Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 11 mai 2023 par lequel le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois.
Par jugement n° 2304809 du 10 octobre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 10 novembre 2023, M. B..., représenté par la société d'avocats BS2A, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté en litige ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", subsidiairement " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus de titre est insuffisamment motivé ;
- le préfet n'a pas examiné sa demande en tant qu'elle portait sur un titre portant la mention " salarié " ;
- il a pris sa décision sans se prononcer au préalable sur la demande d'autorisation de travail dont il était saisi ;
- cette décision méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision limitant à trente jours le délai de départ volontaire est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la fixation du pays de destination est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
- l'interdiction de retour est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
- ses motifs sont entachés d'erreur matérielle en ce qu'elle mentionne qu'il constituerait une menace de trouble à l'ordre public, laquelle ne saurait être confondue avec la soustraction à une mesure d'éloignement ;
- elle est entachée d'erreur d'appréciation dans l'application des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 décembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bertrand Savouré, premier conseiller ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... relève appel du jugement du 10 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Loire rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement et l'interdisant de retour sur le territoire pour une durée de six mois.
2. La demande déposée le 13 septembre 2022, tendant à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié ", a été analysée par l'arrêté litigieux comme fondée sur les articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, alors que la demande visait également l'article L. 421-1 du même code et mentionnait, d'ailleurs, le dépôt par son employeur d'une demande d'autorisation de travail, le préfet de la Loire n'a pas examiné sa demande sur ce fondement. Par suite, M. B... est fondé à soutenir qu'en s'abstenant de statuer sur le fondement de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Loire s'est mépris sur la portée de sa demande et n'a pas procédé à un examen complet de celle-ci.
3. Le refus de titre de séjour opposé à M. B... étant ainsi entaché d'illégalité, l'obligation de quitter le territoire français dont il est assorti et les décisions fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement et l'interdisant de retour sur le territoire français doivent, par voie de conséquence, également être annulées.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
5. Eu égard au motif d'annulation qu'il retient et compte tenu de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, le présent arrêt implique nécessairement, mais seulement, que la situation de M. B... soit réexaminée et que, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour lui soit délivrée. Ainsi, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative et de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'enjoindre au préfet territorialement compétent de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, après remise sous quinzaine d'une autorisation provisoire de séjour. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de prononcer d'astreinte.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sous réserve que Me Bescou, avocat de M. B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement à ce dernier d'une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2304809 du tribunal administratif de Lyon du 10 octobre 2023 et l'arrêté du 11 mai 2023 par lequel le préfet de la Loire a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a désigné le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire pour une durée de six mois sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Loire de se prononcer, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sur la situation de M. B... et de le munir, dans le délai de quinze jours à compter de cette notification et dans l'attente de ce réexamen, d'une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me Bescou en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi relative à l'aide juridique sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,
Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,
M. Bertrand Savouré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.
Le rapporteur,
B. SavouréLe président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
F. Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N°23LY03498