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17/10/2024 | FRANCE | N°23LY00263

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 17 octobre 2024, 23LY00263


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. et Mme J... B..., M. A... G..., M. et Mme F... E..., M. D... H... et le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2019 par lequel le préfet de la Savoie a transféré d'office dans le domaine public les emprises de la rue du commandant C... I... à Chambéry.



Par jugement n° 1906421 du 28 novembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.>


Procédure devant la cour



Par une requête enregistrée le 20 janvier 2023, le syndicat de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme J... B..., M. A... G..., M. et Mme F... E..., M. D... H... et le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2019 par lequel le préfet de la Savoie a transféré d'office dans le domaine public les emprises de la rue du commandant C... I... à Chambéry.

Par jugement n° 1906421 du 28 novembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 20 janvier 2023, le syndicat de copropriétaires de la résidence Le Granier, M. et Mme B..., M. G... et M. et Mme H..., représentés par Me Sevino, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté du préfet de la Savoie du 24 juillet 2019 ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Savoie et au maire de Chambéry d'adopter un arrêté d'expropriation incluant la dalle, l'étanchéité et les poteaux porteurs de la voie, dans un délai de quinze jours et d'installer un portique de sécurité, afin d'assurer l'exécution de l'arrêté du 16 août 2016 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Chambéry la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser au syndicat de copropriétaires de la résidence Le Granier.

Ils soutiennent que :

- l'arrêté litigieux devait étendre le transfert à la dalle de couverture des garages, à l'étanchéité et aux poteaux porteurs, qui constituent les fondations de la voie de circulation et font ainsi partie intégrante de la voie ;

- l'arrêté litigieux devait étendre le transfert à ces éléments, qui constituent des accessoires indissociables de la voie ;

- l'arrêté litigieux a pour effet de mettre à leur charge des servitudes non prévues par la loi et contraire à l'article 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen.

Par mémoire enregistré le 27 novembre 2023, la commune de Chambéry, représentée par Me Laurent, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge des requérants la somme globale de 3 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 27 novembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 janvier 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sophie Corvellec ;

- les conclusions de Mme Christine Psilakis, rapporteure publique ;

- les observations de Me Breteau pour le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier et autres, et celles de Me Laurent pour la commune de Chambéry ;

Considérant ce qui suit :

1. La société civile de gestion Le Granier est propriétaire, à Chambéry, d'un ensemble de soixante-neuf garages construits en sous-sol de la rue du commandant C... I..., aménagée et ouverte à la circulation publique. Par une délibération du 24 janvier 2018, le conseil municipal de Chambéry a engagé une procédure de transfert de cette voie privée dans son domaine public, telle que prévue par l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme. A la suite de l'opposition du syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier et de différents propriétaires, ce transfert a finalement été prononcé d'office par arrêté du préfet de la Savoie du 24 juillet 2019. Ce syndicat de copropriétaires, ainsi que M. et Mme B..., M. G... et M. et Mme H..., propriétaires au sein de la résidence Le Granier, relèvent appel du jugement du 28 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande d'annulation de cet arrêté. Ils doivent être regardés comme demandant l'annulation de cet arrêté, en tant seulement qu'il n'inclut pas dans le transfert qu'il prononce la dalle de couverture, l'étanchéité et les poteaux porteurs des garages.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes, d'une part, de l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme : " La propriété des voies privées ouvertes à la circulation publique dans des ensembles d'habitations (...) peut, après enquête publique ouverte par l'autorité exécutive de la collectivité territoriale (...), être transférée d'office sans indemnité dans le domaine public de la commune sur le territoire de laquelle ces voies sont situées. La décision de l'autorité administrative portant transfert vaut classement dans le domaine public et éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels et personnels existant sur les biens transférés. Cette décision est prise par délibération du conseil municipal. Si un propriétaire intéressé a fait connaître son opposition, cette décision est prise par arrêté du représentant de l'Etat dans le département, à la demande de la commune. L'acte portant classement d'office comporte également approbation d'un plan d'alignement dans lequel l'assiette des voies publiques est limitée aux emprises effectivement livrées à la circulation publique (...) ".

3. En premier lieu, eu égard à l'absence d'indemnisation qui accompagne, en principe, la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme, la notion de voies privées ouvertes à la circulation publique dans des ensembles d'habitations ne peut, au sens de cet article, être entendue que strictement, mais peut comprendre les accessoires de la voie qui, concourant à son utilisation, lui sont indissociables.

4. Par acte de vente des 7 et 9 mars 1960, la Société Civile de Gestion Immobilière, qui a acquis diverses parcelles auprès du département de la Savoie, s'est engagée à créer dans le cadre de son projet, à ses frais, risques et périls, une rue, utilisée comme voie publique, reliant la place de la Gare au quai Charles Roissard. Cet acte précise que le sous-sol de la rue demeurera sa propriété et pourra être utilisé pour la construction de garages particuliers. Alors même qu'ils sont situés en dessous de la chaussée de la voie de circulation de la rue du commandant C... I..., à laquelle ils servent d'assise, la dalle supérieure des garages ainsi construits et son revêtement d'étanchéité, de même que les piliers de soutènement de ces garages, sont matériellement distincts de cette voie et n'en font pas partie intégrante. Par ailleurs, ne concourant pas à l'utilisation de cette voie, ils constituent l'accessoire indissociable du garage, non celui de la voie. Par suite, le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier n'est pas fondé à soutenir que le transfert prononcé en application de l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme par l'arrêté litigieux aurait pu être étendu à ces éléments.

5. En second lieu, alors même qu'il n'inclut pas la dalle supérieure des garages, son revêtement d'étanchéité et les piliers de soutènement, le transfert prononcé par l'arrêté litigieux n'emporte, à l'égard des requérants, pas d'autres obligations que celles leur incombant en tant que propriétaires de ces garages. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que cet arrêté emporte une servitude non autorisée par la loi et contraire à l'article 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. La présente décision rejetant les conclusions à fin d'annulation du syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier et autres et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, leurs conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Chambéry, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier et autres. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier le versement d'une somme globale de 2 000 euros à verser à la commune de Chambéry, en application de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier et autres est rejetée.

Article 2 : Le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier versera à la commune de Chambéry une somme globale de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié, en application des dispositions du troisième alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, au syndicat des copropriétaires de la résidence Le Granier, à la commune de Chambéry, au ministre de l'intérieur et à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2024, où siégeaient :

M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,

Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.

La rapporteure,

S. CorvellecLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY00263


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00263
Date de la décision : 17/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01-01-01 Domaine. - Domaine public. - Consistance et délimitation. - Domaine public artificiel.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: Mme PSILAKIS
Avocat(s) : LAURENT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-17;23ly00263 ?
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