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23/05/2024 | FRANCE | N°22LY01704

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 23 mai 2024, 22LY01704


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure

La société Cabinet d'Etudes topographiques Ingénierie (CETI) a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler ou de résilier l'accord-cadre de maîtrise d'œuvre portant sur des travaux d'électrification rurale, d'éclairage public et travaux connexes du programme 2020 et, éventuellement, des programmes 2021, 2022 et 2023 conclu pour le compte du syndicat départemental d'énergie de la Haute-Loire et de condamner le syndicat départemental d'énergie de la Haute-Loire (SDE 43)

à lui verser la somme de de 31 425 euros HT en réparation des préjudices subis du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Cabinet d'Etudes topographiques Ingénierie (CETI) a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler ou de résilier l'accord-cadre de maîtrise d'œuvre portant sur des travaux d'électrification rurale, d'éclairage public et travaux connexes du programme 2020 et, éventuellement, des programmes 2021, 2022 et 2023 conclu pour le compte du syndicat départemental d'énergie de la Haute-Loire et de condamner le syndicat départemental d'énergie de la Haute-Loire (SDE 43) à lui verser la somme de de 31 425 euros HT en réparation des préjudices subis du fait de son éviction illégale de ce marché.

Par jugement n° 2000985 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par requête et mémoires enregistrés le 3 juin 2022, le 11 janvier 2023 et le 13 mars 2023, (ce dernier non communiqué), la société CETI, représentée par Me Conti, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 mai 2022 ;

2°) d'annuler ou, à défaut, de résilier l'accord-cadre de maîtrise d'œuvre ;

3°) de condamner le SDE 43 à lui verser la somme de 31 425 euros en réparation des préjudices subis du fait de son éviction illégale ;

4°) de mettre à la charge du SDE 43 une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a statué infra petita en examinant un moyen qu'elle n'avait pas soulevé et a omis de répondre à deux des moyens soulevés tirés de ce que l'offre de la société attributaire était incomplète et de ce que les offres des soumissionnaires ont été dénaturées ;

- le président du SDE 43 n'était pas compétent pour signer le marché litigieux ; la signature de ce marché excède la gestion des affaires courantes et intervient après expiration du mandat des élus du syndicat départemental d'énergie de la Haute-Loire ;

- faute d'avoir fourni un extrait Kbis, un certificat de régularité fiscale et un certificat de régularité sociale datés antérieurement à la signature du marché conformément aux articles R. 2143-7, R. 2143-8 et R. 2143-9 du code de la commande publique, l'offre de l'attributaire était irrecevable au sens de l'article R. 2144-7 du code de la commande publique et aurait dû être rejetée ;

- faute de comporter un mémoire technique ainsi que l'attestation des moyens utilisés afin d'assurer une disponibilité immédiate pour présence sur le terrain en urgence imposée par le suivi des travaux, l'offre de la société attributaire était incomplète et aurait dû être déclarée irrégulière en application de l'article L. 2152-2 du code de la commande publique ;

- la capacité technique de la société attributaire et ses références professionnelles étaient insuffisantes et, au vu des exigences de l'acheteur en vertu du 2° de l'article R. 2143-3 du code de la commande publique ; l'offre de la société attributaire aurait dû être rejetée sans être examinée ;

- la définition et la mise en œuvre des critères et sous-critères de la notation porte atteinte aux principes de transparence et d'égalité de traitement des candidats ; les critères d'analyse des offres sont imprécis et leur définition n'est pas identique dans l'ensemble des documents de consultation ; les attentes de l'acheteur public quant au contenu du mémoire technique ne sont pas suffisamment détaillées ; le critère de la valeur technique ne pouvait englober celui des qualifications et expérience du personnel sans méconnaître l'article R. 2157-2 du code de la commande publique ; pour l'appréciation du critère " valeur technique de l'offre ", le SDE 43 s'est appuyé sur deux sous-critères pondérés (mémoire technique et fourniture des CV et compétences professionnelles ") qui n'avaient pas été présentés comme tels dans les documents de consultation ; l'écart de points entre l'offre de l'attributaire et son offre s'est constitué sur l'appréciation du mémoire technique ;

