Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler le communiqué " Mobilité automne 2020 " en date du 14 janvier 2021 du sous-directeur des ressources humaines et de la sous-directrice des personnels de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) en tant qu'il rejette sa demande de mutation, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 15 mars 2021.
Par un jugement n° 2105602 du 18 novembre 2022, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête des mémoires enregistrés les 19 janvier, 17 juillet et 16 octobre 2023, ce dernier non communiqué, M. C..., représenté par Me Marco, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et ces décisions ;
2°) d'enjoindre à la direction générale de l'aviation civile de réexaminer sa demande de mobilité ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il devait bénéficier des dispositions des articles 2.2 et 2.3 des lignes directrices de gestion relatives aux orientations générales en matière de mobilité édictées en application de l'article 18 de la loi du 11 janvier 1984, exigeant que l'avis défavorable à une candidature répondant à un critère de priorité légale soit motivé avec soin et que les décisions défavorables fassent l'objet d'une justification circonstanciée, communicable aux agents, dans la mesure où il bénéficie de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé et d'une priorité médicale de niveau 1 ; il a été de ce fait dans l'impossibilité de s'assurer que le refus opposé à ses demandes a été motivé au regard d'une incompatibilité manifeste et objective entre son profil et les compétences attendues sur les postes candidatés ; il n'a été destinataire d'aucune information à la suite de sa non-mutation malgré une demande formulée en ce sens ;
- son droit de priorité, tel que prévu par le II de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, a été méconnu ;
- en ne respectant pas les dispositions spécifiques de l'article 2.2 des lignes directrices et notamment les procédures de gestion et d'examen des demandes de mutation s'inscrivant dans ce cadre et décrites dans les notes n° 55-380 du 29 avril 2009 et n° 12-41 du 5 décembre 2012, l'administration a entaché ses décisions d'illégalité ;
- le refus de mutation porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la direction générale de l'aviation civile s'est constituée frauduleusement des justificatifs, notamment un avis du médecin chef de la DGAC, dans le seul but de justifier sa décision devant le tribunal et devant le défenseur des droits.
Par des mémoires enregistrés les 9 juin et 13 septembre 2023, la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, représentée par Me Thiriez, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. C... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 14 septembre 2023, l'instruction a été close au 16 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code du travail ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- les lignes directrices de gestion relatives aux orientations générales en matière de mobilité de la direction générale de l'aviation civile ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;
- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;
- et les observations de M. C... ainsi que celles de Me Brecq-Coutant, pour la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 mai 2024, présentée pour M. C... ;
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., électronicien des systèmes de la sécurité aérienne au sein de la direction générale de l'aviation civile (DGAC), exerçant ses fonctions depuis 2018 sur le site du service technique de Lyon a candidaté, dans le cadre de la procédure de mobilité d'automne 2020, sur deux postes basés respectivement à Mérignac et à Nice. M. C... n'a été retenu sur aucun de ces deux postes, ainsi que cela ressort du communiqué du sous-directeur des ressources humaines et de la sous-directrice des ressources-humaines de la DGAC du 14 janvier 2021 établissant la liste des postes pourvus lors de la mobilité d'automne 2020. Le 15 mars 2021, M. C... a saisi la DGAC d'un recours gracieux rejeté implicitement, puis expressément par une décision du 27 juillet 2021. M. C... relève appel du jugement du 18 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation du communiqué en tant qu'il révèle que sa demande a été rejetée, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux.
2. Aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État alors applicable : " I. - L'autorité compétente procède aux mutations des fonctionnaires en tenant compte des besoins du service. / II. - Dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service (...) les affectations prononcées tiennent compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée : 1° (...)'; 2° Au fonctionnaire en situation de handicap relevant de l'une des catégories mentionnées aux'1° (...) de l'article L. 5212-13 du code du travail'; (...) / IV. - Les décisions de mutation tiennent compte, dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État, des lignes directrices de gestion en matière de mobilité prévues à l'article 18 de la présente loi. ". L'article L. 5212-13 du code du travail dispose que : " Bénéficient de l'obligation d'emploi instituée par l'article L. 5212-2 :/ 1° Les travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles ; (...) ".
