Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 15 septembre 2021 par laquelle la présidente du conseil d'administration du service départemental métropolitain d'incendie et de secours (SDMIS) a prononcé à compter du lendemain sa suspension sans traitement de ses fonctions de sapeur-pompier, jusqu'à la production d'un justificatif de vaccination ou de contre-indication à la vaccination.
Par un jugement n° 2108125 du 5 octobre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 6 décembre 2023, et un mémoire en réplique, enregistré le 13 juin 2024, M. B..., représenté par Me Werquin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 octobre 2023 ;
2°) d'annuler la décision précitée de suspension du 15 septembre 2021 ;
3°) de condamner le SDMIS à régulariser sans délai sa situation administrative et financière pour la période de deux mois durant laquelle sa suspension a été exécutée, comprenant le versement des salaires et l'ancienneté, et les droits à la retraite ;
4°) de mettre à la charge du SDMIS une somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il ne pouvait légalement être suspendu de ses fonctions dès lors qu'il a présenté dès le 16 septembre sa feuille justificative munie du " QR code " ;
- la décision est entachée d'un détournement de procédure puisque si le chef de centre lui a annoncé sa suspension le 16 septembre, le SDMIS lui avait déjà envoyé la suspension le 15 septembre, soit un jour avant la prise de garde.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2024, le service départemental-métropolitain d'incendie et de secours (SDMIS), représenté par Me Prouvez, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 ;
- le décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Felmy, présidente-assesseure,
- les conclusions de Mme Lordonné, rapporteure publique,
- et les observations de Me Litzler, représentant le service départemental-métropolitain d'incendie et de secours.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., adjudant-chef de sapeur-pompier professionnel, a fait l'objet d'une décision du 15 septembre 2021 par laquelle la présidente du conseil d'administration du service départemental-métropolitain d'incendie et de secours (SDMIS) a prononcé sa suspension de fonctions à compter du 16 septembre 2021, au motif qu'il ne justifiait pas de la régularité de sa situation au regard de son obligation de vaccination contre la covid-19. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. D'une part, aux termes du V de l'article 13 de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire : " Les employeurs sont chargés de contrôler le respect de l'obligation prévue au I de l'article 12 par les personnes placées sous leur responsabilité (...) ". Il en résulte qu'il appartient à l'employeur des personnes soumises à l'obligation vaccinale de contrôler le respect de cette obligation, en produisant les documents prévus par ce même article, notamment le certificat de statut vaccinal ou un certificat de contre-indication, ou un certificat de rétablissement. Cet article fait obligation aux employeurs de s'assurer de la conservation sécurisée de ces documents. Les agents ou salariés peuvent transmettre le certificat de rétablissement ou le certificat médical de contre-indication au médecin du travail compétent, qui informe l'employeur du fait que l'obligation a été satisfaite. Il résulte de ces dispositions que l'employeur ne saurait avoir accès à aucune autre donnée de santé.