- l'analyse de son offre a été sous-évaluée ;

- la notation de son offre est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, de même que celle de la société attributaire, notamment sur le critère " moyens pour une disponibilité immédiate " ;

- disposant d'une chance sérieuse de remporter le marché, elle doit être indemnisée de son manque à gagner, d'un montant de 30 425 euros HT correspondant à un taux de marge nette HT de 18 % sur le montant total des travaux HT de la tranche ferme et des frais de présentation de l'offre, chiffrés à 1 000 euros HT.

Par mémoire enregistré le 8 novembre 2022, le SDE 43 et la SEMEV, représentés par Me Marion, concluent au rejet de la requête et demandent que soit mise à la charge de la requérante une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est de nature à remettre en cause la validité du contrat de marché public de travaux contesté et que les conclusions indemnitaires doivent être rejetées ; à titre subsidiaire si la cour est susceptible de faire droit aux conclusions indemnitaires de la société CETI, le taux de marge nette constaté pour une maîtrise d'œuvre est compris entre 5 et 8 % du montant HT du marché.

La clôture de l'instruction a été fixée au 21 mars 2023 par ordonnance du même jour, prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la commande publique, notamment son annexe 9 constituée par l'arrêté du 22 mars 2019 fixant la liste des renseignements et documents pouvant être demandés aux candidats aux marchés publics ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Psilakis, première conseillère,

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,

- et les observations de Me Conti pour la société CETI et celles de Me Marion pour le SDE 43 et SEMEV.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un appel d'offre ouvert, le SDE 43 agissant par son mandataire, la société d'économie mixte d'électrification du Veley (SEMEV), a attribué à la société AB2R par accord cadre, la maîtrise d'œuvre des travaux d'électrification en zone rurale, d'éclairage public (investissement et maintenance) et de travaux connexes (travaux de maîtrise de l'énergie, d'infrastructures d'énergies renouvelables, de réseau d'infrastructure de recharge de véhicules électriques, d'infrastructure de gaz, de communications électroniques) relatifs au programme 2020 et éventuellement, par reconduction, aux programmes 2021, 2022 et 2023. La société CETI, candidate évincée, a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une demande d'annulation ou de résiliation de cet accord-cadre et de condamnation du SDE 43 à lui verser la somme de 31 425 euros HT, en réparation du préjudice subi du fait de son éviction illégale. La société CETI relève appel du jugement du 5 mai 2022 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte de l'instruction que le tribunal n'a ni visé ni examiné le moyen tiré de ce que le SDE 43 a omis d'intégrer dans son appréciation les éléments constitutifs de l'offre de la société CETI. Ce moyen, distinct des griefs formulés quant à la mise en œuvre des critères d'attribution du marché en litige et qui n'était pas inopérant, était soulevé par la société CETI dès l'introduction de l'instance. La société CETI est ainsi fondée à soutenir que l'omission du tribunal de répondre à ce moyen entache le jugement attaqué d'irrégularité et est, dès lors, fondée à en demander l'annulation pour ce motif, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de régularité soulevés.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société CETI devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand.

Sur les conclusions tendant à l'annulation ou à la résiliation du marché :

4. Tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité de ce contrat. Il ne peut invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont il se prévaut ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Un concurrent évincé ne peut ainsi invoquer, outre les vices d'ordre public dont serait entaché le contrat, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction.

