Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme F... B... et Mme E... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération du 9 mai 2016 par laquelle le conseil municipal de Saint-Cirgues-en-Montagne a approuvé la mise à jour du tableau de classement des voies communales et des chemins ruraux.
Par jugement n° 1608079 du 13 novembre 2018, le tribunal n'a annulé cette délibération qu'en tant qu'elle classe le chemin n° 15 dit chemin de Fioulebise rebaptisé Chemin G... comme chemin rural.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 14 janvier 2019 et un mémoire du 1er avril 2020 (non communiqué), la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne, représentée par la SCP d'avocats Beraud-Lecat-Bouchet, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il annule le classement du chemin rural n° 15 et de rejeter la demande de première instance de Mmes B... ;
2°) de mettre à la charge de Mmes B... une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune de Saint-Cirgues-en-Montagne soutient que :
- le chemin en litige est ouvert à la circulation publique et répertorié comme itinéraire de randonnée pédestre ; il ne sert pas exclusivement à la communication entre différents fonds agricoles ou à leur exploitation et ne présente pas le caractère d'un chemin d'exploitation ; il fait l'objet de surveillance et d'entretien de sa part ;
- ce chemin est présumé lui appartenir en application de l'article L. 161-3 du code rural et de la pêche maritime ;
- la délibération en litige n'est au demeurant entachée d'aucun vice de procédure ni de détournement de pouvoir.
Par mémoire enregistré le 5 juillet 2019, Mmes B..., représentées par la société CDMF-Avocats Affaires Publiques, concluent au rejet de la requête et demandent à la cour de mettre à la charge de la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mmes B... soutiennent que :
- la critique articulée en appel contre le motif de censure retenu par le tribunal n'est pas fondée ;
- cette délibération méconnaît, en tout état de cause, les articles L. 161-6 du code rural et de la pêche maritime, L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques et L. 141-1 et suivants du code de la voirie routière ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et de détournement de pouvoir.
Par arrêt n° 18LY03563-19LY00127 du 6 août 2020, la cour a sursis à statuer sur la requête n° 18LY03563 jusqu'à ce que le tribunal judiciaire de Privas se soit prononcé sur la propriété de l'assiette du chemin traversant, notamment le fonds de Mmes B....
Par jugement du 7 novembre 2023, contre lequel il n'a pas été formé de pourvoi en cassation, le tribunal judiciaire de Privas, après avoir relevé que la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne produisait des éléments démontrant l'affectation au public du chemin de Fioulebise rebaptisé Chemin G... faisant présumer une appropriation publique, a jugé que Mmes B... renversaient cette présomption par la production de titres établissant leur qualité de propriétaires des emprises de ce chemin, dans sa traversée des parcelles C 299, C 300, C 301, C 304, C 325 et C 326.
Par mémoire enregistré le 11 janvier 2023, Mmes B..., concluent aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens. Elles soutiennent, en outre, que l'arrêt par lequel la cour d'appel de Nîmes s'est prononcée sur le litige opposant M. A... à la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne sur la propriété du chemin G... traversant les parcelles de ce tiers, leur est inopposable.
Par mémoire enregistré le 22 octobre 2024, non communiqué, la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de la voirie routière ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- les conclusions de Mme C...,
- et les observations de Me Leroy pour Mmes B....
Considérant ce qui suit :
Sur les conclusions de la requête :
1. Aux termes de l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune ". Aux termes de l'article L. 161-3 du même code : " Tout chemin affecté à l'usage du public est présumé, jusqu'à preuve du contraire, appartenir à la commune sur le territoire de laquelle il est situé ".
2. Il résulte tant des motifs que du dispositif du jugement du 7 novembre 2023 que le tribunal judiciaire de Privas, après avoir relevé que la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne produisait des éléments démontrant l'affectation au public du chemin de Fioulebise rebaptisé Chemin G... faisant présumer une appropriation publique, a jugé que Mmes B... renversaient cette présomption par la production de titres établissant leur qualité de propriétaires des emprises de ce chemin, dans sa traversée des parcelles C 299, C 300, C 301, C 304, C 325 et C 326.
3. Il suit de là que la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la délibération du 9 mai 2016 par laquelle le conseil municipal a classé en chemin rural la section du chemin n° 15 dit G... traversant lesdites parcelles.
4. En revanche, il résulte du même jugement du tribunal judiciaire et des écritures de la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne que le surplus du tracé du chemin n° 15 est usuellement emprunté par d'autres catégories d'usagers que les riverains, de telle sorte qu'en application des dispositions citées au point 1, une appropriation publique est présumée sans que soit rapportée la preuve contraire d'une propriété privée de ces emprises. En outre, il ressort des pièces du dossier que ce chemin, affecté à l'usage du public, n'a pas été classé comme voie communale. Il suit de là que la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'approbation du classement du chemin n° 15 en chemin rural, dans sa section extérieure aux parcelles C 299, C 300, C 301, C 304, C 325 et C 326.
