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12/06/2024 | FRANCE | N°23LY02246

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 3ème chambre, 12 juin 2024, 23LY02246


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble : 1°) d'annuler l'arrêté du 30 mai 2023 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de son éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans ; 2°) d'annuler l'arrêté du 30 mai 2023 par lequel le préfet

de l'Isère l'a assigné dans le département de l'Isère pour une durée de 45 jours ; 3°) d'enjoindre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble : 1°) d'annuler l'arrêté du 30 mai 2023 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de son éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans ; 2°) d'annuler l'arrêté du 30 mai 2023 par lequel le préfet de l'Isère l'a assigné dans le département de l'Isère pour une durée de 45 jours ; 3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale", à tout le moins de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois courant à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, dans l'attente, lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ; 4°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, dans les mêmes conditions, de procéder à l'effacement du signalement aux fins de non-admission Schengen découlant de l'interdiction de retour annulée ; 5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2303467 du 6 juin 2023, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble, après avoir réservé jusqu'à ce qu'il y soit statué en formation collégiale les conclusions aux fins d'annulation de la décision relative au séjour, les conclusions aux fins d'injonction qui en sont l'accessoire et les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative, a fait droit aux conclusions de cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 4 juillet 2023, le préfet de l'Isère demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble du 6 juin 2023 ;

2°) de rejeter la demande de M. C... présentée devant le tribunal administratif de Grenoble.

Il soutient que :

- le requérant ne justifie pas d'une résidence habituelle et continue en France depuis qu'il a atteint l'âge de 13 ans ; en tout état de cause, une telle résidence a été interrompue du fait de son incarcération ;

- les autres moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 octobre 2023, M. C..., représenté par SELARL BS2A Bescou et Sabatier Avocats Associés, agissant par Me Bescou, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête du préfet est infondée ;

- il s'en rapporte aux éléments contenus dans sa requête introductive d'instance devant le tribunal dont il entend reprendre les termes, au besoin, et en s'y rapportant, devant la cour.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant turc né le 5 novembre 1979, est entré sur le territoire français le 29 juin 1992 sous couvert de son passeport revêtu d'un visa de long séjour délivré au titre d'une procédure de regroupement familial. A sa majorité, une carte de résident lui a été délivrée valable jusqu'au 4 novembre 2007 et renouvelée jusqu'au 4 novembre 2017. Il a été condamné le 21 août 2018 à six ans d'emprisonnement, au retrait total de l'autorité parentale sur ses trois enfants, ainsi qu'à la privation de tous ses droits civiques, civils et de famille pour une durée de cinq ans pour menace de mort matérialisée par écrit, image ou autre objet, commise par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, délaissement de mineur de quinze ans compromettant sa santé ou sa sécurité, privation de soins ou d'aliments compromettant la santé d'un mineur de quinze ans par ascendant ou personne ayant autorité et soustraction d'enfant par ascendant pendant plus de cinq jours, en un lieu inconnu de ceux chargés de sa garde. Il a été incarcéré le 22 octobre 2015. Le 9 septembre 2020, à l'issue de l'exécution de sa peine d'emprisonnement, il a demandé au préfet de l'Isère la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" sur le fondement des articles L. 435-1 et L.423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 mai 2023, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour au motif qu'il représente une menace à l'ordre public, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination de son éloignement et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans. Par un autre arrêté du même jour, le préfet de l'Isère l'a assigné dans le département de l'Isère pour une durée de 45 jours. Par un jugement n° 2303467 du 6 juin 2023, le magistrat désigné au titre de l'article R. 776-21 du code de justice administrative a réservé jusqu'à ce qu'il y soit statué en formation collégiale les conclusions aux fins d'annulation de la décision relative au séjour, les conclusions aux fins d'injonction qui en sont l'accessoire et les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative (article 1er), a annulé les décisions du 30 mai 2023 du préfet de l'Isère portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixation du pays de destination de l'éloignement et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans (article 2), a annulé l'arrêté du 30 mai 2023 du préfet de l'Isère portant assignation à résidence de M. C... (article 3), a enjoint au préfet de l'Isère, d'une part, de réexaminer la situation de M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du ce jugement et de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour, d'autre part, de mettre en œuvre dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement la procédure d'effacement du signalement de M. C... aux fins de non admission dans le système d'information Schengen (article 4). Le préfet de l'Isère relève appel de ce jugement en ce qu'il fait droit à la demande de première instance.

Sur le bien-fondé du motif d'annulation du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans (...) Par dérogation au présent article, l'étranger mentionné aux 2° à 8° peut faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français en application de l'article L. 611-1 s'il vit en France en état de polygamie ".