5. En premier lieu, aux termes de l'article 19 de la loi du 24 mars 2020 : " (...) IV. - Par dérogation à l'article L. 227 du code électoral : 1° Dans les communes pour lesquelles le conseil municipal a été élu au complet, les conseillers municipaux en exercice avant le premier tour conservent leur mandat jusqu'à l'entrée en fonction des conseillers municipaux élus au premier tour (...) 2° Dans les communes, autres que celles mentionnées au 3° du présent IV, pour lesquelles le conseil municipal n'a pas été élu au complet, les conseillers municipaux en exercice avant le premier tour conservent leur mandat jusqu'au second tour. Le cas échéant, leur mandat de conseiller communautaire est également prorogé jusqu'au second tour, sous réserve du 3 du VII (...) ". Aux termes de l'article 1er de l'ordonnance n° 2020-391 du 1er avril 2020 : " (...) II. - Le président de l'établissement public de coopération intercommunale exerce, par délégation, l'ensemble des attributions de l'organe délibérant (...) VI. - (...) 2° Les dispositions du II sont applicables aux syndicats mixtes mentionnés à l'article L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales : " Les syndicats mixtes constitués exclusivement de communes et d'établissements publics de coopération intercommunale et ceux composés uniquement d'établissements publics de coopération intercommunale sont soumis aux dispositions des chapitres Ier et II du titre Ier du livre II de la présente partie (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions combinées, mises en œuvre pendant l'état d'urgence sanitaire institué par la loi du 24 mars 2020 et dérogatoires à celles applicables au renouvellement des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale mentionnées à l'article L. 5211-8 et suivants du code général des collectivités territoriales, que le président du SDE 43 demeurait compétent pour signer l'acte d'engagement du marché en litige, le 22 avril 2020, sans autorisation de l'organe délibérant et que sa compétence n'était pas limitée, à cette date, à la gestion des affaires courantes. Par suite, le contrat a été régulièrement conclu par le président du SDE 43, élu lors de la mandature prolongée par l'état d'urgence.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2141-2 du code de la commande publique : " Sont exclues de la procédure de passation des marchés les personnes qui n'ont pas souscrit les déclarations leur incombant en matière fiscale ou sociale ou n'ont pas acquitté les impôts, taxes, contributions ou cotisations sociales exigibles ".

8. Il résulte de l'instruction que le SDE 43 justifie de la capacité à soumissionner de la société AB2R par la production de l'extrait Kbis, du certificat de régularité fiscale et du certificat de régularité sociale, exigés par les articles R. 2143-7, R. 2143-8 et R. 2143-9 du code de la commande publique, qui étaient annexés à la candidature de la société attributaire et mentionnant une date antérieure à la signature du marché. Par suite la société CETI n'est pas fondée à soutenir que l'attributaire devait être exclu de la procédure et que son offre n'aurait pas dû être examinée.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 2142-1 du code de la commande publique : " L'acheteur ne peut imposer aux candidats des conditions de participation à la procédure de passation autres que celles propres à garantir qu'ils disposent de l'aptitude à exercer l'activité professionnelle, de la capacité économique et financière ou des capacités techniques et professionnelles nécessaires à l'exécution du marché. Ces conditions sont liées et proportionnées à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution ". Aux termes de l'article 3 de l'annexe 9 du même code : " I. - Dans la mesure où ils sont nécessaires à l'appréciation des capacités techniques et professionnelles des candidats, l'acheteur peut exiger un ou plusieurs renseignements ou documents figurant dans la liste ci-dessous. Pour les marchés publics autres que de défense ou de sécurité, cette liste est limitative. 1° Une liste des travaux exécutés au cours des cinq dernières années, assortie d'attestations de bonne exécution pour les travaux les plus importants (...) Ces attestations indiquent le montant, la date et le lieu d'exécution des travaux et précisent s'ils ont été effectués selon les règles de l'art et menés régulièrement à bonne fin ".

