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19/10/2023 | FRANCE | N°22LY00311

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 19 octobre 2023, 22LY00311


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Grenoble a demandé au tribunal administratif de Grenoble, d'une part, d'annuler la délibération du 21 décembre 2018 par laquelle le conseil métropolitain de Grenoble-Alpes Métropole a fixé le montant des attributions de compensation définitives des communes membres au titre de l'année 2018 et le montant des acomptes provisoires au titre de l'année 2019, en tant qu'elle déduit du montant de l'attribution de compensation qui lui est accordée le montant des charges transférées de voirie telle

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La commune de Grenoble a demandé au tribunal administratif de Grenoble, d'une part, d'annuler la délibération du 21 décembre 2018 par laquelle le conseil métropolitain de Grenoble-Alpes Métropole a fixé le montant des attributions de compensation définitives des communes membres au titre de l'année 2018 et le montant des acomptes provisoires au titre de l'année 2019, en tant qu'elle déduit du montant de l'attribution de compensation qui lui est accordée le montant des charges transférées de voirie telles qu'évaluées par la commission locale d'évaluation des charges transférées (CLECT) dans son rapport du 15 novembre 2018 intégrant les charges afférentes aux " contrôles d'accès ", subsidiairement, de l'annuler intégralement, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux, d'autre part, d'enjoindre à Grenoble Alpes Métropole de lui rembourser les sommes de 188 241 euros et de 179 663 euros, déduites du montant de son attribution de compensation en 2018, au titre respectivement des charges de fonctionnement et d'investissement et de fixer en conséquence le montant des attributions de compensation pour les années à venir ;

Par jugement n° 1904084 du 29 novembre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la délibération du 21 décembre 2018 en tant qu'elle fixe le montant de l'attribution de compensation définitive devant être versée à la commune de Grenoble au titre de l'année 2018 et a enjoint à Grenoble Alpes Métropole de rembourser à la commune de Grenoble les sommes de 188 241 euros et de 179 663 euros illégalement déduites du montant de l'attribution de compensation versée à cette commune en 2018.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 31 janvier 2022, Grenoble-Alpes Métropole, représentée par Me Supplisson (SELARLU Legipublic avocats), demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 novembre 2021, annulant la délibération du 21 décembre 2018 du conseil métropolitain de Grenoble-Alpes Métropole en tant qu'elle fixe le montant de l'attribution de compensation définitive devant être versée à la commune de Grenoble au titre de l'année 2018 et enjoignant à Grenoble-Alpes Métropole de rembourser à cette commune les sommes de 188 241 euros et de 179 663 euros déduites du montant de l'attribution de compensation versée en 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la commune de Grenoble devant le tribunal administratif de Grenoble ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Grenoble la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le rapport de la CLECT de 2015 ne pouvait retenir une évaluation forfaitaire globale des charges de voirie transférées, sans procéder à une évaluation du coût réel des transferts opérés à partir d'un inventaire physique exhaustif des composantes de la voirie ;

- cette évaluation forfaitaire globale ne comprend pas les charges liées aux bornes électriques et autres dispositifs de contrôle d'accès ;

- la charge liée au transfert de ces dispositifs constitue dès lors un nouveau transfert de charges, justifiant une révision du montant de l'attribution de compensation accordée, en application du V du 6° de l'article 1609 nonies C du code général des impôts et du principe de neutralité budgétaire qui inspire cette procédure.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 novembre 2022, la commune de Grenoble, représentée par Me Delescluse, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Grenoble-Alpes Métropole la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle expose que :

- la requête est irrecevable, à défaut pour le président de la métropole d'avoir été régulièrement habilité par le conseil métropolitain ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sophie Corvellec ;

- les conclusions de M. Bertrand Savouré, rapporteur public ;

- et les observations de Me Delescluse pour la commune de Grenoble ;

Considérant ce qui suit :

