La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/09/2024 | FRANCE | N°23LY01053

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 19 septembre 2024, 23LY01053


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 15 juin 2021 par lequel le directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale (DASEN) de la Loire a affecté Mme B... D... en qualité de directrice de l'école de Moingt à Montbrison, à titre définitif, à compter du 1er septembre 2021.



Par un jugement n° 2106452 du 27 janvier 2023, le tribunal a rejeté sa demande.





Procédure de

vant la cour



Par une requête enregistrée le 27 mars 2023, Mme C..., représentée par Me Salen, demande à la cour :

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 15 juin 2021 par lequel le directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale (DASEN) de la Loire a affecté Mme B... D... en qualité de directrice de l'école de Moingt à Montbrison, à titre définitif, à compter du 1er septembre 2021.

Par un jugement n° 2106452 du 27 janvier 2023, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 27 mars 2023, Mme C..., représentée par Me Salen, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre à l'académie de Lyon de la nommer directrice de l'école de Moingt à Montbrison, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le signataire de la décision n'était pas compétent ;

- Mme D... ne pouvait, sur le fondement de l'article 25-3 du décret du 1er août 1990 relatif au statut particulier des professeurs des écoles et des lignes directrices de gestion académiques relatives à la mobilité des personnels de l'éducation nationale, publiées au bulletin d'information rectorales (BIR) du 22 mars 2021, se voir appliquer une " mesure de carte scolaire " dans la mesure où elle n'avait pas été nommée à titre définitif sur son poste précédent et que le poste qu'elle occupait précédemment, qu'il s'agisse de son poste de directrice de l'école Chemin rouge, occupé pendant l'année scolaire 2019-2020, ou du poste d'animation et de soutien en territoires ruraux de l'année 2020-2021, n'a été ni supprimé ni ne lui a été retiré ;

- à supposer qu'elle ait pu bénéficier d'une mesure de carte scolaire, elle ne pouvait bénéficier de la bonification correspondante dans la mesure où l'établissement qu'elle a quitté et celui qu'elle a rejoint n'appartiennent pas au même groupe au sens de l'article du décret du 26 janvier 1983 portant dispositions statutaires pour les instituteurs et les professeurs des écoles chargés de certaines fonctions ;

- en procédant à la nomination de Mme D..., alors qu'elle disposait, en réalité, d'un nombre de points inférieur à elle, l'académie de Lyon a méconnu les dispositions de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 et les lignes directrices relatives au mouvement.

Par un mémoire enregistré le 26 janvier 2024, le recteur de l'académie de Lyon conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- il n'y avait pas lieu à statuer sur la demande de Mme C... dès lors que celle-ci a été enregistrée le 6 août 2021 alors qu'elle s'était vue retirer son emploi de direction à compter du 29 juin 2021 ;

- les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Mme D... à laquelle la requête a été communiquée n'a pas présenté d'observations.

Par une ordonnance du 29 janvier 2024, l'instruction a été close le 8 mars 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 90-680 du 1er août 1990 ;

- le décret n° 89-122 du 24 février 1989 ;

- le décret n° 2018-303 du 25 avril 2018 ;

- les lignes directrices de gestion ministérielles relatives à la mobilité des personnels du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, publiées au bulletin officiel spécial n° 9 du 16 novembre 2020 ;

- les lignes directrices de gestion académiques relatives à la mobilité des personnels du ministre de l'éducation nationale publiées au bulletin d'information rectorale de l'académie de Lyon du 22 mars 2021 ;

- la note de service de l'inspecteur d'académie, directeur académique des services de l'éducation nationale de la Loire " Mouvement des enseignants du 1er degré public du département de la Loire - Année 2021 ", publiée au bulletin d'information rectoral du 6 avril 2021 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

- et les observations de Mme C... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 septembre 2024, présentée par Mme C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., professeure des écoles de classe normale, alors affectée en qualité de directrice de l'école Chemin rouge à Montbrison, a participé en avril 2021 au mouvement intra-départemental de la Loire des personnels enseignants du 1er degré pour l'année scolaire 2021-2022. Elle a sollicité dans ce cadre le poste de directrice de l'école de Moingt située à Montbrison qu'elle n'a pas obtenu. Elle a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 15 juin 2021 par lequel le directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale (DASEN) de la Loire a affecté Mme D... en qualité de directrice de l'école de Moingt, à titre définitif, à compter du 1er septembre 2021. Elle relève appel du jugement du 27 janvier 2023 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Si Mme C... avait fait l'objet d'un arrêté portant retrait de son poste de directrice de l'école Chemin rouge de Montbrison, qui n'était au demeurant pas devenu définitif, lorsque le tribunal s'est prononcé sur la légalité de l'arrêté du 15 juin 2021 par lequel le DASEN de la Loire a affecté Mme D... en qualité de directrice de l'école de Moingt, cette circonstance n'était pas de nature à rendre sans objet la demande d'annulation présentée par l'intéressée. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement aurait omis de prononcer un non-lieu à statuer doit être écarté.