10. Il résulte de l'instruction que pour apprécier la valeur technique des candidats, le SDE 43 a demandé, conformément à l'article 4.2 du règlement de consultation, une déclaration indiquant les effectifs moyens annuels du candidat ainsi que l'effectif des personnels d'encadrement, les titres d'études et l'expérience professionnelle du ou des responsables et exécutants de la prestation envisagée, les déclarations indiquant l'équipement technique mis à disposition ainsi qu'une liste des services fournis, similaires à l'objet de l'accord cadre en cause sur les trois dernières années. Il résulte du tableau de vérification du contenu des offres, daté du 9 mars 2020, que ces éléments ont été fournis à l'appui de la candidature de la société attributaire. Dans ces conditions, le SDE 43 a pu exercer un contrôle sur sa capacité technique. Par ailleurs, si la société CETI se prévaut de ce que la société attributaire bénéficiait, au moment de la procédure en cause, d'une expérience de maitrise d'œuvre limitée aux réseaux d'eau et d'assainissement, il résulte de l'instruction que le dossier de candidature de l'attributaire précisait qu'il conditionnait le recrutement de membres de son équipe spécialisés dans le domaine des réseaux électriques à l'obtention du marché. Dans ces conditions, le pouvoir adjudicateur n'a pas vicié la procédure en prenant en compte des capacités techniques déterminées par des recrutements conditionnés à l'obtention du marché pour l'appréciation des capacités techniques de ce candidat.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 2152-2 du code de la commande publique : " Une offre irrégulière est une offre qui ne respecte pas les exigences formulées dans les documents de la consultation, en particulier parce qu'elle est incomplète (...) ".

12. Contrairement à ce que soutient la société CETI, il résulte du tableau de vérification du contenu des offres, daté du 9 mars 2020, que le mémoire technique ainsi que l'attestation de disponibilité immédiate ont été joints à l'offre de la société attributaire qui n'était, ainsi, pas irrégulière.

13. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 2157-2 du code de la commande publique : " Pour attribuer le marché au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, l'acheteur se fonde : (...) 2° Soit sur une pluralité de critères non-discriminatoires et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution, parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs (...) Il peut s'agir des critères suivants : a) La qualité, y compris la valeur technique (...) b) (...) l'assistance technique (...) et les caractéristiques opérationnelles ; c) L'organisation, les qualifications et l'expérience du personnel assigné à l'exécution du marché lorsque la qualité du personnel assigné peut avoir une influence significative sur le niveau d'exécution du marché (...) ".

14. Pour assurer le respect des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, l'information appropriée des candidats sur les critères d'attribution d'un marché public est nécessaire, dès l'engagement de la procédure d'attribution du marché, dans l'avis d'appel public à concurrence ou le cahier des charges tenu à la disposition des candidats. Dans le cas où le pouvoir adjudicateur souhaite retenir d'autres critères que celui du prix, il doit porter à la connaissance des candidats la pondération ou la hiérarchisation de ces critères.

15. Il résulte de l'article 5.2 du règlement de consultation que le pouvoir adjudicateur a prévu pour le marché en cause trois critères d'évaluation de l'offre, un critère relatif au prix pondéré pour 50 % de la note finale et deux critères relatifs à la qualité technique de l'offre dont l'un pondéré pour 15 % concernant les moyens utilisés afin d'assurer une disponibilité immédiate et présence terrain et l'autre pondéré pour 35 % concernant la valeur technique, ce critère étant lui-même apprécié au stade de la présentation des candidatures sur la base de la liste du personnel dédié à la réalisation du marché, la fourniture des curriculum vitae et de compétences professionnelles de chaque personne affectée au marché et le mémoire technique.

16. D'une part, la circonstance que le règlement de consultation précise que le critère du prix devait être exprimé en pourcentage de rémunération du montant HT des travaux n'est pas susceptible d'avoir vicié la procédure de mise en concurrence, dès lors que l'ensemble des candidats ont été avertis dans les documents de consultation, des conditions, claires et sans équivoque, de mise en œuvre de ce critère.

