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05/12/2024 | FRANCE | N°23LY03692

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 05 décembre 2024, 23LY03692


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 19 avril 2023 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.



Par jugement n° 2304098 du 3 octobre 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant l

a cour

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2023, M. B..., représenté par Me Huard, demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 19 avril 2023 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2304098 du 3 octobre 2023, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2023, M. B..., représenté par Me Huard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et les décisions du préfet de l'Isère du 19 avril 2023 ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa situation après délivrance sous huitaine d'une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son avocat de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivé et n'a pas été précédé d'un examen de sa situation particulière ;

- cette décision méconnaît l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- cette mesure d'éloignement et la décision en fixant le pays de destination méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... relève appel du jugement du 3 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère du 19 avril 2023 rejetant sa demande de renouvellement du titre de séjour dont il bénéficiait comme étudiant, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Sur le refus de renouvellement du titre de séjour :

2. En premier lieu, le préfet de l'Isère, qui n'était pas tenu d'évoquer l'ensemble des arguments de M. B..., a énoncé les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision, sans se borner à une motivation stéréotypée. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse n'est pas suffisamment motivée.

3. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse, ainsi motivée, que le préfet de l'Isère a, contrairement à ce que prétend M. B..., préalablement procédé à un examen de sa situation particulière. Le moyen tiré du défaut d'un tel examen doit, par suite, être écarté, sans que ne puisse être utilement invoquée à son appui la prétendue erreur d'appréciation dont cet examen serait entaché.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an (...) ". Pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement d'un titre de séjour en qualité d'étudiant, d'apprécier notamment, à partir de l'ensemble du dossier et sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies.

5. Entré en France au mois d'août 2018 pour y poursuivre des études, M. B..., de nationalité marocaine, y a obtenu, au terme de l'année universitaire 2021/2022, un diplôme de master en biologie et agrosciences. L'année suivante, il a donné une nouvelle orientation à ses études, en intégrant une formation de " développeur web et web mobile ", qui permet de prétendre à un titre professionnel de niveau bac + 2, bien inférieur au diplôme précédemment obtenu, sans démontrer la nécessité et la cohérence d'un tel cursus, notamment au regard de compétences informatiques requises pour intégrer le master en bioinformatique auquel il avait par ailleurs candidaté sans succès. Dans ces conditions, compte tenu de l'absence de progression des études de M. B..., le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les dispositions citées au point 4, en refusant de lui renouveler son titre de séjour.

6. En quatrième lieu, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales étant par elles-mêmes sans incidence sur l'appréciation de la réalité et du sérieux des études poursuivies et n'ayant pas été examinées d'office par le préfet de l'Isère, elles ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre du refus de renouvellement de titre de séjour litigieux. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut qu'être écarté.

7. En cinquième lieu, à la date du refus litigieux, M. B... résidait depuis moins de cinq ans sur le territoire français où il n'a été autorisé à résider qu'en tant qu'étudiant, qualité qui ne lui donnait pas vocation à s'y établir durablement. Célibataire et dépourvu de charges de famille, il ne s'y prévaut d'aucune réelle attache privée ou familiale, sans prétendre être dépourvu de telles attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de dix-neuf ans. Dans ces circonstances, nonobstant les études qu'il suit en France, il n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui renouveler son titre de séjour, le préfet de l'Isère a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

Sur l'obligation de quitter le territoire français et le pays de destination :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité du refus de renouvellement du titre de séjour dont M. B... bénéficiait doit être écarté.

9. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".

10. Comme indiqué au point 7, résidant depuis moins de cinq ans en France et uniquement en qualité d'étudiant, M. B..., célibataire et dépourvu de charges de famille, ne s'y prévaut d'aucune réelle attache privée ou familiale, sans prétendre en être dépourvu dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de dix-neuf ans. Dans ces circonstances, nonobstant les études qu'il suit en France, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en l'obligeant à quitter le territoire français et en fixant le Maroc comme pays à destination duquel il pourra être éloigné, le préfet de l'Isère a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Pour ces mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de l'intéressé.

11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B....

13. Enfin, le présent arrêt rejetant les conclusions à fin d'annulation de M. B... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Aline Evrard, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Bertrand Savouré, premier conseiller,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2024.

La rapporteure,

S. CorvellecLa présidente,

A. Evrard

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 23LY03692


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY03692
Date de la décision : 05/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme EVRARD
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: Mme PSILAKIS
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-05;23ly03692 ?
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