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05/10/2023 | FRANCE | N°22LY02863

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 05 octobre 2023, 22LY02863


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut, de réexaminer sa situation et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n°

2200204 du 1er avril 2022, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut, de réexaminer sa situation et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 2200204 du 1er avril 2022, le tribunal a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 28 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Huard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté en tant qu'il porte refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, ou à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai, en la munissant d'une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de cette notification ;

3°) de mettre à la charge de l'État, au profit de son conseil, une somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour est entaché d'une insuffisance de motivation ; il est également entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation ; il est entaché de vices de procédure, faute de production par le préfet de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) afin de vérifier qu'il comporte toutes les mentions requises ; cet avis n'a pas été adopté par trois médecins de cet office régulièrement désignés, n'a pas été signé par ceux-ci ; le rapporteur, qui ne doit pas avoir siégé avec le collège, n'a pas émis de rapport, lequel n'a donc pas été établi dans les conditions prévues par l'annexe B de l'arrêté du 27 décembre 2016 ; le préfet s'est estimé lié par l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII pour prendre ce refus de titre de séjour ; il méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ; elle méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de M. Chassagne, premier conseiller, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante de la République d'Angola née le 2 juillet 1952 à Damba, déclare être entrée sur le territoire français le 3 mai 2016. A la suite d'une demande datée du 24 septembre 2019 pour la délivrance d'un titre sur le fondement de l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée du séjour des étrangers et du droit d'asile, Mme A... a obtenu un récépissé pour la période du 8 novembre 2019 au 7 mai 2020, puis une autorisation provisoire de séjour pour la période du 15 janvier au 14 juillet 2020, et un titre de séjour valable du 15 juillet 2020 au 14 juillet 2021. La demande de Mme A... tendant au renouvellement de ce titre a fait l'objet, le 9 décembre 2021, d'un arrêté du préfet de l'Isère lui opposant un refus avec obligation de quitter le territoire français. Mme A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble qui a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté dans cette mesure.

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...) / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. / (...). " Aux termes des dispositions de l'article R. 425-11 du même code : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 425-9 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. "

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) émis le 27 septembre 2021 a été signé par trois médecins, qui avaient été régulièrement désignés par le directeur de l'OFII par sa décision du 7 juin 2021, qui a été publiée. Par ailleurs, si Mme A... fait valoir que le rapport médical adressé à ce collège n'aurait pas été établi conformément aux conditions prévues par l'annexe B de l'arrêté du 27 décembre 2016, elle se borne à l'alléguer de manière insuffisamment circonstanciée, alors au demeurant que le préfet n'est pas destinataire d'un tel rapport. Ainsi, et par adoption pour le surplus des motifs retenus par les premiers juges, les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de ce que le refus de titre de séjour serait entaché de vices de procédure, faute de production par le préfet de l'avis du collège des médecins de l'OFII afin de vérifier qu'il comporte toutes les mentions requises, et dès lors que cet avis n'a pas été adopté par trois médecins de cet office régulièrement désignés, qu'il n'a pas été signé par ceux-ci, que le rapporteur, qui ne doit pas avoir siégé avec le collège, n'a pas émis de rapport, lequel n'a donc pas été établi dans les conditions prévues par l'annexe B de l'arrêté du 27 décembre 2016 doivent, en l'absence d'éléments nouveaux et de critique pertinente en appel, être écartés.

4. Il ressort des pièces du dossier et des termes mêmes de la décision contestée que le préfet de l'Isère, pour refuser un titre de séjour à Mme A... au regard des dispositions précitées de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'est, à l'issue d'un examen approfondi de la situation de l'intéressée, approprié l'avis précédemment évoqué du collège des médecins de l'OFII émis le 27 septembre 2021, après une convocation de l'intéressée pour examen par le médecin qui a établi le rapport médical, selon lequel si l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, toutefois, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, et au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, son état de santé peut permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine. Mme A... entend critiquer la décision en litige et contester le sens de cet avis en se prévalant de ce qu'elle a bénéficié auparavant du droit de se maintenir en France pour y recevoir des soins, et qu'elle souffre de plusieurs pathologies. Elle précise également qu'elle a subi, depuis cet avis médical, une dégradation de son état. Toutefois, à supposer même que toutes les pathologies dont souffre Mme A... puissent être appréciées comme pouvant entraîner, dans le cas d'un défaut de soins appropriés, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée n'apportant aucun élément relatif à l'une de celles-ci, les pièces médicales qu'elle produit, soit un certificat médical établi par un neurochirurgien le 14 novembre 2018, les comptes rendus d'imageries par résonance magnétique établis les 29 novembre et 13 décembre 2021 par des praticiens hospitaliers, ce dernier document faisant état d'une situation préexistante à la date de cet avis, ainsi qu'un certificat médical établi postérieurement à cet avis et à la décision contestée, le 5 janvier 2022, par un praticien hospitalier, n'indiquent pas que son état de santé ne pourrait pas faire l'objet d'un traitement approprié dans son pays d'origine. D'ailleurs, si Mme A... évoque l'accès effectif aux soins dans ce pays, elle n'apporte aucun élément circonstancié sur ce point. De plus, si elle a auparavant bénéficié de titres en raison de son état de santé, une telle circonstance est sans incidence sur la décision contestée. Dès lors, eu égard à l'ensemble de ces éléments, le moyen soulevé par Mme A... tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être admis.

5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme A... est entrée en France, compte tenu de la date qu'elle a déclarée, à l'âge de soixante-trois ans, et s'y est maintenue pendant un peu plus de cinq années à la date de l'arrêté en litige, pour une partie importante de manière irrégulière. Elle y demeure célibataire et sans enfant alors qu'elle avait vécu auparavant toute son existence en Angola, où demeurent selon les mentions de cet arrêté, qu'elle ne conteste pas sérieusement, ses enfants majeurs, sa mère, son frère et ses sœurs. Il n'apparaît pas qu'elle justifierait d'une insertion personnelle d'une particulière intensité. Ainsi, et pour le surplus par adoption des motifs du tribunal, les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de ce que le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtraient les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et seraient entachés d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée doivent être écartés.

6. En dernier lieu, les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de ce que le refus de titre de séjour serait entaché d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de la situation de Mme A..., de ce que le préfet serait estimé lié par l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII pour prendre ce refus de titre de séjour, et de ce que l'obligation de quitter le territoire français serait illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour doivent, en l'absence d'éléments nouveaux et de critique pertinente en appel, être écartés par les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Sa requête doit donc, dans l'ensemble de ses conclusions, être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente-assesseure ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2023.

Le rapporteur,

J. ChassagneLe président,

V.-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02863

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02863
Date de la décision : 05/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: M. Julien CHASSAGNE
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-10-05;22ly02863 ?
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