3. Selon l'article 2-2 des lignes directrices de gestion relatives aux orientations générales en matière de mobilité de la direction générale de l'aviation civile, relatif à la " prise en compte des priorités légales définies à l'article 60 de la loi n° 84-16 (annexe 1- justificatifs à produire avec la demande de mutation) " : " L'agent dont l'emploi est supprimé et qui ne peut être réaffecté sur un emploi correspondant à son grade dans son service bénéficie d'une priorité absolue. / Par ailleurs, dans toute la mesure compatible avec le bon fonctionnement du service, priorité est donnée : (...) / A l'agent en situation de handicap relevant de l'une des catégories mentionnées aux 1° (...) de l'article L. 5212-13 du code du travail, (...). / Toutes les demandes de mutation formulées pour répondre à une situation (...) médicale font l'objet au préalable d'une évaluation (...) du médecin de prévention intervenant auprès du service d'affectation de l'agent y compris pour ceux en situation particulière (CLD, disponibilité...). Les procédures de gestion et d'examen des demandes de mutation s'inscrivant dans ce cadre sont décrites dans les notes n° 55 380 du 29/04/2009 et n° 12- 41 du 05/12/2012. " Aux termes de l'article 2-6 de ces lignes directrices : " La durée minimale d'une tenue de poste est fixée à trois ans. Elle peut toutefois être réduite pour prendre en compte des situations individuelles particulières (rapports sociaux ou médicaux) ou pour répondre à des nécessités de service. (...) ". Enfin d'après l'article 3-3 de ces mêmes lignes directrices, relatif aux modalités d'information de la décision : " Les candidatures recueillies seront transmises aux chefs de service pour avis. Tout avis défavorable doit être motivé explicitement et précisément dans l'outil SIRH et doit être communiqué au candidat à sa demande. / L'avis défavorable à une candidature répondant à un critère de priorité légale (articles 60 II et 62 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984) doit être justifié par l'incompatibilité manifeste et objective entre le profil dudit candidat et les compétences attendues sur le poste. Il doit être motivé avec soin. / Lorsqu'un agent fait valoir une priorité légale de mutation mais qu'il obtient un avis défavorable du chef de service receveur, ce dernier doit lui faire un retour écrit en motivant son rejet, avant la publication des décisions finales par l'administration. / La décision finale de l'administration s'appuie sur le classement du service receveur, le classement des vœux des candidats, l'avis du service donneur ainsi que les éventuelles priorités définies par la loi ou les lignes de gestion. / (...) / Les décisions défavorables doivent faire l'objet d'une justification circonstanciée, communicable aux agents. / (...) ".
4. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... se serait prévalu, à l'appui de sa demande, de la priorité légale dont il pouvait bénéficier à raison de sa reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé. Même si sa demande de mutation se fonde sur une situation médicale qui trouve son origine dans la même affection que celle qui a justifié cette reconnaissance, il devait expressément se prévaloir de cette dernière qualité s'il entendait bénéficier de la priorité légale qui lui est attachée. Sa demande, qui se fonde sur une situation médicale, obéit aux règles prévues dans les notes n° 55-380 du 29 avril 2009 et n° 12-41 du 5 décembre 2012. Le requérant ne peut, par suite, utilement faire valoir qu'en méconnaissance des dispositions des articles 2-2 et 3-3 des lignes directrices précitées, les avis défavorables n'auraient pas fait l'objet d'une motivation soignée et qu'il n'aurait pas eu de retour écrit des chefs de service receveurs, motivant leurs rejets, avant publication des décisions finales dans la mesure où ces dispositions ne sont applicables que pour les demandes de mutation fondées sur une priorité légale. Il n'est pas plus fondé, pour les mêmes motifs, à faire valoir qu'il aurait, de ce fait, été dans l'impossibilité de s'assurer que le refus opposé à ses demandes a été motivé au regard d'une incompatibilité manifeste et objective entre son profil et les compétences attendues sur les postes sur lesquels il a candidaté.
