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01/02/2024 | FRANCE | N°21LY02056

France | France, Cour administrative d'appel, 7ème chambre, 01 février 2024, 21LY02056


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 31 décembre 2019 par laquelle la ministre de la transition écologique et solidaire l'a titularisée dans le corps des ingénieurs des travaux publics de l'État (ITPE), en tant que cette décision n'a pas repris l'intégralité de son ancienneté de contractuelle de droit public lors de son reclassement dans ce corps, et d'enjoindre à cette autorité de recalculer son échelon et son grade en prena

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 31 décembre 2019 par laquelle la ministre de la transition écologique et solidaire l'a titularisée dans le corps des ingénieurs des travaux publics de l'État (ITPE), en tant que cette décision n'a pas repris l'intégralité de son ancienneté de contractuelle de droit public lors de son reclassement dans ce corps, et d'enjoindre à cette autorité de recalculer son échelon et son grade en prenant en compte l'intégralité de son ancienneté et de corriger son arrêté de titularisation, et en conséquence, de mettre le décret n° 2005-631 du 30 mai 2005 en conformité avec les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C-302/11 à C-305-11 du 18 octobre 2012.

Par un jugement n° 2002603 du 26 avril 2021, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 22 juin 2021 et 12 mai 2022, Mme B..., représentée par Me Deniau, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 31 décembre 2019 par laquelle la ministre de la transition écologique et solidaire l'a titularisée dans le corps des ITPE, en tant que l'intégralité de son ancienneté de contractuelle de droit public n'a pas été reprise lors de son reclassement dans ce corps ;

3°) d'enjoindre à la ministre de la transition écologique et solidaire, à titre principal, de recalculer son échelon et son grade en prenant en compte l'intégralité de son ancienneté et de corriger son arrêté de titularisation en conséquence, et de mettre le décret n° 2005-631 du 30 mai 2005 en conformité avec les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne C-302/11 à C-305-11 du 18 octobre 2012, ou, à titre subsidiaire, de prendre une nouvelle décision après réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 040 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa demande de première instance était recevable, tant du point de vue du délai de recours que du caractère non purement confirmatif de la décision en litige ;

- les dispositions de l'article 19 du décret n° 2005-631 du 30 mai 2005 et, par renvoi, du 1° du I de l'article 7 du décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006, dont il lui a été fait application, méconnaissent le principe d'égalité, en créant une différence de traitement injustifiée, entre les agents qui avaient auparavant le statut de fonctionnaire, et ceux qui avaient le statut d'agent contractuel de droit public ; il est en de même compte tenu des dispositions du II de l'article 3 et du I du 2 du décret du 23 décembre 2006 et du a) du 2° du II de l'article 10 du décret n° 2010-311 du 22 mars 2010, les agents ayant servi dans une administration, organisme ou établissement d'un État membre où le personnel est normalement régi par les dispositions d'un contrat public bénéficiant des mêmes règles de reclassement que les fonctionnaires ;

- ces mêmes dispositions méconnaissent les points 1 et 4 de la clause 4 de l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée dans l'Union européenne mis en œuvre par la directive 1999/70/CE, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne dans les affaires jointes du 18 octobre 2012 C-302/11 à C-305/11, et le principe de non-discrimination inscrit à l'article 2 du traité sur l'Union européenne ; la reprise partielle prévue est manifestement disproportionnée ; elles méconnaissant également la clause 4 de l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée dans l'Union européenne mis en œuvre par cette directive telle qu'interprété par l'arrêt de la cour du 20 septembre 2018 affaire C-466/17 ;

- ces mêmes dispositions méconnaissent l'article 225-1 du code pénal prohibant la discrimination selon l'origine, créant une différence de traitement entre une " origine contractuelle " et une " origine de titulaire " de la catégorie A de la fonction publique ;

- elles méconnaissent également le principe d'égale admissibilité aux emplois publics prévu par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Par des mémoires enregistrés les 11 avril et 13 septembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... sont soit inopérants soit infondés.

