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21/09/2023 | FRANCE | N°22LY01185

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 21 septembre 2023, 22LY01185


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 20 octobre 2021 par lequel la préfète de la Loire a refusé de procéder au renouvellement de sa carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, d'autre part

, d'enjoindre à la préfète de la Loire de lui délivrer un titre de séjour ou de r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler l'arrêté du 20 octobre 2021 par lequel la préfète de la Loire a refusé de procéder au renouvellement de sa carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, d'autre part, d'enjoindre à la préfète de la Loire de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 2108865 du 18 mars 2022, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 20 octobre 2021 de la préfète de la Loire en tant qu'il a prononcé à l'encontre de M. B... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 15 avril et 16 mai 2022, présentés pour M. B..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2108865 du tribunal administratif de Lyon du 18 mars 2022 en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre l'arrêté du 20 octobre 2021 de la préfète de la Loire en ce qu'il a refusé de procéder au renouvellement de sa carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, ainsi que ces décisions ;

2°) d'enjoindre à la préfète de la Loire :

- à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " ou " vie privée et familiale ", et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail, dans un délai de huit jours et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

- à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, dans le même délai et sous la même astreinte ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;

- c'est à tort que la préfète a considéré, pour refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que sa présence constituait une menace à l'ordre public ; c'est également à tort qu'elle a considéré qu'il ne justifiait pas pouvoir vivre de ses seules ressources, pour l'application des dispositions de l'article L. 426-20 du même code ; c'est aussi à tort que la préfète a sollicité une substitution de motif au motif que la décision en litige aurait également pu être fondée sur le motif tiré de ce qu'à la date de cette décision, il n'exerçait plus aucune activité cultuelle et n'était dès lors plus qu'un simple salarié, cette qualité étant incompatible avec la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " visiteur " ; le refus de titre méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son droit à une vie privée et familiale et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence.

Par un mémoire enregistré le 1er septembre 2023, la préfète de la Loire conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- elle s'en remet à la sagesse de la cour concernant le moyen qu'elle a relevé d'office ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité du moyen, touchant à la légalité externe de la décision de refus de titre de séjour, tiré de son insuffisante motivation, relevant d'une cause juridique distincte de celle dont relevaient les moyens soulevés en première instance.

Par une ordonnance du 1er septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 6 septembre 2023 à 16 h 30.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Duguit-Larcher, présidente-assesseure, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant comorien né le 1er janvier 1987 à Mdjoiezi Hambou, (Comores) entré en France le 17 janvier 2014 muni d'un visa de long séjour valant titre de séjour portant la mention " étudiant ", a ensuite bénéficié d'un titre de séjour " étudiant ". Il a sollicité le renouvellement, en dernier lieu, le 29 avril 2021, de la carte de séjour temporaire " visiteur " qui lui avait été délivrée à compter du 20 décembre 2018 eu égard à sa qualité de ministre du culte depuis le 1er mars 2017. Par un arrêté du 20 octobre 2021, la préfète de la Loire a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. M. B... relève appel du jugement du 18 mars 2022 du tribunal administratif de Lyon, qui a annulé la seule interdiction de retour sur le territoire, en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, dans sa demande présentée devant le tribunal administratif de Lyon, M. B... n'a invoqué que des moyens relatifs à la légalité interne de la décision de refus de titre de séjour en litige. Par suite, le moyen, touchant à la légalité externe de ladite décision, tiré de son insuffisante motivation, relevant d'une cause juridique distincte de celle dont relevaient les moyens soulevés en première instance est, par suite, irrecevable.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources, dont le montant doit être au moins égal au salaire minimum de croissance net annuel, indépendamment de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale et de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " d'une durée d'un an / Il doit en outre justifier de la possession d'une assurance maladie couvrant la durée de son séjour et prendre l'engagement de n'exercer en France aucune activité professionnelle. / Par dérogation à l'article L. 414-10, cette carte n'autorise pas l'exercice d'une activité professionnelle (...) ".

4. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué, le juge peut procéder à la substitution demandée.

5. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la préfète de la Loire a fait valoir en première instance, dans un mémoire enregistré le 20 décembre 2021 et communiqué à M. B..., que la décision en litige pouvait être légalement fondée sur le motif tiré de ce qu'à la date de cette décision, M. B... n'exerçait plus l'activité de ministre du culte qu'il avait auparavant exercée depuis le 1er mars 2017, au titre de laquelle il s'était vu délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " et que sa qualité de salarié, depuis le 1er janvier 2021, en qualité " d'enseignant - imam " était incompatible avec la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " visiteur ". Comme l'ont également constaté les premiers juges, il ressort des pièces du dossier que si, jusqu'au mois de novembre 2018, M. B... percevait des indemnités de culte, il était titulaire, depuis cette date, d'un contrat de travail à durée indéterminée qui le liait à l'association cultuelle de Saint-Chamond et percevait, à ce titre, des salaires ainsi qu'il en justifiait en versant au débat l'ensemble de ses bulletins de paie et était affilié à l'URSSAF par son employeur. Dès lors, et alors même que son activité d'enseignant ne serait qu'accessoire, M. B... exerçait, à la date de la décision en litige une activité professionnelle au sens des dispositions mentionnées ci-dessus de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vertu desquelles la carte de séjour temporaire " visiteur " n'autorise pas l'exercice d'une telle activité. Il résulte de l'instruction que la préfète de la Loire aurait pris la même décision si elle ne s'était fondée que sur ce seul motif, en dépit de la circonstance, alléguée par le requérant, que l'autorité préfectorale ne s'était pas fondée sur ce motif pour refuser antérieurement de renouveler son titre de séjour alors que sa situation était alors identique. Par suite, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... aurait été privé d'une garantie procédurale liée au motif substitué, les premiers juges ont pu, contrairement à ce que soutient le requérant, faire droit à la demande de substitution sollicitée par la préfète de la Loire en constatant que ladite préfète pouvait, en se fondant sur ce seul motif, substitué aux deux motifs initiaux, refuser de procéder au renouvellement de la carte de séjour temporaire de l'intéressé.

6. En troisième lieu, dès lors qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5 que le motif tiré de ce que l'activité professionnelle exercée par M. B... faisait obstacle au renouvellement de sa carte de séjour temporaire mention " visiteur " doit être substitué aux motifs initiaux tirés, d'une part, de ce que sa présence en France constituait une menace pour l'ordre public et, d'autre part, de ce qu'il n'apportait pas la preuve de son autonomie financière, les moyens tirés de l'illégalité de ces deux motifs doivent être écartés comme inopérants.

7. En dernier lieu, les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés d'une violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés par les motifs adoptés par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

8. Eu égard à ce qui précède l'obligation de quitter le territoire français n'est pas illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour.

Sur la légalité de la fixation du pays de renvoi :

9. Eu égard à ce qui précède la fixation du pays de renvoi n'est pas illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Lyon a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre l'arrêté du 20 octobre 2021 de la préfète de la Loire en ce qu'il a refusé de procéder au renouvellement de sa carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à la mise à la charge de l'État d'une somme au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Picard, président de chambre ;

Mme Duguit-Larcher, présidente-assesseure ;

M. Chassagne, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 septembre 2023.

La rapporteure,

A. Duguit-LarcherLe président,

V.-M. Picard

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

1

2

N° 22LY01185

al


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01185
Date de la décision : 21/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. PICARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : ROYON

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-09-21;22ly01185 ?
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