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25/09/2024 | FRANCE | N°22LY03426

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 3ème chambre, 25 septembre 2024, 22LY03426


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2020 par lequel le maire de Saint-Vallier a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie.



Par un jugement n° 2003079 du 20 septembre 2022, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 novembre 2022 et 25 avril 2023, M

. C..., représenté par la SELARL Adida et associés, agissant par Me Meunier, demande à la cour, dans le dernier état de ses...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2020 par lequel le maire de Saint-Vallier a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie.

Par un jugement n° 2003079 du 20 septembre 2022, le tribunal administratif de Dijon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 novembre 2022 et 25 avril 2023, M. C..., représenté par la SELARL Adida et associés, agissant par Me Meunier, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 20 septembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2020 par lequel le maire de Saint-Vallier a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie ; ;

3°) de mettre une somme de 2 500 euros à la charge de la commune de Saint-Vallier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il a été victime de harcèlement et de discrimination ;

- ce comportement est à l'origine de son syndrome dépressif ;

- en conséquence, le lien avec le service est établi ; le médecin psychiatre dans son expertise du 18 juin 2019 ne s'est pas prononcé sur l'existence de ce lien.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2023, la commune de Saint-Vallier, représentée par Me Cottignies, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 23 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 février 2024.

Par une lettre du 18 juin 2024, la cour a informé les parties, qu'en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de de la méconnaissance du champ d'application de la loi en raison de l'application de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et de ce que la cour est susceptible de substituer d'office à ces dispositions celles de l'article 21 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère ;

- les conclusions de Mme Bénédicte Lordonné, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Cottignies pour la commune de Saint-Vallier.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C... relève appel du jugement du 20 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 septembre 2020 par lequel le maire de Saint-Vallier a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa maladie.

Sur les dispositions applicables :

2. Lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point.

3. Les dispositions de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans des conditions mentionnées à ce tableau ont été rendues applicables aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale par l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique.

4. L'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, codifié à l'article L. 822-18 du code général de la fonction publique, est entré en vigueur, en tant qu'il s'applique à la fonction publique territoriale, à la date d'entrée en vigueur, le 13 avril 2019, du décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique.

5. Aux termes de l'article 15 de ce décret : " Le fonctionnaire en congé à la suite d'un accident ou d'une maladie imputable au service continue de bénéficier de ce congé jusqu'à son terme. Toute prolongation de ce congé postérieure à l'entrée en vigueur du présent décret est accordée dans les conditions prévues au chapitre Ier. / Les conditions de forme et de délais prévues aux articles 37-2 à 37-7 du décret du 30 juillet 1987 précité ne sont pas applicables aux fonctionnaires ayant déposé une déclaration d'accident ou de maladie professionnelle avant l'entrée en vigueur du présent décret. Les délais mentionnés à l'article 37-3 du même décret courent à compter du premier jour du deuxième mois suivant la publication du présent décret lorsqu'un accident ou une maladie n'a pas fait l'objet d'une déclaration avant cette date ".

6. Il résulte de ces dispositions que les conditions de forme et de délai prévues aux articles 37-2 à 37-7 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, dans sa rédaction issue du décret du 10 avril 2019, sont uniquement applicables, d'une part, aux demandes de prolongation d'un congé pour accident de service ou pour maladie imputable au service pour une période débutant après le 13 avril 2019 et, d'autre part, aux demandes initiales de congé pour invalidité temporaire imputable au service motivées par un accident ou une maladie dont la déclaration a été déposée après cette date.

7. M. C... n'a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie que le 5 mars 2020. Eu égard à la date de cette demande, sont applicables les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 19 janvier 2017, lesquelles prévoient, dans le cas où la maladie ne figure pas dans l'un des tableaux des maladies professionnelles désignés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale, comme c'est le cas pour la pathologie dont souffre le requérant, que la maladie peut être reconnue imputable au service " lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat ".

8. Le pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité administrative en vertu des dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 est le même que celui dont l'investissent les dispositions de l'article 57 de la loi susvisée du 26 janvier 1984. Les garanties dont sont assortis ces textes sont similaires. Dans ces conditions, et ainsi qu'en ont été informées les parties, il y a lieu de substituer ces dispositions à la base légale retenue par le maire de Saint-Vallier.

9. D'une part, M. C..., affecté à la direction des services techniques de la commune de Saint-Vallier, exerçait les fonctions d'entretien des bâtiments, de propreté et de conservation du patrimoine municipal bâti et non bâti. Pour soutenir qu'il a fait l'objet de harcèlement moral de la part de son employeur, M. C..., fait valoir qu'il a été " placardisé ", sans accès à son bureau ni à l'outil informatique indispensable dans le cadre de la gestion des accès des bâtiments municipaux. Cependant, les attestations de la psychologue, psychothérapeute et thérapeute familiale qu'il produit, établies sur la seule base de ses déclarations, ne peuvent venir au soutien de ses allégations, qui ne sont corroborées par aucun document ou témoignage probant. Les courriers dont il fait état dénonçant auprès de la collectivité la situation de harcèlement moral qu'il prétend subir n'invoquent aucun fait précis ou daté. S'il évoque dans ses écritures un refus de formation au montage et démontage d'échafaudage pour des motifs de santé qu'il conteste, ce seul élément ne suffit en tout état de cause pas pour faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre, lequel suppose des agissements répétés.

10. D'autre part, les certificats médicaux que le requérant produit, également rédigés à partir de ses propres déclarations, sans identifier aucune cause professionnelle susceptible d'expliquer l'état pathologique du patient, ne permettent pas davantage de constater l'existence de circonstances particulières tenant à ses conditions de travail de nature à faire reconnaître sa pathologie comme étant imputable au service. Il ressort des pièces du dossier, comme l'a relevé le docteur A..., expert psychiatre, dans son rapport d'expertise du 18 juin 2019, que le requérant souffre depuis de nombreuses années de troubles anxio-dépressifs et présente une personnalité très sensitive allant parfois jusqu'à un vécu persécutif. Si les difficultés dans son travail, en particulier celles apparues à compter du changement de chef de service de la régie technique en 2016, ont pu participer à une décompensation dépressive, le requérant présentait un état pathologique antérieur. Sa pathologie dépressive ayant pu être favorisée par des éléments de sa personnalité, les éléments du dossier ne permettent pas de retenir l'existence d'un lien essentiel entre sa pathologie et l'exercice des fonctions. La commission de réforme a d'ailleurs rendu un avis défavorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie le 1er septembre 2020.

11. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. C... demande au titre des frais qu'il a exposés soit mise à la charge de la commune de de Saint-Vallier, qui n'est pas partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du requérant la somme qu'elle demande au titre de ses frais non compris dans les dépens sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Vallier tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et à la commune de Saint-Vallier.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,

Mme Vanessa Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 septembre 2024.

La rapporteure,

Vanessa Rémy-Néris

Le président,

Jean-Yves Tallec

Le greffier en chef,

Cédric Gomez

La République mande et ordonne au préfet de Saône-et-Loire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03426


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03426
Date de la décision : 25/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LORDONNE
Avocat(s) : ADIDA & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-25;22ly03426 ?
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