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20/06/2024 | FRANCE | N°22LY00401

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 20 juin 2024, 22LY00401


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la délibération du 15 décembre 2020 par laquelle le conseil départemental de la Côte-d'Or, prenant acte du point d'étape sur la mise en œuvre de la stratégie départementale de l'eau, a approuvé une autorisation de programme quinquennale de 5 250 000 euros, destinée au financement d'études de maîtrise d'œuvre et a inscrit 1 000 000 euros de crédits de paiement au titre de l'année 2021.



Par

jugement n° 2100316 du 14 décembre 2021, le tribunal a fait droit à sa demande d'annulation.





Proc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la délibération du 15 décembre 2020 par laquelle le conseil départemental de la Côte-d'Or, prenant acte du point d'étape sur la mise en œuvre de la stratégie départementale de l'eau, a approuvé une autorisation de programme quinquennale de 5 250 000 euros, destinée au financement d'études de maîtrise d'œuvre et a inscrit 1 000 000 euros de crédits de paiement au titre de l'année 2021.

Par jugement n° 2100316 du 14 décembre 2021, le tribunal a fait droit à sa demande d'annulation.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 février 2022 et le 18 octobre 2023, le département de la Côte-d'Or, représenté par Me Karpenschif (Selas Fiducial Legal by Lamy), demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du 14 décembre 2021

2°) de mettre à la charge de Mme B..., de M. A... et du groupe politique Forces de progrès, chacun en ce qui le concerne, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative ;

- c'est à tort que jugement attaqué a fait droit à une demande irrecevable, dirigée contre une délibération confirmative insusceptible de recours ;

- le III 3° de l 'article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales permet au département d'intervenir financièrement pour les solidarités territoriales sur des maîtrises d'ouvrage des communes et de leurs groupements, à leur demande ; le I de l'article L. 1111-10 du même code lui permet de contribuer au financement de projets d'autres collectivités locales ; l'article L. 3232-1-1 du même code lui permet de financer une assistance technique aux communes et à leurs groupements dans le domaine de l'eau.

Par mémoires enregistrés le 20 septembre 2023 et le 25 octobre 2023 (ce dernier, non communiqué), Mme B..., M. A... et le groupe politique Forces de progrès, représentés par Me Brillier Laverdure, concluent au rejet de la requête et demandent que le département de la Côte-d'Or leur verse à chacun une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction a été fixée au 2 novembre 2023 par ordonnance du même jour, prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christine Psilakis, rapporteure,

- les conclusions de M. Bertrand Savouré, rapporteur public,

- et les observations de Me Romatier pour le département de la Côte-d'Or , et celles de Me Brillier Laverdure pour Mme B..., de M. A... et le groupe politique Forces de progrès ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la délibération du 15 décembre 2020 par laquelle le conseil départemental de la Côte-d'Or, prenant acte du point d'étape sur la mise en œuvre de la stratégie départementale de l'eau, a approuvé la création d'une autorisation de programme quinquennale de 5 250 000 euros destinée au financement d'études de maîtrise d'œuvre pour la gestion de la ressource en eau dans trois secteurs jugés critiques et a inscrit 1 000 000 euros de crédits de paiement au titre de l'année 2021. Par jugement n° 2100316 du 14 décembre 2021, dont le département interjette appel, le tribunal a annulé cette délibération.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux points 10, 12, 13 et 15 de son jugement, le tribunal a exposé les motifs pour lesquels il a écarté chacun des fondements juridiques invoqués par le département pour justifier la délibération en litige et qu'il a d'ailleurs utilement contestés en appel. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le fond du litige :

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la délibération litigieuse a, d'une part, approuvé une autorisation de programme qui, en vertu de l'article L. 3312-4 du code général des collectivités locales, autorisait l'engagement de crédits dans les limites du montant et de la période qu'elle définit, et pour l'objet qu'elle déterminait, d'autre part, inscrit des crédits de paiement pour 2021 en exécution de cette autorisation. En ce qu'elle a emporté ces effets juridiques, elle présentait un caractère décisoire et ne peut être regardée comme confirmative de la délibération du 19 novembre 2019 ayant approuvé la politique départementale de gestion de l'eau 2019-2024 et qui était dépourvue d'effets budgétaires. Dès lors, le département de la Côte-d'Or n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal aurait fait droit à une demande dirigée contre un acte insusceptible de recours.

