Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'association La Colombe a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner la commune de Blanzat à lui verser la somme de 453 284,96 euros en réparation du préjudice subi du fait du non-respect de son engagement d'échanger des parcelles dont elles sont respectivement propriétaires.
Par jugement n° 1900340 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a limité la condamnation de la commune de Blanzat à la somme de 80 250,29 euros.
Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 26 août 2022, l'association La Colombe, représenté par Me Guitton, demande à la cour :
1°) de porter la condamnation prononcée par le tribunal à la somme de 345 283,15 euros ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Blanzat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est entaché d'erreurs factuelles quant aux dates et aux parcelles en litige, qui le rendent irrégulier ;
- il est entaché d'une insuffisance de motivation ;
- au fond, la commune a commis une faute en ne faisant pas aboutir son engagement d'échange de parcelles ;
- pour l'évaluation du préjudice, l'engagement d'échanger les parcelles est antérieur à la date du 10 juin 2014 retenue par le tribunal et doit être fixé au 7 février 2012, date à laquelle elle est devenue propriétaire des parcelles ;
- l'ensemble des préjudices invoqués s'élève au montant demandé, justifié par les pièces produites.
Par mémoire enregistré le 3 février 2023, la commune de Blanzat, représenté par Me Bonicel-Bonnefoi, demande à la cour :
1°) par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement en tant qu'il la condamne à verser une indemnité de 80 250,29 euros et de rejeter la demande de première instance ;
2°) de mettre à la charge de l'association La Colombe la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle n'a pas commis de faute de sorte que la demande de première instance aurait dû être rejetée ;
- les moyens de la requête d'appel doivent être écartés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bertrand Savouré, premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Christine Psilakis, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Mathevon, représentant l'association La Colombe, et celles de Me Lambert, représentant la commune de Blanzat ;
L'association La Colombe a produit une note en délibéré, enregistrée le 14 octobre 2024.
Considérant ce qui suit :
1. L'association La Colombe a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner la commune de Blanzat à lui verser la somme de 453 284,96 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subi du fait du comportement fautif de la commune tenant au non-respect de son engagement de procéder à l'échange de parcelles nécessaires à la finalisation de son projet de construction d'un lieu de vie pour personnes âgées. Par un jugement du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a fait droit à cette demande à hauteur de 80 250,29 euros. L'association La Colombe relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande à hauteur de 345 283,15 euros. La commune de Blanzat conclut à l'annulation du jugement et au rejet de la demande de première instance.
Sur la faute de la commune de Blanzat :
2. L'association La Colombe fait valoir que dès l'acquisition des terrains en cause, par la voie d'un acte d'apport réalisé par Mme B... et Mme A... le 27 février 2012, elle s'est trouvée en contact avec la commune de Blanzat en vue de la réalisation d'un projet de lieu de vie pour personnes âgées, lequel impliquait un échange de parcelles permettant, d'une part, d'élargir la voirie et, d'autre part, de rendre plus fonctionnelle la disposition des parcelles pour l'association. Il ressort des pièces du dossier qu'un permis de construire a été délivré le 18 août 2015 et que sa mise en œuvre était subordonnée à l'échange de parcelles, formalisé dès le 10 juin 2014 par la signature conjointe du formulaire normalisé de demande d'enregistrement par les services de publicité foncière du transfert de propriété. Le maire ainsi manifesté, au nom de la commune, son accord pour la réalisation de cet échange parcellaire. Dans ces conditions, alors qu'au regard du comportement de la commune, l'incertitude pesant sur la légalité du permis de construire en raison du recours contentieux dont il faisait l'objet pouvait légitimement être perçue par l'association comme le seul obstacle à la finalisation de l'échange de parcelles, le silence opposé au courrier du 25 juin 2018, adressé à la suite du rejet par le tribunal administratif de Clermont-Ferrand par un jugement du 13 mars 2018 de ce recours contentieux, par lequel l'association lui demandait la " régularisation " de l'échange, c'est-à-dire la signature de l'acte authentique, doit être regardée comme une rupture fautive d'engagement.
3. Si l'échange de parcelles impliquait préalablement à la signature de l'acte authentique la mise en œuvre de la désaffectation et du déclassement des parcelles à céder, dépendances du domaine public, l'association La Colombe, qui n'est d'ailleurs pas professionnelle de l'immobilier, pouvait légitimement se fier au comportement de la commune, qui n'a fait état ni auprès de l'association ni dans la présente instance, d'une quelconque difficulté à réaliser ledit déclassement. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que l'association La Colombe n'avait pas commis de faute exonératoire, totale ou partielle, de responsabilité de la commune de Blanzat.
Sur les préjudices :
4. En premier lieu, comme l'a jugé le tribunal, les contacts noués avant la promesse d'échange, telle qu'elle s'est manifestée pour la première fois, le 10 juin 2014, ne sauraient donner lieu à indemnisation. Par suite, l'ensemble des préjudices invoqués antérieurement à cette date doit être écarté.
5. En deuxième lieu, l'association n'est pas fondée à demander l'indemnisation de la taxe foncière acquittée postérieurement au 10 juin 2014, laquelle aurait été due même si le projet s'était réalisé. Il en va de même des frais comptables, d'assurance et bancaires, des cotisations de membre d'une centrale de référencement associative, dont le lien avec la faute invoquée n'est pas établi.
6. En troisième lieu, en revanche, il résulte de l'instruction, et en particulier des notes d'honoraires d'architecte et d'avocat, des factures du centre France Publicité relative à un appel d'offre et d'entreprises de dématérialisation de procédures de marchés publics et de forfait retouche pour modélisation 3D et de constat d'huissier que l'association La Colombe établit avoir exposé en pure perte, de 2014 à 2017, des frais pour la réalisation de son projet de construction de résidence pour personnes âgées à compter de juin 2014 à hauteur de 80 250,29 euros. Dans ces conditions, le tribunal a fait une exacte appréciation du préjudice en le fixant à cette somme.
7. Il résulte de tout ce qui précède que l'association La Colombe n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le jugement, dont les erreurs factuelles n'entachent pas la régularité et qui est suffisamment motivé, n'a fait droit à sa demande qu'à hauteur du montant mentionné au point précédent. Il en résulte également que l'appel incident de la commune de Blanzat doit être rejeté.
Sur les frais liés au litige :
8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association La Colombe ou de la commune de Blanzat le paiement des frais exposés par l'autre partie en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'association La Colombe est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Blanzat sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association La Colombe et à la commune de Blanzat.
Délibéré après l'audience du 10 octobre 2024, où siégeaient :
M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,
Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,
M. Bertrand Savouré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2024.
Le rapporteur,
B. SavouréLe président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
F. Faure
La République mande et ordonne au préfet du Puy-de-Dôme en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 22LY02623