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01/02/2024 | FRANCE | N°23LY00289

France | France, Cour administrative d'appel, 5ème chambre, 01 février 2024, 23LY00289


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 24 juin 2022 par lesquelles le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2205424 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour
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Par une requête enregistrée le 23 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Coutaz, demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 24 juin 2022 par lesquelles le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2205424 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 23 janvier 2023, M. A..., représenté par Me Coutaz, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 décembre 2022 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées du 24 juin 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " et ce dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les deux jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, une somme de 2 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- il est père d'un enfant français dont il subvient aux besoins ; dès lors, le refus de titre de séjour méconnaît le 4 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- il réside en France avec sa compagne et leur enfant et le refus de titre de séjour méconnaît le 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- ce refus de titre méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- ce refus est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- il méconnaît le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- dès lors qu'il remplit les conditions des 4 et 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, il ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 31 mai 1992, de nationalité algérienne, déclare être entré en France en septembre 2019. Le 3 janvier 2022, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Par décisions du 24 juin 2022, le préfet de l'Isère a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. M. A... relève appel du jugement du 30 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions du 24 juin 2022.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de la fiche de renseignements complétée par l'intéressé, lors de sa demande de titre de séjour présentée le 3 janvier 2022, qu'il a présenté cette demande en se prévalant de la situation de " couple pacsé " et non de celle de parent d'enfant français. Par suite, le requérant ne peut utilement soutenir que le refus de titre de séjour aurait été pris en méconnaissance des stipulations du 4 de l'article 6 de l'accord franco-algérien.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait entaché son refus de titre de séjour d'un défaut d'examen complet de la demande de l'intéressé.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) " et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. M. A... fait valoir qu'il est pacsé depuis le 20 novembre 2020 avec une ressortissante française dont il a reconnu, le 7 août 2020, l'enfant né le 11 février 2016. Toutefois, les seules pièces produites consistant en des factures d'électricité et des attestations de proches ne suffisent pas à établir, à la date de la décision en litige, l'ancienneté et l'intensité de la vie commune entre l'intéressé et sa compagne. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé qui ne fait état d'aucune activité professionnelle ou d'aucun revenu ne justifie pas ainsi qu'il l'affirme, subvenir aux besoins de son enfant. Enfin, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé qui a vécu en Algérie jusqu'à l'âge de 27 ans n'est pas dénué de toute attache familiale dans ce pays, où résident ses parents ainsi que ses sœurs. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour en litige porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et méconnaîtrait de ce fait les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou celles du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Pour les mêmes motifs, il n'est pas fondé non plus à soutenir que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ".

7. Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

8. Le requérant soutient qu'il s'occupe de son enfant, de nationalité française, qu'il a reconnu postérieurement à sa naissance. Toutefois, ainsi qu'il a été dit, il ne justifie pas pourvoir à l'entretien et à l'éducation de cet enfant. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; (...) ". Indépendamment de l'énumération faite par l'article L. 611-3 précité des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Et lorsque la loi ou une convention internationale prévoit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement.

10. D'autre part, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 4) au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ; (...) ".

11. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le requérant ne justifie pas qu'il contribuerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant français. Dans ces conditions, il n'entre pas dans la catégorie des étrangers pour lesquels la loi prévoit qu'ils doivent se voir attribuer de plein droit un titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré de ce que sa qualité de parent d'enfant français s'opposerait à son éloignement français doit être écarté.

12. En second lieu, et pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 3 à 7 du présent arrêt, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'un défaut d'examen complet de la demande de l'intéressé, qu'elle méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé doivent être écartés.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

13. Il résulte des points 3 à 12 du présent arrêt que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

14. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie du présent arrêt en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er février 2024.

La rapporteure,

P. DècheLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 23LY00289

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00289
Date de la décision : 01/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : COUTAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-01;23ly00289 ?
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