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31/10/2024 | FRANCE | N°23LY03853

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 31 octobre 2024, 23LY03853


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2022 par lequel la préfète du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.



Par jugement n° 2301912 du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour


Par requête enregistrée le 15 décembre 2023, Mme B..., représentée par la société d'avocats Lozen, deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 13 octobre 2022 par lequel la préfète du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2301912 du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 15 décembre 2023, Mme B..., représentée par la société d'avocats Lozen, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 juin 2023 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Rhône du 13 octobre 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation après remise d'une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachés d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la fixation du pays de destination est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bertrand Savouré, premier conseiller,

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... relève appel du jugement du 27 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 13 octobre 2022 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire (...) au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales (...) ".

3. Si Mme B..., fait valoir qu'elle est en couple depuis 2019 avec une compatriote et qu'elles ne pourraient vivre leur vie de couple dans leur pays d'origine, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'est entrée en France que le 6 novembre 2021, à l'âge de trente-trois ans. Dans ces conditions, eu égard notamment à la faible ancienneté et aux conditions de son séjour en France, le refus de titre de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, les moyens tirés de ce que les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français auraient méconnu les stipulations citées au point 2 et seraient entachées d'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

4. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est fondée à invoquer, par voie d'exception, ni l'illégalité du refus de titre de séjour pour contester l'obligation de quitter le territoire français qui l'assortit, ni ces deux décisions pour contester la fixation du pays de destination.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. "

6. Mme B..., qui vit avec une compatriote de même sexe, fait valoir que l'homosexualité est illégale en Syrie, qu'elle y est exposée à une peine pouvant aller jusqu'à trois ans d'emprisonnement et plus généralement à diverses formes de persécution liée à son orientation sexuelle, qui n'est pas contestée par la préfète du Rhône. Dans ces conditions, et dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait légalement admissible dans un autre pays que la Syrie, la requérante est fondée à soutenir que la décision fixant comme destination la Syrie ou tout autre pays où elle serait légalement admissible méconnaît les stipulations citées au point 5.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme B... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande d'annulation de la décision fixant le pays de destination.

8. Le présent arrêt rejetant les conclusions à fin d'annulation dirigées contre le refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français sous trente jours et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, les conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me Messaoud, avocate de Mme B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à ce dernier d'une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 27 juin 2023 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet du Rhône du 13 octobre 2022 est annulé en tant qu'il fixe le pays à destination duquel Mme B... sera reconduite.

Article 3 : L'Etat versera à Me Messaoud, avocate de Mme B..., la somme de 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,

Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,

M. Bertrand Savouré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2024.

Le rapporteur,

B. SavouréLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N°23LY03853


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY03853
Date de la décision : 31/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Bertrand SAVOURE
Rapporteur public ?: Mme PSILAKIS
Avocat(s) : MESSAOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-31;23ly03853 ?
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