3. Ainsi que le prévoit le II de l'article 12 de la loi du 5 août 2021, le décret du 1er juin 2021 prescrivant les mesures générales nécessaires à la gestion de crise a prévu les modalités d'établissement et de présentation de ce certificat sous une forme ne permettant d'identifier que la nature de celui-ci et la satisfaction aux critères requis. L'article 2-3 du décret du 1er juin 2021 dans sa rédaction issue du décret du 7 août 2021, applicable au contrôle de l'obligation vaccinale en vertu de son article 49-1, énumère limitativement les informations auxquelles les personnes et services autorisés à contrôler les justificatifs ont accès. Cet article prévoit que : " Tout justificatif généré conformément au présent I comporte les noms, prénoms, date de naissance de la personne concernée et un code permettant sa vérification dans les conditions prévues au II ". L'article 49-1 du même décret énumère les justificatifs acceptés pour que le parcours vaccinal soit validé conforment à l'obligation législative précitée : " Hors les cas de contre-indication médicale à la vaccination mentionnés à l'article 2-4, les éléments mentionnés au second alinéa du II de l'article 12 de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 susvisée sont : /1° Un justificatif du statut vaccinal délivré dans les conditions mentionnées au 2° de l'article 2-2 ; / 2° Un certificat de rétablissement délivré dans les conditions mentionnées au 3° de l'article 2-2 ; / 3° A compter de la date d'entrée en vigueur de la loi et jusqu'au 14 septembre 2021 inclus et à défaut de pouvoir présenter un des justificatifs mentionnés aux présents 1° ou 2°, le résultat d'un examen de dépistage, d'un test ou d'un autotest mentionné au 1° de l'article 2-2 d'au plus 72 heures. A compter 15 septembre 2021 et jusqu'au 15 octobre 2021 inclus, ce justificatif doit être accompagné d'un justificatif de l'administration d'au moins une des doses d'un des schémas vaccinaux mentionnés au 2° de l'article 2-2 comprenant plusieurs doses. ". Ces dispositions ne créent pas, par elles-mêmes, des traitements des données à caractère personnel des agents ou salariés astreints à l'obligation vaccinale et, en tout état de cause, les dispositions de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés s'imposeraient à tout acte qu'un employeur prendrait pour créer un tel traitement. Au surplus, si l'article 6 de la même loi du 6 janvier 1978 interdit de traiter des données à caractère personnel concernant la santé, ce même article, ainsi que le 3° de l'article 44 de la même loi, prévoient que cette interdiction ne s'applique pas aux traitements justifiés par l'intérêt public.
4. Pour établir le respect de l'obligation précitée à laquelle il était assujetti en sa qualité de sapeur-pompier professionnel, M. B... fait valoir qu'il a présenté un " QR code " relatif à son certificat de rétablissement, que son administration n'a cependant pas été en mesure d'exploiter. Toutefois, il précise lui-même avoir produit cette information numérique sur un papier plié qui ne répond pas aux conditions de validité du justificatif prévu par les dispositions de l'article 2-3 précité en l'absence de présentation de ses nom, prénoms, et date de naissance. Le SDMIS fait à ce titre valoir sans être contesté que l'application mobile " TousAntiCovid Vérif " permettait de lire les noms, prénoms et date de naissance de la personne concernée par le " QR code ", ainsi qu'un résultat positif ou négatif de détention de l'une des preuves requises, sans en révéler la nature. En se bornant notamment à faire état d'un courrier de la Commission nationale informatique et libertés du 4 mars 2022, M. B... n'établit pas l'atteinte au principe de confidentialité des données dans la vérification, par son administration, des obligations qui lui incombaient au titre des dispositions rappelées au point 2. De même, la seule circonstance que le certificat mentionnerait la recommandation de ne présenter à l'autorité que le " QR code " est sans incidence sur ce point. En tout état de cause, et à supposer même que le SDMIS ne puisse se prévaloir de l'impossibilité de vérifier l'information numérique de son agent, il ressort des pièces du dossier, en particulier du courriel adressé au requérant le 17 septembre 2021, que ce dernier, invité à transmettre le justificatif requis au médecin du travail astreint au secret médical, s'est abstenu d'y procéder. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'il a régulièrement produit le certificat l'autorisant à exercer son activité, conformément aux dispositions citées au point 3, lors de sa prise de service du 16 septembre 2021, date d'effet de la décision attaquée.
5. D'autre part, la seule circonstance, au demeurant régulière, que le SDMIS a notifié à M. B... le 15 septembre 2021, soit un jour avant sa prise de garde, la décision de suspension à effet au 16 septembre 2021, ne saurait caractériser un détournement de procédure. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le directeur du SDMIS ne pouvait légalement prononcer sa suspension de fonctions à compter du 16 septembre 2021.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
7. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions de la requête de M. B... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lyon et de la décision du 15 septembre 2021, n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions de la requête aux fins d'injonction et d'astreinte doivent ainsi être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du SDMIS, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au service départemental métropolitain d'incendie et de secours.
Délibéré après l'audience du 10 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 septembre 2024.
La rapporteure,
Emilie Felmy
Le président,
Jean-Yves TallecLe greffier en chef,
Cédric Gomez
La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY03744