Par une ordonnance du 14 septembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, et notamment son Préambule ;

- le traité sur l'Union européenne ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999 concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée ;

- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne du 18 octobre 2012 C-302/11 à C-305/11, du 20 septembre 2018 C-466/17 et du 20 juin 2019 C-72/18 ;

- le code pénal ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ;

- le décret n° 2005-631 du 30 mai 2005 portant statut particulier du corps des ingénieurs des travaux publics de l'État ;

- le décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 relatif aux règles du classement d'échelon consécutif à la nomination dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l'État ;

- le décret n° 2010-311 du 22 mars 2010 relatif aux modalités de recrutements et d'accueil des ressortissants des États membres de l'Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen dans un corps, un cadre d'emplois ou un emploi de la fonction publique française ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chassagne, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Rivière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Jagueux, substituant Me Deniau, pour Mme B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Après avoir exercé sous contrat de droit public des fonctions de chargée d'étude au sein de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse (RMC), pour la période du 14 juin 2011 au 31 décembre 2018, Mme B... a été déclarée admise à l'issue des opérations d'un concours réservé pour accéder aux corps des ingénieurs des travaux publics de l'État (ITPE) organisé au titre de l'année 2018. Elle a alors été nommée par un arrêté du 21 mai 2019 en qualité de stagiaire du corps des ITPE à compter du 1er janvier 2019 et été affectée au sein de l'agence de l'eau RMC pour la période du 1er janvier au 31 août 2019, puis, à compter du 1er septembre suivant, en qualité de chargée de mission à la direction régionale de l'environnement de l'aménagement et du logement Auvergne Rhône-Alpes. Elle a ensuite, par un arrêté de la ministre de la transition écologique et solidaire du 31 décembre 2019, notifié le 7 février 2020, été titularisée au sein de ce corps au grade d'ingénieur à compter du 1er janvier 2020. Elle a bénéficié d'une reprise partielle d'ancienneté, étant ainsi placée au troisième échelon de ce grade avec une ancienneté conservée d'un an, trois mois et neuf jours. Mme B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon qui a rejeté sa demande d'annulation de cette décision du 31 décembre 2019 en tant qu'elle n'a pas repris l'intégralité de son ancienneté de contractuelle de droit public lors de son reclassement.

2. Aux termes de l'article 19 du décret du 30 mai 2005 : " Le classement lors de la nomination en qualité d'ingénieur stagiaire ou titulaire est déterminé conformément aux dispositions du décret n° 2006-1827 du 23 décembre 2006 relatif aux règles du classement d'échelon consécutif à la nomination dans certains corps de catégorie A de la fonction publique de l'État, à l'exception de ses articles 4, 5 et 6. Il est fait application aux ingénieurs qui avait précédemment la qualité de fonctionnaire des dispositions des articles 20, 21 et 22 du présent décret. ". Aux termes de l'article 7 du décret du 23 décembre 2006 : " I. - Les agents qui justifient de services d'ancien fonctionnaire civil, de services en tant qu'agent d'une organisation internationale intergouvernementale ou de services d'agent public non titulaire, autres que des services accomplis en qualité d'élève ou de stagiaire, sont classés à un échelon déterminé en prenant en compte une fraction de leur ancienneté de services publics civils dans les conditions suivantes : / 1° Les services accomplis dans des fonctions du niveau de la catégorie A sont retenus à raison de la moitié de leur durée jusqu'à douze ans et des trois quarts de cette durée au-delà de douze ans ; / (...). ".

3. En premier lieu, aux termes de l'article 20 du décret du 30 mai 2005 : " Les fonctionnaires qui appartenaient à un corps ou à un cadre d'emplois de la catégorie A ou de niveau équivalent sont titularisés et classés à l'échelon comportant un indice brut égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui qu'ils détiennent dans leur grade d'origine à la date de leur nomination en qualité d'ingénieur des travaux publics de l'État stagiaire. / Dans la limite de l'ancienneté exigée à l'article 28 pour une promotion à l'échelon supérieur, ils conservent l'ancienneté d'échelon acquise dans leur précédent grade ou classe lorsque l'augmentation d'indice brut consécutive à leur nomination est inférieure à celle qui aurait résulté d'un avancement d'échelon dans leur ancienne situation. / Les fonctionnaires nommés alors qu'ils ont atteint le dernier échelon de leur précédent grade ou classe conservent leur ancienneté d'échelon dans les conditions définies à l'alinéa précédent lorsque l'augmentation d'indice brut consécutive à leur nomination est inférieure à celle résultant de leur promotion à l'échelon terminal. ". Aux termes de l'article 2 du décret du 23 décembre 2006 : " I. - Les personnes nommées dans l'un des corps mentionnés à l'article 1er qui justifient de services antérieurs sont classées à un échelon déterminé, sur la base des durées moyennes fixées par le statut particulier de ce corps pour chaque avancement d'échelon, en application des articles 3 à 10. Le classement est prononcé à la date de nomination dans le corps, à l'exception des cas dans lesquels cette nomination est prononcée dans un échelon d'élève dont la durée n'est pas prise en compte pour l'avancement. Dans ce cas, le classement est prononcé à la date de nomination comme stagiaire ou, à défaut, comme titulaire. / (...). ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " (...) / II. - Les agents qui justifient de services accomplis dans une administration, un organisme ou un établissement d'un État membre de la Communauté européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen sont classés en application des dispositions du titre II du décret n° 2010-311 du 22 mars 2010 relatif aux modalités de recrutements et d'accueil des ressortissants des États membres de l'Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen dans un corps, un cadre d'emplois ou un emploi de la fonction publique française. / (...). ". Enfin, aux termes de l'article 10 du décret du 22 mars 2010 : " (...) / II. - Les modalités de prise en compte des services accomplis sont déterminées au regard de la nature juridique de l'engagement qui lie le ressortissant de l'un des États mentionnés à l'article 9 à son employeur, en application des textes régissant le personnel de l'administration, de l'organisme ou de l'établissement dans l'État membre d'origine, l'institution, l'organe ou l'agence de l'Union européenne. La détermination de la nature juridique de l'engagement s'effectue comme suit : / (...) / 2° Lorsque, dans l'administration, l'organisme ou l'établissement de l'État membre d'origine, l'institution, l'organe ou l'agence de l'Union européenne, le personnel est normalement régi par les dispositions d'un contrat de droit public : / a) L'agent qui justifie d'un contrat de droit public est classé selon les règles fixées par les dispositions statutaires régissant le corps, le cadre d'emplois ou l'emploi d'accueil, applicables aux fonctionnaires ; / (...). ".

