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25/04/2024 | FRANCE | N°24LY00017

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 7ème chambre, 25 avril 2024, 24LY00017


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2023 par lequel la préfète du Rhône a décidé sa remise aux autorités allemandes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.



Par un jugement n° 2808231 du 23 octobre 2023, le magistrat désigné par la présidente du tribunal a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour



Par une requête et un mémoire enregistrés

les 4 janvier et 28 février 2024, ce dernier non communiqué, M. A..., représenté par Me Robin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2023 par lequel la préfète du Rhône a décidé sa remise aux autorités allemandes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2808231 du 23 octobre 2023, le magistrat désigné par la présidente du tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 janvier et 28 février 2024, ce dernier non communiqué, M. A..., représenté par Me Robin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de l'admettre au séjour en France au titre de l'asile et de lui délivrer une attestation de demande d'asile, subsidiairement de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois à compter de l'arrêt ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté quant au critère de détermination de l'État membre responsable, à la vulnérabilité de son épouse et à l'impact de sa remise aux autorités allemandes sur son état de santé ;

- la décision est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen réel de sa situation ;

- la décision a été prise en méconnaissance de son droit à être entendu en violation des stipulations de l'article 41.2 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et du principe général du droit de l'Union européenne relatif aux droits de la défense et à une bonne administration ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 et méconnaît l'article 31 du même règlement, dispositions à combiner avec l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la décision méconnaît les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 12 février 2024, la préfète du Rhône conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens présentés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 novembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 de la Commission ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

- et les observations de Me Lulé, représentant M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant ivoirien né le 30 octobre 1987, est entrée en France, selon ses déclarations, le 30 juin 2023 et y a demandé l'asile. Il relève appel du jugement du 23 octobre 2023 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 septembre 2023 par lequel la préfète du Rhône a décidé sa remise aux autorités allemandes, responsables de l'examen de sa demande d'asile.

Sur la régularité du jugement :

2. Le magistrat désigné par la présidente du tribunal a répondu, aux points 5 et 6 du jugement au moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté en litige. Par suite, le moyen tiré de ce que le magistrat désigné, qui n'avait pas à répondre à l'ensemble des arguments soulevés par le requérant à l'appui de ce moyen, ne se serait pas prononcé sur le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté quant au critère de détermination de l'État membre responsable, à la vulnérabilité de l'épouse de l'appelant et à l'impact de sa remise aux autorités allemandes sur son état de santé doit être écarté.

Sur les conclusions à fins d'annulation :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 572-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du troisième alinéa de l'article L. 571-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre État peut faire l'objet d'un transfert vers l'État responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. (...) ". Il résulte de ces dispositions que la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre État membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.

4. Pour l'application de ces dispositions, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre État membre. Une telle motivation doit permettre d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application, c'est-à-dire, pour un transfert en vue d'une première prise en charge, l'un des critères du chapitre III du règlement du 26 juin 2013 et, pour un transfert en vue d'une reprise en charge, l'un des critères du b) c) ou d) de l'article 18 dudit règlement.

5. L'arrêté litigieux, qui vise le règlement européen du 26 juin 2013, et notamment son article 18, précise qu'après consultation du fichier européen Eurodac, il est apparu que le requérant avait été identifié en Italie, pour le franchissement d'une frontière puis le dépôt d'une demande d'asile, puis en Allemagne, où il avait en dernier lieu demandé l'asile le 27 janvier 2023. Il indique qu'alors que les autorités italiennes ont refusé de le reprendre en charge, les autorités allemandes ont accepté cette reprise. Une telle motivation qui fait apparaître qu'il est fait application du b), c) ou d) du paragraphe 1 de l'article 18 est suffisante. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de transfert, qui n'avait pas à faire mention du dépôt par la compagne du requérant d'une demande de titre de séjour le 12 septembre 2023 ni des éléments dont le préfet disposait sur l'état de santé de cette dernière, serait insuffisamment motivée doit être écarté.

6. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Rhône, qui n'était pas tenue d'examiner la demande de titre de séjour de la compagne du requérant avant de prendre la décision litigieuse, n'aurait pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation.

7. En troisième lieu, M. A... reprend en appel les moyens tirés de ce que son droit d'être entendu a été méconnu, que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013, que la décision méconnaît l'article 31 du même règlement, l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu, alors, comme l'a indiqué le premier juge, que la circonstance que sa compagne ne parlerait pas l'allemand ne saurait suffire à démontrer l'impossibilité d'une prise en charge médicale en Allemagne et que les nouveaux certificats médicaux qu'il a produits ne font pas état de ce que les traitements dont sa compagne a besoin, notamment, en ce qui concerne son insuffisance rénale, une surveillance suivie d'une hémodialyse puis éventuellement d'une greffe de rein, ne seraient pas disponibles en Allemagne où elle ne pourrait être transférée sans risques, d'écarter ces moyens par adoption des motifs du jugement du tribunal.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2024 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

V-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 24LY00017

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY00017
Date de la décision : 25/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : SCP ROBIN VERNET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-25;24ly00017 ?
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