Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société Vaginay TP a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 19 mars 2021 par lequel la préfète de la Loire l'a mise en demeure de régulariser sa situation administrative, s'agissant de l'installation de stockage des déchets non dangereux qu'elle exploite sur le territoire de la commune de Montagny, de procéder à la remise en état prévue à l'article L. 512-61 du code de l'environnement, et a mis en œuvre des mesures conservatoires et une suspension d'activité, ainsi que la décision de rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n° 2107358 du 19 janvier 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 mars 2023 et 24 avril 2024, la société Vaginay TP, représentée par Me Salen, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 19 janvier 2023 ainsi que les décisions susvisées ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté a été édicté en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration et de celles de l'article L. 171-7 du code de l'environnement dès lors qu'elle n'a pas bénéficié d'un délai suffisant pour présenter ses observations ;
- elle ne pouvait être destinataire de la mise en demeure litigieuse dès lors qu'elle n'a ni la qualité d'exploitante ni celle de propriétaire du site.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 10 avril 2024 et 3 mai 2024, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Une ordonnance du 10 avril 2024 a fixé en dernier lieu la clôture de l'instruction au 2 mai 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère,
- les conclusions de Mme Bénédicte Lordonné, rapporteure publique,
- et les observations de Me Salen pour la société Vaginay TP.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'un contrôle réalisé par l'inspection des installations classées, la préfète de la Loire, par un arrêté du 19 mars 2021, a mis en demeure, en vertu des dispositions de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, la société Vaginay TP de suspendre immédiatement son activité de stockage, transit, regroupement, tri ou préparation de déchets non dangereux, sur un terrain situé sur le territoire de la commune de Montagny, de régulariser sa situation administrative et de procéder à la remise en état du terrain, l'arrêté fixant également des mesures conservatoires. Le recours gracieux présenté par la société Vaginay TP a été rejeté par décision du 16 juillet 2021. Cette dernière relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ainsi que celle de la décision rejetant son recours gracieux.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, , aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) ". L'article L. 511-2 de ce même code dispose : " Les installations visées à l'article L. 511-1 sont définies dans la nomenclature des installations classées établie par décret en Conseil d'Etat, pris sur le rapport du ministre chargé des installations classées, après avis du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques. Ce décret soumet les installations à autorisation, à enregistrement ou à déclaration suivant la gravité des dangers ou des inconvénients que peut présenter leur exploitation. ". Selon la nomenclature des installations classées annexée à l'article R. 511-9 du code de l'environnement, sont soumises à enregistrement : " rubrique 2760 - 2. Installation de stockage de déchets non dangereux autre que celle mentionnée au 3 : (...) b) Autres installations que celles mentionnées au a. " et " rubrique 2716 : Installation de transit, regroupement, tri ou préparation en vue de la réutilisation de déchets non dangereux non inertes à l'exclusion des installations visées aux rubriques 2710, 2711, 2712, 2713, 2714, 2715 et 2719 et des stockages en vue d'épandages de boues issues du traitement des eaux usées mentionnés à la rubrique 2.1.3.0. de la nomenclature annexée à l'article R. 214-1. / Le volume susceptible d'être présent dans l'installation étant : (...) 2. Supérieur ou égal à 100 m3, mais inférieur à 1 000 m3 ".
3. Aux termes de l'article L. 171-7 du code de l'environnement : " I.- Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l'objet de l'autorisation, de l'enregistrement, de l'agrément, de l'homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application du présent code, ou sans avoir tenu compte d'une opposition à déclaration, l'autorité administrative compétente met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine, et qui ne peut excéder une durée d'un an. / Elle peut, par le même acte ou par un acte distinct, suspendre le fonctionnement des installations ou ouvrages, l'utilisation des objets et dispositifs ou la poursuite des travaux, opérations, activités ou aménagements jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d'autorisation, d'enregistrement, d'agrément, d'homologation ou de certification, à moins que des motifs d'intérêt général et en particulier la préservation des intérêts protégés par le présent code ne s'y opposent. / L'autorité administrative peut, en toute hypothèse, édicter des mesures conservatoires aux frais de la personne mise en demeure. (...) / III. Sauf en cas d'urgence, et à l'exception de la décision prévue au premier alinéa du I du présent article, les mesures mentionnées au présent article sont prises après avoir communiqué à l'intéressé les éléments susceptibles de fonder les mesures et l'avoir informé de la possibilité de présenter ses observations dans un délai déterminé. " Par ailleurs, l'article L. 121-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Les dispositions de l'article L. 121-1 ne sont pas applicables : (...) 3° Aux décisions pour lesquelles les dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière ; ".