Sur la recevabilité de la demande présentée par Mme C... devant le tribunal :

3. Dès lors que Mme C... avait demandé sa mutation sur le poste de directrice de l'école de Moingt, elle justifiait d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre l'arrêté du 15 juin 2021 et ce alors même qu'elle avait fait l'objet d'un arrêté, au demeurant non définitif, de retrait de son emploi de directrice de l'école Chemin rouge à Montbrison à compter du 29 juin 2021. Par suite, la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de Mme C... opposée par le recteur de l'académie de Lyon devant le tribunal doit être écartée.

Sur la légalité de l'arrêté du 15 juin 2021 :

4. Aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, alors en vigueur : " I. L'autorité compétente procède aux mutations des fonctionnaires en tenant compte des besoins du service. / II. - Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service et sous réserve des priorités instituées à l'article 62 bis, les affectations prononcées tiennent compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée : (...) / 5° Au fonctionnaire, y compris relevant d'une autre administration, dont l'emploi est supprimé et qui ne peut être réaffecté sur un emploi correspondant à son grade dans son service. / (...) IV. - Les décisions de mutation tiennent compte, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État, des lignes directrices de gestion en matière de mobilité prévues à l'article 18 de la présente loi. / Dans le cadre de ces lignes directrices, l'autorité compétente peut, sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, définir des critères supplémentaires établis à titre subsidiaire. Elle peut notamment conférer une priorité au fonctionnaire ayant exercé ses fonctions pendant une durée minimale dans un territoire ou dans une zone rencontrant des difficultés particulières de recrutement. (...) ". Aux termes de l'article 25-3 du décret du 1er août 1990 visé ci-dessus relatif au statut particulier des professeurs des écoles : " Pour prononcer les affectations, il est tenu compte, dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, des priorités prévues par l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 précitée et, en outre, des critères de priorité suivants : / (...) 3° La situation de l'agent affecté dans un emploi supprimé en raison d'une modification de la carte scolaire ; (...) ".

5. Les lignes directrices de gestion académiques de l'académie de Lyon du 22 mars 2021 visées ci-dessus précisent : " Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, les affectations prononcées tiennent compte ainsi des demandes formulées par les intéressés au titre des priorités suivantes : (...) Bonifications liées à l'expérience et au parcours professionnel / Dispositions communes aux premier et second degrés (...) / Bonification pour les agents affectés dans un emploi supprimé en raison d'une modification de la carte scolaire ". L'annexe 2, qui décline les orientations générales et les principes régissant les procédures de mutations aux personnels enseignants du premier degré prévoit : " III.2. - Mesure de carte scolaire / Les enseignants concernés par un retrait d'emploi bénéficient de priorités sur vœu de réaffectation. (...) / Détermination de l'enseignant bénéficiaire d'une mesure de carte scolaire : / Seuls les enseignants nommés à titre définitif, sur un poste définitif, sont concernés par une mesure de carte scolaire. / Niveau de bonification : (...) /

".

6. A la suite de l'annulation par un jugement du 6 juillet 2020 du tribunal administratif de Lyon de l'arrêté du 6 juin 2019 par lequel Mme D... avait été affectée à compter du 1er septembre 2019 en qualité de directrice de l'école élémentaire publique Chemin rouge à Montbrison, le DASEN de la Loire l'a informée qu'elle bénéficierait au titre du mouvement de mutation de 2021 des mesures de carte scolaire de retrait d'emploi. Lors du mouvement de mutation, elle a obtenu une bonification de deux cents points au titre de la carte scolaire. Toutefois, aucune des dispositions précitées ne prévoit, en l'absence de suppression de poste, l'attribution de points à un agent dont l'affectation a été annulée et que l'administration aurait dû, par l'effet de cette annulation, replacer dans la situation antérieure à cette décision d'affectation. En attribuant deux cents points de bonification à Mme D... pour ce motif, le DASEN a commis une erreur de droit.

7. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

8. Eu égard à ses motifs, et alors que d'autres personnes avaient postulé sur le poste de directrice de l'école de Moingt et qu'il n'est pas sérieusement contesté qu'ils disposaient de plus de points que Mme C..., le présent arrêt n'implique pas d'enjoindre à l'académie de Lyon de nommer cette dernière sur ce poste. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 27 janvier 2023 et l'arrêté du directeur académique des services départementaux de l'éducation nationale de la Loire du 15 juin 2021 sont annulés.

Article 2 : L'État versera à Mme C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., à Mme B... D... et à la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au recteur de l'académie de Lyon.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 septembre 2024.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

V.M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY01053

ar


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY01053
Date de la décision : 19/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Enseignement et recherche - Questions propres aux différentes catégories d'enseignement - Enseignement du premier degré - Instituteurs et professeurs des écoles.

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Affectation et mutation.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : SALEN

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-19;23ly01053 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award