4. En second lieu, aux termes de l'article L. 3211-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République : " Le conseil départemental règle par ses délibérations les affaires du département dans les domaines de compétences que la loi lui attribue. / (...) / Il a compétence pour promouvoir les solidarités et la cohésion territoriale sur le territoire départemental, dans le respect de l'intégrité, de l'autonomie et des attributions (...) des communes ". A cet égard, les articles L. 2224-7-1 et L. 5214-16 (7°) du même code attribuent la gestion de l'eau aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale. Le département ne peut donc prendre d'initiatives en ce domaine qu'à des fins de solidarité et dans le respect des attributions des communes ou des intercommunalités.

5. Pour justifier son intervention, le département de la Côte-d'Or se prévaut, tout d'abord, de l'article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales qui dispose : " I. - Les compétences des collectivités territoriales dont le présent article prévoit que l'exercice nécessite le concours de plusieurs collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales sont mises en œuvre dans le respect des règles suivantes : 1° Les délégations de compétence sont organisées dans le cadre de la convention territoriale d'exercice concerté prévue au V de l'article L. 1111-9-1 (...) / III. - Le département est chargé d'organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l'action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l'exercice des compétences relatives à : (...) 3° La solidarité des territoires (...) / V. - Les modalités de l'action commune des collectivités territoriales et de leurs groupements pour l'exercice des compétences mentionnées aux II à IV sont débattues par la conférence territoriale de l'action publique prévue à l'article L. 1111-9-1 ".

6. Or, il ne ressort pas des pièces du dossier que la mise à l'étude d'un schéma directeur d'ouvrage de captage et de traitement de l'eau dans les trois secteurs identifiés comme prioritaires ait été débattu en conférence territoriale de l'action publique ni que, l'ayant été, le département de la Côte d'or ait été désigné pour en assurer la réalisation coordonnée. Dans ces conditions, il ne peut avoir acquis la qualité de chef de file qui l'aurait habilité à engager une autorisation de programme sur le fondement de l'article L. 1111-9 précité.

7. Le département de la Côte-d'Or invoque, ensuite, le I de l'article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales qui dispose : " Le département peut, à leur demande, contribuer au financement des projets dont la maîtrise d'ouvrage est assurée par les communes, leurs groupements, les établissements publics qui leur sont rattachés (...) ". Or, il est constant que les études de maîtrise d'œuvre financées par l'autorisation de programme approuvé par la délibération litigieuse devaient être réalisées sous la maîtrise d'ouvrage du département qui en était d'ailleurs l'unique commanditaire. Dans ces conditions, ces dispositions ne pouvaient valablement fonder son engagement budgétaire

8. Enfin, si aux termes du premier alinéa de l'article L. 3232-1-1 du même code : " Pour des raisons de solidarité et d'aménagement du territoire, le département met à la disposition des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale qui ne bénéficient pas des moyens suffisants pour l'exercice de leurs compétences dans le domaine (...) de la protection de la ressource en eau (...) une assistance technique dans des conditions déterminées par convention ", en l'absence de convention d'assistance conclue avec les communes ou établissements publics de coopération intercommunale qui, dans les trois secteurs concernés, disposeraient de moyens insuffisants pour assumer la compétence de gestion de la ressource en eau, le département de la Côte-d'Or ne pouvait, de sa propre initiative et en tant que maître d'ouvrage, financer un programme d'études sur le fondement de ces dispositions.

9. Il résulte de ce qui précède que la délibération du 15 décembre 2020 a été prise en méconnaissance des dispositions citées aux points 4, 5 et 8 et que le département de la Côte-d'Or n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé ladite délibération. Les conclusions de sa requête doivent, dès lors, être rejetées.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les conclusions présentées par le département de la Côte-d'Or, partie perdante, doivent être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département de la Côte-d'Or, une somme de 1 000 euros à verser à Mme B..., seule, M. A... et le groupe politique Forces de progrès, qui n'étaient pas parties en première instance, et n'ont, en outre, pas présenté d'intervention volontaire, n'ayant pas la qualité de partie.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du département de la Côte-d'Or est rejetée.

Article 2 : Le département de la Côte-d'Or versera à Mme B... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au département de la Côte-d'Or, à Mme C... B..., à M. D... A... et au groupe politique Forces de progrès.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2024 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Arbaretaz, président

Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,

Mme Christine Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2024.

La rapporteure,

Ch. Psilakis

Le président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

2

N° 22LY00401


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY00401
Date de la décision : 20/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-03-02 Collectivités territoriales. - Département. - Attributions.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : BRILLIER LAVERDURE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-20;22ly00401 ?
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