4. Les dispositions du III de l'article L. 171-7 du code de l'environnement citées au point précédent organisent une procédure contradictoire particulière applicable préalablement à l'édiction des mises en demeure et des mesures accessoires adressées aux exploitants d'installations non autorisées. Les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, qui fixent, en l'absence de dispositions législatives ayant instauré une procédure contradictoire particulière, les règles générales de la procédure contradictoire ne sauraient dès lors être utilement invoquées à l'encontre d'un arrêté pris sur le fondement de l'article L. 171-7 du code de l'environnement. Par suite, ainsi que l'a estimé à bon droit le tribunal, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration est inopérant et doit être écarté.
5. En outre, il est constant que le projet d'arrêté de mise en demeure a été adressé par les services de la préfecture de la Loire à la société Vaginay TP, par un courrier du 26 février 2021 qu'elle a reçu le 1er mars suivant, lui impartissant un délai de quinze jours pour formuler des observations. Un tel délai était suffisant pour lui permettre de présenter d'éventuelles observations et de solliciter le cas échéant un délai supplémentaire pour ce faire. L'arrêté a été édicté le 19 mars 2021 soit à l'issue de ce délai. Par suite et en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 171-7 du code précité doit également être écarté.
6. En deuxième lieu, la société requérante soutient qu'aucun élément matériel n'établit qu'elle exerce, elle-même, l'activité de stockage de déchets non déclarée sur des parcelles appartenant aux époux A... situé au lieu-dit " Les vieilles cours " sur le territoire de la commune de Montagny et, à tout le moins, qu'elle n'en est pas la dernière exploitante. Elle estime que seuls les propriétaires des parcelles en litige peuvent être mis en demeure de déposer une déclaration ou une autorisation au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement. Toutefois, il ressort des deux rapports de contrôle établis les 6 août 2020 et 15 février 2021 par un agent de l'inspection des installations classées, après visites du site et audition tant des propriétaires des parcelles en cause que du représentant de la société Vaginay TP, que l'accès au site où sont déversés principalement des déchets provenant de la société Vaginay TP et de plusieurs entreprises de travaux publics, essentiellement situées dans les départements de la Loire et du Rhône et qui ignorent que leurs déchets sont enfouis sur le site, est régulé par la société Vaginay TP par un portail donnant rue Desvernay au moyen d'une chaîne et d'un cadenas, le tout étant entouré d'une clôture agricole. Il en ressort qu'aucune autre société n'a accès au dépôt sans autorisation, excepté un agriculteur. En outre, la société Vaginay TP assure à ses frais la sécurisation de l'accès principal au site rue Desvernay ainsi que la remise en état du site par enfouissement des dépôts (y compris les dépôts sauvages). La société requérante confirme d'ailleurs dans ses écritures être intervenue pour limiter les risques de glissement de terrain par l'apposition de blocs de béton afin de consolider un talus. Compte tenu de ces éléments, c'est à bon droit que le préfet de la Loire a considéré que la société Vaginay TP est bien l'exploitante de l'installation en cause dès lors qu'elle contrôle effectivement l'activité de stockage de déchets non dangereux sur lesdites parcelles. A ce titre, les circonstances tirées de ce que de nombreux dépôts ont été effectués antérieurement à son arrivée sur le site, qu'une faible minorité de déchets relèvent de son activité et que les propriétaires du terrain ont mis à disposition une pelleteuse sur le site sont sans incidence sur la qualité d'exploitante de l'installation non autorisée de la société Vaginay TP. Par suite, c'est par une exacte application des dispositions de l'article L. 171-7 du code de l'environnement que la préfète de la Loire a regardé la société requérante comme étant la " personne intéressée " au sens de ces dispositions et lui a adressé une mise en demeure de régulariser sa situation administrative en cessant son activité de stockage, transit, regroupement, tri ou préparation en vue de la réutilisation de déchets non dangereux.
7. Il résulte de ce qui précède que la société Vaginay TP n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme à la société Vaginay TP au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Vaginay TP est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Vaginay TP et à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Délibéré après l'audience du 26 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 décembre 2024.
La rapporteure,
Vanessa Rémy-NérisLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Péroline Lanoy
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière
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N° 23LY00789