Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... H... et Mme F... D..., épouse H... ont demandé au tribunal administratif de Lyon, chacun pour ce qui le concerne, d'annuler les arrêtés du 26 janvier 2023 par lesquels le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé, à leur encontre, une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de six mois.
Par un jugement n° 2303585-2303586 du 21 septembre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 15 décembre 2023, M. et Mme H..., représentés par Me Vernet, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler les arrêtés du 26 janvier 2023 ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Rhône, à titre principal, de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de leur situation dans le délai de deux mois et de leur délivrer, sous 48 heures, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à leur conseil, une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Ils soutiennent que :
- les décisions de refus de séjour méconnaissent le 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- ces décisions méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elles sont entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur leur situation personnelle ;
- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et octroyant un délai de départ volontaire de trente jours sont illégales du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- ces décisions méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elles sont entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur leur situation personnelle ;
- les décisions désignant le pays de renvoi sont illégales du fait de l'illégalité des décisions de refus de séjour et portant obligation de quitter le territoire français.
La préfète du Rhône, qui a reçu communication de la requête, n'a pas produit d'observations.
M. et Mme H... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 novembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Le rapport B... Pruvost, président, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme H..., ressortissants algériens nés respectivement en 1963 et en 1966, sont entrés régulièrement en France le 27 février 2018, accompagnés de leur fils mineur, E... G... H..., né en 2005. Par des arrêtés du 1er septembre 2020, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 janvier 2021, le préfet du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour en qualité de parents d'enfant malade et les a obligés à quitter le territoire français. Ils ont à nouveau sollicité, le 28 juin 2022, leur admission au séjour en raison de l'état de santé de leur fils. Par des arrêtés du 26 janvier 2023, le préfet du Rhône a refusé de faire droit à leur demande, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays à destination et a prononcé, à leur encontre, des interdictions de retour sur le territoire français pour une durée de six mois. Ils relèvent appel du jugement du 21 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon, après les avoir jointes, a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur la légalité des décisions de refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 5) Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. M. et Mme H..., qui résident en France depuis 2018, se prévalent de l'état de santé de leur fils E... G..., âgé de dix-huit ans à la date des décisions attaquées. Il ressort toutefois des pièces du dossier que ce dernier a fait l'objet, le 26 janvier 2023, d'une décision de refus d'admission au séjour prise par le préfet du Rhône sur le fondement du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, après un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 10 janvier 2023 indiquant que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Leur fils est atteint de phénylcétonurie, maladie génétique rare entraînant, du fait d'une mauvaise assimilation des protéines, l'accumulation progressive de phénylalanine dans l'organisme, toxique pour le cerveau, dont la prise en charge nécessite le suivi d'un régime hypoprotidique strict et la prise de compléments alimentaires consistant en un mélange d'acides aminés sans phénylalanine, qui sont spécialement indiqués au cours de l'enfance et de l'adolescence, afin d'éviter des séquelles neurologiques. Si M. et Mme H... produisent plusieurs certificats médicaux établis par le praticien hospitalier qui suit leur fils, ainsi qu'un certificat médical établi par un médecin généraliste, qui indiquent qu'en cas d'arrêt du traitement, les manifestations de la maladie vont s'aggraver régulièrement, ces documents, peu circonstanciés quant au niveau de gravité d'un défaut de prise en charge médicale, ne permettent pas de contredire l'avis précité du collège de médecins, rendu sur la base d'un rapport faisant état d'une stabilisation de l'état B... H..., qui est désormais adulte. Si les requérants font valoir que les produits hypoprotidiques et les compléments alimentaires, notamment le PKU Sphère inclus dans son régime alimentaire ne sont pas disponibles en Algérie, cette circonstance est en-elle-même sans incidence sur l'appréciation portée par le préfet, dès lors qu'ainsi qu'il vient d'être dit, il n'est pas établi que le défaut de prise en charge devrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Le fils B... et Mme H... ne remplissant pas les conditions lui ouvrant droit à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Algérie, pays dans lequel M. et Mme H..., qui ne justifient d'aucune intégration socio-professionnelle en France, ont vécu, respectivement, jusqu'à l'âge de cinquante-cinq ans et cinquante-deux ans, et dans lequel ils ne soutiennent pas être dépourvu d'attaches. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de leur séjour en France, les décisions de refus de séjour attaquées n'ont pas porté une atteinte disproportionnée au droit B... et Mme H... au respect de leur vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels elles ont été prises. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, M. et Mme H... ne sont pas fondés à soutenir que ces décisions sont entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur leur situation personnelle.
Sur la légalité des obligations de quitter le territoire français et des décisions fixant le délai de départ volontaire :
4. En premier lieu, les décisions de refus de séjour n'étant pas illégales, M. et Mme H... ne sont pas fondés à exciper de leur illégalité à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire.
5. En second lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, soulevés à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ volontaire, doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3.
Sur la légalité des décisions désignant le pays de destination :
6. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. et Mme H... ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité des décisions les obligeant à quitter le territoire français à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions désignant le pays de renvoi. Ces dernières décisions n'ayant été prises ni en application, ni sur le fondement des décisions de refus de titre de séjour, M. et Mme H... ne sauraient utilement exciper de l'illégalité de ces refus de séjour à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions fixant le pays de renvoi.
7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme H... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, doivent également être rejetées leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'allocation de frais liés au litige.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête B... et Mme H... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... H..., à Mme F... D..., épouse H... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 2 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
M. Haïli, président-assesseur,
M. Porée, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 septembre 2024.
Le président-rapporteur,
D. Pruvost
Le Président-Assesseur,
X. Haïli
La greffière,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY03859