Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler les décisions du 25 janvier 2023 par lesquelles la préfète de l'Allier l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de dix-huit mois.
Par un jugement n° 2300171 du 2 mars 2023, la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 29 mars 2023, M. B..., représenté par Me Demars, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 mars 2023 de la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées du 25 janvier 2023 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Allier de procéder à la suppression de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué méconnaît le principe du contradictoire ;
- ce jugement ne vise ni ne statue sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision portant signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;
- il omet de statuer sur les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de communiquer l'entier dossier relatif à sa situation administrative ;
- ce jugement est insuffisamment motivé ;
- le tribunal a statué ultra petita ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît son droit d'être entendu ;
- cette décision est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle, notamment en ce qui concerne sa situation professionnelle ainsi que l'intérêt supérieur de ses deux enfants ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet ne s'est pas livré à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses deux enfants mineurs ;
- le préfet a méconnu le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant et a entaché sa décision d'éloignement d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu ;
- cette décision est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle est disproportionnée tant dans son principe que dans son quantum ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 11 janvier 2024, la préfète de l'Allier conclut au rejet de la requête.
Elle soutient qu'aucun des moyens invoqués par le requérant n'est fondé.
Par décision du 3 mai 2023, M. B... été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C-166/13 du 5 novembre 2014 et C-249/13 du 11 décembre 2014 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;
;
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant albanais, né le 9 juillet 1988, est entré en France en septembre 2018, selon ses déclarations. Le 24 janvier 2023, il a été placé en retenue pour vérification de son droit au séjour. Par décisions du 25 janvier 2023, la préfète de l'Allier l'a obligé à quitter le territoire français sans délai sur le fondement des dispositions du 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de dix-huit mois. M. B... relève appel du jugement du 2 mars 2023 par lequel la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".
3. Il résulte de ces dispositions, destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction, que la méconnaissance de l'obligation de communiquer le premier mémoire d'un défendeur est en principe de nature à entacher la procédure d'irrégularité. Il n'en va autrement que dans le cas où il ressort des pièces du dossier que, dans les circonstances de l'espèce, cette méconnaissance n'a pu préjudicier aux droits des parties.
4. Il ressort des pièces du dossier que le premier mémoire en défense de la préfète auquel étaient jointes plusieurs pièces a été enregistré le 24 février 2023, et qu'il a été communiqué au conseil du requérant, le 28 février 2023, à 10 heures 56, soit à l'issue de l'audience qui s'est tenue le même jour, ainsi que le fait valoir le requérant sans être contredit. Il ressort par ailleurs du jugement contesté que la présidente du tribunal a tenu compte des éléments contenus dans les pièces annexées au mémoire de la préfète de l'Allier, s'agissant notamment du procès-verbal d'audition de l'intéressé lors de sa retenue, le 24 janvier 2023, et a fait droit aux conclusions de ce premier et unique mémoire présenté par la préfète. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que le premier juge a méconnu le caractère contradictoire de la procédure et a entaché son jugement d'irrégularité. Ce jugement doit, par suite, être annulé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tirés de son irrégularité.
5. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand et la cour.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, la décision attaquée est signée par M. Sanz, secrétaire général de la préfecture de l'Allier, qui disposait d'une délégation de signature à cet effet consentie par un arrêté de la préfète de l'Allier du 6 janvier 2023, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué doit être écarté.
7. En deuxième lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. En outre, ainsi que la Cour de justice l'a jugé dans ses arrêts C-166/13 et C-249/13 des 5 novembre et 11 décembre 2014, le droit d'être entendu préalablement à l'adoption d'une décision de retour implique que l'autorité administrative mette le ressortissant étranger en situation irrégulière à même de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur l'irrégularité du séjour et les motifs qui seraient susceptibles de justifier que l'autorité s'abstienne de prendre à son égard une décision de retour. Il n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français ou sur la décision le plaçant en rétention dans l'attente de l'exécution de la mesure d'éloignement, dès lors qu'il a pu être entendu sur l'irrégularité du séjour ou la perspective de l'éloignement.
8. En l'espèce, si M. B... soutient que la préfète de l'Allier lui a notifié la décision litigieuse, sans avoir été mis à même de présenter préalablement des observations, il ressort des pièces du dossier, et en particulier du procès-verbal d'audition du 24 janvier 2023, lors de son placement en retenue administrative, que M. B... a été entendu par les services de police sur sa situation administrative et familiale et qu'il a pu faire état, notamment, de sa situation familiale, ainsi que du fait qu'il venait de déposer une demande d'autorisation de travail. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance du droit d'être entendu doit être écarté.
9. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète se serait abstenue de procéder à un examen sérieux et complet de la situation personnelle de l'intéressé.
10. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
11. M. B... se prévaut de sa durée de résidence depuis près de cinq ans, en France ainsi que de la présence, sur le territoire national, de son épouse et de leurs deux enfants mineurs. Il ressort toutefois des pièces du dossier que son épouse, de nationalité albanaise, est également en situation irrégulière sur le territoire national, si bien qu'il n'est fait état d'aucun obstacle à la reconstitution de la cellule familiale formée par le couple et leurs enfants en Albanie, pays dans lequel M. B... a vécu jusqu'à l'âge de trente ans et où il n'est pas établi qu'il serait dépourvu de toute attache familiale. L'intéressé, qui fait état de ce qu'il lui a été proposé de conclure un contrat à durée indéterminée, en qualité de façadier, pour lequel, il a sollicité une autorisation de travail ne justifie pas, par ces éléments, d'une insertion socioprofessionnelle notable sur le territoire. Dans ces conditions, la décision obligeant M. B... à quitter le territoire français n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, M. B... n'est pas fondé à soutenir que cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
12. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
13. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète se serait abstenue de procéder à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses enfants. Par ailleurs, il n'est pas établi que la décision portant obligation de quitter le territoire français litigieuse exposerait les enfants du requérant à une situation de nature à porter atteinte à leur intérêt supérieur. Par suite, le préfet n'a pas méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur la légalité de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
14. En premier lieu, en raison de la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, M. B... ne saurait soutenir que la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire serait illégale pour défaut de base légale.
15. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 8, 9, 10 et 12 du présent arrêt, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige aurait été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu, ni qu'elle serait entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle, ni qu'elle méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni que la préfète n'aurait pas procédé à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses enfants et qu'elle aurait méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
16. En premier lieu, la décision attaquée est signée par M. Sanz, secrétaire général de la préfecture de l'Allier, qui disposait d'une délégation de signature à cet effet consentie par un arrêté de la préfète de l'Allier du 6 janvier 2023, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté attaqué doit être écarté.
17. En second lieu, l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas établie, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi devrait, par voie de conséquence, être annulée, doit être écarté.
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois :
18. En premier lieu, en raison de la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, M. B... ne saurait soutenir que la décision lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois serait illégale pour défaut de base légale.
19. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) les décisions d'interdiction de retour et de prolongation d'interdiction de retour prévues aux articles L. 612-6, L. 612-7, L. 612-8 et L. 612-11 sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées "
20. Il incombe à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
21. La décision en cause précise la durée du séjour en France de l'intéressé et mentionne aussi les éléments de fait relatifs à sa situation personnelle et familiale, en relevant notamment qu'il est marié et qu'il a deux enfants, mais qu'il ne justifie pas de liens personnels et familiaux en France, suffisamment stables, anciens et intenses. Elle énonce également que l'intéressé a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement qu'il n'a pas exécuté., et conclut que, dans ces conditions, elle ne porte pas une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale. Elle mentionne ainsi les considérations de fait sur lesquelles elle se fonde. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant dix-huit mois doit, dès lors, être écarté.
22. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 8, 9, 10 et 12 du présent arrêt, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige aurait été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu, ni qu'elle méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni que la préfète n'aurait pas procédé à un examen réel, sérieux et complet de la situation de ses enfants et qu'elle aurait méconnu les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
23. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
24. Il résulte des dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux et, le cas échéant, la menace pour l'ordre public que constitue sa présence sur le territoire. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les motifs qu'invoque l'autorité compétente sont de nature à justifier légalement dans son principe et sa durée la décision d'interdiction de retour et si la décision ne porte pas au droit de l'étranger au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. En revanche, lorsqu'il est saisi d'un moyen le conduisant à apprécier les conséquences de la mesure d'interdiction de retour sur la situation personnelle de l'étranger et que sont invoquées des circonstances étrangères aux quatre critères posés par les dispositions précitées de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il incombe seulement au juge de l'excès de pouvoir de s'assurer que l'autorité compétente n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
25. En se bornant à faire état de la durée de sa présence en France, ainsi que de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec ce pays, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, le requérant ne saurait être regardé comme justifiant de circonstances humanitaires, au sens des dispositions citées au point précédent, faisant obstacle à ce qu'une interdiction de retour sur le territoire français soit prononcée à son encontre. Par suite, la préfète qui s'est prononcée au regard de l'ensemble des critères prévus par les dispositions précitées de l'article 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a pu, sans entacher sa décision d'erreur de droit, d'erreur d'appréciation et d'erreur manifeste d'appréciation, interdire à l'intéressé, le retour sur le territoire français pour une durée de dix-huit mois.
Sur le signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen :
26. Lorsqu'elle prend à l'égard d'un étranger une décision d'interdiction de retour sur le territoire français, l'autorité administrative se borne à informer l'intéressé de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Une telle information ne constitue pas une décision distincte de la mesure d'interdiction de retour et n'est, dès lors, pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. Par suite, les conclusions tendant à l'annulation du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetées.
27. Il résulte de ce qui précède que la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand doit être rejetée ainsi que ses conclusions présentées en appel à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE
Article 1er : Le jugement n° 2300171 du 2 mars 2023 de la présidente du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie du présent arrêt en sera adressée à la préfète de l'Allier.
Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er février 2024.
La rapporteure,
P. Dèche
Le président,
F. Bourrachot,
La greffière,
A-C. Ponnelle
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 23LY01145