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10/07/2024 | FRANCE | N°22LY03756

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 3ème chambre, 10 juillet 2024, 22LY03756


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 6 juillet 2021 par laquelle le directeur général des Hospices Civils de Lyon (HCL) a prononcé son licenciement pour motif disciplinaire, d'enjoindre à cette autorité de le réintégrer dans ses fonctions, dans le délai de quinze jours suivant la notification du jugement et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et de mettre à la charge des Hospices Civils de Lyon une somme de 2 000 euros au titre

de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 6 juillet 2021 par laquelle le directeur général des Hospices Civils de Lyon (HCL) a prononcé son licenciement pour motif disciplinaire, d'enjoindre à cette autorité de le réintégrer dans ses fonctions, dans le délai de quinze jours suivant la notification du jugement et sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et de mettre à la charge des Hospices Civils de Lyon une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2107133 du 9 décembre 2022, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du directeur général des HCL portant licenciement de M. C..., a enjoint à cette autorité de réintégrer l'intéressé dans ses fonctions dans le délai de deux mois suivant la notification du jugement, a mis à la charge des HCL une somme de 1 400 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 22 décembre 2022, les Hospices Civils de Lyon (HCL), représentés par la SELARL Carnot Avocats, agissant par Me Prouvez, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 9 décembre 2022 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les faits reprochés à M. C..., dont la matérialité est établie, ne reposent pas sur ses capacités professionnelles ou une inadaptation sur un poste d'encadrement, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, mais sont constitutifs de manquements dans l'accomplissement de ses missions ;

- au regard de l'accumulation, de la gravité des manquements, du niveau de responsabilités de l'agent et des troubles causés au bon fonctionnement du service, la sanction du licenciement, prise après avis favorable du conseil de discipline, est proportionnée contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges.

La requête a été communiquée à M. C... qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par une ordonnance du 23 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n°91-155 du 6 février 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ;

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations de Me Rey pour les Hospices civils de Lyon.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C... a été recruté par les Hospices civils de Lyon en 2014 comme chargé de mission au sein de la direction de la pharmacie, sous couvert d'un contrat à durée déterminée transformé par la suite en contrat à durée indéterminée. Il a exercé depuis le 1er avril 2019, les fonctions d'attaché d'administration en charge des pôles d'odontologie et de gériatrie répartis sur trois sites, à savoir le centre de soins dentaires, l'hôpital des Charpennes et l'hôpital Edouard Herriot. Les Hospices civils de Lyon relèvent appel du jugement du 9 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 6 juillet 2021 par laquelle le directeur général de cet établissement hospitalier a prononcé le licenciement de M. C... pour motif disciplinaire.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 39 du décret du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de la fonction publique hospitalière susvisé, dans sa version alors applicable : " Les sanctions disciplinaires susceptibles d'être appliquées aux agents contractuels sont les suivantes : / 1° L'avertissement ;/ 2° Le blâme ; / 3° L'exclusion temporaire des fonctions avec retenue de traitement pour une durée maximale de six mois pour les agents recrutés pour une période déterminée et d'un an pour les agents sous contrat à durée indéterminée. / 4° Le licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement. / La décision prononçant une sanction disciplinaire doit être motivée ". Selon l'article 39-2 du même décret : " Tout manquement au respect des obligations auxquelles sont assujettis les agents publics, commis par un agent contractuel dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, est constitutif d'une faute l'exposant à une sanction disciplinaire (...) ".

3. Pour prononcer le licenciement de M. C..., le directeur de l'établissement hospitalier a relevé que l'intéressé, d'une part, a rencontré des difficultés dans la gestion du temps de travail de ses équipes, notamment en validant des heures non réalisées, en omettant de contrôler et de suivre régulièrement les pointages et en n'intervenant à ce sujet qu'après les alertes du bureau du personnel, d'autre part, a manqué de discernement le 2 octobre 2020 lors d'une réunion, en répondant brutalement à une assistante. La décision attaquée se fonde également sur plusieurs autres manquements révélés lors de l'enquête administrative le concernant et notamment l'absence d'animation des équipes, l'absence de réunions périodiques, des propos déplacés et insistants relevant de la vie sentimentale privée, le manque de communication avec ses collaborateurs, et sa difficulté à gérer une activité sur plusieurs sites.