5. En deuxième lieu, l'administration a, par courrier du 27 juillet 2021, indiqué au requérant les motifs pour lesquels ses deux candidatures n'avaient pas été retenues, tenant à ce qu'il n'avait pas la durée d'amortissement de poste minimale et qu'il n'avait pas postulé sur les sites conseillés par le médecin de prévention. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir qu'en l'absence de réponse à sa demande du 5 janvier 2021 de communication des motifs de la décision, l'administration aurait méconnu le 6ème alinéa de l'article 3-3 des lignes directrices précitées imposant une justification circonstanciée des avis, communicable aux agents.
6. En troisième lieu, M. C... reprend en appel le moyen tiré de ce que son droit de priorité, tel que prévu par le II de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État a été méconnu. Il y a lieu, par adoption des motifs du tribunal, d'écarter ce moyen.
7. En quatrième lieu, le moyen tiré de ce que, en ne respectant pas les dispositions spécifiques de l'article 2-2 des lignes directrices et notamment les procédures de gestion et d'examen des demandes de mutation s'inscrivant dans ce cadre et décrites dans les notes n° 55-380 du 29 avril 2009 et n° 12-41 du 5 décembre 2012, l'administration aurait entaché ses décisions d'illégalité n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.
8. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
9. M. C... fait valoir qu'il réside à Lyon, alors que sa compagne et leur enfant résident à Tournefeuille près de Toulouse. S'il indique que ses demandes de mutation à Bordeaux et à Nice avaient pour objectif de permettre un rapprochement familial et lui auraient permis de s'approcher de l'endroit où il pourrait poursuivre ses soins, qu'il s'agisse de Toulouse ou d'Aix-en-Provence, il apparait qu'il n'a fait aucune demande de poste à Toulouse, alors que soixante-six postes étaient proposés dans cette ville et que trois répondaient aux préconisations médicales le concernant. Par ailleurs, si la compagne de M. C... a également demandé à être mutée à Bordeaux ou à Nice lors de la campagne de mobilité de la fin de l'année 2020, lorsqu'elle a été reçue, en 2019, au concours d'assistant d'administration de l'aviation civile et qu'elle a alors dû changer de poste, elle a décliné la proposition d'affectation de l'administration à Lyon où elle se trouvait déjà ainsi que son compagnon et c'est à sa demande qu'elle a été mutée à Toulouse en 2020. Dans ces conditions et eu égard au motif d'intérêt général pris en considération par l'administration pour refuser la mutation sollicitée, tiré de ce que l'intéressé, qui venait d'acquérir sa qualification technique supérieure, ne disposait pas de l'ancienneté minimale de trois ans exigée avant de quitter son poste, l'administration n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en refusant de lui accorder la mutation sollicitée. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
10. En dernier lieu, et ainsi qu'il a été dit au point 5, il ressort des pièces du dossier que pour refuser de faire droit à la demande de mutation de M. C... l'administration s'est fondée sur les motifs tirés de ce que l'intéressé ne justifiait pas de la durée minimale d'amortissement et de ce que ses demandes de mutation ne concernaient pas les villes au sein desquelles il était susceptible, selon les avis du médecin de prévention, de poursuivre son traitement médical. M. C... n'a pas contesté ces motifs. Si, dans les écritures devant le tribunal, puis devant la cour, l'administration a par ailleurs indiqué qu'elle avait demandé " un retour du médecin chef (Dr B...) sur la conduite à tenir au vu de la situation médicale de M. C... " et qu'il lui " a été remonté que le programme médical de M. C... pouvait se poursuivre à Lyon ", ce motif, qui ne constitue pas l'un des motifs de la décision litigieuse, est surabondant. Dans ces conditions, M. C... ne peut utilement faire valoir que la direction générale de l'aviation civile se serait ainsi constituée frauduleusement des justificatifs dans le seul but de justifier sa décision devant le tribunal et devant le défenseur des droits. Par suite ce moyen doit être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge une somme à verser à l'État en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré après l'audience du 6 mai 2024 à laquelle siégeaient :
M. Picard, président de chambre ;
Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;
M. Chassagne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mai 2024.
La rapporteure,
A. Duguit-LarcherLe président,
V-M. Picard
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 23LY00274
lc