les dispositions prévues au présent chapitre ou à la section 4 du chapitre Ier du titre V du présent livre, notamment aux articles L. 151-22, L. 151-23 ou L. 151-41, ou par des orientations d'aménagement et de programmation en application de l'article L. 151-7, en tenant compte des activités humaines, notamment agricoles. ". Et aux termes de l'article L. 151-23 dudit code : " Le règlement peut identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les sites et secteurs à protéger pour des motifs d'ordre écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation. Lorsqu'il s'agit d'espaces boisés, il est fait application du régime d'exception prévu à l'article L. 421-4 pour les coupes et abattages d'arbres. / Il peut localiser, dans les zones urbaines, les terrains cultivés et les espaces non bâtis nécessaires au maintien des continuités écologiques à protéger et inconstructibles quels que soient les équipements qui, le cas échéant, les desservent. ".

21. Comme mentionné au point 11, la cartographie de la trame verte et bleue annexée au PLU-H ne fait apparaître à proximité du terrain d'assiette du projet aucun élément de la trame verte ni de la trame bleue, ni une continuité écologique qu'il serait nécessaire de préserver. Au demeurant, l'autorité environnementale a relevé le caractère anthropisé du site, une végétation inexistante et une faune très peu présente. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance du document graphique du PLU-H relatif aux trames verte et bleue doit être écarté.

22. Enfin, il ressort du dossier de demande de permis de construire que des arbres seront plantés sur le pourtour des bâtiments, qu' un jardin en pleine terre, des massifs arbustifs et des espaces végétalisés seront créés dans les espaces séparant les sept bâtiments du projet ainsi qu'un potager pédagogique. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 3.1 du règlement de la zone UPr4 du PLU-H concernant les abords des constructions et le paragraphe D de l'OAP sur la place du végétal et la biodiversité doit être écarté.

23. Il résulte de tout de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation doivent être rejetées.

Sur les frais du litige :

26. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la commune de Villeurbanne et de la société Rhône Saône habitat au titre des frais exposés dans l'instance.

27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Villeurbanne et de la société Rhône Saône habitat qui n'ont pas, dans la présente instance, la qualité de parties perdantes, verse aux requérants la somme qu'ils réclament au titre des frais du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. H... et autres est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... H..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants, à la commune de Villeurbanne, à la société Rhône Saône habitat et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie en sera adressée à la présidente de la commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Vinet, présidente de la formation de jugement,

M. Moya, premier conseiller,

Mme Soubié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 décembre 2024.

La rapporteure,

A.-S. SoubiéLa présidente,

C. Vinet

La greffière,

F. Bossoutrot

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, à la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, à la ministre du logement et de la rénovation urbaine et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie chacun en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY00187

kc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY00187
Date de la décision : 12/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Aménagement commercial.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINET
Rapporteur ?: Mme Anne-Sylvie SOUBIE
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : JEAN-MARC PETIT-AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-12;24ly00187 ?
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