Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 21 avril 2022 par lequel le préfet du Rhône l'a expulsé du territoire français et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2204242 du 7 juillet 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 19 juillet 2023, M. B..., représenté par Me Hmaida, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 7 juillet 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 avril 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait en ce qu'elle indique que l'autorité parentale lui aurait été retirée alors que le juge aux affaires familiales a seulement confié l'exercice de l'autorité parentale à la mère de l'enfant ; le préfet a relevé que les faits commis l'avaient été à l'encontre de sa conjointe, alors qu'il n'entre pas dans le cadre des dispositions de l'article L. 631-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les faits à l'origine de son expulsion n'ayant pas été commis sur conjoint puisqu'il n'a jamais été marié avec la mère de son enfant ; de telles erreurs révèlent un défaut d'examen de sa situation et ont exercé une influence sur le sens de la décision attaquée ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L. 631-1 et L. 631-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il démontre contribuer à l'entretien et à l'éducation de son fils mineur de nationalité française : il s'acquitte de la pension alimentaire de 200 euros par mois fixée par le jugement du juge aux affaires familiales du 1er mars 2022 ; le droit de visite n'a pas encore été mis en place ; il est en conséquence protégé contre l'expulsion en application de l'article L. 631-2 du ce code, lequel n'exige pas que le ressortissant étranger exerce l'autorité parentale ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
La requête a été communiquée à la préfète du Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.
Par une décision du 13 septembre 2023, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. B....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 2011 pris pour son application ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ;
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;
- et les observations de Me Hmaida, pour M. B... ;
Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 10 juin 2024, présentée pour M. B... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant tunisien né le 23 novembre 1991, déclare être entré irrégulièrement en France au cours de l'année 2011. M. B... a obtenu le 6 octobre 2015, une carte de séjour temporaire en qualité de parent d'un enfant français, né le 18 mars 2015, de la relation nouée avec une ressortissante française, puis la délivrance d'une carte de résident, valable du 28 décembre 2016 au 27 décembre 2026. Par un arrêté daté du 21 avril 2022, le préfet du Rhône a prononcé l'expulsion de l'intéressé du territoire français, au motif de la menace grave pour l'ordre public que constituait sa présence. M. B... relève appel du jugement du 7 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut décider d'expulser un étranger lorsque sa présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public, sous réserve des conditions propres aux étrangers mentionnés aux articles L. 631-2 et L. 631-3 ". Les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public.
3. Il ressort des termes de l'arrêté contesté que, pour caractériser la menace grave pour l'ordre public que constitue la présence de M. B..., le préfet du Rhône s'est fondé sur la circonstance que l'intéressé avait fait l'objet de huit inscriptions au fichier de traitement des antécédents judiciaires, notamment pour des faits de violences verbales ou physiques à l'encontre de son ex-concubine, Mme ... et de deux condamnations pénales pour des faits de violence commis sur celle-ci , la première, le 11 avril 2019, la peine d'emprisonnement prononcée étant de deux mois, assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve avec une obligation de soins et une interdiction de paraître au domicile de la victime, la seconde, le 4 octobre 2021 pour des faits commis en état de récidive légale le 27 septembre 2021, la peine d'emprisonnement prononcée étant de douze mois d'emprisonnement dont six mois assortis d'un sursis probatoire de trois ans avec maintien en détention, l'interdiction d'entrer en relation avec la victime et celle de paraître dans certains lieux, le tribunal correctionnel ayant également ordonné la pose d'un bracelet " anti rapprochement " à l'issue de l'incarcération de M. B... qui s'est déroulée du 1er octobre 2021 au 3 février 2022.
4. Le requérant soutient que la décision attaquée est entachée d'une erreur de fait en ce qu'elle mentionne que " l'autorité parentale sur son fils lui a été retirée " alors que le juge aux affaires familiales lui en a retiré seulement l'exercice. Toutefois, l'erreur de fait n'est pas établie du seul fait de l'imprécision de la mention précitée, alors que le préfet du Rhône a relevé sans erreur que le " 1er mars 2022, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Vienne (...) a souligné que (...) le comportement de monsieur à l'audience démontre une absence totale de remise en cause de sa part cinq mois après les faits puisqu'il indique ne pas voir en quoi les violences commises feraient obstacle à un dialogue serein et constructif à propos d'Anis. (...) De même l'attitude de monsieur B... interpelle quant à sa capacité à exercer les fonctions parentales dans l'intérêt du mineur. En effet, si son souhait de revoir Anis est légitime, il ne s'interroge à aucun moment même lorsque le contexte de la commission des faits est rappelé sur l'impact des violences sur la mère à l'égard de leur fils (...). C... de ses éléments, le juge aux affaires familiales a décidé de confier l'exercice de l'autorité parentale exclusivement " à la mère.
5. Le requérant se prévaut également de ce que la décision attaquée indique à tort que les faits commis par M. B... l'auraient été à l'encontre de sa conjointe, alors qu'il n'a jamais été marié avec la mère de son fils. Toutefois, une telle circonstance n'est pas de nature à elle seule à révéler un défaut d'examen particulier de sa situation. Dès lors que M. B... ne relève pas de la protection prévue par l'article L. 631-3 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile comme l'ont précisé les premiers juges, ce motif présente un caractère superfétatoire, de sorte que l'erreur de fait est restée sans incidence sur l'appréciation du préfet relative à la menace grave pour l'ordre public, que constitue la présence en France de M. B..., laquelle ne procède pas d'une inexacte application des dispositions de l'article L. 631-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. En deuxième lieu, M. B... soutient qu'il ne pourrait légalement faire l'objet d'une mesure d'expulsion en application du 1° de l'article L. 631-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel prévoit que " Ne peut faire l'objet d'une décision d'expulsion que si elle constitue une nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique et sous réserve que l'article L. 631-3 n'y fasse pas obstacle : 1° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an (...) ".
7. Les premiers juges ont relevé que M. B... ne s'acquitte pas de la pension alimentaire à hauteur de la contribution fixée par le juge aux affaires familiales au titre des années 2017, 2018, 2021, du premier trimestre 2022 et des mois de mars à août 2022. En se bornant à faire valoir qu'il n'a pas conservé tous les justificatifs mais qu'il s'acquitterait de la pension alimentaire de 200 euros par mois fixée par le jugement précité du 1er mars 2022 du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Vienne, M. B... ne conteste pas sérieusement le jugement attaqué. Par ailleurs, si le requérant soutient que le droit de visite mensuel lui ayant été accordé par le juge aux affaires familiales n'a pas encore été mis en place, en produisant à hauteur d'appel la justification d'un premier rendez-vous le 27 juillet 2023, il ne démontre par aucun élément contemporain de la décision attaquée entretenir une quelconque relation avec son fils mineur comme l'a déjà opposé le jugement attaqué. Il en résulte que le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il serait protégé contre une mesure d'expulsion en application des dispositions précitées du 1° de l'article L. 631-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. En troisième et dernier lieu, M. B... réitère en appel ses moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de l'article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs circonstanciés retenus à bon droit par les premiers juges.
9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 28 mai 2024 à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juin 2024.
La rapporteure,
Bénédicte LordonnéLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY02404