La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/03/2024 | FRANCE | N°23LY02921

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 07 mars 2024, 23LY02921


Vu les procédures suivantes :



Procédure contentieuse antérieure



M. A... C... et Mme B... D... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon, chacun pour ce qui le concerne, d'annuler les arrêtés du 8 mars 2023 par lesquels la préfète du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné l'Arménie, Etat dont ils sont ressortissants, comme pays de destination.

Par jugement nos 2302244-2302245 du 31 mai 2023, la magis

trate désignée par la présidente du tribunal a rejeté leurs demandes.

Procédures devant la cour
...

Vu les procédures suivantes :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... et Mme B... D... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Lyon, chacun pour ce qui le concerne, d'annuler les arrêtés du 8 mars 2023 par lesquels la préfète du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné l'Arménie, Etat dont ils sont ressortissants, comme pays de destination.

Par jugement nos 2302244-2302245 du 31 mai 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal a rejeté leurs demandes.

Procédures devant la cour

Par requête enregistrée le 13 septembre 2023, M.et Mme C..., représentés par Me Delbes, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et les arrêtés de la préfète du Rhône du 8 mars 2023 ;

2°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de leur délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- le refus de titre de séjour opposé à Mme C... méconnaît l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les refus de séjour méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la fixation du pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

M. et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 9 août 2023.

La préfète du Rhône, à qui la requête a été communiquée, n'a pas présenté d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. E... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C..., ressortissants arméniens nés, respectivement, en 1976 et en 1983, sont entrés le 26 octobre 2021 en France, sous couvert de visas de court séjour délivrés par les autorités grecques, accompagnés de leurs deux enfants mineurs, et ont demandé l'asile. Leurs demandes ont été rejetées, en dernier lieu, le 9 décembre 2022 par la Cour nationale du droit d'asile. Invités, sur le fondement de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à indiquer s'ils estimaient pouvoir prétendre à une admission au séjour à un autre titre que l'asile, ils ont sollicité un titre sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 423-9 de ce code, en invoquant, pour M. C..., sa vie privée et familiale et, pour Mme C..., son état de santé. Ils relèvent appel du jugement du 31 mai 2023 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes d'annulation des arrêtés ayant rejeté leurs demandes de titre de séjour, leur faisant obligation de quitter le territoire français sous trente jours sur le fondement des dispositions des 3° et 4° de l'article L. 611-1 de ce code et désignant l'Arménie comme pays de destination.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ".

3. Pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par Mme C..., la préfète du Rhône s'est appropriée le sens de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) émis le 9 août 2022, selon lequel, si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Arménie vers lequel elle peut voyager sans risque. Si les complications endocriniennes dont souffre Mme C... et qui sont consécutives à une intervention chirurgicale subie en France, fin 2021, nécessitent un traitement médicamenteux à base d'hydrocortisone, aucune pièce versée au dossier ne permet de contredire l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII selon lequel un traitement médical approprié est disponible en Arménie. Tel n'est notamment pas le courrier du 29 novembre 2022 du secretariat général du ministère de la santé arménien qui, s'il indique uniquement que l'hydrocortisone n'est pas enregistrée dans ce pays, se prononce sur une molécule et non pas sur les spécialités médicales contenant cette molécule et qui seules peuvent être recensées dans la liste des médicaments distribués. Par suite, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir qu'en refusant de délivrer un titre de séjour en raison de l'état de santé de Mme C..., la préfète du Rhône aurait méconnu les dispositions citées au point 2.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire (...) au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".

5. M. et Mme C... sont arrivés récemment en France et ils n'établissent pas en se bornant à reproduire le récit non étayé d'éléments vérifiables présenté devant la Cour nationale du droit d'asile qu'ils ne pourraient reconstituer leur cellule familiale en Arménie où ils ont vécu jusqu'à l'âge de quarante-cinq ans et trente-huit ans, où se trouve l'essentiel de leurs attaches privées et familiales et où leurs enfants pourront reprendre leur scolarité. Dans les circonstances de l'espèce, la préfète du Rhône, en refusant de les admettre au séjour, n'a pas porté au droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Il n'est pas davantage établi que la préfète du Rhône aurait entaché ses décisions d'erreur manifeste d'appréciation de leur situation personnelle.

6. En dernier lieu, M. et Mme C... reprennent en appel le moyen qu'ils avaient invoqué en première instance, tirés de la méconnaissance par les décisions fixant le pays de destination de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par la magistrate désignée du tribunal.

7. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes d'annulation. Les conclusions de leur requête, présentées aux mêmes fins, doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction.

8. Enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. et Mme C.... Ces conclusions doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... épouse C..., à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 8 février 2024, à laquelle siégeaient :

M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,

Mme Christine Psilakis, première conseillère,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 mars 2024.

Le président, rapporteur,

Ph. E...L'assesseure la plus ancienne,

C. Psilakis

La greffière

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

No 23LY02921


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY02921
Date de la décision : 07/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : DELBES

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-07;23ly02921 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award