17. D'autre part, il résulte du rapport d'analyse des offres que, pour déterminer la note globale du critère de la valeur technique, le SDE 43 a noté sur 25 le mémoire technique et sur 10 les compétences techniques et professionnelles des personnels. Ce faisant, le syndicat départemental d'énergie de la Haute-Loire ne s'est pas borné à décrire sa méthode de notation mais a institué deux sous-critères qui n'étaient pas annoncés comme tels dans les documents de consultation. Toutefois il ressort des mentions des documents de consultation que les attentes du maître d'ouvrage sur le contenu du mémoire technique étaient suffisamment précises pour ne pas induire en erreur les candidats sur le soin qu'ils devaient apporter à la rédaction de ce document qui constitue habituellement l'élément principal d'appréciation d'une offre. En outre, il résulte de l'instruction que la société CETI a obtenu la notation la plus élevée sur la compétence du personnel. N'ayant pas été lésée par la mise en œuvre de ce sous-critère, elle n'est pas recevable, en application des principes rappelés au point 4, à se prévaloir de manquements quant à sa mise en œuvre, qui sont sans rapport direct avec son éviction. Il en résulte qu'en l'espèce, la mise en œuvre des deux sous-critères précités, non initialement présentés comme tels dans les documents de consultation par le pouvoir adjudicateur, n'a pas entaché d'irrégularité l'attribution du marché.

18. En sixième lieu, si le rapport d'analyse des offres mentionne que, dans son mémoire technique, la société CETI " ne définit pas la mission qu'il devra remplir ", cette mention ne suffit pas à caractériser une appréciation erronée de l'offre de ce candidat, dès lors qu'il résulte des autres mentions de ce rapport, notamment des critiques afférentes aux modalités de mise en œuvre des prestations, que l'intégralité des composantes de l'offre de la société CETI a été exhaustivement analysée.

19. En septième et dernier lieu, il résulte de l'instruction que la société CETI a obtenu, sur le critère du prix la note maximale de 50/50 et la société AB2R la note de 47/50 et que les sociétés AB2R et CETI ont obtenu chacune 15 points sur le critère " moyens pour une disponibilité immédiate ". Enfin, sur le critère " valeur technique ", la société CETI a obtenu la note de 16/35 alors que la société AB2R a obtenu la note de 24,5/35.

20. D'une part, s'agissant du critère de la valeur technique, le rapport d'analyse des offres a relevé trois avantages qualitatifs de l'offre de la société attributaire, tenant à la simplicité de son organisation, au rythme hebdomadaire des réunions de suivi de chantiers et à la mise en œuvre de moyens de planification informatisées bien adaptés. En se bornant à soutenir qu'elle aurait pu elle aussi produire un mémoire technique de niveau comparable, la société CETI ne critique pas utilement l'appréciation du mérite comparé des offres. Ainsi, le SDE 43 a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, attribuer une note supérieure au mémoire technique présenté par la société AB2R.

21. D'autre part, en se bornant à soutenir que la société AB2R ne disposerait de personnels suffisamment qualifiés en électricité qu'après recrutement supplémentaire, lui-même conditionné à l'attribution du marché, la société CETI ne démontre pas l'erreur manifeste entachant l'attribution à ce candidat de la note maximale au critère des moyens pour une disponibilité immédiate.

22. Il résulte de ce qui précède que la société CETI n'est pas fondée à soutenir que le marché attribué à la société AB2R serait entaché de vices ou d'irrégularités et que ses conclusions à fin d'annulation ou de résiliation doivent être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

23. En l'absence de vices d'irrégularités entachant le marché attribué à la société AB2R, la société CETI n'est pas fondée à demander à être indemnisée de son éviction. Par suite, les conclusions indemnitaires dirigées contre le SDE 43 ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

24. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la société CETI au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du syndicat départemental d'énergie de la Haute-Loire présentées sur ce fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2000985 du 5 mai 2022 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société CETI est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par le SDE 43 au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS cabinet d'études topographiques ingénierie, au syndicat départemental d'électricité de la Haute-Loire et à la société d'économie mixte d'électrification du Veley.

Délibéré après l'audience du 2 mai 2024 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Arbarétaz, président,

Mme Evrard, présidente assesseure,

Mme Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mai 2024.

La rapporteure,

C. Psilakis

Le président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY01704


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01704
Date de la décision : 23/05/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-02-005 Marchés et contrats administratifs. - Formation des contrats et marchés. - Formalités de publicité et de mise en concurrence.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : TEILLOT & ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-23;22ly01704 ?
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