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19/09/2024 | FRANCE | N°23LY00119

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 2ème chambre, 19 septembre 2024, 23LY00119


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016, ainsi que des pénalités correspondantes.



Par un jugement n° 2001982 du 10 novembre 2022, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une requête et des

mémoires, enregistrés les 13 janvier et 6 octobre 2023 et 2 février 2024, Mme B..., représentée par le cabinet CMS Francis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015 et 2016, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2001982 du 10 novembre 2022, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 13 janvier et 6 octobre 2023 et 2 février 2024, Mme B..., représentée par le cabinet CMS Francis Lefebvre Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration a méconnu l'article L. 47 A II du livre des procédures fiscales en n'informant pas la SASU Mes Bourgognes que le traitement informatique de sa comptabilité impliquerait un rapprochement des quantités achetées / factures d'achats et des quantités vendues / factures de ventes, ni un rapprochement des quantités en stocks et des quantités d'achats et de ventes ; cette société n'a pas été davantage informée d'un traitement informatique de la fiabilité des recettes déclarées par l'examen des disquettes de sauvegarde effectuées sur caisse KSD ;

- la SASU Mes Bourgognes n'a pas disposé d'un délai de réflexion suffisant pour choisir une des trois options de réalisation des traitements informatiques ; le courrier de la vérificatrice du 18 octobre 2017 ne fixe aucun délai pour procéder au choix précité, et la vérificatrice ne l'a pas informée du droit de demander un délai ; la société devait disposer d'un délai de réflexion de quelques jours lui permettant d'échanger avec ses conseils ou de prendre attache avec un prestataire en informatique ;

- l'article L. 57 du livre des procédures fiscales a été méconnu en l'absence de précisions sur certains traitements informatiques effectués par l'administration ;

- l'administration a méconnu le d. du III de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales en communiquant les résultats des traitements informatiques à la SASU Mes Bourgognes, sous un format inexploitable informatiquement ; l'article L. 300-4 du code des relations entre le public et l'administration prévoit une mise à disposition de document sous forme électronique dans un standard exploitable par un système de traitement automatisé ;

- la procédure d'imposition est irrégulière en raison d'erreurs de la vérificatrice concernant notamment les écarts négatifs, résultant nécessairement de la comparaison entre les achats et les ventes facturées de vins de la SASU Mes Bourgognes, qui ne sont pas identifiés de la même façon entre ces deux opérations commerciales ;

- les paragraphes 160, 215 et 310 de la documentation administrative référencée BOI-CF-IOR-60-40-30 sont opposables à l'administration ;

- il doit être fait application d'un taux de démarque inconnue à tout le moins de 1 % tel que constaté dans le secteur de la distribution ;

- la SASU Mes Bourgognes n'a pas pu facturer des ventes de bouteilles de vins qui auraient été achetées pour zéro euro.

Par des mémoires, enregistrés les 8 août et 26 décembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 5 février 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 5 mars 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Porée, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laval, rapporteur public,

- et les observations de Me Ladarré, représentant Mme B... ;

Une note en délibéré, présentée pour Mme B..., a été enregistrée le 4 septembre 2024 ;

Considérant ce qui suit :

1. La SASU Mes Bourgognes, qui exerçait une activité de commerce de détail de vins sous l'enseigne Mes Bourgognes à Beaune (Côte-d'Or) et dont Mme B... était la présidente et l'associée unique, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur la période du 27 août 2014 au 31 août 2016 au terme de laquelle la vérificatrice a rejeté sa comptabilité, procédé à la reconstitution de ses chiffres d'affaires et réintégré dans ses résultats, outre des honoraires d'avocat comptabilisés en charges déductibles non engagés dans son intérêt, les omissions de recettes révélées par la reconstitution de chiffre d'affaires de la société. Mme B... et son époux ont, en conséquence de ce contrôle, été assujettis, au titre des années 2015 et 2016, à des compléments d'impôt sur le revenu procédant de l'imposition entre les mains de Mme B..., en qualité de maître de l'affaire, des omissions de recettes que l'administration a soumises à l'impôt dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts. Ces impositions ainsi que les contributions sociales corrélativement mises à la charge du foyer fiscal, en application de la procédure contradictoire, ont été assorties des intérêts de retard et de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts. Mme B... relève appel du jugement du 10 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Dijon, après avoir accueilli la demande de substitution de base légale présentée en première instance par l'administration tendant au maintien de l'imposition des distributions relatives aux omissions de recettes sur le fondement du 1° de l'article 109-1 du même code, a rejeté sa demande de décharge de ces impositions et pénalités.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En vertu du principe d'indépendance des procédures, les moyens relatifs à la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre d'une société soumise au régime d'imposition des sociétés de capitaux sont sans influence sur l'imposition personnelle à l'impôt sur le revenu des bénéficiaires des revenus distribués par cette société. Par suite, Mme B... ne peut utilement faire valoir, pour contester les compléments d'impôt sur le revenu mises à la charge du foyer fiscal au titre des années 2015 et 2016, que la procédure d'imposition suivie avec la SASU Mes Bourgognes est entachée d'irrégularité, et notamment que la proposition de rectification adressée à la SASU Mes Bourgognes n'est pas suffisamment motivée.

Sur le bien-fondé des impositions :

3. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ".

4. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) ".

5. La réponse aux observations du contribuable du 25 juillet 2018 adressée à M. et Mme B... mentionne que la proposition de rectification du 9 avril 2018 leur a été notifiée le 18 avril 2018, qu'ils n'ont pas demandé une prorogation du délai de réponse de trente jours, que leurs observations ont été formulées plus de trente jours après la réception de la proposition de rectification, et qu'ils sont ainsi considérés comme ayant tacitement accepté les rectifications. De plus, il résulte de l'instruction que M. et Mme B... ont présenté leurs observations à la suite de cette proposition de rectification le 14 juin 2018, qui ont été reçues le 15 juin suivant par l'administration. Dans ces conditions, Mme B... s'étant abstenue de répondre dans le délai de trente jours à la proposition de rectification, la charge de la preuve lui incombe.

6. En premier lieu, Mme B... se prévaut d'un taux de démarque inconnue à tout le moins de 1 %, qui correspond à l'écart entre le stock théorique et l'inventaire réel dans les rayons en raison de vols à l'étalage, de vols internes, de fraudes de fournisseurs et de pertes administratives. Il résulte du jugement du tribunal de commerce de Dijon du 16 mars 2017 que l'époux de Mme B... travaillait de manière permanente dans l'établissement qui disposait ainsi, de deux personnes pour la surveillance. La requérante ne démontre pas de vols à l'étalage, ni de la casse de bouteilles alors, au demeurant, que le taux revendiqué de 1 % est celui retenu dans le secteur de la grande distribution et non dans celui de la vente au détail.

7. En second lieu, Mme B... soutient qu'il ne peut être retenu au titre des ventes facturées par la SASU Mes Bourgognes, des prix d'achats de bouteilles nuls. Toutefois, par un jugement du 16 mars 2017, le tribunal de commerce de Dijon a condamné l'époux de Mme B... à payer à la société Holding les Etangs des dommages et intérêts de 314 000 euros en réparation du préjudice subi pour avoir notamment subtilisé de nombreuses bouteilles dans le stock de la SARL Fredane. Le tableau Excel produit par la requérante relevant les absences de recoupements par la vérificatrice entre les achats et les ventes facturées en raison notamment d'erreurs entachant le millésime ou l'appellation de vins, les noms de fournisseurs ou de domaines, ne peut suffire à lui-seul à démontrer les erreurs invoquées.

8. Si Mme B... se prévaut d'une correspondance des achats et des ventes facturés de vins qu'ils soient appelés Meursault village ou Meursault Narvaux, et Chassagne-Montrachet village ou Chassagne-Montrachet Les Ancégnières millésime 2012, il résulte de l'attestation du 8 octobre 2019 du domaine Colin Morey Pierre Yves que ces trois appellations font partie respectivement des Meursault village et Chassagne-Montrachet village. En outre, il résulte d'une facture du 1er octobre 2015 du domaine Colin Morey Pierre Yves qu'il identifie précisément les Chassagne Montrachet village Ancégnières et les Meursault village Narvaux.

9. Si Mme B... produit en appel une attestation du 8 octobre 2019 du domaine Bizot selon laquelle le Bourgogne rouge Pinot noir 2012 et le Bourgogne Le Chapitre sont un seul et même vin, elle n'apporte aucune précision dans ses écritures sur la portée de cette attestation alors qu'il résulte de l'annexe C1 à la réponse de l'interlocuteur départemental du 5 juillet 2019 que des modifications ont été apportées sur une facture d'achats auprès du domaine Bizot et sur des factures de ventes par la SASU Mes Bourgognes concernant le vin Bourgogne Le Chapitre - Bourgogne Pinot noir.

10. Si Mme B... produit en appel une attestation de la SARL Château de Béru du 29 août 2019 selon laquelle elle a vendu à la SASU Mes Bourgognes entre le 1er septembre 2014 et le 31 août 2016 du Chablis 1er cru Vaucoupin millésime 2012, la vérificatrice a relevé deux factures des 23 février 2015 et 30 mai 2016 de la SARL Château de Béru mentionnant des ventes de Chablis 1er cru Vaucoupin millésimes 2013 et 2014 de sorte que l'attestation de cette société ne présente pas de caractère probant.

11. Il résulte enfin de l'instruction que la vérificatrice a retenu un prix d'achat nul pour douze bouteilles de Volnay Champans ayant fait l'objet d'une facture de la SASU Mes Bourgognes mentionnant un millésime 2013, ainsi que des achats revendus de douze bouteilles, de la même appellation millésime 2012, n'ayant pas fait l'objet de facturation par ladite société. La facture d'achat du domaine des Comtes Lafon et la seule circonstance qu'il s'agit du même vin provenant du même domaine en quantités identiques, ne suffisent pas à démontrer une simple erreur de millésime sur la facture de vente alors, au demeurant, que Mme B... pouvait disposer de bouteilles millésime 2013 qui ont pu être prélevées par son époux dans le stock de la SARL Fredane.

12. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 2 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

M. Haïli, président-assesseur,

M. Porée, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 septembre 2024.

Le rapporteur,

A. Porée

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY00119


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00119
Date de la décision : 19/09/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Questions communes - Divers.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Arnaud POREE
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : CMS FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-19;23ly00119 ?
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