4. Si le principe d'égalité de traitement entre les agents appartenant à un même corps interdit les distinctions au sein de ce corps selon les conditions dans lesquelles ces agents ont été recrutés, notamment pour l'avancement, il n'implique pas que, lors de leur intégration en son sein, ils bénéficient de conditions identiques de classement. Si les dispositions précitées au point 2 de l'article 19 du décret du 30 mai 2005 et, par renvoi, du 1° du I de l'article 7 du décret du 23 décembre 2006, dont il lui a été fait application, et celles de l'article 20 du même décret du 30 mai 2005 prévoient un mécanisme de reclassement différent entre les agents qui, lors de leur nomination dans le corps des ITPE, avaient auparavant le statut de fonctionnaire et ceux qui avaient le statut d'agent contractuel de droit public, le principe d'égalité ne se trouve pas pour autant méconnu. Le mécanisme de reclassement prévu par les dispositions précitées du II de l'article 3 et du I du 2 du décret du 23 décembre 2006 et du a) du 2° du II de l'article 10 du décret du 22 mars 2010, qui concernent les agents ayant servi dans une administration, un organisme ou un établissement d'un État membre de la Communauté européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, dont le statut, lors de leur nomination dans le corps précité, est différent de celui visé par les dispositions citées au point 2, ne caractérise pas davantage une violation du principe d'égalité. Le moyen doit donc, dans chacune de ses branches, être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de la clause 3 de l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée dans l'Union européenne mis en œuvre par œuvre par la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999 : " Aux termes du présent accord, on entend par : / 1. " travailleur à durée déterminée ", une personne ayant un contrat ou une relation de travail à durée déterminée conclu directement entre l'employeur et le travailleur où la fin du contrat ou de la relation de travail est déterminée par des conditions objectives telles que l'atteinte d'une date précise, l'achèvement d'une tâche déterminée ou la survenance d'un événement déterminé ; / 2. "travailleur à durée indéterminée comparable", un travailleur ayant un contrat ou une relation de travail à durée indéterminée dans le même établissement, et ayant un travail/emploi identique ou similaire, en tenant compte des qualifications/compétences. Lorsqu'il n'existe aucun travailleur à durée indéterminée comparable dans le même établissement, la comparaison s'effectue par référence à la convention collective applicable ou, en l'absence de convention collective applicable, conformément à la législation, aux conventions collectives ou aux pratiques nationales. ". Aux termes de la clause 4 de ce même accord : " Principe de non-discrimination (clause 4) : / 1. Pour ce qui concerne les conditions d'emploi, les travailleurs à durée déterminée ne sont pas traités d'une manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée comparables au seul motif qu'ils travaillent à durée déterminée, à moins qu'un traitement différent soit justifié par des raisons objectives. / (...) / 4. Les critères de périodes d'ancienneté relatifs à des conditions particulières d'emploi sont les mêmes pour les travailleurs à durée déterminée que pour les travailleurs à durée indéterminée, sauf lorsque des critères de périodes d'ancienneté différents sont justifiées par des raisons objectives. ". Cette dernière clause, dans l'interprétation qu'en retient la Cour de justice de l'Union européenne, s'oppose aux inégalités de traitement dans les conditions d'emploi entre travailleurs à durée déterminée et travailleurs à durée indéterminée, sauf à ce que ces inégalités soient justifiées par des raisons objectives, qui exigent que l'inégalité de traitement se fonde sur des éléments précis et concrets pouvant résulter, notamment, de la nature particulière des tâches pour l'accomplissement desquelles des contrats à durée déterminée ont été conclus et des caractéristiques inhérentes à celles-ci ou, le cas échéant, de la poursuite d'un objectif légitime de politique sociale d'un État membre.