4. D'une part, il ressort des pièces du dossier, notamment des écritures des HCL, que près d'un an après son entrée en fonctions, M. C... a rencontré des difficultés dans l'accomplissement de ses missions et qu'au cours d'un entretien du 4 juin 2020, il lui a été indiqué que des progrès étaient attendus. Les premiers juges ont relevé que les très nombreux témoignages recueillis au cours de l'enquête administrative menée par la direction des ressources humaines établissent que M. C... n'était que peu ou pas présent sur les différents sites, n'organisait que très peu de réunions de travail, était défaillant dans la tenue des entretiens d'évaluation de ses agents, et dans l'utilisation des logiciels, cette carence ayant été à l'origine d'erreurs dans l'organisation et la validation des congés ou dans la gestion du pointage des heures de service. Comme l'ont estimé les premiers juges, les carences ainsi révélées dans la manière de servir de M. C..., de nature à établir son incapacité à remplir les fonctions qui lui avaient été confiées, relevaient d'une insuffisance professionnelle et non d'un manquement fautif de l'intéressé à ses obligations.

5. D'autre part, il ressort également des pièces du dossier qu'au cours d'une réunion organisée le 2 octobre 2020, M. C... a refusé sèchement la parole à une assistante, ce qui a donné lieu à une altercation après la réunion. Si ce dernier reconnaît avoir à ce titre commis une maladresse, la majorité des témoignages recueillis au cours de l'enquête font état d'un comportement variable et impulsif. Il ressort également des résultats de cette même enquête que M. C... a tenu à plusieurs reprises des propos déplacés, à connotation sexuelle, dans le cadre du service et a adopté un comportement ambigu avec de nombreuses collègues féminines, se manifestant par un mélange entre la vie privée et la vie professionnelle, l'une d'entre elles ayant même été l'objet pendant plusieurs mois d'une tentative de séduction très insistante malgré ses refus explicites opposés à de nombreuses reprises. Eu égard au comportement gravement inadapté de M. C... dans l'exercice de ses fonctions, qui relève d'un manquement à l'obligation de dignité lui incombant, et aux troubles causés au bon fonctionnement du service, la sanction du licenciement, prise après avis favorable de la commission administrative paritaire siégeant en matière disciplinaire, n'est pas entachée de disproportion, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges.

6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen invoqué par M. C... à l'encontre de la décision de licenciement contesté.

7. M. C... a fait valoir devant les premiers juges le moyen tiré de l'incompétence de Mme B..., directrice adjointe des HCL, signataire de la décision en litige. En réponse, les HCL se sont bornées à faire valoir, sans en mentionner la date ou la référence, que cette dernière disposerait d'une délégation de signature ayant fait l'objet d'une publication et à renvoyer à l'intégralité des recueils des actes administratifs de la préfecture du Rhône du mois de juin 2021. Si Mme B... disposait en effet d'une délégation de signature en date du 22 juin 2021, publiée au recueil des actes administratifs spécial du 29 juin 2021, l'article 5 de cette délégation excluait notamment de son champ d'application les décisions de sanctions disciplinaires. Il suit de là que le licenciement pour motif disciplinaire de M. C... a été pris par une autorité incompétente et doit être annulée pour ce motif.

8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les HCL ne sont pas fondées à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 6 juillet 2021 portant licenciement de M. C....

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions que les HCL, partie perdante, présentent sur leur fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête des Hospices Civils de Lyon est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié aux Hospices Civils de Lyon et à M. A... C....

Délibéré après l'audience du 25 juin 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

M. Joël Arnould, premier conseiller,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juillet 2024.

La rapporteure,

Bénédicte LordonnéLa présidente,

Emilie Felmy

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03756


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03756
Date de la décision : 10/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-01 Fonctionnaires et agents publics. - Agents contractuels et temporaires. - Fin du contrat. - Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : CARNOT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-10;22ly03756 ?
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