La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/02/2024 | FRANCE | N°22LY02978

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 19 février 2024, 22LY02978


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision de rejet implicitement née du silence conservé par le préfet de l'Isère sur la demande de regroupement familial présentée en faveur de son épouse.



Par ordonnance n° 2205852 du 19 septembre 2022, le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 octobre

2022, M. B..., représenté par Me Coutaz, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance, ainsi que la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision de rejet implicitement née du silence conservé par le préfet de l'Isère sur la demande de regroupement familial présentée en faveur de son épouse.

Par ordonnance n° 2205852 du 19 septembre 2022, le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 octobre 2022, M. B..., représenté par Me Coutaz, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance, ainsi que la décision implicite de refus du préfet de l'Isère née sur sa demande de regroupement familial ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère d'admettre son épouse au bénéfice du regroupement familial, sous huit jours et sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande de première instance était recevable, l'accusé de réception qui lui a été délivré ne comportant pas la mention des voies de recours ouvertes contre une décision implicite de refus ;

- la décision litigieuse méconnaît l'article 4 de l'accord franco-algérien, lequel est contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce qu'il ne dispense pas les bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé de la condition de ressources ;

- elle méconnaît en outre l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Sophie Corvellec ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité algérienne, relève appel de l'ordonnance du 19 septembre 2022 par laquelle le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté, comme tardive et par suite irrecevable, sa demande tendant à l'annulation la décision de rejet implicitement née du silence conservé par le préfet de l'Isère sur la demande de regroupement familial présentée le 15 janvier 2020 en faveur de son épouse.

2. Aux termes de l'article L. 421-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux demandes de regroupement familial présentées par les ressortissants algériens et dans sa rédaction alors applicable : " L'autorité administrative statue sur la demande dans un délai de six mois à compter du dépôt par l'étranger du dossier complet de cette demande (...) ".

3. Les règles relatives au délai raisonnable au-delà duquel le destinataire d'une décision ne peut exercer de recours juridictionnel, qui ne peut en règle générale excéder un an sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, sont également applicables à la contestation d'une décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur une demande présentée devant elle, lorsqu'il est établi que le demandeur a eu connaissance de la décision. La preuve d'une telle connaissance ne saurait résulter du seul écoulement du temps depuis la présentation de la demande. Elle peut en revanche résulter de ce qu'il est établi, soit que l'intéressé a été clairement informé des conditions de naissance d'une décision implicite lors de la présentation de sa demande, soit que la décision a par la suite été expressément mentionnée au cours de ses échanges avec l'administration, notamment à l'occasion d'un recours gracieux dirigé contre cette décision. Le demandeur, s'il n'a pas été informé des voies et délais de recours dans les conditions prévues par l'article R. 112-11-1 du code des relations entre le public et l'administration dispose alors, pour saisir le juge, d'un délai raisonnable qui court, dans la première hypothèse, de la date de naissance de la décision implicite et, dans la seconde, de la date de l'événement établissant qu'il a eu connaissance de la décision.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a reçu une attestation de dépôt de la demande de regroupement familial qu'il a présentée en faveur de son épouse le 15 janvier 2020, l'informant que " faute de réponse dans un délai de six mois (...), la demande sera considérée comme rejetée par le préfet ". Si cette attestation ne comportait pas de mention précise des voies de recours ouvertes à l'encontre de cette décision, propre à rendre opposable à M. B... le délai de recours de deux mois, prévu par le code de justice administrative, elle est en revanche de nature à établir que celui-ci a eu connaissance de la naissance d'une décision implicite au terme d'un délai de six mois. La connaissance qu'il a ainsi acquise de la naissance d'une décision implicite ne saurait être remise en cause par la suspension de ce délai de six mois entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020, qui a résulté de l'instauration d'une période d'urgence sanitaire et de l'article 7 de l'ordonnance susvisée du 25 mars 2020. Par ailleurs, le délai moyen d'instruction d'un an indiqué, à titre purement informatif, sur le site internet de la préfecture et les informations, au demeurant non démontrées, qui lui auraient été données oralement ne sauraient constituer des circonstances particulières justifiant que le délai raisonnable dans lequel il lui appartenait d'exercer son recours soit supérieur à un an. En conséquence, enregistrée au tribunal administratif de Grenoble le 13 septembre 2022 uniquement, plus d'un an après la naissance de la décision implicite en litige, la demande d'annulation présentée par M. B... était, ainsi que l'a relevé le premier juge, tardive et par suite irrecevable.

5. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président de la quatrième chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

6. Le présent arrêt rejetant les conclusions à fin d'annulation de M. B... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent également être rejetées.

7. Enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Aline Evrard, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

Mme Christine Psilakis, première conseillère,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 février 2024.

La rapporteure,

S. CorvellecLa présidente,

A. Evrard

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02978


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02978
Date de la décision : 19/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme EVRARD
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : COUTAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-19;22ly02978 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award