3. Il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu protéger de l'éloignement les étrangers qui sont en France depuis l'enfance, à raison de leur âge d'entrée et d'établissement sur le territoire. Dans ce cadre, les éventuelles périodes d'incarcération en France, si elles ne peuvent être prises en compte dans le calcul d'une durée de résidence, ne sont pas de nature à remettre en cause la continuité de la résidence habituelle en France depuis au plus l'âge de treize ans, alors même qu'elles emportent, pour une partie de la période de présence sur le territoire, une obligation de résidence, pour l'intéressé, ne résultant pas d'un choix délibéré de sa part.

4. Il ressort du jugement attaqué que, pour annuler la décision par laquelle le préfet de l'Isère a obligé M. C... à quitter le territoire français, le magistrat désigné a retenu que l'intéressé est entré en France le 29 juin 1992 à l'âge de 12 ans et demi dans le cadre du regroupement familial, qu'il y a été scolarisé et a obtenu, à sa majorité, une carte de résident valable jusqu'au 4 novembre 2007 renouvelée jusqu'au 4 novembre 2017, de sorte qu'il justifiait résider habituellement en France depuis qu'il a atteint, au plus, l'âge de treize ans, sans que sa période d'incarcération ne puisse, à cet égard, lui être opposée.

5 Pour contester l'appréciation portée par le premier juge, le préfet de l'Isère fait état du caractère lacunaire des preuves du caractère habituel et continu de la résidence de l'intéressé en France. S'il ressort du certificat de scolarité portant sur l'année 1992-1993 ainsi que du certificat de contrôle médical passé dans les locaux de l'OFII le 26 juin 1992, que M. C... a été scolarisé en France, alors qu'il avait 12 ans, aucune pièce du dossier n'établit la résidence habituelle du requérant en France au cours des années suivantes, et durant sa minorité. Si M. C... soutient qu'il a poursuivi sa scolarité sur le territoire français et a été muni d'un document de circulation pour étrangers mineurs, il n'en justifie pas. En l'absence de toute autre production susceptible d'étayer ses affirmations, le caractère habituel de sa résidence en France pendant les années 1993 à 1997 n'est pas établi. A sa majorité, le 5 novembre 1997, et jusqu'en 2017, M. C... a obtenu une carte de résident. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'arrêt de la 5ème chambre correctionnelle de la Cour d'appel de Montpellier du 21 août 2018, que M. C... a soustrait ses trois enfants à leur mère pour les emmener en mars 2014 en Turquie où ils sont restés plus de trois ans et qu'il a déclaré à l'audience les avoir laissés dans ce pays pour retourner seul en France environ un an et demi après leur arrivée. Le requérant ne produit d'ailleurs aucune pièce justifiant de sa présence en France entre le mois de mars 2014 et le 22 octobre 2015, date de son interpellation en exécution du mandat d'arrêt délivré le 20 avril 2015. Ainsi, M. C... ne justifie pas de sa résidence habituelle en France depuis qu'il a atteint, au plus, l'âge de treize ans. Dans ces conditions, et quand bien même sa période d'incarcération ultérieure ne peut lui être opposée, ainsi que l'a relevé à juste titre le premier juge, le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a retenu que l'obligation de quitter le territoire français méconnaissait les dispositions précitées de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif, que l'appelant se borne à déclarer reprendre en appel.

Sur les autres moyens :

S'agissant de l'incompétence :

7. L'arrêté du 30 mai 2023 a été signé par M. Simplicien, secrétaire général de la préfecture, qui disposait à cet effet d'une délégation de signature par un arrêté du 9 mai 2023, régulièrement publié. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions en litige manque en fait.

S'agissant de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour :

8. En premier lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. ".

9. Les années passées en détention au titre d'une peine privative de liberté ne peuvent être regardées comme une période de résidence habituelle au sens des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et s'imputer sur le calcul des dix ans qu'elles mentionnent.

10. M. C... soutient avoir résidé habituellement en France depuis plus de dix ans avant ses emprisonnements successifs et avoir vainement tenté de demander le renouvellement de sa carte de résident alors qu'il était en détention. Toutefois, compte tenu des conditions de son séjour dans son pays d'origine décrites au point 5, seule la période postérieure à son retour en France doit être prise en compte comme durée de résidence habituelle en France pour l'application de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, M. C... ne justifie pas résider en France habituellement depuis plus de dix ans. Dès lors, le préfet n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 432-1 du même code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ".

