La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/06/2024 | FRANCE | N°22LY02147

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 20 juin 2024, 22LY02147


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



Le département de l'Ain a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la société Paris Nord Assurances Services (PNAS) à le garantir, au titre du contrat d'assurance applicable à compter du 1er janvier 2011, des condamnations mises à sa charge et payées dans le cadre du litige l'opposant à M. A..., à hauteur des sommes de 62 398 euros en remboursement de la somme versée à M. A... et de 6 839,18 euros pour les frais d'expertise, dans un délai de trois mois à com

pter de la notification du jugement.



Par jugement n° 20000751 du 12 mai 2022, le trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le département de l'Ain a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la société Paris Nord Assurances Services (PNAS) à le garantir, au titre du contrat d'assurance applicable à compter du 1er janvier 2011, des condamnations mises à sa charge et payées dans le cadre du litige l'opposant à M. A..., à hauteur des sommes de 62 398 euros en remboursement de la somme versée à M. A... et de 6 839,18 euros pour les frais d'expertise, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

Par jugement n° 20000751 du 12 mai 2022, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 juillet 2022, le 20 avril 2022 et le 21 juin 2023, le département de l'Ain, représenté par Me Abecassis, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner la société PNAS à le garantir des condamnations mises à sa charge et payées dans le cadre du litige l'opposant à M. A..., à hauteur des sommes de 62 398 euros en remboursement de la somme versée à M. A... et de 6 839,18 euros pour les frais d'expertise, dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt ;

3°) de mettre à la charge de la société PNAS la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la société PNAS est tenue de répondre de l'ensemble des obligations prévues au contrat d'assurance qui stipule que les sinistres déclarés par son intermédiaire sont réputés déclarés à l'assureur ;

- le groupement qu'elle forme avec la société AREAS Dommages étant solidaire, la société PNAS est tenue de répondre des manquements contractuels de sa cotraitante à ses obligations d'assureur, dès lors que le caractère aléatoire du sinistre était acquis et que lui-même n'a pas commis de faute constitutive de motif d'exclusion de couverture ;

- en outre, la société PNAS a méconnu l'obligation d'information et de conseil qui lui incombait en sa qualité d'intermédiaire en assurance en ne l'avertissant pas de l'éventualité d'un défaut de garantie pour absence d'aléa et en attendant six années pour lui faire part de son refus de garantir ;

- la société PNAS a également méconnu ses obligations dès lors qu'elle aurait dû, en sa qualité de courtier, transmettre la demande de garantie et de remboursement à la société AREAS Dommages ;

- la société PNAS a également méconnu ses obligations dès lors qu'elle s'est comportée comme l'assureur en assumant la défense devant la juridiction administrative.

Par mémoires enregistrés le 14 mars 2023 et le 1er juin 2023, la société PNAS, représentée par Me Baghdasarian, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge du département de l'Ain la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en sa qualité de courtier en assurance, elle n'était pas débitrice des obligations d'assurance ;

- compte tenu de la répartition des prestations annexée au contrat, aucune solidarité avec la société AREAS Dommages, seule chargée de porter le risque, ne peut lui être opposée ;

- subsidiairement, le refus de garantie est justifié en application de la clause d'exclusion, prévue au contrat, pour faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ;

- elle n'a pas manqué à son devoir de conseil ni à aucune obligation de diligence dès lors qu'elle a fait savoir au département, à la réception de la déclaration de sinistre, que la garantie n'était pas acquise et qu'aucun délai ne lui était imposé pour notifier sa décision ;

- la prise en charge du sinistre au titre de la garantie " défense recours " ne vaut pas acceptation de la prise en charge de la garantie " responsabilité civile ".

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des assurances ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Evrard, présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,

- et les observations de Me Cornuot pour le département de l'Ain, et de Me Bucher pour la société PNAS.

Une note en délibéré a été présentée pour le département de l'Ain, enregistrée le 5 juin 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Pour assurer ses activités et ses biens, le département de l'Ain a conclu un marché d'assurance dont le lot n° 2, portant sur l'assurance responsabilité civile générale, a été confié, par un acte d'engagement du 16 décembre 2010, à un groupement composé de la société Paris Nord Assurances Services (PNAS), intermédiaire et mandataire du groupement, et de la société AREAS Dommages, assureur. Le département de l'Ain ayant été condamné, par un arrêt de la cour du 14 mars 2019, à verser à M. A... les sommes de 62 398 euros en réparation du sinistre causé à l'immeuble de ce particulier par un bâtiment départemental mitoyen et 6 839,18 euros pour les frais d'expertise d'appel, il a demandé à son assureur le remboursement de ces sommes. Par un courrier du 26 avril 2019, la société PNAS l'a informé qu'il n'en serait pas garanti au motif que le sinistre, résultant d'un défaut d'entretien, n'était ni accidentel ni aléatoire. Le département de l'Ain a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner la société PNAS à le garantir de la condamnation mise à sa charge dans le cadre du litige l'ayant opposé à M. A..., à hauteur des sommes de 62 398 euros en remboursement de la somme versée à M. A... et de 6 839,18 euros pour les frais d'expertise. Il relève appel du jugement du 12 mai 2022 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la méconnaissance par la société PNAS des obligations lui incombant en tant que courtier en assurance :

2. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et, notamment, de l'article 3.2 de l'acte d'engagement du 16 décembre 2010, que la société AREAS Dommages était chargée, en qualité d'assureur, de porter le risque tandis que la mission de la société PNAS, intervenue en tant qu'intermédiaire, se limitait à celle de courtier et d'intermédiaire entre l'assureur et l'assuré. Ni la circonstance que la société PNAS a été désignée en tant que mandataire du groupement, ni celle que le cahier des charges du marché prévoit, à l'article 1er de la partie " déclaration et règlement des sinistres ", que la déclaration de sinistre faite à l'intermédiaire est réputée être faite à l'assureur, n'ont eu pour effet de substituer la société PNAS à la société AREAS Dommages pour l'exercice de la mission d'assurance qui est propre à cette dernière société. Dans ces conditions, la société PNAS n'étant pas tenue personnellement, en sa qualité de courtier en assurance, d'une obligation d'assurance, les conclusions du département de l'Ain tendant à ce qu'elle le garantisse en tant qu'assureur de la condamnation prononcée à son encontre ne peuvent qu'être rejetées.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 521-1 du code des assurances : " I.- Les distributeurs de produits d'assurance agissent de manière honnête, impartiale et professionnelle et ce, au mieux des intérêts du souscripteur (...) ".

4. D'une part, le département de l'Ain soutient que la société PNAS a méconnu l'obligation d'information et de conseil lui incombant en sa qualité d'intermédiaire en assurance en s'abstenant de transmettre la déclaration de sinistre qu'il a souscrite à la société AREAS Dommages. Toutefois, il résulte de l'instruction, et, notamment, des termes mêmes du courrier de la société PNAS du 26 avril 2019, que la société AREAS Dommages a été rendue destinataire de cette déclaration, et qu'elle a refusé d'accorder sa garantie au motif que le sinistre ne présentait pas un caractère aléatoire.

5. D'autre part, si le département de l'Ain soutient que la société PNAS a méconnu son obligation d'information et de conseil en l'avertissant tardivement de son refus de garantir le sinistre, il résulte de l'article 2 du titre " déclaration et règlement des sinistres " de l'annexe au contrat, qui stipule que : " En cas de doute sur l'engagement de la garantie, l'Assureur en avisera immédiatement le Département, mais assumera cependant sa défense dans l'attente de tous (...) éléments nouveaux (...) pour lui permettre de prendre une position définitive ", qu'il n'incombait qu'à la société AREAS Dommages, désignée comme " l'Assureur " par la répartition détaillée des prestations entre cotraitantes du groupement jointe à l'acte d'engagement, et non à la société PNAS, d'informer l'assuré du refus de garantie.

6. Enfin, la société PNAS, en assumant les frais de défense du département de l'Ain devant la juridiction administrative, ne saurait être regardée comme s'étant engagée à accepter de garantir le département de la condamnation.

7. Il résulte de ce qui précède que le département de l'Ain n'est pas fondé à soutenir que la société PNAS a méconnu ses obligations légales d'information et de conseil ni ses obligations contractuelles ayant le même objet.

Sur la méconnaissance par la société PNAS de son obligation de couvrir le risque au titre de la solidarité la liant à la société AREAS :

8. Il résulte de la répartition détaillée des prestations entre les membres du groupement titulaire du marché d'assurance conclu par le département de l'Ain, laquelle, dès lors qu'elle figure dans l'acte d'engagement signé par le département de l'Ain, est opposable à ce dernier, et qui définit les missions distinctes confiées à chacun des intervenants, qu'aucune solidarité ne lie les membres du groupement, lequel est d'ailleurs qualifié par l'acte d'engagement de groupement conjoint. Par suite, le département de l'Ain n'est pas fondé à soutenir que la société PNAS doit lui délivrer sa garantie, en lieu et place de la société AREAS Dommages qui s'y est refusée, compte tenu de la solidarité la liant à cette société.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le département de l'Ain n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Les conclusions de sa requête, présentées aux mêmes fins, doivent être rejetées.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société PNAS, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le département de l'Ain demande au titre des frais liés à l'instance. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du département de l'Ain une somme de 1 500 euros à verser à la société PNAS sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du département de l'Ain est rejetée.

Article 2 : Le département de l'Ain versera à la société PNAS une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au département de l'Ain et à la société Paris Nord Assurances Services.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2024, à laquelle siégeaient :

M. Arbaretaz, président,

Mme Evrard, présidente assesseure,

Mme Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2024.

La rapporteure,

A. EvrardLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02147


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02147
Date de la décision : 20/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-01-03-02 Marchés et contrats administratifs. - Notion de contrat administratif. - Diverses sortes de contrats. - Marchés.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : CABINET HENRI ABECASSIS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-20;22ly02147 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award