1. Dès sa constitution, le 1er janvier 2015, la métropole Grenoble-Alpes Métropole a exercé la compétence de création, d'aménagement et d'entretien de la voirie, transférée des communes membres de l'ex communauté d'agglomération. Conformément à l'article 1609 nonies C du code général des impôts, une commission locale d'évaluation des charges transférées (CLECT) a procédé, dans un rapport du 26 novembre 2015, à une évaluation des charges ainsi transférées, lesquelles ont été répercutées sur l'attribution de compensation accordée aux communes membres. Par un second rapport du 15 novembre 2018, la CLECT a notamment évalué la charge liée au transfert des dispositifs d'accès et des bornes électriques de voirie, laquelle a donné lieu à un nouvel ajustement des attributions de compensation des communes, par délibération du conseil métropolitain du 21 décembre 2018. Saisi par la commune de Grenoble, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette délibération en ce qu'elle rectifie le montant de l'attribution de compensation lui revenant, après déduction de la somme de 367 904 euros au titre du transfert de ces dispositifs d'accès, par un jugement du 29 novembre 2021, dont Grenoble-Alpes Métropole relève appel.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes du IV de l'article 1609 nonies C du code général des impôts : " Il est créé entre l'établissement public de coopération intercommunale soumis aux dispositions fiscales du présent article et les communes membres une commission locale chargée d'évaluer les transferts de charges (...) / Les dépenses de fonctionnement, non liées à un équipement, sont évaluées d'après leur coût réel dans les budgets communaux lors de l'exercice précédant le transfert de compétences ou d'après leur coût réel dans les comptes administratifs des exercices précèdent ce transfert (...) / Le coût des dépenses liées à des équipements concernant les compétences transférées est calculé sur la base d'un coût moyen annualisé. Ce coût intègre le coût de réalisation ou d'acquisition de l'équipement (...) Il intègre également les charges financières et les dépenses d'entretien (...) / (...) / La commission locale chargée d'évaluer les charges transférées remet dans un délai de neuf mois à compter de la date du transfert un rapport évaluant le coût net des charges transférées. Ce rapport est approuvé par délibérations concordantes de la majorité qualifiée des conseils municipaux (...) ". Aux termes du V du même article : " 1° L'établissement public de coopération intercommunale verse à chaque commune membre une attribution de compensation (...) / Le conseil de l'établissement public de coopération intercommunale ne peut procéder à une réduction des attributions de compensation qu'après accord des conseils municipaux des communes intéressées (...) 1° bis Le montant de l'attribution de compensation et les conditions de sa révision peuvent être fixés librement par délibérations concordantes du conseil communautaire, statuant à la majorité des deux tiers, et des conseils municipaux des communes membres intéressées, en tenant compte du rapport de la commission locale d'évaluation des transferts de charges (...) 2° L'attribution de compensation est égale à la somme des produits mentionnés au I et aux 1 et 2 du I bis et du produit de la taxe sur les surfaces commerciales (...), perçus par la commune l'année précédant celle de la première application du présent article, diminuée du coût net des charges transférées calculé dans les conditions définies au IV (...) / L'attribution de compensation est recalculée, dans les conditions prévues au IV, lors de chaque transfert de charge (...) 6° Les attributions de compensation fixées conformément aux 2°, 4°, 5° ou, le cas échéant, au 1° bis du présent V sont recalculées dans les conditions prévues au IV lors de chaque nouveau transfert de charges (...) ".

3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que lorsque, comme en l'espèce, les conseils municipaux et le conseil communautaire n'ont pas approuvé, par délibérations concordantes adoptées à la majorité des deux tiers, un dispositif particulier de révision, l'établissement public de coopération intercommunal ne peut réviser de son propre chef le montant de l'attribution de compensation attribuée originellement aux communes, en se prévalant d'une nouvelle évaluation par la CLECT de charges précédemment transférées. Il ne saurait non plus utilement se prévaloir du principe de neutralité financière des transferts de charges, auquel il lui appartenait de veiller à l'occasion de la procédure d'inventaire et d'évaluation mise en œuvre.

4. A la création de la métropole Grenoble-Alpes Métropole, la compétence de la voirie, jusqu'alors exercée par les communes membres de l'ex communauté d'agglomération, lui a été transférée. Ce transfert a nécessairement inclus l'ensemble des accessoires de la voirie, parmi lesquels ont été identifiés les bornes escamotables et les potelets, ainsi qu'il résulte de la délibération du conseil communautaire de la communauté d'agglomération du 7 novembre 2014 et du document d'information qui y était joint. Les charges transférées pour l'exercice de cette compétence, à la seule exception de celles liées aux ouvrages d'art de voirie, ont été évaluées dans un rapport de la CLECT du 26 novembre 2015 et répercutées sur l'attribution de compensation accordée à ces communes et ne peuvent donner lieu à révision. En outre, les observations du rapport du 15 novembre 2018 sur les omissions de la première évaluation ne sont pas constitutives d'un nouveau transfert de charges, susceptibles de justifier, après nouvelle évaluation de la CLECT, une révision de l'attribution de compensation accordée aux communes concernées, dès lors que la compétence exercée par l'établissement public est inchangée. Grenoble-Alpes Métropole ne pouvait, en conséquence, réduire unilatéralement, par la délibération litigieuse, le montant de l'attribution de compensation versée à la commune de Grenoble, sans méconnaître les dispositions citées au point 2.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense, que Grenoble-Alpes Métropole n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a partiellement annulé la délibération de son conseil métropolitain du 21 décembre 2018 et lui a enjoint de rembourser à la commune de Grenoble les sommes irrégulièrement déduites du montant de l'attribution de compensation versée à cette commune en 2018.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Grenoble, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Grenoble-Alpes Métropole. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de Grenoble, en application de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Grenoble-Alpes Métropole est rejetée.

Article 2 : Grenoble-Alpes Métropole versera une somme de 2 000 euros à la commune de Grenoble en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Grenoble-Alpes Métropole et à la commune de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2023, où siégeaient :

M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,

Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2023.

La rapporteure,

S. CorvellecLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

M-T. Pillet

La République mande et ordonne au préfet de l'Isère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY00311


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY00311
Date de la décision : 19/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-01-07-03 Collectivités territoriales. - Dispositions générales. - Dispositions financières. - Compensation des transferts de compétences.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SELARL LEGIPUBLIC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-10-19;22ly00311 ?
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