12. En l'espèce, M. C... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 423-23 et son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour rejeter cette demande, le préfet de l'Isère a relevé que la présence de l'intéressé en France constituait une menace pour l'ordre public. Il ressort des pièces du dossier que le bulletin n° 1 du casier judiciaire de M. C... porte la mention de six condamnations, notamment pour des faits de conduite en état alcoolique, défaut d'assurance, conduite malgré suspension du permis et prise du nom d'un tiers. Le 21 août 2018, il a été condamné à la peine de six ans d'emprisonnement, retrait total et définitif de l'autorité parentale sur ses enfants, privation de tous ses droits civiques, civils et de famille pour une durée de cinq ans pour des faits de menace de mort matérialisée par écrit commise par une personne étant ou ayant été conjoint, de délaissement de mineur de 15 ans compromettant sa santé ou sa sécurité, de privation de soins ou d'aliments compromettant la santé d'un mineur de 15 ans par ascendant et de soustraction d'enfant par ascendant pendant plus de cinq jours en un lieu inconnu de ceux chargés de sa garde. Eu égard à la récurrence de ces condamnations, au caractère récent de la dernière d'entre elles et à la gravité des faits pour lesquels il a été condamné, le préfet de l'Isère a pu à bon droit estimer que le comportement de M. C... constituait une menace pour l'ordre public. Par suite, quand bien même le requérant ne se serait pas fait défavorablement connaître durant sa détention et depuis sa remise en liberté en septembre 2020, le préfet était fondé à lui refuser, pour ce seul motif, la délivrance d'un titre de séjour. Dès lors les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur de fait doivent être écartés.

13. En troisième lieu, M. C... soutient qu'il est entré en France à l'âge de 12 ans par regroupement familial, que ses deux parents résident en France régulièrement, que l'ensemble de ses frères et sœurs, à l'exception d'une sœur, résident sur le territoire français, que ses trois enfants sont de nationalité française et qu'il espère reprendre des contacts avec ces derniers. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 5, il n'établit pas résider de manière habituelle sur le territoire depuis le 29 juin 1992. Il a soustrait ses trois enfants à leur mère entre le 28 février 2014 et le mois d'avril 2017, soit pendant plus de trois ans. Pendant cette période, les enfants ont été accompagnés en Turquie par leur père en compagnie de leur grand-père et de leur tante paternelle puis ont été gardés dans un logement occupé par leur grand-père sans qu'ils soient scolarisés. Ainsi qu'il a également été dit au point 5, le requérant a affirmé avoir vécu un an et demi en Turquie avec ses enfants. Alors qu'il n'a plus aucun contact avec eux, il ne justifie pas être dépourvu d'attaches personnes stables dans son pays d'origine. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée porterait une atteinte excessive à son droit de mener une vie privée et familiale normale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'est pas davantage fondé à soutenir que le refus de titre de séjour méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou qu'il serait entaché d'une erreur manifeste dans l'application des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

S'agissant des moyens dirigés spécifiquement contre l'obligation de quitter le territoire français :

14. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 5 que M. C... ne justifie pas résider en France habituellement depuis plus de dix ans. En conséquence, il n'est pas davantage fondé à soutenir que les dispositions des 3° et 4° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, visant le cas de l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans et depuis plus de vingt ans, feraient obstacle à son éloignement du territoire français.

S'agissant de la décision de refus d'accorder un délai de départ volontaire :

15. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision de refus d'accorder un délai de départ volontaire devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

16. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Isère aurait entaché sa décision d'une erreur de droit en s'estimant à tort en situation de compétence liée.

17. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, en estimant que la présence en France de M. C... constituait une menace pour l'ordre public, le préfet de l'Isère n'a commis aucune erreur de droit ou de fait. Il n'a pas davantage entaché sa décision d'erreur d'appréciation.

S'agissant de la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :

18. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français :

19. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'interdiction de retour sur le territoire français devrait être annulée en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

20. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 11, en estimant que la présence en France de M. C... constituait une menace pour l'ordre public, le préfet de l'Isère n'a commis aucune erreur de droit ou de fait.

21. En troisième lieu, compte tenu notamment de ce qui a été dit au point 12, en particulier au regard de la gravité des faits pour lesquels il a été condamné, les éléments notamment de sa vie privée et familiale dont fait état M. C... ne suffisent pas pour considérer que la durée de trois ans de l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée à son encontre serait entachée d'une erreur d'appréciation. Pour les mêmes motifs, en tout état de cause, l'interdiction de retour sur le territoire français ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de l'assignation à résidence :

22. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'assignation à résidence devrait être annulée en conséquence de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, et refus de délai de départ volontaire ne peut qu'être écarté.

23. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de l'Isère est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions du 30 mai 2023 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans et l'arrêté du même jour portant assignation à résidence de M. C... dans le département de l'Isère pour une durée de 45 jours.

24. Par voie de conséquence, les conclusions de M. C... aux fins d'injonction et d'astreinte et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif Grenoble du 6 juin 2023 est annulé.

Article 2 : La demande de M. C... devant le tribunal administratif de Grenoble et ses conclusions présentées en appel sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2024 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juin 2024.

La rapporteure,

Bénédicte LordonnéLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 23LY02246


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY02246
Date de la décision : 12/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU & SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-12;23ly02246 ?
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