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03/10/2024 | FRANCE | N°24LY00203

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 03 octobre 2024, 24LY00203


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 10 mars 2022 par lequel le préfet de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé son pays de renvoi.



Par un jugement n° 2201208 du 22 décembre 2023 le tribunal a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour



Par une requête

enregistrée le 22 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Jauvat, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté men...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 10 mars 2022 par lequel le préfet de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé son pays de renvoi.

Par un jugement n° 2201208 du 22 décembre 2023 le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 22 janvier 2024, M. A..., représenté par Me Jauvat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté mentionné ci-dessus ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Allier, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou un titre de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " ;

3°) de mettre à la charge de l'État le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 300 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour est entaché d'un vice de procédure faute de consultation de la commission du titre de séjour ; il est entaché d'une erreur de fait et d'une erreur de droit, aucune falsification des documents d'état civil présentés ne pouvant être retenue ; il méconnaît les dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il méconnaît les dispositions de l'article L. 435-3 de ce code ainsi que celles de ses articles L. 423-23 et L. 435-1 et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La préfète de l'Allier à qui la requête a été communiquée n'a pas produit d'observations.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Boffy, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen, déclare être né le 30 décembre 2002 et être entré en France en mars 2019. Après avoir été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance du département de l'Allier le 2 septembre 2019 en qualité de mineur isolé étranger, il a sollicité auprès des services de la préfecture de ce département la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 10 mars 2022, le préfet de l'Allier a opposé un refus à cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office. Il relève appel du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand qui a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur le refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente à l'appui de sa demande : / 1° Les documents justifiants de son état civil ; 2° Les documents justifiants de sa nationalité ; (...) ". Aux termes de l'article L. 811-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " la vérification des actes d'état civil étrangers est effectuée dans les conditions définies à l'article 47 du code civil ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Ces dispositions posent une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère. Cependant, la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement supplétif du 28 février 2018 a été établi à la demande du père de M. A.... Le requérant, qui a déclaré que son père était décédé alors qu'il était encore très jeune enfant, n'établit pas l'existence de la tradition patriarcale dont il se prévaut pour justifier d'une telle contradiction. Pour le surplus, et par les mêmes motifs que ceux retenus par le tribunal, qu'il y a lieu d'adopter, le moyen tiré de ce que le jugement supplétif du 28 février 2018 tenant lieu d'acte de naissance et l'extrait d'acte de naissance du 12 mars 2018 auraient été jugés à tort frauduleux par l'administration ne peut qu'être écarté. Si l'intéressé a produit pour la première fois en appel un jugement supplétif du 13 octobre 2023 et un extrait du registre de l'état-civil du 7 novembre 2023, qui ont le même objet que les actes plus anciens mentionnés ci-dessus, dont l'administration a renversé la présomption de validité, de tels documents ne sauraient davantage être regardés, dans ces circonstances, comme présentant un caractère probant, et ce d'autant plus que deux jugements supplétifs distincts ne peuvent tenir lieu d'un même acte de naissance. Par suite, aucune erreur de droit ou de fait n'entache le refus de séjour contesté.

4. Aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance ou du tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. ".

5. Le préfet de l'Allier a pu légalement se fonder sur le motif tiré de ce que les documents produits lui apparaissaient frauduleux et ne permettaient pas en conséquence d'établir l'âge et l'identité du requérant pour refuser de délivrer à celui-ci un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, (...) et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. M. A... fait valoir qu'il est engagé dans une formation de CAP " serrurier métallier " et il se prévaut de sa relation avec une compatriote guinéenne, titulaire d'un récépissé de demande de premier titre de séjour qui, à la date du refus litigieux, était enceinte de ses œuvres. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il est entré récemment sur le territoire français, aucun obstacle à la reconstitution avec sa compagne d'une cellule familiale en Guinée n'étant avéré. Par suite, aucune violation des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni erreur manifeste d'appréciation n'apparaît constituée.

8. M. A... reprend en appel ses moyens de première instance tirés de la méconnaissance des articles L. 435-1 et L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs du jugement attaqué.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

9. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour opposé à M. A... doit être écarté.

10. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, les moyens soulevés à l'encontre de la mesure d'éloignement tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation dont elle serait entachée doivent être écartés.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

11. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré de l'illégalité de la décision fixant le pays de renvoi par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français opposés à M. A... doit être écarté.

12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 8, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

13. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande. Dès lors, la requête de M. A... doit, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

Mme Boffy, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2024.

La rapporteure,

I. BoffyLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

1

2

N° 24LY00203

kc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY00203
Date de la décision : 03/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Irène BOFFY
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS W. HILLAIRAUD - A. JAUVAT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-03;24ly00203 ?
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