6. Le principe de non-discrimination mentionné à la clause n° 4 de l'accord-cadre mis en œuvre par la directive citée au point précédent, conformément aux stipulations de la clause 3 de cet accord, et ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne interprète celles-ci, ne vise qu'à proscrire, en principe, les différences de traitement opérées entre les travailleurs à durée déterminée et les travailleurs à durée indéterminée placés dans une situation comparable. Ainsi, si Mme B... conteste les dispositions citées au point 2 ci-dessus en ce qu'elles instaurent une différence de traitement entre agents lors de leur nomination dans le corps des ITPE, celle-ci est fondée, non pas sur la durée déterminée ou indéterminée de la relation de travail antérieure à cette nomination, mais sur le caractère statutaire ou contractuel de celle-ci. Par suite, Mme B... ne saurait utilement se prévaloir des clauses ainsi mises en œuvre par cette directive, telle qu'interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne, pour critiquer ces dispositions. Le moyen ne saurait donc être retenu.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 2 du traité sur l'Union européenne : " L'Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi que de respect des droits de l'homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l'égalité entre les femmes et les hommes ". Aux termes de l'article 10 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " Dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions, l'Union cherche à combattre toute discrimination fondée sur le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. ". Aux termes de l'article 21 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " 1. Est interdite, toute discrimination fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l'âge ou l'orientation sexuelle. 2. Dans le domaine d'application du traité instituant la Communauté européenne et du traité sur l'Union européenne, et sans préjudice des dispositions particulières desdits traités, toute discrimination fondée sur la nationalité est interdite ".

8. Contrairement à ce que soutient Mme B..., le principe de non-discrimination tel que garanti par les dispositions citées au point précédent, eu égard à sa nature et à son objet défini par celles-ci, ne saurait être utilement invoqué pour critiquer la différence de traitement entre fonctionnaires et agents contractuels à durée indéterminée lors de leur nomination dans le corps des ITPE prévue par les dispositions citées au point 2 ci-dessus, dont le fondement ne relève pas des catégories visées par ces dispositions du droit de l'Union européenne. Le moyen ne peut donc être admis.

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 225-1 du code pénal, dans sa rédaction applicable : " Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques sur le fondement de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur grossesse, de leur apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de leur situation économique, apparente ou connue de son auteur, de leur patronyme, de leur lieu de résidence, de leur état de santé, de leur perte d'autonomie, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée. / (...). ".

10. Si Mme B..., soutient que la différence de traitement entre fonctionnaires et agents contractuels à durée indéterminée lors de leur nomination dans le corps des ITPE créerait une discrimination selon l'origine en violation de l'article 225-1 ci-dessus du code pénal, un tel moyen, dans la mesure où cette différence de traitement ne relève en toute hypothèse d'aucune des catégories visées par ces dispositions, ne saurait être utilement invoqué.

11. En dernier lieu, aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : " La Loi est l'expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. ". Si le principe de l'égal accès des citoyens aux emplois publics, proclamé par ces dispositions, impose que, dans les nominations de fonctionnaires, il ne soit tenu compte que de la capacité, des vertus et des talents, il ne s'oppose pas à ce que les règles de recrutement destinées à permettre l'appréciation des aptitudes et des qualités des candidats à l'entrée dans un corps de fonctionnaires soient différenciées pour tenir compte tant de la variété des mérites à prendre en considération que de celle des besoins du service public.

12. Les dispositions critiquées par Mme B..., citées au point 2 plus haut, qui concernent le classement lors de la nomination en qualité d'ingénieur stagiaire ou titulaire dans le corps des ITPE, ne sont pas relatives à l'accès à un emploi public au sens de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen précité. Mme B... ne saurait en conséquence utilement invoquer à leur encontre ce dernier article. Le moyen, inopérant, ne saurait donc être retenu.

13. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit, dans l'ensemble de ses conclusions être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2024 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente assesseure ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er février 2024.

Le rapporteur,

J. Chassagne

Le président,

V-M. Picard La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 21LY02056

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