5. Il y a lieu pour la cour, saisie par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués devant le tribunal et devant la cour par Mmes B....
6. En premier lieu, si l'article L. 161-6 du code rural et de la pêche maritime ouvre au conseil municipal la faculté d'incorporer à la voirie rurale les chemins d'exploitation sur demande des associations syndicales qui en sont les gestionnaires, il ne fait pas obstacle à ce que des chemins ouverts au public qui, comme celui G..., ne sont pas gérés par de telles associations soient classés, à l'initiative de la collectivité publique, parmi les chemins ruraux dès lors qu'il répondent aux conditions des articles L. 161-1 et L. 161-3 du même code. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 161-6 motif pris de l'absence de manifestation de volonté d'une association syndicale n'est pas fondé et doit être écarté.
7. En deuxième lieu, et d'une part, en dépit de l'erreur de rédaction du procès-verbal de la délibération litigieuse retraçant l'incorporation dans la voirie communale d'une section de 3 500 mètres, le tableau qui lui est annexé classe sans ambiguïté cette section parmi les chemins ruraux de la commune, sous le n° 15 et l'appellation de chemin G.... Il suit de là que Mmes B... ne sauraient utilement invoquer la méconnaissance des articles L. 2111-1 du code général des collectivités territoriales et L. 141-3 du code de la voirie routière exigeant, sauf maintien des conditions de desserte, une enquête publique préalablement au classement d'une dépendance en tant que voie communale.
8. D'autre part, Mmes B... n'ayant pas relevé appel du jugement n° 1608079 en ce qu'il a rejeté leur demande de première instance dirigée contre le surplus de la délibération du 9 mai 2016 approuvant la mise à jour du tableau de classement des voies communales et des chemins ruraux, le moyen tiré de la méconnaissance des mêmes dispositions, motif pris de ce que quatorze autres dépendances auraient été irrégulièrement déclassées de voies communales en chemins ruraux, étranger au litige d'appel, doit être écarté comme inopérant.
9. En troisième lieu, la circonstance que les riverains du chemin desservant également un parc éolien aient signé des protocoles d'accord avec l'exploitant, ou bien que cet exploitant se soit engagé à financer l'entretien de la voie en dédommagement des contraintes d'accès à ses installations ne fait pas obstacle à ce que la collectivité publique incorpore le chemin dans la voirie rurale dans le souci de concilier les différents usages qui peuvent en être faits, dès lors que cette conciliation n'est pas contraire à l'intérêt général. En conséquence, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
10. En quatrième lieu, si le fonds du maire de Saint-Cirgues-en-Montagne est desservi par le chemin G..., il ne ressort pas des pièces du dossier que le classement de la section du chemin n° 15 extérieure à la propriété de Mmes B... ait eu pour but de lui procurer un avantage personnel. Il suit de là que le détournement de pouvoir n'est pas établi.
11. Il résulte de ce qui précède, d'une part, que la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'intégralité du classement dans la voirie rurale du chemin n° 15, d'autre part, que ledit jugement doit être annulé dans cette mesure, enfin, que la demande d'annulation présentée au tribunal par Mmes B... et tendant à l'annulation de la délibération du 9 mai 2016 en ce qu'elle a intégré le chemin n° 15 dit G... au tableau de classement des chemins ruraux, dans sa section extérieure aux parcelles C 299, C 300, C 301, C 304, C 325 et C 326, doit être rejetée.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne et de Mmes B....
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1608079 du 23 octobre 2018 du tribunal administratif de Lyon en ce qu'il annule le classement dans la voirie rurale de Saint-Cirgues-en-Montagne du chemin n° 15, dans sa section extérieure aux parcelles C 299, C 300, C 301, C 304, C 325 et C 326, est annulé et la demande d'annulation présentée au tribunal par Mmes B... tendant à l'annulation de la délibération du 9 mai 2016 par laquelle le conseil municipal de Saint-Cirgues-en-Montagne a intégré le chemin n° 15 dit G... au tableau de classement des chemins ruraux, dans sa section extérieure aux parcelles C 299, C 300, C 301, C 304, C 325 et C 326, est rejetée.
Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Cirgues-en-Montagne, à Mme F... B... et à Mme E... B....
Délibéré après l'audience du 31 octobre 2024, où siégeaient :
M. Philippe Arbarétaz, président,
Mme Aline Evrard, présidente assesseure,
M. Bertrand Savouré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 novembre 2024.
Le président, rapporteur,
Ph. D...La présidente assesseure,
A. Evrard
La greffière,
F. Faure
La République mande et ordonne au préfet de l'Ardèche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 19LY00127