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25/09/2024 | FRANCE | N°23LY03301

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 3ème chambre, 25 septembre 2024, 23LY03301


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de C... d'annuler l'arrêté du 20 avril 2023 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.



Par un jugement n° 2304053 du 28

septembre 2023, le tribunal administratif de C... a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de C... d'annuler l'arrêté du 20 avril 2023 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par un jugement n° 2304053 du 28 septembre 2023, le tribunal administratif de C... a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 24 octobre 2023, M. A..., représenté par Me Kummer, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de C... du 28 septembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 avril 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale" dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, subsidiairement, dans le même délai et sous la même astreinte, de procéder au réexamen de sa situation administrative et lui délivrer dans l'attente une autorisation de séjour avec autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet devait saisir la commission du titre de séjour eu égard à la durée de sa présence en France et dès lors qu'il remplit les conditions de délivrance du titre de séjour prévu à l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale en raison de la méconnaissance du droit d'être entendu ;

- il remplit de plein droit les conditions de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne peut dès lors faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale dès lors qu'il ne dispose d'aucune attache sociale ou professionnelle dans ce pays.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant tunisien né le 22 juillet 1998, déclare être entré en France le 11 juin 2008. Par des décisions du 20 avril 2023, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A... relève appel du jugement du 28 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de C... a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la légalité des décisions du 20 avril 2023 :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. ".

3. M. A... est entré en France le 5 juillet 2008 selon ses déclarations, alors qu'il était âgé de neuf ans, après le décès de son grand-père paternel qui l'élevait en Tunisie. D'abord recueilli par sa tante en vertu d'un acte de Kafala, il a été placé en foyer de janvier à octobre 2013 et confié au service de l'aide sociale à l'enfance par un jugement en assistance éducative en date du 31 janvier 2014 renouvelé par un jugement du 2 mars 2015. M. A... a obtenu un document de circulation valable du 11 avril 2013 au 21 juillet 2017 et a été scolarité en école élémentaire, au collège, puis en lycée professionnel. Alors que la résidence habituelle du requérant en France au cours des années 2017 à 2020 est contestée dans les écritures de première instance du préfet, les pièces versées au dossier pour les années considérées, à savoir le rappel à la loi pour usage de stupéfiants dont a fait l'objet M. A... le 23 mars 2017, le récépissé de demande de titre de séjour et le refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français du 11 décembre 2018, le dépôt de plainte pour violence sur mineur le 30 janvier 2019, l'intervention chirurgicale subie en novembre 2020 pour une appendicite aigue et l'échéancier du mois de décembre 2020 ne suffisent pas pour démontrer la continuité de sa présence en France. En tout état de cause, si M. A... fait valoir qu'il a toutes ses attaches en France, ayant été élevé par sa tante et son oncle, ses parents résident dans son pays d'origine. Il ressort du jugement en assistance éducative du tribunal pour enfants de C... du 31 janvier 2014 que l'intéressé a conservé des contacts réguliers avec ces derniers, même s'il indique que sa famille l'aurait rejeté. Il ne démontre aucune insertion particulière dans la société française, ne pouvant justifier ni du sérieux de ses études, ni de l'obtention d'un diplôme, ni d'un projet professionnel. Comme il a été dit, il a fait l'objet d'un rappel à la loi pour usage de stupéfiants le 23 mars 2017. Dans ces conditions, et eu égard aux conditions du séjour en France de M. A..., qui a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement par arrêté du 11 décembre 2018, le préfet de l'Isère n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise. Les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent, par suite, être écartés.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : / 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles (...) L. 423-23 (...) à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; / (...) / 4° Dans le cas prévu à l'article L. 435-1 ". Aux termes de l'article L. 435-1 du même code : " (...) / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14 / (...) ".

5. Pour les motifs énoncés au point 3, M. A... ne remplit pas effectivement les conditions de délivrance du titre de séjour prévu à l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. A... n'a pas déposé une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais sur celui de l'article L. 423-23 du même code. Dans ces conditions, M. A... ne peut, en tout état de cause, à l'appui du moyen tiré du vice de procédure résultant de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, utilement soutenir qu'il justifierait d'une durée de présence habituelle en France de plus de dix ans dans les conditions prévues à l'article L. 435-1 du même code. Par suite, le préfet de l'Isère n'était pas tenu de saisir pour avis la commission du titre de séjour avant de rejeter la demande de M. A....

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. M. A... réitère en appel ses moyens tirés de ce qu'il serait protégé contre une mesure d'éloignement, de ce que l'obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour, illégale en raison de la méconnaissance du droit d'être entendu, méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par les premiers juges.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

7. Le moyen de M. A... tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit être écarté par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par les premiers juges.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de C... a rejeté sa demande.

9. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,

Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 septembre 2024.

La rapporteure,

Vanessa Rémy-Néris

Le président,

Jean-Yves Tallec

Le greffier en chef,

Cédric Gomez

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY03301


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY03301
Date de la décision : 25/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LORDONNE
Avocat(s) : KUMMER

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-25;23ly03301 ?
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