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04/04/2024 | FRANCE | N°22LY03078

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 04 avril 2024, 22LY03078


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 octobre 2021 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.



Par jugement n° 2200094 du 19 avril 2022, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 octobre 2022 et le 2 octobre 2023, M. B..., représenté par Me Cou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 18 octobre 2021 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par jugement n° 2200094 du 19 avril 2022, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 20 octobre 2022 et le 2 octobre 2023, M. B..., représenté par Me Couderc (SCP Couderc-Zouine), demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et les décisions du préfet du Rhône du 18 octobre 2021 ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement, de réexaminer sa situation après remise d'une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour méconnaît l'article 6 7° de l'accord franco-algérien ;

- il méconnaît l'article 6 5° de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article L. 611-3 9° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la fixation du délai de départ volontaire est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- la fixation du pays de destination est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 3 convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sophie Corvellec ;

- et les observations de Me Lulé pour M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 19 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 18 octobre 2021 rejetant sa demande de titre de séjour, fondée sur son état de santé, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de quatre-vingt-dix jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".

3. Pour rejeter la demande dont il était saisi, le préfet du Rhône s'est approprié le sens de l'avis médical du collège de médecins de l'Office français de l'intégration et de l'immigration du 4 juin 2021, selon lequel si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, au vu de l'offre de soins et des caractéristiques du système de santé algérien. Il ressort des pièces du dossier que M. B... souffre, depuis l'enfance, d'une épilepsie active, présentant un risque important de crise généralisée, nécessitant un suivi trimestriel auprès d'un neurologue et pour laquelle il reçoit en France un traitement composé de Depakine, Lamictal et Urbanyl. Aucun des documents médicaux qu'il produit n'indique que ces produits, ou les substances actives qui les composent, ne seraient pas disponibles en Algérie, ni que ce pays ne serait pas doté de neurologues. Par ailleurs, ne sont de nature à établir une telle indisponibilité ni la circonstance que sa prise en charge n'y était pas satisfaisante avant son entrée en France, ni les ordonnances de Depakine portant la mention " non disponible " dont il se prévaut, qui n'émanent que d'une seule pharmacie algérienne. De même, les difficultés d'approvisionnement qu'il invoque ne sont nullement étayées. Dans ces conditions, la seule circonstance que l'Urbanyl n'est pas mentionné sur le site internet Pharma'Net qui a vocation à répertorier les médicaments commercialisés en Algérie ne saurait suffire à remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'OFII. Enfin, s'il invoque sa situation financière, M. B..., qui ne donne aucune précision sur le coût de sa prise en charge et ne prétend pas être dans l'incapacité d'exercer une activité professionnelle, ne démontre pas ne pas pouvoir se procurer des ressources et bénéficier d'une affiliation au système de sécurité sociale algérien. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Rhône a méconnu les stipulations citées au point 2.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire (...) au bien-être économique du pays, (...) à la prévention des infractions pénales (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

5. M. B..., ressortissant algérien né en 1984, est entré en France, d'après ses déclarations, le 10 juin 2019. A la date de la décision litigieuse, il ne résidait ainsi que depuis deux ans sur le territoire français, où, célibataire et dépourvu de charges de famille, il ne dispose d'aucune attache familiale. Il ne démontre pas la réalité de l'intégration et des attaches privées dont il se prévaut, par ses courtes activités professionnelles et bénévoles au sein de la structure qui l'accueille, par des attestations, au demeurant non complétées, et par une promesse d'embauche, postérieure à la décision litigieuse. En revanche, il ne prétend pas être dépourvu de telles attaches dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-sept ans et où demeurent, d'après le formulaire de demande complété par ses soins, ses parents et quatre membres de sa fratrie. Enfin, comme indiqué au point 3, il ne ressort pas des pièces du dossier que son état de santé nécessite qu'il demeure sur le territoire français. Dans ces circonstances, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Rhône a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations précitées. Pour ces mêmes motifs, le préfet du Rhône n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B....

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour doit être écarté.

7. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 5, M. B..., qui n'a pas avancé d'autres arguments, n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

8. En troisième lieu, comme indiqué au point 3, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de ce que le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile fait obstacle à ce qu'une obligation de quitter le territoire français soit prononcée à son encontre doit être écarté.

Sur le délai de départ volontaire :

9. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se prévaloir, par voie d'exception, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le délai de départ volontaire.

Sur le pays de destination :

10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français doit, en tout état de cause, être écarté.

11. En second lieu, comme indiqué au point 3, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... ne pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

13. Le présent arrêt rejetant les conclusions à fin d'annulation de M. B... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. B....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 14 mars 2024, à laquelle siégeaient :

M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,

Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2024.

La rapporteure,

S. CorvellecLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03078


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03078
Date de la décision : 04/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SCP COUDERC - ZOUINE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-04;22ly03078 ?
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